Ne cesser de grandir – Le repère dans notre vie

« Yossef, apercevant parmi eux Binyamin, dit à l’intendant de sa maison : ‘‘Fais entrer ces hommes chez moi ; qu’on tue des animaux et qu’on les accommode, car ces hommes dîneront avec moi. » (Béréchit 43, 16)

Presque chaque année, on lit la parachat Miketz à la période de ‘Hanouka. Or nous avons trouvé dans cette paracha une allusion à ces jours de fête, comme il est dit : « qu’on tue des animaux et qu’on les accommode » (outvoa’h téva’h véhakhen), les termes « téva’h véhakhen » étant composés des mêmes lettres que le mot « ‘hanouka ». Voici une merveilleuse allusion à ‘Hanouka trouvée dans la Torah ! Il y a donc lieu d’approfondir et de comprendre le lien théorique entre la fête de ‘Hanouka et la parachat Miketz.

Comme nous le savons, l’habitude est, à ‘Hanouka, d’allumer chaque jour une bougie supplémentaire, selon l’avis de Beit Hillel. Nos Sages disent que cette habitude s’est installée dans les communautés juives, puisqu’elle ancre en nous la notion qui consiste à « ne cesser de grandir ». Ceci nous enseigne que dans le service divin, il ne suffit pas de progresser une seule fois, mais il faut servir D. chaque jour en améliorant à chaque fois notre service par rapport à la veille. Nos Sages veulent nous apprendre par là à prendre sur nous, durant une période donnée, un progrès à faire dans un certain domaine. Puis quand nous y sommes parvenus et que cette chose nous est acquise, il faudra ajouter un autre élément à travailler, tout en continuant de garder la résolution précédente. Ainsi, si nous ne cessons jamais d’évoluer et de progresser dans notre service divin, nous pourrons atteindre des niveaux spirituels très élevés.

Yossef se trouvait dans une terre étrangère, loin de la maison de son père et de toute chose sainte. Alors qu’il séjournait en Egypte, terre d’impureté et de débauche, il a été confronté à de terribles épreuves, comme par exemple lorsque la femme de Potiphar a tenté de le faire fauter. Mais bien qu’il ait été éloigné de la maison de son père, il a résisté aux difficultés et aux épreuves qui se sont dressées sur son chemin. De plus, quand il a été nommé vice-roi d’Egypte, il ne s’est pas enorgueilli, mais a tout attribué à Hachem et déclaré à tout son entourage « Je crains D. ». Il est aussi connu que Yossef était très beau. Nos Sages racontent que lorsqu’il passait dans la rue, toutes les femmes levaient les yeux vers lui, et émues et troublées, elles coupaient leurs doigts avec les couteaux qu’elles tenaient en main pour couper des fruits.

Nous apprenons des paroles de nos Sages que la beauté de Yossef n’avait pas d’égale. Pourtant, il n’en a pas profité pour s’enorgueillir et s’est protégé autant que possible afin de ne pas tomber dans la faute. Il est intéressant de comprendre d’où Yossef a puisé la force de rester à son niveau, sans chuter, en dépit de l’impureté et de la débauche qui l’entouraient.

La résistance dont a fait preuve Yossef ainsi que son adhésion à Hachem s’expliquent par le verset (Béréchit 37, 3) « parce qu’il était le fils de sa vieillesse », et Rachi nous donne l’explication d’Onkelos : « Un fils intelligent ; tout ce qu’il avait appris auprès de Chem et Ever, il le lui avait transmis. » Autrement dit, Ya’akov a transmis à son fils Yossef toute la Torah qu’il avait apprise chez Chem et Ever. Yossef était donc un homme de Torah. Or la Torah permet de se confronter à toutes les épreuves et de leur résister, même les plus difficiles ! Le Rambam écrit dans Hilkhot Dé’ot (6, 1) qu’on a naturellement tendance à se laisser attirer et influencer par la société en ce qui concerne ses façons d’être et de penser. Mais cela s’applique uniquement si on n’est pas imprégné de Torah. En effet, quand on se trouve totalement investi et plongé dans la Torah et qu’elle guide nos pas, elle protège et sauve de la faute. Ainsi Yossef, qui portait fièrement l’héritage de son père et appliquait son enseignement, a pu surmonter les difficultés qui l’ont assailli grâce à la Torah qui l’a protégé dans une terre étrangère remplie d’impureté.

Il faut savoir que la Torah ne peut, à elle seule, nous protéger. Il est nécessaire de se fatiguer pour elle, selon le principe « ne cesser de grandir ». Tout comme Beit Hillel a institué d’allumer, chaque jour de ‘Hanouka, une bougie supplémentaire, il en est de même pour le service divin. Ce n’est pas une simple nouveauté halakhique apportée par Beit Hillel, mais un repère dans notre vie : il nous faut allumer une lampe perpétuelle, ne pas nous contenter de notre niveau spirituel, mais aspirer constamment à toujours améliorer notre service. Nous apprenons cette notion de Yossef qui, dans sa grande sagesse, a compris que s’il ne s’astreignait pas à grandir continuellement en suivant la Torah de son père, il risquait de déchoir jusqu’à un abîme spirituel duquel il est extrêmement difficile de revenir. C’est pourquoi il s’est efforcé d’accomplir les mitsvot et de craindre Hachem, dans une volonté de prolonger la tradition de ses pères, ce qui ne peut se produire que grâce à une persévérance et à une amélioration dans le service divin.

Pour appuyer nos propos, rappelons que lorsque Yossef s’est dévoilé à ses frères, il a envoyé par leur intermédiaire des charrettes (agalot) à son père, et nos Sages disent que son geste était intentionnel. Pourtant Ya’akov était riche et il ne manquait certainement pas de charrettes ! Mais il a voulu rappeler à son père les halakhot de la génisse (egla) dont on brise la nuque, sujet qu’ils étaient occupés à étudier quand ils avaient été séparés, vingt-deux ans auparavant. Or il va de soi que Yossef n’a pu s’en souvenir que parce qu’il était resté plongé dans la Torah sans interruption et s’y était investi corps et âme. Dans le cas contraire, il n’aurait pas pu se rappeler les halakhot qu’il avait étudiées avec son père de nombreuses années plus tôt.

Nous comprenons à présent ce que Yossef a dit aux gens de sa maison : « qu’on tue des animaux et qu’on les accommode » (outvoa’h téva’h véhakhen). Pour tuer le mauvais penchant et éliminer son emprise, il ne suffit pas de le surmonter une seule fois, puisqu’il a pour caractéristique de se renouveler. Nous devons agir envers lui comme nous le faisons à ‘Hanouka : en « ne cessant de grandir, d’augmenter ». Ce n’est qu’en attaquant le mauvais penchant une fois après l’autre que nous pourrons le dominer et mettre fin à son influence sur nous. Nous tirons cette leçon de Yossef, qui a soumis son mauvais penchant en l’attaquant sans pitié une fois après l’autre. D’où la redondance du verset « outvoa’h téva’h » (qu’on tue des animaux) : il vient nous enseigner, de la sorte, qu’il ne faut cesser de combattre le yetser hara. C’est ce que Yossef a fait, en s’attachant à la Torah, en s’améliorant, en progressant.

 

 

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