EMOR 7 Mai 2011 3 Iyar 5771 |
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Critique de l’orgueil et éloge de l’humilité
(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
Il est écrit au début de notre paracha (Vayikra 21, 1) « Dis aux cohanim, fils d’Aaron, et dis-leur : Nul ne doit se souiller par le cadavre d’un de ses concitoyens. » Comme Rachi, nos Sages interprètent ainsi (Yebamot 114a) la répétition du verbe « dis… et dis-leur » : pour mettre en garde les grands à propos des petits. Le texte vient donc ici prévenir les adultes de surveiller les enfants afin qu’ils ne soient pas rendus impurs par un intermédiaire.
Quant à moi, je pense que ce verset s’adresse à l’érudit. « Pour mettre en garde les grands à propos des petits » : que la personne sage ne se comporte pas avec dédain, qu’elle ne fasse pas, D. préserve, de la Torah un outil à son service (Avot 4, 5), mais plutôt qu’elle se considère comme petite et se conduise avec humilité et modestie. « Nul ne doit se souiller par le cadavre d’un de ses concitoyens » est un ordre qui provient de la Torah ! Il signifie que si l’on ne se comporte pas avec humilité, alors toute notre Torah est déviée de son objectif ; seule notre écorce en profitera et deviendra alors prépondérante. En effet, la Torah apporte la sainteté sur l’homme et le rapproche de D. à condition qu’il reste simple et effacé. La michna Avot (4, 4) va dans ce sens : « Rabbi Levitas homme de Yavné avait l’habitude de dire : Sois très, très modeste, car l’homme est destiné à devenir vermine. »
Notre but dans ce monde est de combattre le mauvais penchant, de nous construire en accomplissant sans cesse la Torah, les mitsvot et les bonnes actions. Si l’on arrête d’étudier la Torah ou d’accomplir de bonnes actions, notre édifice risque de s’écrouler et il faudra se bâtir à nouveau.
Tel est le sens de cette michna : « homme de Yavné » (nom qui évoque la racine du verbe « construire ») : l’homme doit être un combattant et bâtir son édifice. C’est à ce sujet que le Tanna prodigue un conseil à celui qui est grand en Torah : « Sois très, très modeste. » Comme la Torah a répété le verbe ‘dire’ (« Dis… et dis-leur »), le Tanna répète également l’adverbe « très » pour signifier que si nous aspirons à ce que la construction de notre personne reste stable et ne s’effondre pas, nous devons être humble et nous considérer comme petit, car : « L’homme est destiné à devenir vermine. » Si la fin de tout homme est de toutes façons les vers, pourquoi s’enorgueillir par rapport à son prochain ?
En tant que serviteur de D., nous aspirons au monde futur. Mais si nous sommes pleins d’orgueil et de grossièreté, traits de caractère qui extirpent l’homme de ce monde (Avot 4, 21), nous perdrons d’un côté ce que nous aurions gagné de l’autre (Sota 5a), tous nos espoirs se solderont par des échecs et seuls les vers profiteront de notre corps épais et gras. En effet, une personne imbue d’elle-même, même si elle est physiquement menue, est rendue épaisse et grasse du fait de son arrogance. Le conseil à retenir pour tout serviteur de D. est donc le suivant : rester humble et modeste, car c’est le seul moyen de concrétiser ses espoirs.
Remarquons à quel point l’orgueil est en horreur à Celui par la parole de Qui le monde a été créé. Comme nous le savons, il est interdit d’offrir en sacrifice un animal qui aurait un défaut (Vayikra 22, 20). Seule une bête parfaite peut être amenée sur l’autel et servir d’expiation pour celui qui l’offre.
J’ai trouvé dans le livre « Avkat Rokhel » la question suivante : « Pourquoi un animal porteur d’un défaut est-il inapte à être offert en sacrifice ? L’essentiel est que le fauteur regrette ses actes et en ait le coeur brisé, comme il est dit « un cœur brisé et abattu, ô D., Tu ne le dédaignes point ! » (Téhilim 51, 19) ! Qu’importe que la bête soit parfaite ou non puisque le principal est le cœur meurtri ? »
Voici mon interprétation : il est évident que quiconque a fauté et désire apporter un sacrifice en guise d’expiation doit avant tout se repentir sincèrement et être blanchi de tout manquement et de tout péché. En effet, sans repentir aucun sacrifice n’est agréé par D., fût-il le plus beau et le plus gras ! Hachem veut surtout un coeur propre et pur au moment de l’offrande, et si le fauteur est encore imprégné intérieurement d’un défaut, son offrande ne sera pas agréée.
Ainsi, puisque notre propre chair doit être lavée de toute faute et de toute transgression et que l’animal vient en expiation à notre place [on lui inflige tout ce qu’on aurait dû nous faire subir à nous-mêmes (Ramban Vayikra 1, 9)], il s’ensuit que la bête doit également être parfaite et sans défaut. En réalité, ce sacrifice est à l’image de la personne qui l’offre : s’il comporte un défaut, c’est le signe que la personne aussi en comporte et ne s’est pas totalement repentie. C’est la raison pour laquelle un tel animal serait inapte à être offert en sacrifice.
Mais de nos jours, alors que nous n’avons plus d’autel pour y offrir nos sacrifices, ce processus est remplacé par les prières, comme il est dit : « Nous paierons les taureaux par nos lèvres » (Hoché’a 14, 3). En effet, nos Sages affirment (Berakhot 26b, Midrach Rabba 18, 21) que « les prières ont pris la place des sacrifices ». En outre, nous pouvons aussi remplacer les sacrifices en étudiant le passage de la Torah qui les concerne, comme il est dit (Mena’hot 110a) : « Quiconque étudie le passage de la Torah qui traite du sacrifice expiatoire est considéré comme s’il en avait apporté un etc. »
Ainsi, avant de s’adonner à la Torah, à la prière et à l’étude des sacrifices, nous devons nous assurer d’être irréprochables et sans fautes. Dans le cas contraire, nos prières et notre Torah ne seront pas agréables à D. Or il n’existe pas de plus grand défaut que l’orgueil et la poursuite des honneurs. En effet, comment une personne imbue d’elle-même pourrait-elle se tenir dans une synagogue ou une maison d’étude et approfondir les passages de la Torah traitant des sacrifices alors que toute sa personne est déficiente ? De surcroît, Hachem a proclamé à son sujet : « Lui et Moi ne pouvons résider ensemble dans le monde. » (Sota 5a) Cette personne-là n’est donc qu’une insulte et une offense à Celui par la parole de Qui le monde est venu à l’existence.
C’est pourquoi il faut faire extrêmement attention à se conduire de manière humble et modeste. Tel est le sens de « pour mettre en garde les grands à propos des petits » : nous devons toujours nous comporter avec humilité, soumission et effacement, et étudier la Torah de manière désintéressée. Alors nos prières seront agréées, et notre âme éclairera notre chemin dans ce monde-ci et dans le monde à venir, amen.
LES PAROLES DES SAGES
Parfois une heure équivaut à mille heures
« Pendant six jours on se livrera au travail, mais le septième jour il y aura repos, repos solennel pour une sainte convocation : vous ne ferez aucun travail. C’est un Chabbat pour Hachem, dans toutes vos habitations. » (Vayikra 23, 3)
Le septième jour est le jour le plus important de la semaine, et il faut le consacrer à l’étude de la sainte Torah. Les paroles du midrach dans « Tanna DeBei Eliahou » (Rabba Chapitre 1) nous apprennent beaucoup à ce sujet : « Hachem a parlé ainsi à Israël : ‘Mes enfants, ne vous ai-Je pas écrit dans Ma Torah ‘Ce livre de la Torah ne doit pas quitter ta bouche’ (Josué 1, 8) ? Même si vous vous livrez au travail pendant six jours, lors du Chabbat vous ne vous occuperez que de Torah.’ » C’est d’ici que nos maîtres ont déduit la halakha suivante : « On se lèvera toujours tôt le jour du Chabbat et on étudiera, on se rendra à la synagogue, on y lira la Torah et on répétera dans les Prophètes, puis on rentrera à la maison pour faire un bon repas, afin d’accomplir ce qui est écrit (Kohélet 9, 7) : ‘Va, mange ton pain allègrement et bois ton vin d’un cœur joyeux.’ »
A ce sujet, Rabbeinou Ya’akov Ba’al Hatourim (Ora’h ‘Haïm 290) précise : « Il est écrit dans le midrach que la Torah s’est adressée à D. en ces termes : ‘Maître du monde ! Lorsque les bnei Israël rentreront en terre d’Israël, l’un courra à sa vigne, l’autre à son champ… mais qu’adviendra-t-il de moi ?’ Il lui a alors répondu : ‘J’ai un partenaire à t’associer et il s’appelle Chabbat. En ce jour, les bnei Israël seront libres de leurs activités et ne se consacreront qu’à toi. C’est pourquoi on doit fixer un lieu d’étude afin de transmettre au peuple les lois de Hachem et Ses enseignements. »
Se reposer, mais sur le compte de qui ?
Le Maguid Rabbi Ya’akov de Doubno utilisait une parabole pour expliquer concrètement à l’assemblée de ses fidèles que le jour du Chabbat est un jour consacré au service de D. et à la spiritualité. Il voulait les sensibiliser sur l’importance de ne pas avoir d’occupations profanes pendant cette journée. Voici ce qu’il dit :
Il y a de nombreuses années, un homme a décidé de s’investir davantage dans ses affaires. Pour ce faire, il a quitté son petit village natal pour s’installer dans une grande ville, éloignée. Au bout de quelques années de belle réussite professionnelle, il a été pris de nostalgie pour son village, car il était resté totalement déconnecté de ses anciens amis. De temps en temps, ses pensées erraient et il se posait des questions sur les membres de sa famille, ses amis proches ou encore des fidèles de la synagogue qu’il avait eu l’habitude de fréquenter…
Une longue période s’est ainsi écoulée, sans qu’il puisse avoir de nouvelles de ses proches et de ses amis. Puis, par une belle journée, on a frappé à sa porte : à l’entrée se tenait un mendiant en quête de tsedaka. Le marchand, surpris, s’est soudain rendu compte que l’homme venait de son propre village : il s’agissait en fait d’un de ses amis de jeunesse !
« Bienvenue ! s’est exclamé l’homme d’affaires avec émotion, que fais-tu ici ? »
« Je suis venu ramasser de l’argent » a répondu son ami.
« Entre, tu prendras bien un petit verre d’eau-de vie ! »
Le commerçant, qui ne pouvait retenir sa brûlante curiosité, lui a demandé en l’implorant : « Raconte-moi comment va notre petit village ? »
En entendant cette question, son ami a regardé sa montre et a reculé tout en balbutiant : « Je n’ai pas le temps, je ramasse de l’argent et chaque minute m’est vraiment précieuse… »
Mais l’homme d’affaires, qui ne voulait pas laisser passer cette occasion en or, s’est empressé de lui demander : « Quelle somme as-tu l’habitude de ramasser en une journée ? »
« Environ mille dollars » a été sa réponse.
« Dans ce cas, je te donnerai la totalité de cette somme à condition que tu t’installes chez moi pour me raconter comment se porte notre village. »
L’hôte n’a pas pu refuser cette offre si généreuse. Ainsi, après s’être restauré il a commencé à raconter à son ami tous les événements qui s’étaient produits dans leur bourg depuis le départ de ce dernier.
Il a parlé pendant deux heures puis il s’est fatigué et a demandé à se reposer un peu. Mais c’est là qu’une surprise l’attendait : « Se reposer ? s’est étonné le commerçant, mais je t’ai payé pour toute la journée ! Si tu veux te reposer, fais-le demain et le repos sera alors sur ton compte ! Pourquoi veux-tu te reposer à mes dépens ? Je t’ai payé seulement pour que tu me racontes tout ce qui s’est passé… »
De la même manière, explique le Maguid, Hachem constate que les membres du peuple d’Israël travaillent toute la semaine pour gagner leur vie et sont plongés dans le domaine matériel, c’est pourquoi Il a institué le jour du Chabbat. Ce jour-là, D. s’adresse à Ses enfants en leur disant : « A présent vous ne travaillez pas, vous devez donc profiter de cette journée pour l’étude de la Torah et des sujets relatifs à la sainteté du Chabbat. » Pourtant, certains d’entre eux ne le consacrent qu’au repos…
A ces personnes, Hachem réplique : « Si vous voulez vous reposer, faites-le sur votre compte ! Pour la détente, vous pouvez utiliser les six jours ouvrables. Mais le septième jour est un ‘Chabbat pour Hachem’, c’est Mon jour, et Je vous l’ai octroyé pour y étudier la Torah et vous élever spirituellement. »
Rabbeinou Yossef ‘Haïm zatsal écrit dans son livre « Ben Ich ‘Haï » : « Les kabbalistes ont affirmé que l’effet de l’étude du Chabbat est mille fois supérieur à celui de l’étude des jours profanes. » Ceci signifie qu’une heure d’étude de Torah effectuée pendant Chabbat équivaut à mille heures effectuées pendant les jours de semaine. Nous comprenons d’ici l’importance de l’étude de la Torah en ce jour saint.
GARDE TA LANGUE
Prendre l’habitude de reprocher
On doit toujours prendre l’habitude de faire des reproches chez soi dans ce domaine (lachon hara et médisance), mais avec douceur, en parlant de la gravité du châtiment que cela entraîne dans l’avenir et de l’importance de la récompense pour ceux qui font attention. Il est dit dans le traité Chabbat (54b) que celui qui aurait la possibilité de faire des reproches à sa famille et ne le fait pas sera un jour tenu responsable des fautes de sa famille.
A LA LUMIERE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
Etudier la Torah dans le but de l’enseigner
« Dis aux cohanim fils d’Aharon et dis-leur qu’ils ne doivent pas se rendre impurs dans leur peuple. »
Les Sages se sont demandé (Yébamot 114a) pourquoi il est écrit deux fois « dis » et « dis-leur ». Il est également difficile de comprendre pourquoi le début est au pluriel, « dis-leur », et la fin au singulier, « dans son peuple ». On peut l’expliquer en fonction de ce que dit la Michna (Avot 2, 8) : « Si tu as appris beaucoup de Torah, ne t’imagine pas que ce soit grâce à tes mérites. » On apprend de là qu’il faut enseigner, sans se dire : « Si j’enseigne aux autres pendant toute ma vie, quand aurai-je le temps d’étudier pour moi-même ? » Les Sages ont dit : « L’homme est né pour le travail » (Iyov 5, 7), le mot « leamal » (pour le travail) est un acronyme de « Lilmod al manat lelamed » (« étudier pour pouvoir enseigner »), car il n’y a pas de plus grand dévouement que de donner de son temps aux autres.
C’est pourquoi quand quelqu’un enseigne en renonçant à son propre temps de travail, D. le lui rend mesure pour mesure, et sa Torah subsiste en lui comme s’il étudiait, même aux moments où il enseigne. Les Sages ont dit (Sanhédrin 99b) : « L’homme travaille à un certain endroit, et sa Torah travaille pour lui à un autre endroit. »
C’est pourquoi il est écrit ici : « Dis et tu leur diras », la Torah nous insinue de cette façon : « Dis à toi-même pour que tu aies la possibilité de dire aux autres. » Tu ne dois pas penser : « Je vais seulement étudier pour moi-même », car si tu te conduis ainsi, ta Torah risque de te rendre impur, ainsi qu’il est dit dans Makot (10a) : « Les talmidei ‘hakhamim qui étudient chacun de son côté méritent la mort, et non seulement cela mais ils deviennent stupides, et non seulement cela mais ils pèchent. »
C’est pourquoi les parachiot Emor et Behar sont reliées à la parachat Be’houkotaï : « Dis », à toi-même, « et dis-leur », aux autres. « Au mont Sinaï », c’est une allusion à l’humilité, car le Sinaï s’est fait petit devant Hachem. Et du fait que l’homme renonce à son étude pour enseigner aux autres, c’est un signe qu’il ne s’enorgueillit pas. Tout cela se trouve à proximité de la parachat Be’houkotaï, qui concerne l’étude de la Torah, ainsi que l’ont expliqué les Sages (Torat Cohanim Be’houkotaï 1) : « Si vous marchez dans Mes lois » (Vayikra 26, 3), cela nous enseigne que D. souhaite que les bnei Israël étudient la Torah. » C’est une allusion au fait qu’il n’y a pas de plus grand dévouement que de se faire petit comme le Sinaï et d’enseigner la Torah aux autres.
A LA SOURCE
A la lueur de la flamme
« Dis-leur qu’ils ne doivent pas se rendre impurs pour une âme dans leur peuple » (21, 1)
L’âme de l’homme est comparée à une flamme, ainsi qu’il est dit : « L’âme de l’homme est la flamme de Hachem. »
De même que la flamme brûle tant qu’il y a de l’huile, et que la lumière s’éteint quand il n’y en a plus, de même tout le monde recherche l’homme tant que son âme est en lui, mais quand elle l’a quitté, tout le monde le fuit.
C’est à ce propos qu’il est dit : « Ils ne doivent pas se rendre impurs pour une âme dans leur peuple. »
(Midrach He’Hadach)
Le grand de la génération
« Le cohen plus grand que ses frères dont la tête sera ointe de l’huile d’onction » (21, 10)
Peut-il y avoir plusieurs cohanim guedolim dans une génération ?
Il est écrit : « Le cohen plus grand que ses frères ». Il n’y a qu’un cohen gadol dans la génération, et non deux.
S’il en est ainsi, pourquoi est-il dit : « Il mourut en ce jour-là quatre-vingt cinq hommes portant le ephod de tissu ? » (I Chemouël 22, 18) ? Il ne portaient que ce qu’ils avaient le droit de porter.
(Midrach HaGadol)
Orné de beauté
« Le cohen plus grand que ses frères dont la tête sera ointe de l’huile d’onction » (21,10)
Quand devient-il grand ? Quand sa tête est ointe de l’huile d’onction. Au moment de l’onction, on plaçait les cohanim de côté, on mettait l’huile d’onction au milieu, et elle coulait d’elle-même pour aller se verser sur la tête du cohen gadol, ainsi qu’il est dit : « C’est pourquoi D. t’a oint d’une huile de joie sur tes frères » (Téhilim 45, 8), car comme l’huile d’onction coulait vers lui, s’il était petit, il devenait grand, et s’il était noir, il devenait blanc. Pourquoi « que ses frères » ? Il était plus beau et plus remarquable que ses frères, ainsi qu’il est écrit : « le cohen plus grand que ses frères ».
(Midrach Yilamdeinou)
Un coeur brisé
« Une bête aveugle, estropiée ou mutilée, affectée de verrues, de gale sèche ou humide, vous ne les offrirez point à Hachem » (22, 22)
Rabbi Abba bar Youdan a dit : Tout ce que Hachem a rendu impropre chez la bête, il l’a rendu admissible chez l’homme. Chez la bête, il a rendu impropre ce qui est « aveugle ou brisé », mais un cœur brisé et humble est recevable à Ses yeux.
Rabbi Alexandri a dit : Si quelqu’un d’ordinaire utilise des ustensiles brisés, c’est une honte pour lui, mais le Saint, béni soit-Il utilise des ustensiles brisés, ainsi qu’il est dit : « Hachem est proche de ceux qui ont le cœur brisé » (Téhilim 34, 19), « Qui guérit les cœurs brisés » (ibid. 147, 3), « Mais Il est aussi dans les cœurs contrits et humbles » (Yéchayah 57, 15).
(Vayikra Rabba)
Le sacrifice provient des bêtes pourchassées
« Un taureau ou un mouton » (22, 27)
« D. recherche celui qui est poursuivi » (Kohélet 3, 15). Rabbi Youda fils de Rabbi Simon dit au nom de Rabbi Yossi bar Nehouraï : « Ici aussi, le taureau est poursuivi par le lion, le mouton par le loup et la chèvre par le tigre.
Le Saint, béni soit-Il a dit : N’amenez pas devant Moi un sacrifice de bêtes de proie mais plutôt de leurs victimes.
(Pessikta de Rav Kahana)
Les septièmes sont chers
« Parle aux bnei Israël et dis-leur au septième mois »
Tous les septièmes sont toujours chers. D’où le savons-nous ? Il y a sept ciels, sept jours de la semaine, et le septième mois est cher, ainsi qu’il est écrit : « au septième mois le premier du mois ».
(Vayikra Raba)
LA PRIERE
Rabbi Chlomo Wolbe trace pour nous dans son merveilleux livre « Alé Chour » les grandes lignes de ce que doit être la prière qui monte des « bouches de Ton peuple Israël » :
Chaque mot de la prière doit être prononcé « de manière posée et avec supplications ».
Même un érudit qui ne s’occupe que de Torah ne prendra pas prétexte de cela pour prier avec précipitation. De même, celui qui prie dans une synagogue avec des personnes qui ont une activité professionnelle ne se pressera pas dans sa prière dans le seul but d’arriver à la partie silencieuse (‘amida) en même temps que les autres fidèles. Il commencera alors sa prière avant le début de la prière collective, et prendra ses dispositions afin de pouvoir prier sans rien omettre et arriver à prononcer la bénédiction « gaal Israël » avec l’assemblée.
Il sera alors probablement indispensable de se lever tôt et pour cela de se coucher tôt. La préparation à la prière du matin commence donc la veille : en ne retardant pas l’heure du coucher ! Voici les conduites à adopter pour effectuer une prière dans la sérénité : se coucher à une heure raisonnable, se lever tôt afin de pouvoir prier posément, méditer une minute au moins avant la prière, outre les autres préparations au moment du lever.
La flamme sainte
On raconte à ce sujet que Rabbi Aharon Cohen, l’un des directeurs de la yéchivat ‘Hevron, se montrait fort comme un lion pour servir son Créateur alors même qu’il souffrait terriblement de sa maladie, qu’il était assailli de douleurs et très affaibli. Pour la plupart d’entre nous, se lever à une heure convenable représente déjà un effort, mais pour lui il s’agissait de surmonter l’ange de la maladie qui le retenait au lit par des chaînes de fer.
Rabbi Aharon Hacohen s’arrachait de son lit et devenait tout entier une flamme sainte qui priait devant le Maître des cieux et de la terre et s’embrasait avec émotion devant Lui.
Ceux qui l’observaient comprenaient alors qu’il s’agissait d’un ange de D. auprès de qui ils allaient puiser Torah et sagesse. « C’est la conscience que j’ai de me tenir devant le Créateur qui me donne le courage de surmonter ma faiblesse », a-t-il une fois expliqué à quelqu’un qui s’étonnait de son énergie depuis l’heure qui précédait la prière jusqu’au moment où il étendait ses mains vers le Créateur en signe de supplication.
Fondre comme de la cire
Une description extraordinaire de la prière de Rav Yéhouda Tsadka, Roch Yéchiva de « Porat Yossef », est donnée dans sa biographie.
Chaque jour, lorsqu’il se préparait pour aller à la prière, il fredonnait le verset « Prépare-toi à aller à la rencontre de ton D., Israël ». Durant la prière elle-même, il tenait le sidour entre les mains et ne levait pas les yeux du texte. On distinguait sur son front et sur les traits de son visage une tension puissante.
On sentait en le voyant que, comme le dit Rabbeinou Avraham fils du Rambam dans son commentaire de la Torah, « la prière est une situation de rencontre entre le fidèle et son Maître », une adhésion à la présence divine.
Son visage reflétait aussi des marques de joie et de bonheur, comme le préconise le Tanna Rabbi Ayabo (Midrach Cho’har Tov) : « Quand tu te tiens en prière, que ton cœur soit comblé car tu t’adresses à D., Qui n’a pas de semblable. » Les mots qu’il prononçait étaient aussi mélodieux que le chant du rossignol. Il était une harpe au service des chants du roi David quand il entonnait les Pessoukei DeZimra. Lorsqu’il lisait le Chema, son visage était empreint d’une lumière suprême.
Pendant la répétition de la ‘amida, il avait coutume de rester debout, les yeux et le cœur centrés sur son sidour ouvert, et d’écouter avec crainte et ferveur la prière de l’officiant, mot après mot. Il n’a jamais renoncé à son habitude de rester debout pendant la répétition, à l’image des « anges qui se tiennent debout », et ce même dans ses vieux jours alors qu’il devenait plus faible, et même lors des jours redoutables lorsque la prière était longue.
Lorsqu’il lisait d’une voix émouvante et en se prosternant « Notre père, notre roi, Tu es notre père », et qu’il accentuait particulièrement le mot « notre père », tout son corps s’exaltait, s’embrasait comme une flambeau. On voyait qu’il vivait et percevait vraiment de tout son être que : « Vous êtes les fils de Hachem votre D. », « nous sommes Tes fils et Tu es notre père ».
Son aspect animé durant la prière évoquait l’image du véritable fidèle, qui se tourne directement vers D., comme le décrit le Rambam avec sa langue d’or (dans Pirkei Hatsla’ha) : « Le fidèle se tient debout, se réjouit dans son cœur et se délecte de ses paroles, ses mains sont déployées, sa bouche articule chaque mot, ses autres membres tremblent et sont saisis de frissons, et il ne cesse d’émettre des sonorités agréables ; il s’attache (à D.), se prépare, implore, s’incline et se prosterne. Il pleure. Parce qu’il se trouve face au Roi grand et redoutable. »
En lisant ces paroles du Rambam, l’image pure de Rabbeinou Yéhouda debout en train de prier nous apparaît naturellement. Un personnage humble et plein d’abnégation, épanchant son cœur de tout son être et récitant des supplications, empli de nostalgie et de repentir.
« Je me souviens des jours d’antan, a raconté l’un de ses proches, lorsque dans la synagogue qui porte le nom de son père, ‘Chaoul Tsadka’, notre Rav se tenait devant la table de l’officiant et qu’il arrivait à la répétition de cha’harit de Yom Kippour. Quand il commençait à dire le ‘vidouy’ de Rav Nissim Gaon, sa voix s’étranglait à cause de ses sanglots contenus et on ne parvenait presque plus à l’entendre. A ce moment, le cœur de tous les fidèles fondait comme de la cire alors qu’ils se trouvaient face à un séfer Torah vivant, pleurant et se confessant avec des torrents de larmes. Si lui était si inquiet et dans une telle détresse, que dirons-nous, pauvres de nous… »
Je suis prière
Acquérir un goût pour la prière
La prière ne s’acquiert ni par des mouvements ni par des grimaces, mais le processus de prière commence par : « Sentez et voyez que Hachem est bon » (Téhilim 34, 9).
Nous sommes tous obligés de donner un sens à la prière afin que celle-ci soit correcte et juste. Mais pour y parvenir, il faut avant tout renforcer en nous les fondements de la foi et de la confiance en la providence divine.
Concrètement, cela revient tout d’abord à saisir le sens des mots, et que nos oreilles entendent ce que notre bouche exprime, sinon ce n’est tout simplement pas une prière ! Au sujet d’une personne qui prie ainsi, il est dit : « Des lèvres on parle amicalement à son prochain, mais dans l’intérieur du cœur on lui tend un piège » (Yirmiyah 9, 7). En effet, nous prononçons des louanges à D. alors que notre cœur est encombré de pensées étrangères et même de reniement. Pour accéder à une prière réellement sincère, il faut se fatiguer et faire des efforts. Ce sera le seul moyen d’apprendre à prier.
[Or Ye’hezkel]