MASSEI 30 JUILLET 2011 28 Tamouz 5771 |
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Personne n’est autorisé à compter sur sa sagesse
(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
« Moché donna aux enfants d’Israël, sur l’ordre de Hachem, les instructions suivantes : ‘La tribu des enfants de Yossef a raison. Voici ce que Hachem a prescrit au sujet des filles de Tselof’had : elles pourront épouser qui bon leur semblera ; toutefois, c’est dans une famille de leur tribu paternelle qu’elles doivent se marier.’ » (Bemidbar 36, 5-6)
De l’épisode des filles de Tselof’had et de la halakha qui en a découlé, nos Sages concluent que nul n’est habilité à se reposer sur sa sagesse. Même quelqu’un qui aurait beaucoup étudié et serait devenu un grand érudit ne doit pas attribuer son savoir à son seul effort. En effet, D. a désapprouvé notre maître Moché lorsque celui-ci a déclaré : « Si une affaire est trop difficile pour vous… » (Devarim 1, 17) et lui a dit : « ‘Te sens-tu capable de juger une situation délicate ? Par ta vie, Je vais te prouver que tu n’es pas apte à le faire ! Je vais te placer face à un cas que le plus petit de tes élèves pourrait résoudre alors que tu en resteras incapable’ » (Sifri Devarim 17). De quoi s’agit-il ? Du jugement des filles de Tselof’had à propos desquelles il est dit « Moché déféra leur cause à Hachem » (Bemidbar 27, 5). Dans le même ordre d’idées, on trouve l’histoire suivante relatée dans I Chemouël (9, 18-19) « Chaoul, abordant Chmouël à la porte de la ville, lui demanda : ‘Enseigne-moi, je te prie, où est la maison du voyant.’ Chmouël répondit à Chaoul : ‘Le voyant, c’est moi.’ » « C’est donc toi le voyant ? » a relevé Hachem, Je vais te montrer que tu ne l’es pas ! » En quelles circonstances le lui a-t-Il fait savoir ? A l’occasion de l’onction du futur roi David. En effet, D. a ordonné à Chemouël (I Chemouël 16, 1) : « Remplis ton cornet d’huile, et va, envoyé par Moi, chez Ychaï le Bethléémite, car c’est un de ses fils que Je Me suis choisi pour roi. » A leur arrivée, le prophète remarqua Eliav et se dit : « L’élu de Hachem est certainement là devant lui » (I Chemouël 16, 6). D. l’a questionné : « N’as-tu pas affirmé être le voyant ? Ne considère pas sa mine ni sa haute taille, celui-là Je le repousse. L’homme ne voit que l’extérieur, tandis que D. scrute le cœur » (I Chemouël 16, 7).
Toujours à ce sujet, on enseigne (dans Bemidbar Rabba 21, 12) que certains tsaddikim se sont enorgueillis d’accomplir parfaitement les mitsvot, et Hachem les a alors fait faillir. Par exemple, David avait déclaré (Téhilim 119, 54) : « Tes préceptes sont devenus pour moi des chants », c’est-à-dire qu’il les considérait légers et habituels comme des chants. D. lui a alors assuré : « Par ta vie, tu verras que tu finiras par te tromper à propos d’une chose que même les enfants connaissent ! » Puis il a effectivement commis une erreur en posant l’Arche sur un char, comme dit le verset (II Chemouël 6, 3) : « On plaça l’Arche du Seigneur sur un chariot neuf. » Or l’Arche se maintenait dans les airs et les bœufs se sont échappés avec la charrette qui se trouvait en-dessous. Ouzza s’est approché pour le retenir, mais « D. le frappa sur place pour cette faute » (II Chemouël 6, 7), car une faute involontaire liée à un manque d’étude est considérée comme une faute volontaire. Alors, « David fut consterné du coup dont Hachem avait frappé Ouzza », mais Hachem répliqua : « Tu as affirmé ‘Tes préceptes sont devenus pour moi des chants’, or n’as-tu pas appris que (Bemidbar 7, 9) : ‘aux enfants de Kehat, il ne leur en donna point [des chariots], car chargés du service des objets sacrés, ils devaient les porter sur l’épaule.’ ? » Le roi David, très troublé, a déclaré : « Hachem notre D. a opéré des brèches parmi nous, qui ne nous étions pas enquis de Lui selon les règles » (I Divrei HaYamim 15, 13). Revenons au sujet initial : D. a laissé Moché faillir afin de l’interpeller sur ce qu’il avait dit : « Si une affaire est trop difficile pour vous, déférez-la moi et j’en prendrai connaissance. » Cela ressemble à un changeur (de monnaie) qui dit à son assistant : « Si on t’apporte des selaïm à monnayer, fais-le, et si ce sont des perles, apporte-les moi. » On lui a confié un chaînon de verres ; il l’a transmis à son maître qui, lui-même, l’a montré à un expert. Ainsi, Moché a dit : « Si une affaire est trop difficile pour vous etc. » Sont venues alors les filles de Tselof’had et il n’a pas été capable de trancher (« Moché déféra leur cause à Hachem. ») Puis il a déclaré : « Les filles de Tselof’had ont raison » : tel est le jugement. D. lui a alors fait remarquer : « Tu avais déclaré ‘Si une affaire est trop difficile pour vous etc.’ ? A présent, le jugement que tu n’as pas su trouver est dévoilé grâce à des femmes. »
La Aggada rapporte également (Béréchit Rabba 61, 1) que le verset « mais qui trouve son plaisir dans la Loi de Hachem et médite cette loi jour et nuit » (Téhilim 1, 2) s’applique à Avraham, au sujet de qui D. déclare (Béréchit 18, 19) : « Si Je l’ai distingué, c’est pour qu’il prescrive… » Rabbi Chim’on s’interroge sur le sens de la fin de ce verset « et médite cette loi jour et nuit » : Comment Avraham, qui n’avait ni père ni maître pour lui enseigner, a-t-il pu étudier toute la Torah ? Hachem a fait de ses deux reins des guides qui faisaient jaillir à son intention la Torah et la sagesse, comme il est dit « Je bénis Hachem, qui a été mon guide : même de nuit, mes reins m’en avertissent » (Téhilim 16, 7).
Par ailleurs, nous savons aussi (Pirkei DeRabbi Eliezer 7) qu’Avraham allait étudier la Torah chez Chem, le fils de Noa’h. Puisque D. lui avait accordé deux reins pour lui enseigner la Torah, pourquoi est-il allé apprendre auprès de Chem ? C’est qu’il craignait de devenir prétentieux et d’en arriver à penser : « Toute ma connaissance ne provient ni d’un Rav ni d’un père, mais j’ai tout acquis par moi même. » Il est donc allé étudier chez un maître afin de prévenir tout sentiment d’orgueil. Aucun disciple ne peut affirmer devant son Rav : « J’ai tout appris par moi-même ! » La présence même du Rav le dément. Telle était la réflexion d’Avraham : « Jusqu’à présent, j’aurais pu supposer avoir tout appris par moi-même. Désormais, puisqu’un Rav m’a enseigné, je peux affirmer que je ne comprends rien tout seul et que tout ce que je sais provient d’un maître. »
Aleph ! Pourquoi n’interviens-tu pas ?
Toujours au même sujet, nous constatons que la lettre ‘aleph’, par laquelle Hachem a introduit les Dix Commandements, ne l’a mérité que parce qu’elle ne s’est pas considérée comme particulièrement sage, elle s’est soumise devant D. et n’a pas cherché la grandeur, comme le rapporte « Otiyot Derabbi Akiva » : « Lorsque le aleph a constaté que D. créait le monde par la lettre ‘beit’, il s’est tenu de côté et s’est tu jusqu’à que Hachem l’interpelle : ‘Aleph, Aleph ! Pourquoi n’interviens-tu pas ?’ Celui-ci a alors répondu : ‘Maître du monde, je ne peux me permettre de me tenir devant Toi et de parler.’ ‘Pourquoi donc ?’ a demandé Hachem. ‘Car les valeurs (numériques) de toutes les autres lettres sont supérieures à la mienne : le beit vaut deux, le guimel vaut trois, le dalet vaut quatre, le hé vaut cinq alors que moi je vaux seulement un’, a t-il répondu. D. l’a alors rassuré : ‘Aleph, ne crains rien car tu es à la tête de toutes les lettres, tel un roi. Tu es un, Je suis Un, la Torah est une et c’est par toi que Je donnerai la Torah à Israël Mon peuple en héritage sur le mont Sinaï, comme il est dit (Chemot 20, 2) : ‘Je suis (Ano’hi qui commence par la lettre aleph) Hachem, ton D.’ »
En résumé, nul ne peut se reposer sur sa sagesse. Nous devons plutôt compter sur la bonté de D. La Guemara dit d’ailleurs (Berakhot 10b) : « Quiconque évoque ses propres mérites dans sa prière, verra la réalisation de celle-ci dépendre du mérite des autres. Mais quiconque se recommande du mérite des autres verra sa prière exaucée par son propre mérite. » On dit également (Sifri Devarim 26) : « Israël a eu deux bons chefs : Moché et le roi David. Ils pouvaient faire subsister le monde par leurs seules bonnes actions, et malgré cela, ils ont supplié Hachem de les pourvoir gracieusement. » Si eux, qui pouvaient compter sur leurs bonnes actions pour le maintien du monde, ont dû implorer la grâce de D., a fortiori celui qui n’atteint pas la cheville des disciples de leurs disciples doit-il supplier Hachem d’agir envers lui gracieusement…
LA PARABOLE ET SA LEÇON
Un long périple dans le désert dans le but de multiplier miracles et délivrances
« Moché inscrivit leurs départs et leurs stations sur l’ordre de Hachem ; voici donc leurs stations et leurs départs. » (Bemidbar 33, 2)
Pourquoi, après avoir mentionné que Moché a inscrit « leurs départs et leurs stations », le verset répète-t-il « voici donc leurs stations et leurs départs » ? Le Maguid nous livre une belle explication, comme de coutume à l’aide d’une parabole :
Un homme riche avait deux fils. Lorsque l’aîné s’est fiancé, la date du mariage a été fixée et le père a confié l’argent de la dot à un tiers. Le deuxième garçon, voyant son père dépenser de grandes sommes pour le mariage de son frère, lui a demandé : « Pourquoi ne me donnes-tu pas aussi tous ces biens ? Pourquoi ma part serait-elle moins belle que celle de mon frère ? Suis-je inférieur à lui ? »
Son père lui a répondu ainsi : « Ton frère aîné a atteint l’âge de se marier, et l’argent que tu vois représente la dot pour son mariage. Quant à toi, tu es encore jeune et tendre, alors observe ce que je donne à présent à ton frère et note sur ton carnet le montant exact des dépenses. Puis, je signerai ton relevé et je te fais la promesse que tu recevras la même somme lorsque tu te fianceras à ton tour. »
C’est ce qu’a fait le jeune homme : il a compté chaque pièce dépensée et a tout inscrit sur son livret. Puis il s’est beaucoup réjoui en voyant arriver toutes sortes de tissus nobles et chers. Le tailleur est ensuite venu, muni de son mètre à mesurer, mais ne s’est occupé que du fiancé sans même prêter attention à la présence du jeune frère. Ce dernier s’est alors plaint à son père : « Le tailleur a utilisé toutes les étoffes uniquement pour les costumes et les vêtements de mon frère, mais il ne coud rien à mon intention ! »
Le père l’a rassuré en expliquant : « Ton frère va bientôt se marier et il lui faut donc de nouveaux habits. Compte et inscris tous les vêtements confectionnés pour lui afin que je fasse de même pour toi au moment de ton mariage. » Il a donc agi ainsi pendant toute cette période de préparatifs, notant sur son cahier tous les achats, du plus important au plus insignifiant, ainsi que les bijoux qu’on taillait pour la mariée.
Une fois le trousseau prêt, le père du fiancé a réuni tous les habits et les bijoux et les a rangés dans un coffre réservé à cet effet afin de les garder jusqu’au jour du mariage.
Or le lendemain matin, la caisse avait disparu ! Tout le monde était désespéré, d’autant que la date du mariage approchait… Le père s’est alors précipité au magasin pour y acheter d’autres tissus. Il a demandé au tailleur de coudre à nouveau des costumes et des vêtements afin de remplacer ceux qui avaient été volés. Celui-ci s’est remis au travail et le jeune frère est à nouveau venu « l’assister » avec beaucoup de zèle, en notant chaque vêtement et chaque toilette.
Après avoir achevé tous les préparatifs, ils ont célébré le mariage dans la splendeur et la magnificence. Durant les jours qui ont suivi le mariage, le cœur joyeux, les deux frères sont allés se promener à travers vergers et vignobles. Le marié a confié à son frère combien il était reconnaissant à leur père pour son bon cœur : « il a tant dépensé pour moi (vêtements de semaine ainsi que de Chabbat et de fête…), et en double ! En effet, quand le premier trousseau a été achevé, tout a été volé et notre père a dû tout remplacer. Mais ces derniers vêtements aussi ont disparu et on a dû en confectionner une troisième fois », a-t-il raconté.
En entendant ce discours, le jeune s’est exclamé : « Mon cher frère, tu te trompes. » « Pourquoi donc ? Ne savais-tu pas qu’à cause du vol des premières tenues, notre père a été contraint d’en faire faire d’autres ? » s’est-il étonné. Le petit frère a expliqué : « Ce que tu dis n’est pas exact. Comprends plutôt que les premières affaires ont disparu afin que mon père m’en procure davantage. En effet, c’est moi qui ai élaboré tout ce stratagème : j’ai incité des voleurs à s’emparer des vêtements pour obliger mon père à en faire coudre d’autres… dans le but d’augmenter les dépenses à noter dans mon carnet, où j’ai écrit le montant total des frais du mariage ! J’ai agi de la sorte car mon père m’a promis de me gâter autant que toi lorsque viendra mon tour. Ainsi, les second et troisième achats n’étaient pas dus au vol des premiers. Il faut plutôt considérer que les premiers biens ont été volés dans le but d’en faire acheter davantage, de sorte que je puisse bénéficier, le moment venu, d’un trousseau plus important. »
Expliquons cette parabole. Moché a inscrit dans un livre tous les événements qui s’étaient produits sur leur chemin, à l’instar de l’allégorie rapportée par nos Maîtres dans le midrach : « Cela ressemble à un roi dont le fils avait été malade et qu’il avait conduit à un endroit éloigné pour le faire soigner. À leur retour, le père s’est mis à énumérer toutes leurs étapes : ‘Ici nous avons dormi, ici nous nous sommes rafraîchis, ici tu as eu des maux de tête.’ » De la même manière, D. a ordonné à Moché : « répertorie-leur les lieux où ils ont éveillé Mon courroux. »
Ainsi Moché a dressé la liste des étapes d’Israël et de toutes les épreuves qu’ils y ont rencontrées. La phrase « Moché inscrivit leurs départs et leurs stations » signifie que Moché a évoqué les événements liés à ces étapes en précisant ce que les bnei Israël y avaient vécu, de la faim à la soif en passant par les guerres et d’autres épisodes de ce genre. Pour que l’on ne pense pas que ces épreuves avaient été causées par leur présence dans ces lieux, le verset reprend en inversant l’ordre des mots : « Voici donc leurs stations et leurs départs ». D. a guidé leurs pas vers ces stations afin que les bnei Israël soient confrontés à ces difficultés… et qu’Il puisse réaliser à nouveau pour eux de nombreux miracles et préparer ainsi un salut éternel vers la délivrance future, rapidement et de nos jours.
GARDE TA LANGUE
Ne pas négliger de répondre « Amen »
Il faut faire très attention à ne pas se choisir une place à la synagogue ou à la maison d’étude parmi des médisants car, hormis le fait que l’on s’habituera à leurs mauvaises conduites et que l’on se mettra également à calomnier les gens, on négligera à plusieurs reprises de répondre « Amen Yéhé Chémé Rabba », et « Barekhou », d’écouter la lecture de la Torah ainsi que la répétition de la ‘Amida par l’officiant, et encore bien d’autres graves transgressions…
(‘Hafets ‘Haïm)
A LA LUMIERE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
Le beit hamidrach ressemble à une ville de refuge
« Celui qui a tué une personne sans intention s’enfuira là-bas » (Bemidbar 35, 11).
Dans la parachat VaEt’hanan, il est dit : « Il s’enfuira vers l’une de ces villes et il vivra. » C’est difficile à comprendre : le verset semblerait dire que lorsque le meurtrier rentre dans une des villes de refuge il vivra, or il peut tout aussi bien mourir dans une ville de refuge ! Que signifie « il vivra » ? Il aurait mieux valu écrire : « Il s’enfuira dans une de ces villes, et sera immédiatement sauvé de la main du vengeur du sang » ! Mais la Torah a écrit « il vivra » pour nous enseigner que quiconque rentre dans le beit hamidrach, qui ressemble à une ville de refuge, il lui est promis qu’il vivra, et ne mourra pas à cause du mauvais penchant, parce que ce dernier ne rentre pas du tout au beit hamidrach. N’est vivant que le tsaddik, et n’est mort que le méchant, comme l’ont dit les Sages (Berakhot 18b) : « Les méchants sont appelés morts de leur vivant, les justes sont appelés vivants dans leur mort. » Moché lui-même leur a dit : « Ce n’est pas avec nos pères que Hachem a conclu cette alliance, mais avec nous-mêmes qui sommes aujourd’hui tous vivants. » Que signifie « tous vivants » ? Que lorsque vous entrez au beit hamidrach pour étudier la Torah, vous êtes délivrés du mauvais penchant qui cherche à vous tuer. Et vous serez des tsaddikim vivants, et non des méchants morts.
Maintenant, nous comprenons également pourquoi Moché, dans Devarim 4, 41, s’est arrêté au milieu du récit du don de la Torah au Sinaï pour se mettre à parler des villes de refuge. C’est parce qu’il a dit aux bnei Israël : Maintenant que j’ai ouvert les cieux devant vous, et que vous savez clairement qu’il n’y a qu’un seul D., et que c’est Lui Qui vous a donné la Torah et les mitsvot, quand vous vous sanctifierez vous serez délivrés du mauvais penchant. Et si vous me demandez comment vous pourrez vivre à l’écart de ce monde-ci, qui est entièrement fait de matière, voici devant vous les villes de refuge, qui sont une allusion au beit hamidrach, où l’homme rentre pour être sauvé du mauvais penchant, qui n’a pas le droit d’y entrer. Lorsqu’il rentre au beit hamidrach, il se sépare de ce monde-ci, et de même qu’au mont Sinaï le mauvais penchant a été enlevé du cœur des bnei Israël (Chir HaChirim Rabba 1, 15), de même quiconque rentre dans le beit hamidrach pour étudier la Torah, est délivré du yetser hara, puisque ce dernier n’a pas le droit d’y entrer.
A LA SOURCE
« Ils partirent du désert du Sinaï et campèrent à Kivrot HaTa’ava » (33, 16)
Ce verset est interprété moralement dans le livre de Rabbi Avraham Baroukh Mani zatsal, « Baroukh Avraham » :
« Nos Sages ont dit (Kidouchin 30b) : « J’ai créé le mauvais penchant, Je lui ai créé la Torah comme antidote. » Il est impossible de vaincre le désir sans l’étude de la Torah.
C’est ce que dit le verset : « Ils partirent du désert du Sinaï », c’est-à-dire que celui qui s’éloigne de la Torah, qui a été donnée au désert du Sinaï, et délaisse son étude, alors « ils campèrent à Kivrot HaTa’ava [littéralement : les tombes du désir] », de mauvais désirs le dominent.
« Il restera là jusqu’à la mort du cohen gadol qui a été oint de l’huile sainte » (35, 25)
Il y a lieu de demander pourquoi le verset fait dépendre le séjour du meurtrier involontaire dans la ville de refuge de la mort du cohen gadol !
Le Rambam, dans le « Guide des Egarés » (3, 40), l’explique en disant qu’on fait dépendre le retour du meurtrier de la ville de refuge de la mort du cohen gadol, parce qu’elle est susceptible de faire oublier la colère du meurtrier du sang pour le meurtre de son parent, car la nature de l’homme est qu’un nouvel événement important fait oublier quelque chose de plus ancien. Quand meurt le cohen gadol, l’homme le plus aimé des bnei Israël, l’âme blessée sera apaisée de sa grande douleur qui en fait oublier une moins intense, et la douleur de l’ensemble de la communauté est une demi-consolation…
« La communauté sauvera le meurtrier de la main du vengeur du sang » (35, 25)
Il est dit dans le traité Sanhédrin (17a) au nom de Rav Cahana : « Quand tous les membres du Sanhédrin l’estiment coupable, on le libère. »
Il y a vraiment de quoi s’étonner ! Comment peut-on dire que c’est justement parce que le Sanhédrin à l’unanimité est d’un seul avis, selon lequel l’accusé est coupable, qu’il est alors déclaré innocent ? Quelle logique est-ce là ?
Le gaon Rabbi Chelomo Kluger zatsal répond à cette question en disant :
Quand le Saint, béni soit-Il a créé le monde, Il a créé la vérité et le mensonge, et il y a entre eux une guerre absolument constante. Partout où la vérité apparaît, immédiatement le mensonge vient s’opposer à elle.
Par conséquent, si ceux qui estiment l’accusé coupable ou innocent constituent la majorité du Sanhédrin, le verdict suit leur opinion. Car nous supposons que la majorité a exprimé la vérité, et la minorité, qui est d’un avis contraire, n’exprime dans son opinion que le mensonge, qui, comme on l’a dit, est l’adversaire juré de la vérité.
Mais du moment que tout le monde dit à l’unanimité : coupable, et qu’aucun des juges du Sanhédrin ne fait entendre un avis contraire, c’est un signe que le mensonge fait l’unanimité. Car s’ils exprimaient la vérité, le mensonge ne se tairait pas et s’opposerait certainement à la vérité en disant le contraire.
« Elles épouseront qui bon leur semblera » (36, 7)
Un ‘hassid était venu trouver le Admor Rabbi Moché de Kovrin zatsal, pour se plaindre de ce que lui, le père, n’avait pas de satisfaction de sa famille.
- A quoi faites-vous allusion ? lui demanda Rabbi Moché.
- Voilà, se mit à expliquer le père en déversant toute l’amertume de son cœur. Je me suis donné tellement de mal, j’ai parcouru le pays en tous sens pour trouver un mari à ma fille. Et maintenant, je m’aperçois que ma fille ne veut pas du fiancé que j’ai choisi pour elle, elle dit que lui, cet homme, ne lui plaît pas…
- Il n’y a pas de quoi lui en vouloir de cela, répondit le Rabbi. Il appuya ses paroles sur le verset de notre paracha où il est dit :
« Voici la chose que Hachem a ordonnée aux filles de Tselophe’had en disant : elles épouseront qui bon leur semblera. » C’est-à-dire, expliqua le Rav, qu’elles épouseront celui qui leur plaira, et non celui qui plaît aux parents…
Par allusion
« Voici les étapes des bnei Israël »
Le mot « Ele » (voici) a la valeur numérique de trente-six.
Cela désigne les trente-six cas de retranchement cités par la Torah, qui sont la cause des étapes des bnei Israël dans leurs exils. Il est dit : les bnei Israël n’ont été exilés que parce qu’ils ont transgressé les trente-six cas de retranchement cités dans la Torah.
UNE VIE DE TORAH
Penchons-nous sur les paroles du « Maguid » qui s’est dévoilé à Rabbi Yossef Karo et lui a révélé des secrets de sa récompense future pour son étude de la sainte Torah :
« Tous les justes du Gan Eden sortiront à ta rencontre, précédés de la présence divine, et ils te recevront avec chants et louanges. Puis ils te laisseront ouvrir la marche tel un fiancé, et t’accompagneront ainsi vers ton dais nuptial (‘houpa).
Seront préparés à ton intention sept dais, l’un devant l’autre, et sept autres l’un au-dessus de l’autre. Dans la ‘houpa intérieure la plus élevée, il y aura sept fleuves d’un parfum délicieux, où tous se trouveront. Je te préparerai un siège en or auquel tu accèderas par sept marches, sur lesquelles je fixerai quelques perles et de belles pierres. Tous les justes t’accompagneront et chanteront devant toi quand tu arriveras au premier dais, où ils te vêtiront d’habits précieux. Il en sera de même à chaque ‘houpa jusqu’au dernier dais, où tu porteras alors quatorze vêtements honorifiques.
Puis deux des tsaddikim qui t’accompagnent se placeront l’un à ta droite et l’autre à ta gauche, comme les garçons d’honneur, et te feront monter sur le trône. Quand tu commenceras à monter, ils te revêtiront d’un habit supplémentaire, de sorte que tu porteras alors quinze vêtements de gloire. On t’installera sur le siège, on t’ornera d’une couronne suspendue en-haut, et tu t’assiéras, l’un à ta droite et l’autre à ta gauche. Tous ces justes s’installeront autour de toi et discuteront avec toi de sujets de Torah pendant cent quatre-vingt jours, comme dans l’histoire d’Esther (1, 4) : « Etalant la richesse de son faste royal et la rare magnificence de sa grandeur, cela pendant une longue durée de cent quatre-vingts jours. » Puis, tu feras à ces tsaddikim un festin de Torah : pendant sept jours, tu enseigneras seul ce que je t’ai transmis dans ce monde-ci et durant ces cent quatre-vingt jours. »
Grâce à la persévérance dans la Torah
Le jeune petit-fils du gaon Rabbi Yéhouda Zéev Segal l’a un jour questionné dans un moment de proximité : « Grand-père, comment as-tu atteint un niveau si élevé ? » Sa réponse a été courte mais forte de sens :
« Sache que l’assiduité dans la Torah est une qualité extrêmement importante ! » Notre Maître le Ram’hal rapporte dans son ouvrage « Messilat Yécharim » les paroles du Tanna Rabbi Pin’has Ben Yaïr : « L’étude de la Torah est le premier pas dans l’échelle du service divin, c’est elle qui mène à la piété et à la sainteté.
Rabbi Yéhouda Zéev étudiait merveilleusement bien et agissait tout aussi bien. On disait de lui qu’il il était un « Messilat Yécharim » vivant : son activité principale consistait en « Tu en parleras jour et nuit ». Il incarnait la maxime des Sages « Sa bouche ne cesse de dire des paroles de Torah » Lorsqu’il tendait le bras pour décrocher le téléphone, il était encore plongé dans son livre. Immédiatement à la fin de sa conversation, avant même d’avoir reposé le combiné, il avait déjà repris cette étude. (Il était extraordinaire dans sa façon de ‘partager le joug de son prochain’ et c’est pourquoi des juifs du monde entier, en situation difficile, lui téléphonaient et lui confiaient leurs soucis, implorant sa bénédiction et la délivrance. Plus d’une fois il a versé des larmes pour la douleur et l’affliction d’autrui, mais extraordinairement, dès qu’il avait fini de parler et d’encourager, sans laisser passer un instant, il reprenait la Guemara au mot où il s’était interrompu.)
Il était rare de le voir sans un livre à la main. Partout où il allait, que ce soit à un mariage, à un entretien, à un rendez-vous médical ou autre, son livre l’accompagnait et il s’y plongeait à chaque moment de libre.
Dans ses dernières années, son médecin lui a recommandé l’implantation d’un stimulateur cardiaque, opération nécessitant une anesthésie locale. Rabbi Yéhouda Zéev a demandé de profiter de ce moment de soins pour étudier, et le docteur a accepté, à condition que ce soit un livre de petite taille. Le Roch Yéchiva a donc étudié les michnayot du Séder Kodachim jusqu’à la fin de l’intervention.
Grand-père, il y a le feu !
Le gendre de Rabbi Ya’akov Israël Fisher, président du Beit Din de Jérusalem, témoigne au sujet de celui-ci :
« Je me souviens, il y a de nombreuses années, avoir mangé une fois chez lui. On a apporté à table un certain plat que l’on a consommé. Au cours de ce même repas, il a demandé pourquoi on n’apportait pas le mets en question. On lui a alors fait remarquer qu’il venait justement d’en manger ! La nourriture ne l’intéressait pas du tout… Tout ce qu’il consommait, c’était toujours avec rapidité et empressement, et il poursuivait immédiatement son étude là où il s’était interrompu.
Quand il était plongé dans des souguiot difficiles, il avait l’habitude de fumer. (Je l’ai une fois interrogé à ce sujet, et il m’a répondu : ‘Je n’avais pas de quoi manger, elle a remplacé mon repas.’) Il s’installait pour étudier, la cigarette brûlant entre ses doigts… jusqu’à qu’elle se consume entièrement ! Sa main était déjà en train de brûler mais il ne ressentait aucune douleur. Des dizaines et des centaines de fois, on a dû l’interpeller : ‘Grand-père, il y a le feu !’ et seulement alors, il jetait la cigarette… »
Lorsqu’il est tombé malade, son état nécessitait une opération urgente, mais en raison de son grand âge et de son importante faiblesse, les médecins craignaient de l’anesthésier, même localement. A leur grand étonnement, le Rav Fisher leur a répondu qu’il valait mieux réaliser l’opération sans anesthésie du tout. Ils ont essayé de lui montrer combien une intervention chirurgicale peut être délicate et douloureuse si l’on reste en état d’éveil. Mais il a campé sur ses positions et assuré : « Tout ira bien, j’approfondirai une souguia. »
Le moment venu, les médecins se sont attelés à leur tâche et le Rav est resté couché sans bouger pendant toute l’heure. A la fin de l’opération, ses fils, inquiets, ont accouru vers lui, mais il n’a pas remarqué leur présence tant il était concentré dans son étude. Enfin sorti de ses réflexions, il a confié que, grâce à D., il n’avait rien senti pendant l’intervention et avait pu préparer la base de son discours de « Chabbat Hagadol ».
Il brûle tous les accusateurs
Un habitant de ‘Haïfa a raconté avoir étudié dans sa jeunesse à la yéchiva de Poniewitz et s’être une fois rendu chez le Rav Chakh pour lui demander un conseil précis. Il a frappé à la porte mais, resté sans réponse, il l’a lui-même poussée et est entré. La maison semblait vide. Surpris, il a supposé que le Rav s’était absenté un instant et serait de retour d’ici peu. Il a alors patienté près de la chambre.
Une ou deux minutes plus tard, il a senti une forte odeur de brûlé provenant de la cuisine. Il s’y est précipité et s’est soudain trouvé face au Rav, debout près des réchauds, tenant une Guemara d’une main tandis que l’autre était occupée à tourner une cuillère dans un ustensile vide sur le point de prendre feu !
Après coup, il s’est avéré que la pieuse femme du Rav lui avait demandé de préparer une bouillie (elle était alors souffrante), et il était à la cuisine pour ce faire. La Guemara dans une main, il avait versé la semoule dans la marmite et avait commencé à remuer avec la cuillère. Il était si plongé dans l’étude de sa souguia qu’il avait continué à mélanger sans même s’apercevoir que la bouillie s’était évaporée depuis longtemps et que la casserole était presque carbonisée. De la fumée se dégageait de l’ustensile tandis que le Rav continuait à remuer…
En entendant cette histoire, le Rav Zilberstein a ajouté avec admiration : « Un tel incendie brûle et anéantit tous les accusateurs du peuple d’Israël ! »