De la vertu de l'abstinence et de la sainteté contre le mauvais penchant

Il est écrit dans notre sidrah: Si un homme ou une femme fait expressément vœu d'être nazir, voulant s'abstenir en l'honneur de l'Eternel, il s'abstiendra de vin et de boisson enivrante, ne boira ni vinaigre de vin, ni vinaigre de liqueur, ni une infusion quelconque de raisins, et ne mangera point de raisins frais ou secs... Tout le temps de l'abstinence, le rasoir ne doit pas effleurer sa tête... Il ne doit pas approcher d'un corps mort... (Nombres 6:2-5)... Le Ramban (ibid. 6:14) considère qu'en vérité cet homme a péché parce qu'il a souffert du fait de s'abstenir de boire du vin (Nazir 19a), et le verset en dit: le pontife fera expiation pour lui du péché qu'il a commis (Nombres 6:11). Cet homme saint aurait d– être un abstème toute sa vie, il se serait alors sanctifié à son Dieu, comme il est écrit: Et c'est parmi vos fils que J'ai suscité des prophètes, parmi vos adolescents des naziréens! (Amos 2:11). Le verset met au plan d'égalité le nazir et le prophète... Il doit donc se faire expier sa faute parce qu'il s'est de nouveau laissé souiller par les désirs de ce monde...

Si on s'approfondit un peu sur le problème, on peut se demander pourquoi ce n'est qu'au nazir que la Torah a interdit de boire du vin, de se couper les cheveux et la barbe, et de se souiller en touchant un cadavre?

C'est que celui qui veut s'attacher au Saint, béni soit-Il, doit avant tout se séparer de ce monde et de toutes ses séductions. Commentant à cet effet le verset: Soyez saints... (Lévitique 19:2), Rachi explique: séparez-vous de l'immoralité au plan sexuel... car là où on parle de barrière contre l'immoralité, on parle de sainteté. Le Ramban, quant à lui, propose une explication différente: la Torah a interdit les péchés graves qui conduisent à la perversion et à l'inceste. Mais ici, elle nous ordonne de nous éloigner même de ce qui est permis: Soyez saints..., commente le Talmud (Bérakhoth 33b; Zohar II, 265a), c'est l'eau avec laquelle on se lave les mains avant de manger; et vous sanctifierez..., c'est celle qu'on utilise à l'issue du repas. Nos Sages enseignent à cet effet: sanctifie-toi de ce qui t'est permis (Yévamoth 20a). Rachi explique: veille à te sanctifier même de ce qui t'est permis pour que tu n'en viennes pas à l'immoralité au plan sexuel, qui est explicitement interdite par la Torah.

Le vin réjouit le cœur de Dieu et celui de l'homme (cf. Psaumes 104:15). On ne peut pas concevoir de joie sans vin (Pessa'him 109a). Grâce au vin, on peut donc mieux servir son Créateur, comme il est écrit: Adorez l'Eternel avec joie (Psaumes 100:2). La joie revêt une importance particulière dans le service divin, et si Dieu réprimande les enfants d'Israël, c'est essentiellement parce qu'ils n'ont pas servi l'Eternel, ton Dieu, avec joie et contentement de cœur (Deutéronome 28:47).

En revanche, le vin peut conduire à des actes irréfléchis, comme nous trouvons chez Noa'h (Tan'houma Béréchith 13): Vaya'hel, Noa'h, l'homme de la terre, commença par planter une vigne (ibid. 9:60): Vaya'hel, il est devenu 'houlin, il s'est profané. Le Satan s'est alors présenté devant lui et lui a proposé de s'associer avec lui. Ce dernier a commencé par égorger un agneau, puis il a tué un lion, et enfin  un porc (cf. Yalkout Chimoni, Genèse 61). Il a enfin égorgé un singe dont il a fait gicler le sang sur la vigne. Ce Midrach nous apprend qu'au début l'homme qui boit est innocent comme un agneau; il devient ensuite puissant comme le lion, et se salit ensuite comme un porc. Une fois qu'il s'enivre, il ressemble à un singe qui danse et prononce des paroles insensées. Tout ceci est arrivé à Noa'h (cf. Kéli Yakar). A cet effet, la Guémara (Bérakhoth 63a) demande: Pourquoi la parachah du nazir suit-elle le cas de la femme accusée d'adultère? Pour t'enseigner que tout celui qui voit la souillure de cette dernière, doit s'abstenir de boire du vin.

Le nazir qui veut se purifier, se sanctifier, s'astient de boire du vin pour deux raisons: parce qu'il a vu la souillure de la femme accusée d'adultère et aussi parce qu'il vise à s'élever dans la joie dans ses dévotions. Il sait certes que le vin réjouit le corps de l'homme, mais il s'abstient de le boire parce qu'il est susceptible de le conduire au péché. Il ne vise qu'à se rapprocher au maximum du Saint, béni soit-Il, en s'engageant dans l'étude de la Torah qui, elle aussi, conduit à la joie, comme il est écrit: Les préceptes de l'Eternel sont droits, ils réjouissent le cœur (Psaumes 19:9).

Le nazir ne se rase pas les cheveux parce qu'il veut maîtriser son penchant. Car, comme on le sait, les cheveux embellissent l'homme: le penchant veut alors le faire trébucher et exercer son pouvoir sur lui. La bataille est donc très ardue. Le Talmud (Nédarim 9b) nous relate l'épisode du nazir qui avait beaucoup de cheveux et qui s'est présenté devant Chimon HaTsadik pour les raser et qu'il offre son sacrifice. Il avait vu son image dans la fontaine et craignait que le mauvais penchant le fasse trébucher... Chimon HaTsadik qui n'avait pas l'habitude d'offrir de tels sacrifices, accepta de le faire pour lui car il était sincère quand il avait accepté de devenir nazir. Il l'embrassa alors sur le front...

On peut décomposer le terme nazir en ner et yaz, qui font allusion à la Torah et aux mitsvoth. Le ner (lampe), ce sont les mitsvoth, comme il est écrit: car le commandement est une lampe... (Proverbes 6:23) et yaz a la même valeur numérique que tov (bon) qui est la Torah, comme l'enseigne le Talmud: la félicité est réservée à ceux qui s'occupent de l'étude de la Torah (Pirké Avoth 6:3; Bérakhoth 5a), comme il est écrit: Je vous ai donné une doctrine salutaire, c'est Ma Torah, ne l'abandonnez pas (Proverbes 4:2). Ainsi, à l'issue de son abstinence, le nazir doit apporter un sacrifice expiatoire, parce que durant cette période, il s'est engagé dans l'étude de la Torah dans la pureté et la sainteté; il s'est isolé de son environnement avec ses forces propres, sans avoir par exemple à consommer du vin, qui éclaircit l'esprit et rend joyeux. C'est ce que nous voyons chez Yossef qui a envoyé à son père dix ânes chargés des meilleurs produits de l'Egypte (Genèse 45:23) c'est-à-dire du vin vieux qu'aiment bien les Anciens (Méguilah 16b). Maintenant qu'il arrête d'être nazir, il ressent une certaine dégradation spirituelle et doit donc apporter un sacrifice expiatoire... Il lui était aussi interdit de toucher un cadavre, source d'impureté et lui, comme on le sait, était la source de la sainteté.

De nos jours, ces règles d'abstinence ne sont pas appliquées, mais, grâce à l'étude de la Torah et l'accomplissement de mitsvoth, on peut accéder à la joie et se rapprocher de Dieu, sans pour autant consommer le vin qui rend joyeux. De plus, pour montrer l'amour qu'on porte au Saint, béni soit-Il, on n'a pas besoin de laisser pousser ses cheveux: on peut y arriver en éliminant le mauvais penchant qui siège sur la tête, et surtout en s'engageant dans l'étude de la Torah, épice particulièrement efficace contre le mauvais penchant (Kidouchine 30b). Et si le mauvais penchant, ce personnage odieux, t'éprouve (lit. te blesse), traîne-le à la yéchivah, où il fondra et explosera (ibid.). Ta récompense sera alors d'autant plus grande.... Ce serait peut-être la raison pour laquelle on coupe les cheveux de l'enfant quand il atteint l'âge de trois ans: guimel (3), qui a donné Vayigamel, il fut sevré (cf. Genèse 21:8). A cet âge, l'enfant commence à distinguer sa droite de sa gauche, et il est déjà en mesure léhigamel, d'être sevré et  de se débarrasser du mauvais penchant. On lui coupe alors les cheveux pour que la kelipah ne prenne pas le dessus sur lui. La cérémonie se passe le jour de l'anniversaire de la mort de Rabbi Chimon bar Yo'haï, Lag Ba'omer, Lag c'est gal de la racine guilah: on sert le Seigneur avec guilah joie, qui est la Torah, (sans se faire aider du vin, par exemple) comme il est écrit: gal dessille les yeux pour que je puisse contempler les merveilles issues de Ta Torah (Psaumes 119:18). Cette joie doit être accompagnée de tremblement, comme il est écrit: Réjouissez-vous guilou [en Dieu] avec tremblement (ibid. 2:11) on coupe les cheveux et on se fortifie contre la kelipah et la sitra a'hra... Le nazir s'élève ainsi grâce à la Torah et aux mitsvoth et réussit à éliminer son mauvais penchant.

 

 

Grand est le repentir qui monte jusqu'au Trône Céleste
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La sainteté du nazir: L'élimination du mauvais penchant

 

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