NASSO 4 JUIN 2011 2 SIVAN 5771 |
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L’ORGUEIL, L’ETUDE DE LA TORAH ET LA MORALE
(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
Le Zohar rapporte que la paracha de Nasso est la plus longue de la Torah. Elle compte cent-soixante seize versets, plus que toute autre. Comment cela se fait-il ?
Les commentateurs en ont donné une explication. Elle tombe toujours aux alentours de Chavouot, et généralement après. On vient donc nous enseigner qu’après le don de la Torah, il ne faut pas se suffire de cet événement, mais on doit s’engager à étudier davantage.
C’est comparable à un homme qui devient médecin. Que fait il par la suite ? Il ouvre un cabinet médical. Après avoir reçu son diplôme, l’avocat aussi ouvre son cabinet. C’est le même principe pour la Torah : Après l’avoir reçue à Chavouot, chacun a le devoir de s’investir dans l’étude.
C’est la raison pour laquelle cette paracha est la plus longue : cela nous enseigne que ce n’est pas en choisissant la facilité et en écourtant son étude que l’on s’investit réellement dans la Torah. Il faut au contraire prolonger cette étude et ne pas regarder sans cesse sa montre dans l’espoir de voir ce moment se terminer enfin ! Nous apprenons cette leçon de la longueur de cette paracha.
Pourtant, nos Sages ont énoncé qu’il faut enseigner la Torah à ses élèves de façon concise ! En fait, il ne s’agit pas de réduire le contenu de la Torah, mais de trouver une méthode simple et brève pour que ses enseignements puissent être assimilés plus facilement.
La paracha s’appelle Nasso, racine qui désigne l’élévation. En effet, l’objectif de la Torah est d’enseigner à l’homme la façon de s’élever. Nos Sages ont dit : « [La Torah] le grandit et l’élève... ». Nous savons malheureusement que lorsque Hitler (que son nom soit effacé), a décidé d’anéantir les juifs, il a envoyé à ses généraux une lettre bien connue (qui a été vue par d’autres), où il explique pourquoi il cherche à exterminer le peuple juif. En voici un extrait :
« Le peuple juif intègre en lui une morale. Dans ce cas, les juifs ont une autre raison d’être dans le monde, et ils sont par conséquent une embuche pour nous, c’est pourquoi il faut les exterminer .» C’est tristement l’une des causes de ce qu’a fait Hitler, mais grâce à D. il n’a pas atteint son but, car la morale est restée ancrée en nous. Nous étions là et nous le resterons, qu’il le veuille ou non.
C’est pourquoi veut nous voir l’étudier et accomplir les mitsvot, pour nous permettre de progresser et de nous élever. Il y a néanmoins un autre point à comprendre concernant la morale : Lorsqu’un juif qui porte une kippa sur la tête crache ou crie dans la rue, la première réaction des gens qui le regardent sera : Regardez un peu ce juif..., alors qu’un comportement semblable chez un non-juif ne serait ni relevé ni même remarqué.
Lorsque quelqu’un fume pendant Chabbat ou ne mange pas cacher, D. peut lui pardonner. En revanche, s’il provoque une profanation du Nom divin, en dérangeant ses voisins par exemple, le pardon n’est pas possible, car son attitude est dépourvue de morale. Comme lorsqu’on voit un jeune dans la rue qui se comporte mal, on lui demande tout de suite qui est son père, qui est son maître, où il a grandi et où il étudie. Il en va de même pour les juifs : tout le monde sait que nous sommes les enfants de D., donc on dira immédiatement : regardez comment ce juif se conduit !
Cette morale, nous l’apprenons de la parachat Nasso. Nasso est un mot qui désigne l’élévation. Il ne s’agit évidement pas de se placer au-dessus des autres en prétendant être supérieur, mais de grandir soi-même en étant un être moral, en ayant une bonne conduite, et en travaillant sur soi pour progresser dans le service divin, comme nous avons déjà dit : « Elle le grandit et l’élève... »
On pourrait ajouter que c’est aussi le lien entre les parachiot Nasso et Béha’alotkha. Au début de la première, il est dit (Bemidbar 4; 22) : « Elève la tête des fils de Guerchon... » Pourquoi n’est-il pas dit : Elève la famille de Guerchon, plutôt que sa tête ? C’est pour nous apprendre que si nous voulons élever la tête, où réside le cerveau, il faut bannir de ce dernier le penchant au mal et toutes les passions qui le perturbent dans le service divin. Voilà comment on s’élève dans la spiritualité, par le biais de la morale. Donc le verset signifie que si l’on désire élever sa tête, il faut chasser (« garech ») ce qu’on appelle les « fils », c’est-à-dire ce qui est secondaire et superflu.
Si on veut donc déloger le penchant au mal qui siège dans le cerveau, on doit s’élever dans le service divin par l’étude de la morale, c’est l’unique moyen de lutter contre lui.
Et c’est bien ce que la parachat Béha’alotkha vient nous indiquer. En effet, l’allumage des lumières de la ménora fait allusion à « la mitsva (qui) est une lampe et la Torah (qui) est la lumière» (Michlei 6, 23). Cette paracha parle de l’allumage de la ménora avec de l’huile d’olive, or la lampe est l’âme, comme il est dit : « la lampe de D est l’âme de l’homme » (ibid. 20, 27). Car c’est seulement en étudiant la morale et la Torah que le corps se sanctifie, et que l’âme se satisfait d’habiter un corps d’une telle sainteté.
Plus encore. Dans la parachat Nasso, la Torah parle à quiconque souhaite s’élever dans l’étude et désire atteindre de hauts niveaux, quiconque est assoiffé d’étude. Pour cela, il faut avoir l’ambition de grimper de plus en plus, car l’élévation dans le service divin n’a pas de limites. C’est pourquoi la Torah demande d’élever la tête, car la principale ambition doit commencer par la tête, à savoir, que si on élève la tête avec de grandes ambitions, c’est alors qu’on arrivera à « allumer les lumières » et qu’on grandira de plus en plus.
En méditant, on réalise que cet aboutissement est ce qui fait la différence entre l’être humain et l’animal. Ce dernier n’a aucun but dans la vie. On n’a jamais vu un animal composter un billet de train, ou se promener une valise à la main. Et même si on l’apprivoisait, il resterait une bête, puisque toutes ses volontés sont bestiales, c’est à dire manger, boire et ensuite se faire égorger.
Mais l’homme a de plus grandes aspirations dans la vie. Il a la capacité d’améliorer ses caractéristiques naturelles, et il peut tout autant transformer sa nature humaine en sauvagerie. C’est pourquoi la Torah apprend à chaque individu à être un homme digne de ce nom, à préserver une morale, et à ne pas se conduire comme un être primitif. Ainsi, elle vient aider l’homme à s’élever, à se hisser très haut.
Mais il ne faut pas oublier de ne pas s’enorgueillir vis-à-vis d’autrui, car la Torah ne peut s’acquérir que par la modestie (Pirkei Avot 6, 6), (Ta’anit 7a). Son objectif principal est d’apprendre à l’homme à se conduire avec humilité, à parler doucement, à être discret. C’est la raison pour laquelle elle l’aide doublement, à s’élever en brisant ses tendances négatives, mais tout en restant humain, moral et modeste.
HISTOIRE VECUE
POURQUOI LES SUPPLICATIONS DU « NETIVOT HAMICHPAT » N’ONT-ELLES PAS ETE ACCEPTEES ?
« Il fera boire à la femme les eaux amères » (Bemidbar 5, 24)
Le « Maguid de Jérusalem », Rabbi Chalom Schwadron zatsal, a raconté cette histoire telle qu’il l’a entendue du machguia’h Rabbi Eliahou Lopian zatsal :
Le Rav de la ville d’Alisca, qui était un grand tsadik, m’a raconté que dans sa jeunesse, il avait feuilleté les archives de la communauté de Lissa, où Rabbi Ya'akov, l’auteur de « Netivot HaMichpat », avait été Rav, et y avait découvert une histoire terrible qui était arrivée à la fille du gaon. Elle était veuve. Cela se passait juste avant le mariage de sa fille, la petite-fille du Netivot HaMichpat, et les deux femmes étaient montées dans une voiture pour se rendre à la ville voisine acheter des vêtements et autres objets pour la fiancée orpheline de père.
Le cocher non-juif, qui savait pourquoi la veuve et sa fille faisaient ce voyage, comprit immédiatement qu’elles devaient avoir sur elles une belle somme d’argent. Il modifia donc le trajet, et au lieu d’aller à la ville la plus proche, il les emmena chez lui dans une banlieue de la ville de Lissa. Là, il appela en hâte ses amis, et ensemble ils dévalisèrent la veuve et sa fille de tout l’argent qu’elles avaient sur elles.
Mais les brigands craignaient qu’elles n’aillent à la police déposer une plainte pour vol avec préméditation. Ils les ligotèrent, allumèrent le poêle et sortirent ramasser du bois pour attiser le feu, dans l’intention de les y jeter, de les tuer et de brûler leur corps pour les faire disparaître. De cette façon, ils pensaient qu’il ne resterait plus aucune trace ni aucune possibilité de les assigner en justice.
Ils passèrent à l’acte. La veuve et sa fille étaient allongées par terre, ligotées, et elles pleuraient leur destin amer, priant et espérant le salut. Les Sages ne nous ont-ils pas enseigné que « même si une épée tranchante est posée sur le cou de quelqu’un, il ne doit pas désespérer de la miséricorde divine » ?
Entre temps, les brigands avaient allumé le feu, et en attendant qu’il flambe comme il faut, ils s’étaient assis autour de la table pour discuter de la façon dont ils allaient partager l’argent entre eux, qui allait recevoir peu et qui beaucoup.
Le cocher arguait avec feu qu’il lui revenait deux fois plus qu’à tous les autres, parce que c’était lui qui avait pris l’initiative de toute l’histoire, et que s’il ne leur avait pas raconté ses projets, il n’en serait rien sorti. Et eux estimaient qu’il fallait partager à parts égales entre toute la bande, il n’était pas possible que l’un reçoive plus que les autres. Le partage du butin devait être à part égale entre tous les participants, sans exception aucune.
Ainsi le temps passait en discussions d’un haut niveau moral, le ton montait, et on entendait parfaitement des cris de l’extérieur de la maison. Tout à coup, la porte s’ouvrit tout grand, et sur le seuil on vit apparaître un officier allemand, qui passait « par hasard » à l’extérieur de la maison, avait entendu les discussions et les cris et avait voulu s’intéresser à ce qui se passait au juste à l’intérieur.
Les brigands restèrent muets. Ils se levèrent sans demander leur reste et s’enfuirent de la maison à toutes jambes, en laissant le paquet d’argent sur la table.
Quand l’officier vit que tout le monde s’était enfui, il comprit qu’il se passait quelque chose de grave, de plus sérieux qu’une simple discussion. Il rentra à l’intérieur, regarda de tous les côtés, et tout à coup il fut stupéfait de voir sur le sol deux femmes ligotées qui pleuraient leur destin amer.
L’officier s’approcha d’elles et leur demanda ce qui se passait : qui les avait attachées et pourquoi étaient-elles attachées là, par terre. Une fois que la veuve et sa fille lui eurent tout raconté, il prit un couteau, coupa leurs liens, leur rendit l’argent qui était posé sur la table et les libéra.
L’interdiction de s’isoler avec un homme
Cette nuit-là, l’auteur de « Netivot » apparut en rêve à sa fille, la veuve, et lui dit :
« Sache que lorsqu’on m’a annoncé le malheur qui avait fondu sur vous, je suis monté en un lieu élevé où j’ai demandé en suppliant la miséricorde divine. Mais on ne m’a pas exaucé ! Pourquoi ne m’a-t-on pas exaucé ? Parce que vous aviez transgressé l’interdiction de vous isoler avec un non-juif quand vous avez voyagé avec lui dans cette voiture !
Je suis monté en un lieu plus élevé, j’ai imploré pour ma fille et ma petite-fille, et j’ai demandé que joue en leur faveur le mérite de la Torah que j’ai enseignée en écrivant « Netivot HaMichpat ». A ce moment-là, mes supplications ont été acceptées en haut, et en fin de compte vous avez échappé à la mort.
Désormais, veillez à observer la grave interdiction de vous isoler avec un homme ! »
Cette histoire a été racontée par la fille, qui l’avait vécue, aux dirigeants de la communauté de Lissa, et ils l’ont écrite sous sa dictée dans les registres de la communauté, en souvenir perpétuel. C’est la fin de l’histoire racontée par Rabbi Eliahou Lopian.
GARDE TA LANGUE
Dire trop de bien d’autrui
Dire trop de bien d’autrui est interdit, même si ce n’est pas devant son ennemi, car on prend l’habitude de finir par dire : à l’exception de tel défaut qu’il a. Ou alors les auditeurs répondent : pourquoi est-ce que tu en dis tant de bien, alors qu’il a tel ou tel défaut ?
(‘Hafets ‘Haïm)
A LA LUMIERE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
La tête s’élève par l’étude de la Torah
Nos Maîtres ont institué la lecture de la parachat Nasso pour le Chabbat qui suit immédiatement la fête de Chavouot. En effet, en ce jour du don de la Torah, tout un chacun intensifie son étude et améliore sa façon d’accomplir les mitsvot. Mais dès le lendemain, chacun reprend le travail et s’éloigne des bonnes dispositions de ce jour. Même si nous nous engageons tous à corriger notre comportement et à augmenter notre temps d’étude durant toute l’année, nos préoccupations journalières nous font oublier à notre insu ces bonnes résolutions et nous ne parvenons pas à les honorer. Parfois même, nous désespérons et déclarons : « Je suis incapable de respecter tous mes engagements ! » Aussi, nos Sages ont institué la lecture de cette paracha immédiatement après la fête, car elle commence par les mots « nasso et roch (il faut faire le relevé, littéralement « élever la tête ». Le terme « nasso » désigne l’élévation, comme pour nous signifier que bien que nous soyons obligés de faire vivre notre famille et que tenir tous nos engagements pris pendant Chavouot nous paraît difficile, voire impossible, nous ne devons en aucun cas nous décourager ni désespérer. Nous devons absolument fermer la porte au mauvais penchant et l’empêcher d’argumenter : « Puisque tu ne peux pas accomplir toutes tes résolutions, n’accomplis même pas le peu que tu pourrais faire ! » Il faudra l’extirper de notre cœur et réaliser ne serait-ce que quelques petits actes, en tout cas tout ce qui est en notre pouvoir.
C’est ce que la Torah veut nous signifier par « nasso et roch » : même si nous ne réussissons pas à mettre en pratique toutes nos décisions, nous ne devons pas en être affligés, nous ne devons pas laisser le mauvais penchant nous décourager ! Au contraire, nous devons nous élever et agir aussi bien que possible ! Seulement, comment y parvenir ? En se fixant des moments pour l’étude de la Torah, ce qui nous permettra de nous débarrasser de ce mauvais conseiller, comme nos Sages ont dit (Kidouchin 30b) :« J’ai créé le mauvais penchant et je lui ai créé la Torah comme antidote. »
C’est pourquoi il est écrit : « Faites aussi le relevé des enfants de Guerchon », ne lisons pas « Guerchon » mais « guirouchin » qui signifie « divorce ». La Torah répudie le yetser hara : dès qu’une personne étudie la Torah, le mauvais penchant s’éloigne d’elle, comme ont dit nos Sages : « Les esprits malfaisants se détachent de quiconque s’imprègne de Torah. »
Nous savons que tout homme a le devoir de s’occuper de la subsistance de sa famille et ne peut pas nécessairement étudier la Torah toute la journée ; alors souvenons-nous de l’histoire suivante rapportée par nos maîtres (‘Haguiga 5b) : Rav Idi, père de Rabbi Ya’akov, allait à pied de chez lui jusqu’à la maison d’étude. Or le chemin était long et il n’atteignait la maison d’étude de Rabbi Yohanan qu’après trois mois de route. Rabbi Yohanan lui a alors dit : « Quiconque étudie la Torah ne serait-ce qu’un jour par an, est considéré comme s’il l’avait étudiée toute l’année. »
Ainsi, si une personne ne peut pas s’investir dans l’étude de la Torah à temps plein, elle devra s’efforcer de le faire au moins durant quelques heures, le matin ou le soir. Alors, elle pourra tenir ses engagements pris à Chavouot et elle s’élèvera, comme il est dit « nasso et roch » : par l’étude de la Torah, la tête s’élève.
Cependant, si l’on ne se plonge pas dans la Torah immédiatement après Chavouot et que l’on ne respecte pas aussitôt nos engagements pris lors de cette fête, la Torah ne se maintiendra pas en nous et cela, même si nous nous appliquons à l’étudier un peu plus tard. Notre étude n’étant pas intervenue juste après le don de la Torah, nous l’oublierons ! Ainsi nos Sages expliquent (Sifri Devarim 48) : si l’on entend une parole de Torah et que, de suite, on la met en application, cette parole et celles que l’on apprendra par la suite se maintiendront en nous. Cependant si l’on oublie les premières paroles entendues, on n’intègrera pas les suivantes non plus. A ce sujet il est écrit dans Meguilat ‘Hassidim « Si tu m’abandonnes pour un jour, je t’abandonnerai deux jours » (Yerouchalmi Berakhot 9, 5).
A LA SOURCE
Mon nom parmi eux
« Moché et Aaron, et les princes de l’assemblée, firent le recensement des Kehatites » (4, 34)
Pourquoi au sujet du dénombrement des Kehatites le verset utilise-t-il le terme « Kehatim » et non « fils de Kehat » comme c’est le cas pour les « fils de Guerchon » ou les « fils de Merari » ?
Les Kehatim étaient recensés en vue de porter l’Arche sainte. Hachem a donc associé Son nom à eux afin qu’ils ne soient pas détruits : il a ajouté un « hé » au début et un « youd » à la fin, ce qui forme Son nom « Youd ké », pour signifier que D. les protègerait de la mort. En effet, il est dit « afin de sauver leur âme du trépas » (Psaumes 33, 19).
[Bamidbar Rabba]
La faute engendre des conséquences
« Que l’on renvoie du camp tout individu lépreux ou atteint de flux » (5, 2)
Rabbi Chimon bar Yo’haï enseigne : au moment où les bnei Israël se tenaient au pied du mont Sinaï et ont affirmé : « Tout ce qu’a dit Hachem, nous le ferons et nous le comprendrons », il n’y avait parmi eux ni individu atteint de flux, ni lépreux, ni aveugle ni paralytique, ni muet, ni sourd ni fou. D’ailleurs, au sujet de cet instant-là il est dit : « Tu es toute belle, mon amie, et tu es sans défaut » (Chir Hachirim 4, 7). Mais quelques jours seulement après qu’ils aient commis la faute du Veau d’or se sont trouvés parmi eux des individus lépreux et d’autres atteints de flux.
A propos de ce moment, D. dit : « Que l’on renvoie du camp tout individu lépreux ou atteint de flux. »
[Vayikra Rabba]
Honneur personnel
« Le cohen puisera de l’eau sainte dans un vase d’argile » (5, 17)
Pourquoi un vase d’argile ? Hachem ménage l’honneur des filles d’Israël, même des plus impies d’entre elles. En effet, si l’ustensile avait été en cuivre ou fait d’un métal quelconque, il aurait subsisté après l’évènement et la honte de cette femme aurait perduré à travers lui. Un vase d’argile, en revanche, se brise et l’acte peut donc être oublié.
[Midrach Hagadol]
Le mérite de la bénédiction
« Que Hachem te bénisse et te protège ! Que Hachem fasse rayonner Sa face sur toi et te soit bienveillant ! Que Hachem dirige son regard vers toi et t’accorde la paix ! » (6, 24)
Pourquoi la première phrase de la bénédiction des cohanim est-elle composée de trois mots ?
Pour évoquer les trois patriarches : Avraham, Yits’hak et Ya’akov. Le cohen leur dit : Que D. se souvienne de l’alliance conclue avec les trois (patriarches) !
La seconde bénédiction comprend cinq mots en référence aux cinq livres de la Torah, car c’est par le mérite de nos ancêtres que la Torah a été donnée à Israël, comme il est dit : « Ce puits, des princes l’ont creusé, les plus grands du peuple l’ont ouvert » (Bemidbar 21, 18). Le cohen leur dit : accomplissez ce qui est marqué dans la Torah, qui a été donnée par le mérite des trois patriarches. La troisième bénédiction est composée de sept mots, comme les sept cieux. Le cohen leur dit : Que celui qui a créé les sept cieux vous bénisse.
[Midrach ‘Hassérot Véyitrot]
Une bénédiction complète
« Que Hachem te bénisse » (6, 24)
Par une descendance, comme il est dit : « Voilà comment est béni l’homme qui craint Hachem ! » (Psaumes 128, 4).
Autre explication : « Que D. te bénisse » dans ton commerce. En effet, on trouve dans Job (1, 10) : « Tu as béni l’œuvre de ses mains », qui signifie que quiconque prenait un centime de chez Job était béni.
Autre explication : Que tous soient bénis par toi, comme il est dit au sujet d’Avraham notre père : « Et toutes les nations de la terre seront bénies par ta postérité » (Béréchit 22, 18). Que les gens disent : que Celui qui a béni Avraham te bénisse aussi. De même il est écrit : « Israël t’évoquera dans ses bénédictions, et dira : que D. te fasse devenir comme Ephraïm et Ménaché ! » (ibid. 48, 20).
Autre explication : « Que D. te bénisse » en te donnant une longue vie, comme il est dit « Or Avraham était vieux, avancé en jours; et Hachem avait béni Avraham en tout » (Béréchit 24, 1).
Autre explication : « Que D. te bénisse » en te donnant des disciples, comme il est dit « Si tu daignes me bénir, accroître mon territoire (multiplier mes frontières), cela fait désigne les élèves » (Divrei Hayamim1, 4, 10).
[Léka’h Tov]
Bénédiction et protection
« Que Hachem te bénisse et te protège ! » (6, 24)
« Qu’Il te bénisse » par l’argent : que tu ne vives pas dans un pays où l’impôt est dû par tête ni dans un pays qui aurait une amende et te demanderait de donner ton or. Au contraire : « Que D. te bénisse et te protège. »
Autre explication : « Qu’Il te bénisse » par des fils, et « Qu’Il te protège » par des filles. En effet, les filles ont besoin de protection, ainsi qu’il est dit : « C’est Hachem qui te garde, Hachem qui est ton ombre » (Psaumes 121, 5).
[Midrach Tan’houma]
LA PRIERE
Pour les prières, notre maître le Maharil Diskin avait l’habitude de s’installer dans sa propre pièce, qui communiquait avec la salle principale où priait l’assemblée des fidèles dont il était l’officiant. Il faisait la prière d’une voix agréable et avec un frémissement, tel un serviteur qui présente une requête à son roi, tel un fils qui reconnaît ses fautes face à son père.
Une fois, son disciple le gaon Rabbi Tsvi Mikhal Shapira a accompli une mission pour lui. En guise de remerciement et de récompense, le Rav lui a dévoilé la raison de son isolement lors des offices. Rabbi Tsvi Mikhal, qui était digne de confiance, a bien sûr gardé le secret, mais il a tout de même raconté que le Rav le lui avait révélé, et que la raison qu’il lui avait confiée ne venait pas du tout à l’esprit naturellement !
Un jour, Rabbi Tsvi Mikhal a regardé par la porte ouverte, et le spectacle qui s’est offert à lui l’a profondément ébranlé. C’était alors la fin de la prière de arvit de Chabbat. Il est rentré chez lui ému et bouleversé. Avant de réciter « Chalom Aleikhem », il a déclaré : « Nous nous apprêtons à accueillir les anges du service, les anges d’en-haut, or je reviens à l’instant de chez un ange qui réside parmi nous. Je l’ai observé pendant la bénédiction ‘Maguen Avot’ et j’ai remarqué qu’en récitant le paragraphe ‘Nous Le servirons avec crainte et peur (Léfanav na’avod béyira vafa’had)’, son visage est devenu brûlant comme un flambeau, et que la veine de son front a gonflé de l’épaisseur d’un doigt ! J’ai été saisi de frissons : éprouver une telle peur du Créateur, une crainte du Ciel si concrète ! Je suis persuadé que quiconque le verrait à ce moment précis acquerrait la crainte révérencielle du Ciel et du Créateur ! »
En entendant cela, son jeune fils Ben Tsion a décidé de mériter ce don de crainte de Hachem. Dès lors, il se tenait chaque Chabbat face à la porte qui s’ouvrait sur la pièce du Rav et admirait son saint visage qui rougissait comme un brasier alors qu’il prononçait en tremblant « Nous Le servirons avec crainte et peur (Léfanav na’avod béyira vafa’had) ! » Ce bref instant de contemplation l’a influencé dans toutes ses voies et on entendait souvent, pendant les jours de semaine, ce petit garçon âgé de cinq ans murmurer avec crainte et frémissement « Léfanav – na’avod – béyira – vafa’had… » Les participants à l’office du Rav s’étaient habitués à ce cérémonial, et après la récitation de « Vayikhoulou », ils faisaient place à l’enfant qui était alors poussé vers la chambre du Rav et pouvait admirer l’expression de son visage saint. Un des fidèles a une fois questionné Rabbi Tsvi Mikhal, le père de cet enfant : « Vous ne craignez pas que se réalisent les dires de la Guemara (‘Haguigua 16a) selon lesquels quiconque observe un prince affaiblit sa vue, car la présence divine repose sur lui, comme il est dit ‘Tu lui donneras de Ta splendeur’ ? »
Rabbi Tsvi Hirsch l’a regardé posément et lui a répondu sur un ton plein de gravité : « C’est un prix raisonnable pour acquérir la crainte de Hachem… ! »
Ainsi, le Chabbat était devenu différent depuis que Ben Tsion observait le Rav, et les jours de semaine en étaient également transformés. Cet enfant s’était élevé au-dessus de tous les jeunes de son âge et se distinguait par sa crainte pure de D. et sa persévérance dans l’étude. Alors qu’il était âgé de sept ans, son père l’avait envoyé apporter un « Michloa’h Manot » au tsaddik Rabbi Ouri Borenstein, qui se trouvait sur son lit de douleur de l’ultime maladie dont il n’allait pas se remettre. A peine était-il entré dans la maison que le tsaddik a ouvert les yeux et demandé à son fils Rabbi Yécha’yah, qui faisait partie des fidèles de l’office du Maharil : « Qui est cet enfant ? Son visage irradie une pure crainte du Ciel ! »
Un jour, l’enfant a été atteint d’une pneumonie, maladie fréquente et dangereuse à cette époque où les antibiotiques n’existaient pas encore. Le mal allait en s’aggravant et on ne pouvait plus qu’espérer un miracle !
Vendredi soir, au moment précis où le Rav avait l’habitude de réciter la prière « Maguen Avot », l’enfant brûlant de fièvre a été pris de tremblements, tout son corps a été secoué, et, en claquant des dents il a gémi dans un frémissement : « Léfanav – na’avod – béyira – vafa’had ! » Un flot de sueur l’a recouvert et son médecin s’est alors exclamé avec soulagement : « La transpiration est un signe positif pour le malade (Berakhot 57b). La phase critique est passée, il va guérir avec l’aide de D… » En effet, le Chabbat suivant, l’enfant était déjà de retour à la synagogue du Rav et contemplait le rayonnement de son visage… »
Les années ont passé, le petit Ben Tsion a grandi et est devenu l’un des plus fidèles disciples du Maharil. Le 29 Tevet 5658, vendredi soir, dernière journée de vie du Rav, celui-ci était allongé sur son lit les yeux fermés, sans connaissance, entouré de ses élèves dévoués. En première position se tenaient ses plus chers disciples, Rabbi Yossef ‘Haïm Zonnenfeld, Rabbi Ya’acov Borenstein, Rabbi Moché Na’houm Wallenstein et Rabbi Tsvi Mikhal Shapira. Derrière eux se trouvaient le reste des élèves.
La chambre était comble et pourtant un silence absolu y régnait, un saint respect redoutable. Soudain, on a senti un mouvement à travers la foule. Rabbi Ben Tsion, âgé de vingt-six ans, se frayait un chemin, ignorant les regards stupéfaits et désapprobateurs qui lui étaient lancés dans un silence tendu. Il s’est faufilé jusqu’au lit de son Rav. Il avait un droit acquis depuis vingt-et-un ans pour observer le visage du maître dans ces instants précis ! Il voulait le faire valoir même à ce moment-là, tout particulièrement, car c’était peut-être (pas un mot, il est si terrible d’y songer)… le dernier Chabbat…
Cette décision semblait insensée, dépourvue de toute logique : le Rav vénéré, ressemblant à un ange, se destine à monter chanter des louanges au Ciel. Il est sans connaissance et les médecins ont abandonné tout espoir de le guérir. Rabbi Ben Tsion a presque atteint le lit du Rav : il ne pouvait tout de même pas déplacer les plus importants disciples, les géants de la Torah ! Il est resté dans la seconde rangée, qui était plus dense, s’est mis sur la pointe des pieds et a observé le visage du Rav qui était d’une pâleur extrême.
Puis soudain, tous les présents ont été pris de frissons ; à l’instant même où notre maître avait l’habitude de prononcer la bénédiction de « Maguen Avot », son visage s’est empourpré comme un flambeau, la veine de son front s’est enflée et est apparue proéminente. Sans aucune parole, sans que l’on n’entende le son de sa voix, ont plané dans la pièce, avec crainte et frissonnement les mots habituels: « Léfanav – na’avod – béyira – vafa’had… » et tous les présents ont été saisis d’un grand tremblement ! (« HaSaraph MiBrisk »)
Je suis prière
Comme si l’on pleurait
Nos Maîtres ont dit : toutes les portes du ciel ont été fermées, sauf celles des larmes. C’est pourquoi nous devons nous réveiller et faire en sorte que notre prière soit dite avec des larmes, des aveux, que nous y mentionnions nos fautes et que nous implorions le pardon… tout cela, bien entendu, avec pleurs et supplications.
Même si parfois nous ne versons pas de larmes, notre prière doit être prononcée d’une voix sourde et brisée, sur un ton de pleurs.
C’est à cela que le Roi David fait allusion dans les Psaumes (6, 9) : « Car Hachem entend le bruit de mes sanglots. » Il n’est pas dit qu’Il entend « mes sanglots » mais « le bruit de mes sanglots » : prier avec un ton de pleurs, avec une voix implorante, à l’image d’un pauvre ou d’un nécessiteux qui supplie.
(Chla Massékhet Tamid)