Index Tsadikim Index Tsaddikim

Rabbi Israel Schapira Le Admor De Bluzow

Le plus vieux des Admorim, le Rav tsadik Rabbi Israël Schapira z’tl de Bluzow, est mort le mardi 2 ‘Hechvan 5750 à Brooklyn, à l’âge de cent ans.

Sa mort fit régner un deuil pesant dans le monde de la Torah en général et chez les ‘hassidim de Bluzow en particulier. Tout le monde sentait qu’il était un vestige que Dieu avait laissé des générations précédentes, pour qu’il puisse nous raconter qui étaient les anciens. Sa personne reflétait celle des grands du monde de la Torah des générations précédentes.

Le mercredi 3 ‘Hechvan 5750, parachat Noa’h, son cercueil arriva à Jérusalem. De myriades de gens participèrent aux obsèques du Admor. Ce fut un enterrement gigantesque.

En accord avec son testament, on ne fit pas d’oraisons funèbres. Le public accompagna le cercueil à pied sur toute la longueur de la rue Méa Chéarim. Au collel ‘Hibat Yérouchalayim, dont le Admor était président d’honneur, on dit le kadich. Au bout de la rue Méa Chéarim attendaient déjà des dizaines d’autobus, et des milliers suivirent le cercueil en voiture jusqu’au cimetière, au mont des Oliviers, où fut enterré le Admor de Bluzow.

Sa vie

Rabbi Israël Schapira est né en ‘Hechvan de l’année 5650 (1889), à Reischa en Galicie, du Admor Rabbi Yéhochoua Schapira de Bluzow. Dès sa plus tendre enfance, on reconnut qu’il était né pour la grandeur. A l’âge de treize ans, il reçut à la fois la couronne de la Torah et celle de l’enseignement, en étant ordonné Rav par le Maharcham, le Rav de Brejan, qui a témoigné de l’ampleur de sa compréhension de la Torah.

Ce fut un petit-fils aimé de son grand-père, le Admor Rabbi Tsevi Elimélekh, auteur de l’ouvrage « Tsevi LaTsaddik ». Quand il monta à la Torah le Chabat de sa bar mitsva et qu’il arriva au verset de la haftarah : « Israël dont Je me glorifie », le saint grand-père se tourna vers son cher petit-fils, et répéta ce verset avec la cantilation. Son assiduité dans l’étude de la Torah ne connaissait aucune limite. Il était extraordinairement studieux et servait Dieu.

Après son mariage, il devint Rav de la petite ville de Istrik, proche de Sanuk, qui fut bientôt un centre vers lequel beaucoup se tournaient pour lui poser des questions en halakhah et lui demander conseil. En 5691 (1931), avec la mort de son père, il fut couronné pour le remplacer et prolonger la glorieuse dynastie de la maison de Dinow-Bluzow.

Pendant l’Holocauste, il connut les souffrances de l’enfer. Il perdit son épouse, ses enfants et ses petits-enfants. Mais c’est justement là, dans la vallée des larmes, que ressortit sa personnalité sainte dont tout disait la bonté et la bienfaisance envers ses frères juifs, et il encourageait chaque juif à mettre sa confiance dans le Créateur du monde et à attendre le salut. Quand il fut sauvé de l’Holocauste, il s’installa à Brooklyn, et eut une grande influence sur la communauté religieuse.

Il disait : « La raison pour laquelle je suis resté en vie est que je puisse continuer à raconter aux générations futures ce qui nous est arrivé pendant ces jours-là. » C’était un merveilleux conteur. Ses histoires et ses expressions, qui sortaient d’un cœur pur et saint, rentraient dans le cœur des auditeurs, qui ne les oubliaient plus jamais.

En voici quelques-unes.

Le puits

La nuit était sombre et froide dans le camp. Tout à coup on entendit une voix qui criait : « Tout le monde dehors, celui qui restera à l’intérieur sera fusillé ! » Tout le monde sortit.

La voix se fit de nouveau entendre :

« Vous vous tenez devant un puits. Celui qui veut rester en vie doit sauter pour passer de l’autre côté du puits. Celui qui ne réussira pas et tombera dans le puits recevra une balle dans la tête. »

A côté du Rabbi de Bluzow se tenait un juif qui lui était très attaché. Il dit : « Pourquoi sauter, Rabbi ? Asseyons-nous au bord du puits, et attendons la balle qui nous délivrera de cet enfer. » « Non, mon ami, dit le Rabbi. Il est interdit à un juif de se suicider. »

Le Rabbi ferma les yeux, fit une courte prière et murmura au juif : « Nous sautons ! » Et au bout d’un instant, ils se retrouvèrent de l’autre côté.

« Rabbi, sauta le juif de bonheur, Je ne peux pas croire que nous soyons en vie ! Par le mérite du Rabbi, Dieu nous a fait ce miracle. Dites-moi, Rabbi, comment avez-vous fait cela ? »

« Comment j’ai fait cela ? répondit le Rabbi, je me suis accroché au mérite de mes ancêtres… Je me suis accroché aux bords du manteau de mon père, de mon grand-père, du père de mon grand-père, et j’ai demandé. Mais dis-moi, mon ami, comment est-ce que toi tu as fait cela ? » « Moi ? répondit le juif, je me suis accroché au Rabbi… »

La bénédiction Chéhe’heyanou

Quand arrivèrent les jours de ‘Hanouka, le Rabbi alluma une bougie de ‘Hanouka dans le camp de Bergen-Belsen. Une fois qu’il eut dit les bénédictions, un juif s’adressa à lui pour lui demander :

« Rabbi, même si vous vous êtes obstiné à allumer la bougie de ‘Hanouka et à dire « lehadlik ner » et « chéassa nissim », qu’est-ce qu’il y a dans cette mitsva qui justifie de dire la bénédiction chéhe’heyanou vékiyemanou véhiguianou la zeman hazé (« qui nous a fait vivre et nous a soutenus et nous a amené jusqu’à ce temps-ci ») ? Un temps où des milliers de juifs meurent de morts terribles, pourquoi dirait-on dessus chéhe’heyanou ? »

« Moi aussi je me suis posé cette question, répondit le Rabbi. J’y ai cherché une réponse, et je l’ai trouvée : quand j’ai dit la bénédiction, j’ai vu ce grand public qui était venu au péril de sa vie écouter l’allumage de la bougie. Et sur le fait que Dieu ait de tels juifs, qui sont prêts à donner leur vie pour la lumière des bougies, rien que là-dessus, on ne peut pas dire chéhe’heyanou ? »

Un juif irréprochable

Un jour, raconte le Rabbi, j’étais en train de scier du bois. Tout à coup j’ai entendu une voix de femme : « Pitié, juifs, pitié, trouvez-moi un couteau ! »

La femme s’est approchée de moi et a dit : « Rendez-moi service, Rabbi, trouvez-moi un couteau… » La première idée qui me vint en tête fut que la femme voulait se suicider.

Alors je lui ai dit : « Il est interdit de faire cela ! » Tout à coup s’est approché un Allemand qui s’est mis à la frapper en criant : « Pourquoi est-ce que tu demandes un couteau ? » Elle ne lui répondit pas, mais ne cessa de répéter : « J’ai besoin d’un couteau… »

L’Allemand lui donna un canif. La femme le saisit et se tourna de l’autre côté où se trouvait un paquet enveloppé. Elle ouvrit le paquet, et à ma stupéfaction il contenait un bébé endormi. Je me figeai sur place. Je compris qu’elle essayait de le circoncire. Elle dit tout haut la bénédiction sur la circoncision du bébé, puis elle se leva, regarda le ciel et dit : « Maître du monde, tu m’as donné un bébé en bonne santé, je Te le rends intègre, comme un juif irréprochable. » Alors elle enveloppa de nouveau le paquet, s’approcha de l’Allemand, d’une main lui tendit le canif où coulait du sang, et de l’autre le bébé…

J’ai pensé alors, continua le Rabbi avec des larmes aux yeux, que ce que cette femme avait fait seule avait fait une profonde impression devant le Trône de gloire, car depuis le sacrifice d’Isaac il n’y avait plus eu de tel sacrifice de la part d’une mère juive…

Un signe sur le séfer Torah

Le Rabbi portait toujours avec lui un morceau de papier qu’il avait reçu d’un saint dans les camps de concentration, cinq minutes avant qu’il soit exécuté. Voici ce qu’il écrivait : « Mon cher Rabbi, je sais qu’on va nous liquider. Je vous demande instamment de mériter d’être sauvé et d’aller en Erets Israël, vous verrez que mon souvenir ne sera pas oublié, qu’on écrira un signe dans le séfer Torah sur mon nom et le nom de ma femme. Je joins à cet envoi cinquante dollars qui me restent encore. »

Et un jour, le Rabbi dit à ses proches : « Vous savez quel est mon passeport pour le monde à venir ? Quand on me demandera quel est mon mérite pour y entrer ? 

– Le chiffre qui est gravé sur votre bras, essaya de répondre quelqu’un.

– Absolument pas, répondit le Rabbi d’une voix brisée, « c’est ce morceau de papier, c’est le seule chose que j’agiterai dans le monde de vérité… »

 

 
INDEX TSADIKIM
 

 

Hevrat Pinto • 32, rue du Plateau 75019 Paris - FRANCE • Tél. : +331 42 08 25 40 • Fax : +331 42 06 00 33 • © 2015 • Webmaster : Hanania Soussan