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Rabbi Tsvi fils de Rabbi Yaacov Ashkenazi • “Hakham Tvi”

En 5408 (1648), le ciel d’Israël s’assombrit de nuages, et fut recouvert d’un lourd brouillard. L’ennemi haï Bogdan Chmielnitski et ses hordes de cosaques attaquèrent les communautés juives de toute la Pologne et la Lituanie, massacrant des dizaines de milliers de juifs, hommes, femmes et enfants. La ville de Vilna but également le calice du malheur. Les cosaques l’envahirent et se livrèrent à un terrible carnage de ses habitants. La ville fut prise d’une grande terreur, et beaucoup de gens prirent la fuite, entre autres le gaon auteur de Cha’ar Ephraïm, qui était à la tête du Beit Din de Vilna, et son gendre le gaon Rabbi Ya’akov avec sa jeune épouse. Ils passèrent la frontière et s’installèrent dans la province de Mehrin.

Mais sur la route les attendaient de nom-breuses épreuves. Dans sa hâte, Rabbi Yaakov s’était séparé de son beau-père et de sa femme, et tomba aux mains des meurtriers. L’un d’eux leva sur lui son sabre et s’apprêtait à le tuer, quand à la dernière minute il eut pitié de lui et lui dit : «Lève-toi et fuis pour sauver ta vie.» Rabbi Ya’akov, qui craignait de tomber aux mains d’autres meurtriers, se cacha entre les morts pendant une huitaine de jours. La nuit il sortait ramasser des plantes pour subsister. A la fin, les assassins quittèrent les lieux et Rabbi Ya’akov se mit à errer à la recherche de sa femme et de son père.

Or pendant qu’il était étendu parmi les morts, des gens qui le connaissaient étaient passés là par hasard, crurent qu’il avait été tué, et vinrent témoigner devant son beau-père qu’ils avaient vu le corps de Rabbi Ya’akov. Le gaon Rabbi Heschel permit à sa femme Ne’hama de se remarier, ce qui était clairement permis, puisque la Torah dit : «Une chose sera établie par deux témoins». Mais la jeune femme n’était pas d’humeur à se laisser consoler, et fit la sourde oreille aux propositions de mariage. Au bout de six mois, Rabbi Ya’akov arriva chez son beau-père, ce qui parut miraculeux. Par le mérite de la droiture de sa jeune femme Ne’hama leur naquit ensuite un fils merveilleux qui reçut le nom de Tsvi Hirsch, connu sous le nom de «‘Hakham Tsvi». Le gaon et tsaddik Rabbi Yossef Eliahou Henkin racontait toujours cette histoire, pour bien montrer à quel point il faut faire attention avant de permettre à une femme agounah de se remarier.

Rabbi Tsvi Hirsch, fils de Rabbi Ya’akov Achkenazi, connu sous le nom de «‘Hakham Tsvi», est né en Mehrin en 5420 (1660).

Dès son jeune âge, il fit preuve de talents considérables, et il aspirait ardemment à étudier la Torah. Il étudia avec son père, ainsi que dans la yéchivah de son grand-père Rabbi Ephraïm Hacohen. Quand il grandit, on l’envoya étudier chez les Sages des sépharadim, et pendant deux ans il resta au Beith Midrach de Rabbi Eliahou Kobo à Salonique. Il y apprit les coutumes des sépharadim et leurs usages, qu’il connaissait parfaitement, ainsi que leur langue. Il aimait beaucoup le judaïsme sépharade et ses coutumes, au point qu’il insistait pour qu’on lui donne le titre de «‘Hakham», que les séphara-dim utilisent à la place du mot «Rav». Au bout de quelques années d’études et de voyages, il revint chez son père à Oubin, où il épousa la fille de l’une des personnalités de la ville. Mais il ne resta pas longtemps en paix, car en 5446 (1686), quand la ville d’Oubin fut assiégée, une balle pénétra chez lui et tua sa jeune femme et leur petite fille. Rabbi Tsvi s’enfuit à Sarajevo où la communauté le reçut comme Rav. De là il alla à Berlin où il prit pour femme la fille de Rabbi Mechoulam Zalman Neumark, qui dirigeait les trois communautés d’Altona, Hambourg et Vendsbek.

Il s’installa à Altona où il enseigna la Torah pendant dix-huit ans, dans le grand Beit Midrach qu’il avait fondé. Il devint connu dans tout le pays comme le plus grand de sa génération, et des pays voisins et lointains on lui adressait des questions sur tout ce qui touchait à la halakhah. Quand son beau-père mourut, Rabbi Tsvi fut nommé à sa place comme Rav des trois communautés en question. A cette époque, le Rav d’Altona était le gaon Rabbi Moché de Rottenbourg. Les deux guéonim décidèrent que chacun d’entre eux assumerait cette responsa-bilité pendant six mois, en alternance.

Mais à cause d’un conflit qui éclata entre lui et son confrère, à propos d’une certaine question sur une poule dans laquelle on n’avait pas trouvé de cœur, que le «‘Hakham Tsvi» permettait, estimant qu’il est impossible à quelque créature que ce soit de vivre sans cœur, alors que Rabbi Moché l’interdisait, il décida de démissionner et retourna au Beit Midrach.

La rumeur s’en étant répandue, la commu-nauté allemande d’Amsterdam invita le ‘Hakham Tsvi à assumer l’importante rabbanouth d’Amsterdam. On lui fit de grands honneurs quand il arriva, et on lui fixa pour salaire deux mille cinq cents pièces d’or hollandaises. Il jouissait également de l’estime de la communauté sépharade de la ville. Il y imprima son livre de responsa «Chééloth Outechouvoth, ‘Hidouchim OuBiourim». Cet ouvrage lui valut une grande notoriété dans le monde rabbinique.

Les Sages de sa génération disaient de lui qu’il était humble comme Hillel et intransigeant comme Chamaï ; pour ce qui est de son humilité, l’histoire suivante en témoignera :

Rabbi Avraham Breuda (auteur du «Echel Avraham» sur le Talmud), Rav de Francfort-sur-le-Main, avait marié son fils à la fille de l’une des personnalités érudites et fortunées de Hambourg. Quand il vint à Hambourg pour le mariage de sa fille, le Rav de la ville donna en son honneur un grand repas auquel il invita toutes les personnalités de Torah de ses trois communautés ; tous les invités se présentèrent, à l’exception de Rabbi Tsvi, qui ne vint pas parce qu’il était en deuil de son père. Rabbi Avraham se mit en colère et lui en voulut. Après le mariage, Rabbi Tsvi partit accueillir le Rav de Francfort en compagnie de deux disciples. Rabbi Avraham le reçut aimablement, et lui demanda :

– Pourquoi n’êtes-vous pas venu jusqu’à présent ?

Rabbi Tsvi s’excusa et lui dit qu’il était dans les douze mois de deuil.

– Mais pourtant, reprit Rabbi Avraham, vous auriez pu envoyer vos élèves en les chargeant de transmettre vos félicitations !

– Je n’ai pas d’élèves, répondit Rabbi Tsvi.

– Et ceux qui viennent d’arriver en votre compagnie ? demanda Rabbi Avraham.

– Ceux-là, dit Rabbi Tsvi, ce sont mes amis...

Mais là où était son humilité, nous trouvons également sa fermeté et son intransigeance ; il aimait la pauvreté et haïssait la corruption, poursuivait la justice et défendait tous les persécutés. Il luttait contre des gens riches et influents et se tenait aux côtés des pauvres et des opprimés. Son intransigeance l’obligea à quitter Amsterdam qu’il aimait tant. Après avoir voyagé jusqu’en Angleterre et être passé par de nombreuses communautés d’Allemagne et de Pologne, il fut invité au poste rabbinique important de Lvov et sa province. Mais il n’en profita pas longtemps, car il mourut à l’âge de 58 ans, le premier jour de Iyar 5478 (1718). Son livre de responsa fut imprimé sous le nom de «‘Hakham Tsvi», et il est célèbre par ses questions autant que par ses réponses.

Beaucoup d’années se sont écoulées depuis la mort du «‘Hakham Tsvi», mais jusqu’à nos jours, son nom est évoqué avec révérence dans toute la diaspora.

 

 
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