La Torah et la prière protègent et sauvent

Il est écrit (Béréchith 28:10-11): « Ya’akov quitta Béer Cheva et se rendit à Haran, et il atteignit le lieu où il établit son gîte, car le soleil s’était couché ». Les Sages disent (Brach’oth 26b): « Vayifgaa, il atteignit, est un des mots qui indiquent la prière, pour nous enseigner que Ya’akov institua la prière du soir ».

Nous avons déjà analysé dans les chapitres précédents ce verset, mais nous n’avons pas pour autant épuisé le sujet:

Pourquoi est-il précisé que Ya’akov quitta Béer Cheva, puisque nous savons déjà qu’il s’y trouvait? Et pourquoi est-il précisé « il se rendit à Haran », puisque nous savons déjà que telle était sa destination? N’aurait-il pas été plus bref de dire: « Ya’akov partit pour Haran »?

Il faut comprendre pourquoi le mot Yayifgaa, indique la prière? De plus, pourquoi est-ce justement en cette circonstance que Ya’akov institua la prière du soir, et non à un autre moment?

Ya’akov dit (ibid. verset 16): « Assurément, l’Eternel est présent en ce lieu, et je ne le savais pas » et les Sages expliquent (Midrach Hagadah): « Si j’avais su, je n’aurais pas dormi en ce lieu saint ». Ya’akov ignorait-il la sainteté de ce lieu où son père Yits’hak avait été présenté en sacrifice? Il faut ajouter une question encore plus difficile. C’est en ce lieu que Ya’akov reçut l’inspiration d’instituer la prière du soir. Il est certain que si ce lieu n’était pas saint, il n’aurait pas eu une telle inspiration et il n’y aurait pas non plus établi son gîte. S’il en est ainsi, comment se fait-il que Ya’akov n’ait pas ressenti tout de suite la sainteté du lieu, d’autant plus que les Sages nous disent que Ya’akov était prophète?

Le livre Béréchith, qui relate la vie de nos Patriarches, est rempli de secrets et d’allusions, et « les actes des pères sont des signes pour leurs enfants » (Sotah 34a). Chacun des plus petits gestes de nos Patriarches est significatif, et chaque lettre de la Torah est un récit complet. Chacun doit apprendre à les décoder et à en dévoiler la sagesse cachée, afin de s’armer dans sa lutte contre le mauvais penchant ou pour avoir la force, grâce aux bons conseils qu’il y puise, de suivre le chemin de la Torah tout au long de sa vie. Et donc notre section cache un enseignement, enfoui et secret, concernant les voies de D., le chemin que nous devons suivre et ce que nous devons faire.

A partir du moment où Ya’akov quitta Béer Cheva, le temps de l’exil commença. Jusque-là, Ya’akov se trouvait protégé dans la maison de son père, respecté par tout le monde pour sa connaissance de la Torah et sa bonne conduite (Béréchith Rabah 63:15), et voilà que maintenant il doit quitter son foyer. Il lui fallait faire beaucoup d’efforts afin d’être sauvé des dangers de l’exil et des pérégrinations qui l’obligeaient à réduire l’étude de la Torah. S’il devait tomber sous l’emprise des tentations, il s’attirerait la colère divine.

C’est ce que la Torah nous indique. Afin d’être sauvé des tentations, afin de ne pas être influencé par les peuples étrangers et la vie en exil, afin que la colère de D. ne nous atteigne pas, il faut adhérer à la Torah, qui est notre source de vie (voir Brach’oth 56b). C’est elle qui nous protège (Sotah 21a), c’est elle qui nous accompagne dans la maison, en chemin, au coucher et au lever (Devarim 6:7), c’est-à-dire, constamment. C’est le sens de « Ya’akov quitta Béer Cheva ». Ya’akov c’est chaque Juif, car tous les Juifs sont les Enfants d’Israël, de notre Patriarche Israël – Ya’akov. Lorsqu’il part en exil, il doit être enveloppé de Torah et ce n’est que grâce à elle qu’il est sauvé, ce n’est qu’en elle qu’il trouve du réconfort. C’est ce que le verset nous indique: « Ya’akov sortit de Béer (le puits) Cheva » c’est-à-dire qu’en partant pour l’exil il faut être rempli des eaux puisées dans notre source de vie. Le mot Béer (puits), a la même valeur numérique que le mot guer (étranger), car lorsque l’on se trouve exilé en pays étranger, il faut être rempli de Torah, c’est la seule chose qui nous préserve de l’assimilation et qui apaise toutes nos faims (le mot cheva peut aussi se lire seva, rassasié). Lorsque nous nous contentons « d’un peu de pain avec du sel, de l’eau avec mesure, et de coucher sur la dure » (Avoth VI:4), la colère de D. nous est épargnée.

Il est écrit « il alla à Haran », un mot qui décrit le chemin que l’on prend, pour nous indiquer qu’il faut prendre le chemin de la Torah, comme il est écrit: « Si vous marchez dans Mes lois » (Vayikra 26:3), c’est-à-dire « Si vous vous occupez de suivre la Torah » (Torat Kohanim ad. Loc.). Grâce à nos efforts pour apprendre la Torah, nous en venons à en pratiquer les commandements et nous écartons de nous, et de tout le Peuple Juif, la colère de Dieu.

Notre section nous enseigne aussi que « le départ de Ya’akov a laissé une impression sur les gens du lieu » (Béréchith Rabah 68:6). Il est dit: « Ya’akov sortit de Béer Cheva – Vayetsé Ya’akov miBéer Cheva. Les dernières lettres de ces mots (aleph, beth, rech) forment le mot Béer ce qui indique que lorsque le Juste habite un lieu, il le marque de son empreinte et il en est la gloire et la splendeur. Mais lorsque Ya’akov sortit de Béer Cheva, il emportait avec lui sa Torah qui allait l’accompagner et le protéger en exil contre les dangers de toutes sortes. C’est alors que l’empreinte dont il a marqué sa ville se fait sentir, car il en fut la gloire, la lumière et la splendeur.

Malgré son soutien, la Torah ne suffit pas à nous faire échapper aux dangers encourus en exil, il nous faut aussi prier et supplier Celui qui a créé le monde – surtout en exil où l’impureté domine et où l’influence de cultures étrangères est énorme. Nous avons besoin autant de la Torah que de la prière pour rendre le Satan impuissant, et surtout de la prière du soir, celle qui est attachée à la nuit, à l’obscurité, à l’exil, comme le dit le Rabbi de Gour dans son livre Beit Israël sur notre section (année 5717, article I): « Les Sages enseignent que Ya’akov institua la prière du soir. Mon saint maître et père m’a confié que la prière du soir est celle que l’on dit dans l’obscurité, en exil… » Et il ajoute (ibid. année 5721, article 1): « Le soir indique l’obscurité des générations faibles. Bien qu’enveloppés d’obscurité, les Juifs peuvent prier et se rapprocher de D… » Autrement dit, même dans l’obscurité de l’exil, l’homme a besoin de prier. Ya’akov ne s’est pas seulement armé de Torah, il s’est aussi renforcé par la prière, car maintenant il se rend à Haran, vers un lieu impur et un entourage néfaste. Il a besoin des forces que procure la prière, surtout la nuit, lorsque l’attribut de Justice prend le dessus (Zohar I, 169b, III, 282a). La prière du matin et de l’après-midi ne suffisent pas puisque maintenant commence le temps de l’exil et c’est pourquoi Ya’akov institua la prière du soir.

Cela nous enseigne une leçon fondamentale, qui s’ajoute à ce que nous avons déjà dit. Les Sages nous disent (Soucah 52b; Kidouchin 30b): « Si tu te heurtes à ce vilain (le mauvais penchant), entraîne-le dans la maison d’étude ». Il est certain que Ya’akov savait que ce lieu où il faisait halte était saint, habité par la Présence de D. et qu’il devait s’y comporter avec une crainte supplémentaire. Dans pareil lieu, il faut se défaire du mauvais penchant grâce à la Torah et à la prière, car le Satan s’agite pour déranger l’homme dans son service de D., justement en un lieu sanctifié comme la synagogue etc. où l’on est assailli par toutes sortes de pensées distrayantes. C’est pourquoi, lorsque le mauvais penchant vient à ta rencontre pour t’attraper, il faut l’entraîner dans la maison d’étude, de Torah et de prière, afin de te débarrasser de lui définitivement.

Ya’akov dit: « Assurément, l’Eternel est présent en ce lieu ». Il ne voulait pas dormir dans ce lieu saint, il aurait préféré renoncer aux bénédictions et même au songe et aux promesses, plutôt que de dormir dans ce lieu saint. Mais le mauvais penchant voulait justement qu’il y dorme, afin de lui nuire et de lui causer du mal. Ya’akov le surmonta, et grâce à sa prière il réussit à le vaincre et à ne pas tomber dans ses filets.

Et Ya’akov s’exclama: « Que ce lieu est redoutable! Ceci n’est autre que la maison de D., et c’est ici la porte du Ciel » (ibid. 28:17). Ya’akov savait que ce lieu était saint, il ignorait seulement que c’était le Saint des Saints, et il lutta vigoureusement pour ne pas s’y endormir. Mais D. fit tomber sur lui un lourd sommeil et le soleil se coucha prématurément (‘Houlin 91b), non pas à cause de son mauvais penchant qu’il avait dominé, mais parce que telle était la volonté de D. qui voulait révéler dans un songe les promesses et les bénédictions.

C’est la raison pour laquelle la prière est appelée entre autres pégia, atteinte: ou l’homme est atteint par le mauvais penchant et dans ce cas, malheur à lui; ou le mauvais penchant est atteint par l’homme, et malheur au mauvais penchant qui tombe sous la main de l’homme. Avec l’aide de D., l’homme peut vaincre le mauvais penchant. Il est écrit (Devarim 21:10): « Lorsque tu pars en guerre contre ton ennemi… et que l’Eternel ton D. le livrera en ton pouvoir… », de même tu vaincras le mauvais penchant grâce à l’aide de D.

Nous allons humblement ajouter autre chose. La prière du soir est importante, car elle est dite la nuit, dans l’obscurité, l’exil, lorsque l’attribut de Justice domine. Ce n’est que grâce à la prière que l’on peut surmonter les souffrances de l’exil, comme Ya’akov qui pria au moment de se rendre en exil. C’est pourquoi il « atteint le lieu ». Il voulait se soustraire à l’emprise du mal, pour que ses descendants apprennent à s’attacher à D. Ce n’est que grâce à la Torah, au service de D. (par la prière) et aux actes de bienveillance, trois choses qui sont les piliers du monde (Avoth I:2), qu’il est possible de vaincre le mauvais penchant et les tentations. Tel est le fondement de la prière du soir, institué par Ya’akov.

Les premières lettres des noms des Patriarches : Avraham, Yits’hak, Ya’akov (aleph, youd, youd) ont la même valeur numérique que le nom de D. (Aleph Héh Youd Héh) pour indiquer que le Nom de D. n’est entier que grâce aux trois prières que les Patriarches ont instituées (Brach’oth 26b). C’est Ya’akov toutefois qui les a complétées, car la prière du soir indique la victoire de la sainteté sur l’impureté. Lorsque Israël fut réduit en esclavage sous le joug des Egyptiens, D. se révéla à eux par Son Grand Nom, disant « Ainsi tu parleras aux Enfants d’Israël: « c’est l’Etre Invariable (Aleph, Héh Youd Héh) qui m’a envoyé vers vous » (Chemoth 3:14), et alors « ils crièrent et leur plainte monta vers D. du sein de l’esclavage » (ibid. 2:23).  Bien qu’ils n’aient pas connu la nature des prières que les Patriarches avaient instituées, ils ont du moins crié vers D. et invoqué le mérite des pères, comme nous le disons dans nos supplications: « Toi qui as agréé notre père Avraham… et Yits’hak.. et Ya’akov… agrée-nous ». D. entendit leurs prières et voulut les délivrer d’Egypte par Son Grand Nom. De même, Ya’akov a surmonté le mauvais penchant en invoquant le Grand Nom de D., afin d’être sauvé des dangers de l’exil.

 

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