L’orgueil est la source de toutes les fautes

« Parle aux cohanim et dis-leur de ne pas se rendre impurs au contact d’une âme de leur peuple » (Lévitique 21, 1). Que signifie « une âme » ? On peut comprendre qu’il s’agit du corps d’un mort, de ses 248 membres et 265 tendons, qui sont appelés le « peuple » du corps [voir à ce propos Nédarim 32b]. L’homme ne doit pas rendre ce « peuple » impur par l’orgueil.

Le Zohar (III 68a) s’interroge sur la proximité des parachioth Kedochim et Emor. Au début de Kedochim (Lévitique 19, 2), le verset enjoint à toute la communauté d’Israël de se sanctifier, c’est pourquoi dans la parachat Emor on exige également des cohanim qu’ils soient saints. Les membres de la tribu de Lévi sont aussi mis en garde, dans le verset : « Parle aux Lévites et dis-leur... » (Nombres 18, 26), afin que tous soient saints et purs, même les grands, qu’ils préservent leurs 248 membres qui correspondent aux mitsvoth positives (Makoth 23b, Tan'houma Tetsé 2), et se sanctifient d’une sainteté supérieure.

Encore faut-il expliquer pourquoi, puisque dans la parachat Kedochim la Torah met en garde tout le peuple d’Israël, qui comprend les cohanim et les Lévites, il faut encore s’adresser à eux séparément ?

C’est que sans cette mise en garde spécifique de la parachat Emor envers les cohanim et les Lévites, on aurait pu croire par erreur que puisqu’ils sont plus saints que les autres benei Israël, on peut leur faire confiance, et ils n’ont pas besoin de barrières supplémentaires. On leur adresse donc une mise en garde spéciale : justement parce qu’ils sont les plus saints, ils doivent se sanctifier encore plus de peur d’en arriver à l’orgueil qui ressemble à l’impudicité (voir ci-dessous). Et ce sont précisément eux, qui se trouvent dans la Tente d’Assignation, qui ont besoin d’une sanctification supplémentaire, dans l’esprit de ce qu’ont dit les Sages : « Plus quelqu’un est grand, plus ses instincts sont puissants » (Soukah 52a). C’est l’explication que donne la Guemara de la répétition « Dis et tu diras » (Lévitique 21, 1) : mettre en garde les grands en plus des petits (Yébamoth 114a), ce qui signifie que la Torah ayant averti les petits, qui sont toute la communauté d’Israël, dans la parachat Kedochim, elle avertit maintenant également les grands, qui sont les cohanim et les Lévites, pour qu’eux aussi se gardent du péché et de l’orgueil.

Or dans la parachat Pin’has, on trouve les mots suivants : « Pin’has fils d’Elazar fils d’Aaron le cohen » (Nombres 25, 11). Les Sages expliquent que les tribus le méprisaient et disaient : « Avez-vous vu ce fils de Pouti dont le père de la mère (Ytro) engraissait (Pitem) des veaux pour des sacrifices idolâtres, et qui a tué un prince d’une tribu d’Israël ? » C’est pourquoi le verset rappelle qu’il descend d’Aaron (Sotah 43a, Rachi Ibid.).

Cela demande explication : 1) Pourquoi les tribus méprisaient-elles Pin’has, qui avait tué Zimri ben Salou, prince de la tribu de Chimon (Nombres 25, 14), alors que celui-ci était passible de mort, et que Pin’has l’avait tué avec la permission de Moïse ? Etait-ce une raison de le mépriser ? 2) Pourquoi rappeler à Pin’has les fautes de son grand-père Ytro, alors que celui-ci s’était repenti et converti et était devenu un juste (Mekhilta Ytro), au point qu’il a mérité d’ajouter à la Torah une parachah qui porte son nom (Chemoth Rabah 27, 7, Sifri Béha’alotkha 10, 29) ? Est-ce donc sa vie antérieure qu’il faut rattacher à son petit-fils Pin’has ? 3) Et si l’on rappelle à Pin’has les fautes de son grand-père, pourquoi le faire justement à propos de l’incident de Zimri et non en toute autre circonstance ?

Ce qui a éveillé la colère des tribus contre Pin’has, c’est qu’il était cohen, et qu’en tuant Zimri il s’est mis en danger d’être rendu impur par un cadavre au cas où les coupables seraient morts sous sa main, sans compter qu’il aurait pu lui aussi être tué dans la lutte. C’est pourquoi on ne lui a pas donné le bénéfice du doute, et on n’a pas attribué sa jalousie à l’amour du Ciel, sinon il n’aurait pas cru devoir précéder des hommes plus grands et meilleurs que lui dans l’accomplissement de la vengeance divine. Et même si c’était avec la permission de Moïse, comme l’ont dit les Sages (Sanhédrin 82a), les tribus estimaient malgré tout que c’était un acte d’orgueil de tuer le prince d’une tribu d’Israël. Le simple fait qu’il soit entré dans la tente et ait vu la laideur de leur faute était pour eux une preuve qu’il était frappé par l’orgueil. Or on sait que l’orgueil contient un peu d’idolâtrie, d’impudicité et de meurtre. Il s’est donc mis en danger par un orgueil qui ressemble à l’idolâtrie, et a subi la vue d’un spectacle impudique. Pourquoi donc entrer, puisqu’il risquait tout cela ?

Les tribus se sont alors demandé d’où venait cet orgueil, et ont conclu qu’il avait sa racine chez le grand-père Ytro, qui était idolâtre avant de se repentir (Chemoth Rabah 1, 38). Ce trait avait été transmis à sa descendance, et bien qu’ensuite il soit devenu un juste, la racine était restée mauvaise. C’est ainsi qu’ils ont expliqué comment Pin’has avait enfreint la mise en garde de l’Ecriture aux cohanim de se préserver de l’orgueil, comme nous l’avons dit sur le verset : « Dis et tu diras, qu’il ne se rende pas impur pour une âme » ?

A cause de tout cela, le verset le fait descendre d’Aaron, ce qui signifie que bien qu’il descende d’Ytro, ses actes ont leur source chez Aaron qui a dit de lui-même (avec Moïse) : « Que sommes-nous ? » (Exode 16, 7), et en qui il n’y avait que de l’humilité, c’est pourquoi beaucoup de miracles ont été faits à Pin’has en cette occasion et il a été préservé de tout mal (Sanhédrin 82b, Targoum Jonathan Nombres 25, 8).

Tout cela était dû au mérite d’Aaron. Il est vrai qu’un homme qui manifeste de l’orgueil a certainement hérité un peu des défauts de ses ancêtres, mais comme par ailleurs il portait en lui Aaron qui était humble et n’agissait jamais que pour l’amour du Ciel, l’ascendance d’Ytro ne s’est pas faite sentir, au point que la Torah témoigne : « Il s’est montré jaloux de ma cause au milieu d’eux » (Nombres 25, 11), sans aucune arrière-pensée ni aucun orgueil, mais uniquement par amour du Ciel.

 

Les remontrances aident l’homme à s’élever en sainteté
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Son cœur s’enorgueillit dans les voies de l’Eternel... (la Torah à travers l’humilité)

 

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