Les actes des pères sont un exemple pour leurs enfants

Après sa victoire, lors de la guerre contre les cinq rois, Avraham fit le serment de ne rien garder du butin pour lui-même, comme il est écrit: « Et Avram dit au roi de Sodome: je jure devant l’Eternel, D. suprême... ni une lanière ni une courroie de sandale, je ne prendrai rien de ce qui est à toi, pour que tu ne puisses pas dire: c’est moi qui ai enrichi Avram » (Béréshit 14:22-23). Le Talmud (Sotah 17a, H’oulin 89a) rapporte à ce sujet: « Rava explique: c’est parce qu’Avraham a dit « ni une lanière ni une courroie de sandale », que ses enfants furent récompensés et méritèrent deux commandements, la cordelière bleue des Tzitzit et la courroie des Téphilines ». La courroie des Téphilines est certainement une récompense (Rashi ad. loc.), comme il est écrit: « Tous les peuples du monde verront que tu portes le Nom de D. et ils te craindront » (Dvarim 28:10), et Rabbi Eliézer HaGadol enseigne (H’oulin ibid, Brach’ot 6a, 57a) que ce verset se réfère aux Téphilines de la tête. Mais quel est le mérite de porter la cordelière bleue des Tzitzit? Il est enseigné (Menah’ot 43b): « Rabbi Meir dit: pourquoi la couleur bleue... parce que l’azur rappelle la mer, et la mer rappelle le ciel, et le ciel rappelle le Trône de Gloire ». Tel est l’enseignement du Talmud.

Le Rabbin Teboul, directeur de notre Kollel m’a demandé: Quel est le rapport entre le fait qu’Avraham ait refusé de prendre pour lui-même des objets de si peu de valeur, qu’une lanière et une courroie, et le fait que ses enfants aient mérité pour cela les commandements des Tzitzit et des Téphilines?

Ces deux commandements sont comptés parmi les six cent treize commandements de la Torah. Est-ce à dire que si Avraham n’avait pas fait ce serment et avait pris pour lui ne serait-ce que des lanières ou des courroies de sandales du butin, les Juifs n’auraient pas reçu les commandements des Tzitzit et des Téphilines, qui sont des commandements de base du Judaïsme? Il est dit à propos des Tzitzit (Bamidbar 15:39): « Vous les verrez et vous vous souviendrez de tous les commandements de D. et vous les exécuterez ». Les Tzitzit rappellent tous les autres commandements. Quant aux Téphilines, ils symbolisent le commandement qui nous lie à D. et nous protège, comme le Talmud nous l’enseigne (Menah’ot 43b, Tossefta Brach’ot VI): « D. aime Israël, et Il l’a entouré de commandements - les Téphilines sur la tête et sur le bras (2), les Tzitzit sur le vêtement à quatre coins (4), la Mezouza sur le montant des portes (1), et c’est à ce propos que David HaMelech’ a dit (Téhilim 119:164): Je Te louerai sept fois par jour pour Tes lois justes ». Le Maharsha (H’idoushey Agadot) écrit: « D. les entoure de ces sept commandements pour les protéger. Est-ce que vraiment, si Avraham avait gardé pour lui une lanière ou une courroie de sandale, ses enfants auraient été privés de ces deux commandements tellement importants, au point de perdre cette protection, d’autant plus qu’à propos des Tzitzit, les Sages ont dit (Menah’ot ibid. Nédarim 25a, Shavouot 29a): « Ce commandement équivaut à tous les autres commandements de la Torah »?

Nous constatons ici la grandeur d’Avraham. Il a montré à ses enfants le chemin de la vertu et de la justice comme il le leur a enseigné (Béréshit 18:19), afin qu’ils suivent son exemple et sa conduite droite et pure, dans le sens où les Sages disent (voir Sotah 34a): « les actes des pères sont un exemple pour leurs enfants ».

Les actes d’Avraham Avinou n’avaient pour but que de sanctifier le Nom de D. dans le monde. C’était également sa seule intention et son seul but lorsqu’il risqua sa vie dans la guerre contre les rois puissants. Les Sages disent à ce propos (Béréshit Rabba 43:2) qu’il n’est parti en guerre qu’avec son serviteur Eliézer, ne reculant devant aucun risque pour libérer les captifs, les ramener vers D., et sanctifier le Nom de D. publiquement. Avraham a combattu avec courage les cinq rois et les a vaincus. Il avait donc légitimement le droit de garder une bonne partie du butin sauvé de la main des oppresseurs au risque de sa vie. Malgré cela, il fit le serment solennel de ne rien garder, car au moment où il avait pris la décision d’aller en guerre, il ne l’avait fait que pour sanctifier le Nom de D. et pour libérer les captifs afin de leur permettre de vivre sans entraves selon les voies de D.

Comme nous le savons, les vêtements et les chaussures s’abîment et se déchirent au cours d’un dur combat, et donc au moins à ces fins, Avraham aurait pu à juste titre garder les lanières pour réparer les vêtements déchirés, et les courroies pour les chaussures. Avraham a renoncé à ces objets de peu de valeur, afin que nul ne puisse prétendre que le butin l’avait enrichi et rendu prospère. Il voulait que tous sachent, sans l’ombre d’un doute, que sa richesse et sa réussite ne lui venaient que de D., comme il est écrit (H’agaÿ  2:8): « L’argent est à Moi et l’or est à Moi, dit l’Eternel », et pour que l’on sache qu’il n’avait bénéficié que de l’aide de D., et qu’il ne s’était pas enrichi par chance ou grâce à sa victoire. C’est de cette façon qu’Avraham a sanctifié le Nom de D. dans le monde.

Cela nous permet d’expliquer ce qui rattache à Avraham ces deux commandements des Tzitzit et des Téphilines, et comment Avraham a permis à ses enfants de les mériter. Bien que ces commandements aient déjà été destinés aux Juifs puisqu’ils font partie des six cent treize commandements de la Torah, D. a révélé à Avraham que « pour avoir sanctifié Mon Nom dans le monde, tu as mérité que ces deux commandements fondamentaux qui protègent les Juifs soient ceux qui perpétueront le lien entre les Juifs et D. » Spécifiquement grâce à ces deux commandements, D. se souviendra du mérite d’Avraham qui était plein de miséricorde et se mit en danger pour sauver les captifs sans penser à lui-même un seul instant. Ainsi, D. protégera les Juifs, et même s’ils commettent des transgressions, même si elles sont nombreuses et graves et qu’ils méritent d’être punis pour leurs fautes, D. veillera sur eux, Il aura pitié d’eux, et Se souviendra en leur faveur du mérite d’Avraham. Nous faisons appel à ce mérite dans la prière de Yom Kippour: « Souviens-Toi de l’alliance d’Avraham et du sacrifice d’Yits’hak... » et dans la prière Neyla, la dernière de ce jour, au moment où les Portes du Ciel se referment, nous prions D. en invoquant le mérite d’Avraham: « Notre père T’a connu depuis le plus jeune âge... et donc Toi aussi souviens-Toi de nous, Tes enfants ».

C’est une juste rétribution. De même qu’Avraham a sanctifié le Nom de D. publiquement, la sanctification du Nom se perpétue dans le monde grâce à ses enfants, car « Tous les peuples du monde verront que tu portes le Nom de D. et ils te craindront ». Les Juifs sont protégés par le mérite des Tzitzit et des Téphilines en récompense de tous les efforts d’Avraham. C’est vraiment une chose merveilleuse: parce qu’Avraham a refusé de garder une seule lanière et une seule courroie (objets pourtant nécessaires après la guerre), ses enfants  mériteront d’être protégés, de sanctifier le Nom de D., et d’être attachés à Lui.

Il est dit (Sotah 17a) que la récompense du commandement des Téphilines est que « tous les peuples du monde sauront que tu portes le Nom de D. et ils te craindront », c’est-à-dire que tous les peuples du monde sauront que tu es attaché à D., que D. te protège, et alors ils te craindront, car ils auront peur de te faire du mal. La récompense des Tzitzit est de jouir de la Présence Divine (ibid.), ce qui est une juste rétribution, puisque ce commandement nous accompagne partout. C’est aussi le sens de ce qui est écrit: « Tu les verras et tu te souviendras... et vous ne suivrez pas les désirs de vos cœurs et de vos yeux... » Il nous est interdit de donner la priorité à nos intérêts personnels, au contraire, il faut suivre la voie d’Avraham qui ne pensait qu’aux autres, et c’est alors que porter les Tzitzit nous protège de tout malheur, de toute souffrance, de toute attaque et de tout danger.

A présent, nous pouvons comprendre pourquoi le Talmud enseigne que ces sept commandements protègent l’homme. La mézouza représente, comme on le sait, une protection du lieu d’habitation et le Nom Sha-d-ay, composé des premières lettres de l’expression Shomer Daltot Israël, le Protecteur des Portes d’Israël, y est inscrit. Ces sept commandements sont sous-entendus dans le verset: « Je Te louerai sept fois par jour pour Tes lois justes - tzidkeyh’a. Ce mot fait allusion au roi de Sodome qui a offert à Avraham de partager le butin, et dont le nom est Melch’i Tzedek (Béréshit 14:18). « Je Te louerai sept fois par jour », c’est-à-dire avec ces sept commandements et cela, à cause de « Tes lois justes », puisque Melch’i Tzedek fit savoir à tous qu’Avraham avait refusé son offre. Il est possible que tzidkeyh’a indique le fait que Melch’i Tzedek a accueilli Avraham avec du pain et du vin (ibid.). Le pain rappelle la table ainsi que l’autel des sacrifices, comme il est écrit (Yéh’ezkiel 41:22): « Et Il me dit: c’est la table dressée devant l’Eternel ». « Le prophète avait commencé par mentionner l’autel, et terminé par la table, pour nous enseigner que lorsque le Temple est construit, l’autel pourvoit au pardon, mais aujourd’hui que le Temple est détruit, la table de chacun lui vaut le pardon » (Brach’ot 55a, H’aguiga 27a), à l’exemple d’Avraham qui a nourri tous les gens de passage. Le vin fait allusion à ce que disent les Sages (Sanhédrin 103b): « Le pouvoir d’une gorgée est immense car elle rapproche ceux qui sont loin ». C’est ce que fit Avraham qui rapprochait ceux qui étaient loin de D. Les Juifs sont sauvés par le mérite de ses actes puisque, eux aussi, suivent la voie d’Avraham et sanctifient le Nom de D.

Nous avons dit qu’Israël a mérité les commandements des Tzitzit et des Téphilines en récompense des lanières et des courroies de sandales qu’Avraham avait refusé de prendre. Le Maharsha (H’idoushey Agadot H’oulin 89a) le confirme: « La raison principale des Tzitzit et des Téphilines est expliquée dans la Torah, mais les commandements qui s’y ajoutent, comme le cordon de couleur téch’elet que l’on ajoute aux Tzitzit et les courroies des Téphilines, ont été ajoutés en souvenir de la lanière et de la courroie... » C’est dire que seuls le cordon de couleur téch’elet et le nœud des Téphilines proviennent du mérite d’Avraham, afin que les Juifs soient intimement attachés à D. par son mérite.

Effectivement, chacun est obligé de sanctifier le Nom de D. à l’exemple d’Avraham, sachant que « si je ne sanctifie pas le Nom de D., qui le fera? » Avraham n’a jamais pensé à lui-même, mais uniquement à l’honneur de D. Chacun doit ressentir comme un devoir de prendre exemple sur lui et s’il le mérite, D. lui réserve une récompense incommensurable. Mais il est interdit de s’attendre à recevoir la rémunération de ses actes si l’on sert D. avec piété, ou si l’on aide les nécessiteux. Car aider celui qui est dans le besoin avec l’intention de recevoir une récompense n’est pas à l’exemple d’Avraham, qui n’a voulu profiter des biens de personne. Il faut aider son prochain sans rien demander en contrepartie, et il est préférable de recevoir une récompense accrue dans le monde à Venir, comme il est dit (Kidoushin 39b): « Il n’y a pas de récompense dans ce monde pour l’obéissance aux commandements ». Celui qui sanctifie le Nom de D. aux yeux de tous, est protégé par ses actes en ce monde et dans l’autre, les peuples du monde le craignent, et il mérite de jouir de la Présence Divine.

J’ai expérimenté cela personnellement. Une fois, quelqu’un a proféré contre moi des calomnies vraiment grossières. Au bout d’un certain temps, le sort a voulu que cet homme fasse faillite, et pour surmonter cette situation, il avait besoin de mon aide car j’étais le seul à pouvoir le sortir de l’impasse dans laquelle il se trouvait. Évidemment, je l’ai aidé en tout dans la mesure de mes moyens, au point qu’il put remonter la pente et même s’enrichir de nouveau. De plus, je suis allé chez lui, j’ai placé une Mézouza sur le montant de sa porte, je l’ai béni, etc. Cet homme et sa femme furent très étonnés de mon soutien, au point qu’ils ne savaient que faire pour me remercier. Je n’avais gardé aucune rancune dans mon cœur, et j’avais agi comme s’il ne s’était rien passé... En fin de compte je leur ai présenté un joli cadeau, un beau portrait du Tzadik le Rabbin Hayim Pinto, que son mérite nous protège. Ils m’ont remercié avec effusion et les larmes coulaient de leurs yeux, et moi je continuais à les bénir... Après cela, ils voulurent me payer pour me remercier de mon aide, mais j’ai refusé leur don. Ils en ont pleuré, mais je les ai consolés de tout. Et effectivement, le couple a sincèrement fait teshouva, avec l’aide de D., et pratique aujourd’hui la Torah et observe les commandements.

Si j’avais accepté leur argent en rétribution, ils auraient jugé cela suffisant pour l’expiation de la médisance, et ils n’auraient pas accompli un retour sincère à D. J’ai pensé qu’il faut suivre la voie d’Avraham qui n’a rien pris pour lui-même et qui a aidé les autres sans s’attendre à une rémunération. Effectivement, c’est ce que j’ai fait, et je leur ai dit: « Il n’y a pas de récompense pour la pratique des commandements en ce monde » (Kidoushin 39b), « le Patron paiera fidèlement le salaire de ton travail » (Avot II:21) et « il faut pratiquer les commandements sans s’attendre à en recevoir le salaire ». Si j’avais accepté leur récompense, ils auraient été convaincus que je n’avais agi que par intérêt, et ils n’auraient ressenti aucune obligation envers D. Mais ils ont sincèrement médité les événements et ils ont compris où se trouvait la vérité... et ils se sont repentis de tout cœur.

Nous comprenons à présent un autre épisode dans lequel Avraham a prouvé combien il était bienveillant. Lorsque Avraham se rend en Egypte avec sa femme Sarah, il lui dit (Béréshit 12:13): « Je te prie de dire que tu es ma sœur, pour que je sois heureux grâce à toi et que j’aie la vie sauve ». Ceci est difficile à comprendre, car Avraham était un homme courageux, qui avait combattu Nimrod, qui fut jeté dans la fournaise dont il fut sauvé, qui est intervenu dans la guerre des quatre rois contre les cinq rois, et ici, Avraham montre aux Egyptiens qu’il les craint? N’aurait-il pas pu se battre contre les Egyptiens et sauver  sa femme Sarah?

Il est vrai qu’Avraham aurait pu se battre contre les Egyptiens, mais il était miséricordieux, comme il est écrit (Mich’a 7:20): « Tu as donné la vérité à Ya’akov, la bienveillance à Avraham », et il essayait toujours de transiger plutôt que de combattre. Avant de déclarer la guerre, il faut proposer la paix, comme il est écrit dans la Torah (Dvarim 20:10): « Lorsque tu t’approcheras de la ville pour lui faire la guerre, tu lui offriras la paix ». C’est ce qu’a fait Avraham. Pour lui-même il ne fit pas la guerre et préféra supporter l’épreuve, mais lorsqu’il s’agissait de courir à la défense des autres, de Loth, ou de sauver les captifs, il partit en guerre courageusement contre les rois puissants, ceci afin de sanctifier le Nom de D. dans le monde.

 

 

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