De la grandeur du Kiddouch Hachem

Notre parachah traite de la grandeur d’Aaron. Après la mort de Nadav et Avihou, il est écrit : « Et Aaron se tut » (Lévitique 10, 3), à savoir qu’il a justifié la sentence par son silence, et a montré à tous que Dieu avait agi justement en prenant la vie de ses deux fils le jour même où il était intronisé Grand Prêtre, le jour de la joie de son cœur, le jour de la joie de l’Eternel, le jour qui avait reçu dix couronnes (Séder Olam 7, Torath Cohanim 9, 1), le jour que le monde entier attendait depuis sa création, le jour enfin où Dieu établirait Sa résidence dans le monde.

Apparemment, Aaron aurait pu demander à Dieu pourquoi Il avait mis à mort ses fils, qui étaient des justes. Ils n’avaient agi que par amour du ciel et pour se rapprocher de Dieu, et même s’ils avaient donné un enseignement devant leurs maîtres (Erouvin 63a), quelle importance cela avait-il ? Ce n’était vraiment pas leur propos. Les benei Israël eux aussi auraient pu poser ces questions, mais voyant qu’Aaron s’était tu et avait accepté le décret, ils en ont conclu qu’il n’y avait pas lieu de protester.

C’est pourquoi le silence est précisément la façon dont le Nom de Dieu a été sanctifié en public. Il est écrit à propos des fils d’Aaron : « Je me sanctifierai par mes proches » (Lévitique 10, 3), et cela s’est réalisé dans le fait qu’Aaron a ratifié le jugement, conscient que tout ce que fait le Miséricordieux est pour le bien (Bérakhoth 60b, Zohar I 181a), et que Dieu réprimande ceux qu’Il aime (Proverbes 3, 12). Moïse avait dit à Aaron (Vayikra Rabah 1é, 2, Tan'houma Chemini 1) : « Je croyais que Dieu se sanctifierait par moi ou par toi, maintenant je vois qu’ils étaient plus grands et plus saints que moi et que toi. » Ton silence prouve donc que tout ton être adhère à Dieu. Quand Aaron s’est tu, il a sanctifié le Nom de Dieu aux yeux de tous les benei Israël, car tous ont vu qu’il acceptait Sa décision. S’il avait protesté, il aurait provoqué une profanation du Nom, alors qu’au contraire il l’a sanctifié en public.

Les deux fils d’Aaron ont ainsi mérité de ressembler à Isaac. De même que Dieu se rappelle la cendre d’Isaac, qui est présente à Ses yeux le jour de Kippour (Vayikra Rabah 36, 5), Il se rappelle la mort des deux fils d’Aaron par laquelle Son Nom a été sanctifié [c’est d’ailleurs grâce à eux que les benei Israël ont mérité le jour de Kippour, comme l’a dit le Admor de Gour à table pendant le repas du Chabath A’harei Mot-Kedochim (année 5753)]. En effet, quiconque sanctifie le Nom de Dieu en public et ratifie ses décrets sans protester est digne que son mérite protège toute sa génération et toutes les générations, en ce monde et dans le monde à venir.

Par conséquent, la mort des justes est une expiation pour les benei Israël (Moed Katan 28a, Yoma 1, 1, Vayikra Rabah 20, 7), car dans leur vie Dieu leur envoie des épreuves, qu’ils acceptent avec amour en reconnaissant qu’elles sont justes, et ce mérite est tel qu’à cause d’eux Dieu pardonne au monde entier. En outre ils sont plus grands encore dans leur mort que pendant leur vie (‘Houlin 7b), et ils peuvent expier pour toute la communauté d’Israël.

En écrivant ces mots, je me souviens d’une visite que j’ai faite à un malade, un homme jeune qui craignait Dieu. Quand je l’ai vu, j’ai parlé à l’ami qui m’accompagnait de l’épreuve terrible que devait traverser la famille du patient, et je lui ai dit que c’était justement à ce moment-là que lui et sa famille devaient se dominer et accepter cette peine en prenant conscience du fait qu’elle était provoquée par l’amour de Dieu pour eux (Bérakhoth 5a). C’est difficile, parce que le Satan accuse l’homme au moment du danger (Tan'houma Vayigach 1), accroissant ainsi le trouble dans le cœur du malade et de sa famille. A ce moment-là ils risquent de se demander pourquoi il doit tant souffrir alors qu’il observe la Torah et les mitsvoth, qu’il est rempli de foi et qu’il se comporte avec bonté envers les autres. Est-ce cela la récompense de sa Torah ? (Bérakhoth 61b, Mena’hoth 29b, Yérouchalmi ‘Haguiga 2, 1).

Ils doivent savoir que ces épreuves sont justement des épreuves d’amour, qui n’entraînent pas de négligence dans l’étude de la Torah et la prière, et que Dieu tient compte de tout. Par conséquent c’est précisément pendant ces durs moments que la famille et surtout le malade doivent surmonter les doutes et la confusion et accepter la souffrance avec amour. Alors, heureux est-il de pouvoir sanctifier le Nom de Dieu en public et en justifiant ce qui lui arrive, dans la certitude que «  Dieu châtie celui qu’Il aime » (Proverbes 3, 12), et que « Celui que Dieu aime, Il l’a frappé de maladie » (Isaïe 53, 10). Mais hélas ! Malheur à celui qui profane ce Nom en protestant contre Ses décrets et en demandant ce qui lui a valu de telles souffrances, car il montre par là qu’à son avis elles sont injustes. Il doit se dominer et les accepter avec amour.

On voit donc à quel point l’homme peut favoriser le monde entier en un seul instant de sanctification publique du Nom de Dieu, surtout s’il Lui consacre toute sa vie, car alors sa récompense est absolument indicible. En outre, Dieu lui en est reconnaissant et l’appelle « Mon fils, celui qui œuvre pour moi », comme il est dit des benei Israël qu’ils oeuvrent pour leur Père des Cieux (Zohar III 7b), Le ceignent de dix vêtements (Devarim Rabah 2, 26), ou Le délivrent de parmi les peuples (Bérakhoth 8a, Zohar III, 281a).

Il est écrit : « Donnez la puissance à Dieu, Sa majesté repose sur Israël » (Psaumes 68, 35), ce qui signifie que par l’intermédiaire des benei Israël qui Le sanctifient, Il a puissance et majesté non seulement dans les Cieux, mais aussi sur la terre, comme en témoigne le verset : « L’Eternel règne, Il est revêtu de majesté » (Psaumes 93, 1). Une fois ceci réalisé, on en arrive également à « Sa force est dans les cieux » (Ibid. 68, 35), en haut comme en bas. En effet celui qui sanctifie le Nom de Dieu est comme un char pour son maître, en ce qu’il porte et protège Son honneur. Et malheur à quiconque profane Son Nom, car il montre que pour lui, il n’existe ni justice ni juge (Yoma 72a, Baba Batra 78b, Vayikra Rabah début du par. 28). S’il a profané le Nom de Dieu fût-ce en secret, on le punit en public (Avoth 4, 4, Tana Debei Eliahou Rabah 13), car il prive Son Maître de sa force, et à cause de lui ce n’est pas l’abondance mais uniquement le malheur qui descendra sur le monde. Quant à celui qui accepte le décret en se taisant comma Aaron, il élève le Nom de Dieu. Le mot vayidom (« il se tut », écrit sans vav) a la même valeur numérique que les mots Y-A-H (un des noms de Dieu) et Adam (« l’homme ») ensemble, et le nom Y-A-H a la même valeur numérique que gaavah (« majesté »), ce qui nous rappelle que « La puissance est à Dieu, sa fierté repose sur Israël », car toute Sa fierté ne devient manifeste que lorsque l’homme s’abstient de protester contre Ses actes et accepte Sa sentence avec amour.

On trouve une allusion à ce sujet dans l’épisode où les benei Israël se sont plaints contre Dieu en disant : « Dieu se trouve-t-Il parmi nous ou non ? » (Exode 17, 7), portant ainsi atteinte à Son Nom, puisque cela montre qu’ils n’acceptaient pas de bon cœur ce qui leur arrivait. Immédiatement, « Amalek vint et lutta contre Israël » (Ibid. 8). Amalek, qui avait créé une imperfection dans le nom Y-A-H, est venu attaquer Israël avec tout son orgueil. C’est pourquoi Dieu a dit : « Puisque sa main s’attaque au trône de Y-A-H, Dieu est en guerre avec Amalek » (Ibid. 17, 16), car il faut maintenant réparer ce que l’orgueil a abîmé en enlevant une unité à la valeur numérique de Y-A-H (quinze) pour le transformer en YAD (« main », valeur numérique : 14). En effet, les forces du mal ont un pouvoir sur la sephirah de Hod (« gloire »), dont la valeur numérique est 15, à savoir Y-A-H (Zohar III 282a). C’est ce que signifie « Puisque sa main etc. ». Quant au mot KESS (« trône »), il s’agit là aussi de lui rendre la lettre aleph pour en faire KISSÉ (la forme complète du mot « trône »), et alors : Y-A-H sera complété et aura de nouveau la valeur de quinze, le trône sera complet, et la sephirah de Hod sera dans sa plénitude, au moment où le royaume de Dieu se révélera sur toute la terre. Quand tout cela se produira-t-il ? Avec la victoire sur Amalek, qui avait porté atteinte à toutes ces notions.

Quand Aaron s’est tu et a accepté la sentence, il a annulé sa propre personne devant Dieu et a élevé la sephirah de Hod jusqu’à sa place, car nous savons que c’est la sephirah qui est représentée par Aaron (Zohar II, 276b). Lui aussi a été élevé par la sephirah de Hod, car quiconque fuit les honneurs et la grandeur se voit poursuivi par eux (Erouvin 13b, Pessikta Zouta Chemoth 4, 1). C’est ce que signifie « il se tut » : il a tout fait remonter jusqu’à sa racine, a rendu la majesté à Dieu, comme dans « L’Eternel règne, Il est revêtu de majesté » (Psaumes 93, 1), et a régénéré le Nom de Dieu et le Hod.

De plus, par son silence et son effacement vis-à-vis de Dieu, il a amené la paix sur le monde entier, ce qui est sa qualité la plus caractéristique : Aaron «aime la paix et poursuit la paix » (Avoth 1, 12). Quand il voit qu’il y a lieu d’accuser Israël, il sait que la cause en est la haine gratuite, c’est pourquoi il poursuit la paix afin d’étendre la sephirah de hod et de l’élever à sa place, pour qu’elle ne tombe pas au pouvoir de la kelipah. Son silence est également la qualité qui permet d’entendre des affronts sans protester, et cette attitude entraîne le rétablissement de la sephirah et du Nom de Dieu.

Le silence d’Aaron a donc eu de nombreux résultats positifs : il a sanctifié le Nom de Dieu, lui a rendu toute sa dimension, a restauré la sephirah de Hod, a amené la paix, et a réalisé un perfectionnement de toute la communauté d’Israël. C’est donc son silence qui a donné du mérite à ses fils Nadav et Avihou, sans quoi le dommage aurait été considérable, mais comme il s’était tu, cette qualité a agi en faveur de ses fils, le Nom de Dieu a été sanctifié à travers eux, l’accusateur a été réduit au silence et la sephirah de Hod (spécifique à Aaron) a été réparée, ainsi que le Nom de Dieu. Quant à Nadav et Avihou, ils se sont élevés et ont atteint la place qui leur convient en ayant sanctifié le Nom de Dieu en public.

 

Ecoutez, fils, les préceptes de votre père... et prêtez attention à la sagesse
Table de matière
Paracha suivante

 

Hevrat Pinto • 32, rue du Plateau 75019 Paris - FRANCE • Tél. : +331 42 08 25 40 • Fax : +331 42 06 00 33 • © 2015 • Webmaster : Hanania Soussan