La croyance en D. et l’observance des commandements

Il est écrit (Dvarim 34:12): « A cause de la main puissante, des miracles et des prodiges que Moshé accomplit aux yeux de tout Israël ». Ce verset est lié au premier verset de la Torah (Béréshit 1:1): « Au commencement D. créa le ciel et la terre ».

Rashi rapporte les paroles de nos Sages (Yalkout Shimoni Shemot 187): « Rabbi Yits’hak remarque: La Torah aurait dû commencer par le verset: ‘Ce mois sera pour vous le premier des mois de l’année’ (Shemot 12:2) puisque c’est le premier commandement qui a été donné au peuple juif. Pour quelle raison commence-t-elle par le récit de la création du monde? C’est que D. a révélé à Son peuple la puissance de Ses actions afin de leur donner l’héritage des nations (Téhilim 111:6). Lorsque les nations du monde accuseront les Juifs, leur disant: vous êtes des voleurs, vous avez conquis les terres des sept peuples Cananéens, ils leur répondront: « Toute la terre appartient à D. C’est Lui qui l’a créée et Il la donne selon Sa volonté à qui Lui plaît. Il a voulu la donner aux sept peuples, et Il a voulu la leur prendre et nous la donner ».

Le monde ne fut créé que pour la Torah, comme il est écrit: « Si ce n’était pour Mon alliance perpétuelle, Je n’aurais pas fixé les lois du ciel et de la terre » (Yérémia 33:25) que les Sages expliquent ainsi (Pessah’im 68b): « Si ce n’était pour la Torah, le ciel et la terre ne pourraient pas subsister ». Rabbi Yits’hak dit que la Torah aurait dû commencer par le premier commandement donné à Israël avant la sortie d’Egypte, et figurant dans la Torah, « Ce mois sera pour vous le premier mois de l’année » (Shemot 12:2). Et il explique que D. a révélé à Son peuple la puissance de Ses actions, pour que, dans le cas où les nations du monde accuseraient les Juifs de s’approprier des terres qui appartiennent aux sept peuples Cananéens, les Juifs puissent leur répondre que le monde entier appartient à D. puisque c’est Lui qui l’a créé. Il a choisi Avraham et sa descendance et Il leur a donné la terre de Canaan. C’est le fondement même de la création du monde, et la raison pour laquelle nous ne sommes pas des voleurs.

Bien des questions se posent à ce sujet.

1) Les peuples du monde ne croient ni en D. Créateur du monde, ni en la pérennité du peuple juif. Pour quelle raison les peuples accepteraient-ils l’argument d’Israël selon lequel D. a privé les Cananéens de leur terre pour la donner aux Juifs, et cela parce qu’Il en est, Lui, le Créateur? Quels que soient nos arguments, ils ne les accepteraient pas, comme Pharaon le proclama: « Qui est votre D. pour que je lui obéisse? » (Shemot 5:2). Ce qui nous ramène à notre première question: Pourquoi la Torah commence-t-elle par le récit de la création et non par « Ce mois sera pour vous... »?

2) Il est difficile de comprendre pourquoi Rabbi Yits’hak remarque que la Torah aurait dû commencer par la sanctification de la néoménie qui est le premier commandement de la Torah, alors que celui de la circoncision imposé à Avraham Avinou et à sa descendance le précède, comme il est écrit (Béréshit 17:10): « Telle est l’alliance entre Moi et vous, que vous garderez toi et ta descendance, de circoncire tout mâle... » Pourquoi selon Rabbi Yits’hak la Torah doit-elle commencer par le commandement de sanctifier le nouveau mois et non par celui de la circoncision?

3) Les commentateurs ont expliqué pourquoi la fin de la Torah et son début sont traditionnellement liés. Si le dernier verset de la Torah était lié au commandement de sanctifier le nouveau mois, quel serait leur rapport?

Afin de répondre clairement - dans le sens où la conclusion résume le contenu - je vais tout d’abord expliquer le lien entre la fin de la Torah et son début, et le reste en découlera logiquement. Si l’homme désire avoir la qualité de réshit, être prémices de la récolte de D., comme il est écrit (Yérémia 2:3): « Israël, consacré par D. est prémices de Sa récolte », il est évident qu’il doit éviter de regarder des choses interdites et d’y penser, comme il est écrit (Bamidbar 15:39): « Ne vous égarez pas à suivre votre cœur et vos yeux ». Les erreurs de vision et de pensée détériorent la foi car la pensée erronée, entraîne nécessairement des carences dans la foi en D. Même si l’on continue à pratiquer les lois de la Torah, on n’en tire aucun bénéfice si l’on ne comprend pas parfaitement les commandements que l’on applique. L’accomplissement des commandements n’a aucun sens lorsque la motivation est erronée ou que les commandements sont exécutés pour des raisons étrangères à leur raison d’être. Celui qui n’a pas une compréhension juste risque de ne pas sentir ce qui lui manque, et sa pratique est imparfaite. Avec le temps, sa pratique est tellement dénaturée qu’il est incapable d’opérer un retour sur lui-même, il ne peut corriger ses faux concepts, ses transgressions sont devenues des habitudes et lui semblent licites (Yoma 86b). Personne ne pourra le convaincre que ses pensées et sa conduite sont mauvaises.

Tel est le lien entre: « Aux yeux de tout Israël » et « Au commencement D. créa ». Tout ce que les Enfants d’Israël ont vu - la main puissante de D. et les merveilles impressionnantes, les miracles et les prodiges, non seulement ceux qui étaient révélés au grand jour mais aussi ceux qui étaient cachés - tout cela les Enfants d’Israël l’ont vu parce que leur regard était demeuré intact et par conséquent leurs pensées étaient claires, ce qui n’est pas le cas lorsque « l’œil regarde et le cœur désire » (Rashi, Shelah’ 15:39), car « l’œil et le cœur sont les deux agents de la faute » (Bamidbar Rabba 10:6). C’est seulement parce qu’ils étaient restés purs que les Enfants d’Israël ont pu garder une foi infaillible dans le Créateur du monde, Celui qui créa le ciel et la terre, Celui qui est Vrai, comme le disent les Sages (Shabbat 55a): « Le sceau du Saint, béni soit-Il, est Vérité et Sa Torah est Vérité » (Yéroushalmi Rosh HaShana III:8). Les termes Béréshit bara Elokim dont les dernières lettres tav, mem, aleph, forment le mot Emet Vérité, indiquent cela. Le commentateur Baal HaTourim remarque que c’est une allusion au verset (Téhilim 119:160): « Le commencement de Ta parole est Vérité».

Les Enfants d’Israël, qui savaient que Moshé agissait en tout au vu et au su de la communauté tout entière, en ont tiré la leçon. Si Moshé Rabbeinou, qui a accompli devant nous tous ces miracles, s’est séparé de sa femme qui est une partie de lui-même (Menah’ot 93b) afin de se sanctifier, ce que D. a approuvé (Shabbat 87a), et s’il lui était interdit de se trouver dans un état d’impureté rituelle ne serait-ce qu’un bref instant, à plus forte raison nous, simples fidèles, devons-nous nous garder des conversations futiles avec notre femme, « et il va sans dire avec une femme étrangère » (Avot I:5). A plus forte raison est-il interdit de contempler la beauté d’une femme, ses vêtements de couleur (Zohar III 83b), ou même son petit doigt (Brach’ot 24a), faute de quoi nous pourrions être amenés à avoir des mauvaises pensées et il est certain que notre foi en serait corrompue.

La tâche principale de l’homme en ce monde est de préserver sa foi en toute circonstance, de la pratiquer durant toute sa vie, et de se garder de tout ce qui pourrait dénaturer la croyance de l’homme en D.

Ceci nous permet de comprendre la question posée par Rabbi Yits’hak, à savoir, pourquoi la Torah ne commence-t-elle pas par la sanctification du nouveau mois, mais par le récit de la création du monde qui ne concerne que la foi en D.? Il aurait été préférable que la Torah commence par la sanctification du nouveau mois qui, elle aussi, symbolise la foi en D. et la rencontre avec la Présence Divine. C’est effectivement ce que nous proclamons dans la bénédiction de la nouvelle lune (Sanhédrin 42a): « C’est un enseignement de l’école de Rabbi Ishmaël: si Israël n’avait eu que le mérite de rencontrer la Présence Divine à chaque nouveau mois, cela aurait suffit », et « Celui qui bénit le nouveau mois en son temps, c’est comme s’il avait rencontré la Présence Divine » (ibid.). De plus, la lune symbolise la création, puisqu’elle est la seule chose créée qui se renouvelle de mois en mois (ibid.), ainsi que nous proclamons dans la bénédiction de la nouvelle lune: « Et Il ordonna à la lune de renouveler la royauté et la gloire de ceux qui sont protégés dès leur naissance ». La lune rappelle à chaque Juif la création. Nous aurions donc deux avantages: l’expression de la foi en D. et l’affirmation de la vérité de la création, outre le fait que c’est le premier commandement donné par  la Torah à Israël!

C’est justement le premier commandement de la Torah, parce qu’il peut nous imprégner de la foi en D., Auteur et Créateur du monde. La preuve en est que la lune disparaît et reparaît régulièrement, sans avoir de place fixe, car elle peut disparaître d’un côté du firmament et réapparaître de l’autre, ce qui n’est pas le cas pour le soleil et les étoiles dont le parcours d’Est en Ouest est régulier, comme il est écrit (Téhilim 104:19): « Le soleil connaît le terme de sa course ».

Si la Torah avait débuté par la sanctification du nouveau mois, nous aurions expliqué ainsi le lien entre « aux yeux de tout Israël » et « ce mois sera pour vous »: les enfants d’Israël ont eu le mérite de voir des miracles et des prodiges, aussi bien ceux qui sont visibles que ceux qui sont habituellement voilés et passent inaperçus, et ils en ont eu connaissance parce qu’ils n’avaient pas faussé leur vue - « aux yeux de tout Israël » - et donc leurs pensées aussi étaient restées propres et pures. « Ce mois sera pour vous » nous ordonne de connaître la vérité de la création et de nous rapprocher de la Présence divine, ce qui nous permet de raffermir de plus en plus notre foi en D., mais le manque de foi, risque d’entraîner à « Sourd sera votre cœur » (une onomatopée des mots de ce même verset) (Shabbat 147b). Si tel avait été le lien, il aurait été très clair.

Et Rabbi Yits’hak demande donc pourquoi la Torah débute par le récit de la création, ce qui, nous l’avons montré plus haut, suppose connaissance et foi en D.? Si le but de la création est l’enseignement de la Torah et l’obéissance à ses commandements (sinon D. n’aurait pas créé le monde), la Torah aurait dû débuter par l’essentiel, c’est-à-dire le commandement « Ce mois sera pour vous... » qui comprend la Torah, et le premier commandement, et la foi en D., Créateur du monde, ainsi que la vérité de la création qui nous est démontrée par la lune qui se renouvelle chaque mois. D’autant plus que la foi est le fondement de notre service de D., comme il est écrit (H’abakouk 2:4): « et le Juste vit selon sa foi », que les Sages expliquent ainsi (Makot 24a): « H’abakouk a résumé tous les commandements de la Torah par leur dénominateur commun, le commandement de la foi en D. » Le but de tout enseignement de la Torah est de nous faire connaître D. et d’avoir foi en Lui.

Rabbi Yits’hak répond à sa propre question: « Pour faire connaître à Son peuple la puissance de Ses actes et leur donner l’héritage des nations... » ce qui montre combien D. est plein de bonté envers Son peuple. Que les Juifs soient sur leur terre ou exilés parmi des peuples hostiles, tant qu’ils observent les commandements et obéissent à la volonté de D., nul n’a le droit de leur faire du mal et personne ne peut remettre en question leurs droits! Par contre, si les Juifs abandonnent D. pour agir comme bon leur semble, s’ils recherchent les plaisirs de ce monde et ses vanités, les nations du monde - qui jusque-là n’avaient rien trouvé à redire et ne posaient pas de questions parce qu’ils étaient conscients que les Juifs représentent le peuple élu par D. pour être Sien - se retournent alors contre les Juifs avec des questions troublantes: Que faites-vous ici? Brigands! Voleurs!

Nous savons que lorsque les Juifs vivaient selon la Torah et ses commandements, comme au temps de Shlomo HaMelech’, ils vivaient en paix, « Yéhouda et Israël vivaient en sécurité, chacun sous sa vigne et sous son figuier, de Dan jusqu’à Béer Sheva... » (Melach’im I, 5:5), et aucune nation voisine n’osait les déranger.

Par contre, si les Juifs, malheureusement, abandonnent D., des malheurs les frappent. D. envoie contre eux les nations du monde, des peuples qui les attaquent et les accusent d’être des usurpateurs et des voleurs, prétendant qu’ils s’approprient terres et richesses, qu’ils sont avides et extorquent les gens, comme ce fut le cas de Hitler, maudit soit-il, qui disait que les Juifs étaient des capitalistes, des voleurs qui, par leur influence, voulaient prendre le pouvoir en s’appropriant les biens et les fortunes d’autrui. Aujourd’hui, comme il y a soixante ans, nous entendons de tels propos dans tous les pays, et les Arabes aussi allèguent que la terre d’Israël (la « Palestine » comme ils la nomment) leur appartient et que les Juifs l’ont volée. Mais nous, que pouvons-nous leur répondre? Leur rétorquer que D. leur a pris un pays qu’ils considèrent comme leur pour nous le donner, est un argument dont ils font fi, et ils continueront à nous narguer et à nous attaquer, comme c’est le cas aujourd’hui dans le monde. Puisqu’il en est ainsi, quel avantage tirons-nous de la réponse de Rabbi Yits’hak, que D. leur a pris la terre et nous l’a donnée?

Si ce n’est que nous devons savoir que les peuples du monde ne pourront rien contre nous et ne penseront même pas à nous accuser d’être des voleurs et des usurpateurs, si nous vivons selon la Loi de D., si nous obéissons à Ses commandements et si nous suivons Ses voies. Car, « lorsque le peuple juif est uni dans la Torah, aucune nation étrangère ne peut le dominer » (Kétoubot 66b). Ce n’est que lorsque Israël abandonne son D. que les nations nous traitent de bandits et de voleurs.  D. envoie contre nous des ennemis afin de nous faire honte et nous faire comprendre comment et pourquoi ces malheurs nous accablent, comment et pourquoi nous sommes haïs de tous, et pour nous ébranler et nous faire revenir à Lui de tout cœur, lorsque nous comprenons enfin que ces malheurs nous accablent parce que nous avons délaissé la voie de D. Il est écrit (Yérémia 9:11-12): « Qui est sage... et nous révélera pourquoi la terre est délaissée - parce qu’ils ont abandonné Ma Loi... », et le Talmud (Babba Metzya 85a) explique: « Ils ont abandonné Ma loi - ils n’ont pas récité la bénédiction avant la lecture de la Torah ». Si nous dédaignons la Torah, nous sommes privés de notre héritage et les peuples étrangers en prennent possession. Mais si nous sommes sincèrement convaincus de la promesse divine, nous pouvons répondre sans hésitation aux nations que nous ne sommes pas des voleurs, que c’est D. qui les a dépossédés de la terre pour nous la donner, ce qui représente en soi l’affirmation que D. est le Créateur et le Maître du monde. Telle est probablement l’intention de Rabbi Yits’hak lorsqu’il dit: « D. a donné la terre à qui Lui plaît... «  c’est à dire que D. donne la terre à qui agit selon Sa volonté, écoute Sa voix et obéit à Ses commandements...

Alors effectivement, lorsque les Juifs reconnaîtront le Créateur, et affirmeront que Lui seul prend et donne, lorsqu’ils auront une foi entière en Lui, les nations du monde aussi accepteront le fait que les Juifs ont reçu de D. la terre d’Israël, car les nations ne les ont attaqués que sur l’incitation de D. pour leur rappeler la vérité de Son existence et renforcer leur foi en Lui.

Cela nous montre que l’éveil à un retour vers D. et à une foi sincère découle de la revendication des nations, chaque fois que les Juifs oublient leur spécificité. Les malheurs causés par les nations et les calomnies contre nous, nous rappellent notre appartenance à D. qui nous a créés et nous a choisis entre tous les peuples pour nous donner la Torah, comme nous le proclamons dans la bénédiction qui précède la lecture publique de la Torah (Brach’ot 11b): « ...qui nous a choisis entre tous les peuples et nous a donné Sa Torah ». Mais si nous délaissons la Torah et D., nous ne méritons pas la terre d’Israël.

L’essentiel du premier verset et du premier commandement de la Torah est la connaissance de D. et le retour vers Lui. Le mot teshouva en hébreu signifie à la fois « retour, repentir » et « réponse ». La teshouva a deux aspects: Quelle réponse donner aux nations, et comment revenir à Dieu de tout cœur à cause des persécutions? Lorsque le Juif affiche sa foi en D., les nations taisent leurs revendications et cessent de l’importuner.

Par contre, si le Juif persiste dans son insoumission à D., aucune explication, aucune apologie ne satisfera les nations. Que chaque Juif sache clairement, sans l’ombre d’un doute, que D. accomplira pour lui des miracles et des prodiges, et lorsqu’il affirmera aux nations du monde que la terre d’Israël lui appartient de droit divin, ils ne trouveront rien à rétorquer et accepteront sûrement cette réponse, à condition que lui-même observe fidèlement la Torah et ses Lois.

 

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