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Vayéchèv

17 DECEMBRE 2011

21 KISLEV 5772

deux nerot HORAIRES DE CHABBAT

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ARCHIVES DE L'ANNEE 2002 A 2012 ARCHIVES

Rappelle Toi du mérite de Yossef le Tsaddik

(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)

« Voici l’histoire de la descendance de Ya’akov : Yossef, âgé de dix-sept ans, menait paître les brebis avec ses frères. Passant son enfance avec les fils de Bilha et ceux de Zilpa, épouses de son père, Yossef débitait sur leur compte (les fils de Léa) des médisances à leur père. » (Béréchit 37, 2)

Comment comprendre ce verset qui déclare : « Voici l’histoire de la descendance de Ya’acov : Yossef » ? Les descendants de Ya’akov étaient pourtant nombreux ! Nos commentateurs expliquent que ce Patriarche a transmis toute sa Torah à son fils Yossef. Puisque toute la Torah qui l’habitait s’est retrouvée chez cet enfant, le texte considère que « Voici la descendance de Ya’akov : Yossef. »

Cela paraît étonnant : comment Yossef a-t-il pu étudier plus que Réouven, l’aîné des frères et donc plus âgé que lui ? Par ailleurs, pourquoi avons-nous l’habitude, au sein du peuple juif, de le surnommer « Yossef le tsaddik » ? Pourquoi précisément lui, alors que ses frères étaient également très pieux, et ne lui étaient certainement pas inférieurs ?

Je pense que la réponse à toutes ces questions réside dans une seule et même qualité, mise en évidence dans l’affirmation « passant son enfance avec les fils de Bilha et ceux de Zilpa ». En réalité, Yossef s’est positionné comme un enfant face aux fils des servantes. Il s’est mis en retrait et s’est comporté avec humilité en créant un lien particulier avec ces derniers sans chercher à les dominer. Rachi souligne qu’il « s’arrangeait les cheveux » : il était très beau et aurait pu s’enorgueillir de cet avantage. De plus, nous savons qu’il jouissait d’un amour particulier de la part de son père, qui lui avait même fait confectionner une tunique à rayures. Malgré tout cela, il a gardé sa grande simplicité, a exprimé son affection aux enfants des servantes et s’est ainsi hissé à un niveau élevé. Au fil du temps, lorsqu’il s’est retrouvé en Egypte et a été nommé vice-roi, il aurait pu détrôner Par’o car il connaissait une langue de plus que lui. Mais par reconnaissance envers le roi qui l’avait placé au-dessus de toutes les régions d’Egypte, il n’a pas cherché à tirer parti de sa supériorité. Ainsi, Yossef était doté d’un surplus de modestie et avait tendance à rester humble alors qu’il maîtrisait toutes les langues et savait interpréter les rêves qui restaient énigmatiques pour tous les magiciens d’Egypte. Au lieu de s’enorgueillir et de devenir arrogant, il s’est au contraire attaché à la qualité de réserve dont il était pétri. Ceci est le sens du verset « Passant son enfance (ména’er) avec les fils de Bilha etc. » : il se comportait ‘avec jeunesse’ (ména’er et atsmo) et se débarrassait de toute grandeur face aux enfants des concubines.

Le nom : témoin de l’identité

Après m’être penché de près sur les versets de la Torah, j’en ai conclu que, de tous ses frères, seul Yossef a pu être qualifié de « tsaddik » et a pu hériter de la Torah de son père, car tous ses comportements étaient empreints de pudeur et de modestie. La sainte Torah s’acquiert à travers l’attachement à son prochain et l’annihilation face à autrui, tout comme Yossef s’est effacé devant les enfants de Bilha et Zilpa, or on sait bien que quiconque partage les difficultés avec son prochain mérite un grand salaire.

Par ailleurs, nous savons que la Torah ne se maintient que chez celui qui se sacrifie pour elle : puisque Yossef a étudié avec humilité et soumission, il a mérité d’apprendre de son père toute la Torah que celui-ci avait acquise en peu de temps chez Chem et Ever.

Une dame est un jour venue me faire le récit de ses peines au sujet de son fils, nommé « Chemouël », qui lui causait de grands soucis. Il ne ressemblait malheureusement pas au prophète Chemouël ! (A l’époque des Juges, avant même la naissance du prophète, une voix céleste avait proclamé qu’un enfant naîtrait, porterait le nom de Chemouël et serait équivalent à Moché et Aharon. Toutes les femmes donnaient alors ce nom à leur fils.) Cette femme me racontait donc qu’au moment de nommer leur fils, elle et son mari avaient espéré qu’il suivrait la voie de la Torah. Elle ne comprenait pas pourquoi ‘son’ Chemouël lui rendait la vie si amère et n’empruntait pas le chemin du prophète du même nom. Alors j’ai expliqué à cette mère malheureuse que lorsque ‘Hanna avait nommé son fils Chemouël, elle voulait signifier que « son nom (chemo) » serait « D. (el) » : qu’il s’appellerait ‘comme D.’, et lorsque la voix céleste s’était faite entendre, ‘Hanna avait déclaré « Que par Ta volonté, ce futur enfant naisse de moi et qu’il soit aussi grand que Moché et Aharon », comme il est dit « Moché et Aharon étaient parmi Ses prêtres, Chemouël parmi ceux qui invoquaient Son nom. »

J’ai une fois lu de Rabbi Eliezer Mena’hem Man Chakh, directeur de la yéchivat Poniewitz, que de nos jours, certains choisissent ce nom pour leur enfant sans être conscient de l’essence profonde qui se cache derrière. J’ai également répondu à mon interlocutrice qu’ayant nommé son enfant ainsi, elle se trouvait dans l’obligation de se sacrifier pour son étude, pour son élévation dans la Torah et sa crainte de D., tout comme ‘Hanna s’était souciée de l’avenir de son fils et l’avait emmené au Sanctuaire dès son sevrage afin qu’il soit imprégné des paroles de Torah.

On rapporte (Chemouël 3, 2) que Chemouël dormait aux côtés du prêtre Héli. Un jour, il a entendu une voix qui l’interpellait. Il s’est réveillé et a demandé à Héli s’il l’avait appelé, mais celui-ci a répondu par la négative. Un peu plus tard, l’appel s’est renouvelé puis encore une fois, Héli a affirmé que cela ne provenait pas de lui. Voyant que la scène se répétait, le cohen a expliqué à l’enfant qu’apparemment, Hachem s’adressait à lui, et que la prochaine fois il devrait répondre : « Hachem, parle, car Ton serviteur T’écoute. » Mais la fois suivante, Chemouël a répondu : « Parle, car Ton serviteur T’écoute », sans mentionner le nom de D. Pourquoi a-t-il agi ainsi ?

D’après moi, le prophète Chemouël, dans sa grande modestie, ne pensait pas avoir atteint le niveau de percevoir D. de manière directe. Ainsi quand il a entendu la voix, c’est par humilité qu’il a décidé de ne pas mentionner le nom de D. : il ne pensait pas être assez grand pour que Hachem s’adresse à lui de manière explicite. C’est pour cette raison que le prophète Chemouël a mérité d’être comparé à Moché et Aharon, au sujet desquels il est dit qu’ils n’ont jamais dérangé un juif pour leur propre profit sans le dédommager.

« Moché et Aharon étaient parmi Ses prêtres, Chemouël parmi ceux qui invoquaient Son nom » : grâce à son abnégation et son extraordinaire modestie, le prophète Chemouël a mérité de ressembler à Moché et Aharon et de faire partie de ceux qui invoquent le nom de D. Il est rapporté dans les livres des Prophètes que Chemouël se déplaçait de lieu en lieu pour se préoccuper des problèmes du peuple plutôt que d’attendre qu’on vienne à lui. Ce comportement se trouvait déjà chez Moché et Aharon : ce dernier aimait et poursuivait la paix, mettait son honneur de côté et se rendait dans les foyers pour y faire résider l’entente. De même, notre maître Moché, faisant fi de sa fonction de dirigeant d’Israël, s’était rendu, lors de la controverse de Kora’h et son assemblée, chez Datan et Aviram pour les apaiser.

A la lueur de tout ce que nous venons de dire, nous apprenons que pour acquérir la Torah et mériter une élévation spirituelle, nous devons nous conduire avec humilité et renforcer en nous les qualités d’abnégation et de soumission, à l’instar de Yossef le tsaddik, de Moché, d’Aharon et du prophète Chemouël. La Torah ne s’acquiert qu’en se sacrifiant pour elle, c’est-à-dire en combattant et détruisant ses mauvais traits de caractère.

LES HOMMES DE FOI

Récits sur les tsaddikim de la famille Pinto

De façon surnaturelle

Un jour de la hilloula de Rabbi ‘Haïm Pinto, que son mérite nous protège, une femme arriva et raconta aux participants une histoire étonnante :

L’année précédente, on lui avait découvert de graves problèmes dans les yeux, qui auraient pu la mener à une cécité totale. Elle alla voir un médecin qui lui dit qu’il y avait un problème médical dans son œil et qu’il fallait l’opérer. Cette femme redoutait beaucoup l’opération, et raconta qu’elle était allée trouver Rabbi David Pinto chelita pour recevoir sa bénédiction.

Naturellement, Rabbi David lui avait dit de commencer à observer les mitsvot, et qu’ainsi, le mérite du tsaddik Rabbi ‘Haïm la protégerait et qu’avec l’aide de D. elle guérirait.

Elle obéit et prit sur elle de se renforcer dans l’observance de la Torah et des mitsvot. Elle croyait de tout son cœur que le mérite du tsaddik lui permettrait de guérir. Le jour de l’opération, le médecin fit des examens en vue de l’opération, et alors il se passa quelque chose d’extraordinaire. A l’examen, il lui dit qu’elle n’avait besoin d’aucune opération !

Ce qui est tout à fait impossible de façon naturelle.

Rabbi David chelita a expliqué cet événement surprenant en disant qu’il montrait concrètement que Hachem peut modifier les lois de la nature. En effet, tous les malheurs proviennent de l’homme, et ils ne sont là que pour qu’il se repente. Quand il le fait effectivement, Hachem les lui ôte de façon surnaturelle

LES PAROLES DES SAGES

La roue de la concession

Rabbi ‘Haïm Rosenberg, ancien élève de la yéchivat ‘Hevron, a raconté une histoire extraordinaire qui montre combien quiconque s’occupe d’une mitsva et s’efforce d’aider autrui, non seulement n’en sort pas perdant, mais reçoit en plus une grande récompense du Ciel.

L’anecdote suivante est citée dans le livre du Rav Zilberstein.

Lors du terrible attentat contre la pizzeria Sbarro à Jérusalem, qui a fait de nombreuses victimes, deux jeunes filles ont bénéficié d’un véritable miracle : elles voulaient y entrer pour se restaurer mais l’hôtesse d’accueil leur a conseillé de revenir une heure plus tard. En effet, la pizzeria était très chargée et elles seraient mal assises si elles s’y installaient tout de suite.

Les deux jeunes filles, venues des Etats-Unis pour visiter Israël, ont suivi son conseil et sont reparties, pensant revenir une heure plus tard. Mais au bout de quelques minutes, l’attentat avait eu lieu… ainsi que l’effroyable massacre qui s’en était suivi.

Les deux touristes ont « bien entendu » été épargnées, mais la pauvre employée qui travaillait au restaurant a été grièvement blessée, et a été admise à l’hôpital où elle a dû subir plusieurs interventions.

Malgré la « raison logique » qu’elle avait invoquée pour les dissuader d’entrer au restaurant, les deux jeunes filles ont vu en elle une envoyée du ciel venue les sauver miraculeusement. Elles lui ont donc rendu visite à l’hôpital et lui ont annoncé leur retour en Amérique tout en lui proposant leur aide si elle était amenée à se rendre elle-même aux Etats-Unis, pour un problème médical ou autre.

Quelques semaines plus tard, les médecins ont conseillé à la victime de solliciter des chirurgiens esthétiques aux Etats-Unis pour réparer totalement ses plaies.

Elle a suivi leur recommandation, et avant de partir pour l’Amérique, a informé les deux jeunes filles qu’elle arrivait pour des soins.

Les miraculées ont tenu leur promesse et sont venues l’accueillir à l’aéroport avec l’intention de l’assister durant tout son séjour aux Etats-Unis.

Combien était grande la récompense de la serveuse ! Elle avait simplement conseillé aux jeunes filles de différer leur repas ! Ce faisant, elle les avait sauvées et avait mérité une aide précieuse de la part des rescapées.

Mais ce n’est pas tout.

Lorsque leur « bienfaitrice » a annoncé qu’elle devait subir des opérations de chirurgie plastique, les jeunes filles se sont trouvées face à deux possibilités : l’amener à l’hôpital du quartier ou se donner davantage de mal et la conduire jusqu’au centre médical de Baltimore où les médecins étaient plus qualifiés.

Toutes deux ont accepté de sacrifier une journée de travail pour accompagner leur amie à Baltimore, qui était assez loin de leur lieu d’habitation et de travail à New York.

Les jeunes filles ne se sont pas laissé arrêter par les difficultés et ont emmené la blessée à Baltimore.

Que s’est-il passé alors ? Ces deux jeunes filles travaillaient dans un des prestigieux bureaux des ‘tours jumelles’, et le jour même où elles avaient pris congé pour accompagner la jeune femme à Baltimore a eu lieu le terrible attentat à New-York et les ‘tours jumelles’ se sont effondrées. Le bureau où les filles travaillaient a évidemment été entièrement détruit et il n’en est pas resté la moindre trace.

Le seul fait de penser à ce qui aurait pu se passer si elles n’avaient pas sacrifié une journée de travail et étaient restées à New-York fait frissonner…

Y a-t-il une preuve plus évidente que quiconque fait des concessions pour son prochain et se consacre à lui sera finalement amené vers les horizons les plus heureux ?

GARDE TA LANGUE

Qui transgresse un interdit

De manière générale, nous ne sommes pas tellement touchés quand un homme simple nous blâme ou commet une injustice envers nous. En revanche, si nous apprenons qu’un érudit nous a critiqués, nous le haïrons davantage et il est très courant que des querelles éclatent suite à cela. Plus particulièrement, si nous parlons au sujet du Rav de la ville, cela peut provoquer de très grands dommages, il arrive qu’on lui rende la vie vraiment infernale.

(‘Hafets ‘Haïm)

A LA LUMIERE DE LA PARACHAH

Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita

Un effort qui reste dans la mesure de la foi

« Mais le maître échanson ne se souvint plus de Yossef et il l’oublia. » (40, 23)

Rachi commente ce verset en disant : « Puisqu’il avait mis toute sa confiance dans le maître échanson, pensant qu’il se souviendrait de lui, Yossef a dû rester en prison pendant deux années supplémentaires, comme il est écrit « Heureux l’homme qui met sa confiance en Hachem et qui ne se tourne pas vers les arrogants » (Téhilim 40, 5), à savoir : qui ne met pas sa confiance dans les Egyptiens, lesquels sont appelés arrogants. » Les commentateurs voient ici une contradiction : au début Rachi dit que Yossef a mis toute sa confiance dans le maître échanson et c’est pourquoi il a été puni. Mais il affirme ensuite qu’il avait confiance uniquement en D. Les paroles de la Guemara (Berakhot 35b) sont bien connues : « Les Sages ont enseigné dans une baraïta que le verset dit : « Tu amasseras ton grain. » Pour quelle raison la Torah doit-elle nous préciser cela ? Parce que par ailleurs, il est écrit : « ce livre de la Torah ne quittera pas ta bouche. » On aurait pu comprendre ces termes textuellement (c’est-à-dire qu’il nous incombe d’étudier la Torah à tout instant, nous mettant alors dans l’impossibilité de travailler pour assurer notre subsistance), c’est pourquoi la Torah précise « tu amasseras ton grain » : tout en étudiant la Torah, mène une vie normale en ce monde-ci. Ceci est le point de vue de Rabbi Yichmaël. Mais Rabbi Chim’on bar Yo’haï demande : « Si un homme laboure au moment des labours etc., qu’adviendra-t-il de l’étude de la Torah ? » et répond : « C’est qu’en réalité, lorsque le peuple d’Israël accomplit la volonté de D., son travail est fait par d’autres, comme il est dit « des étrangers se lèveront et feront paître vos troupeaux etc. » » Abayé remarque que « beaucoup ont agi comme Rabbi Yichmaël l’a préconisé et ont réussi, tandis que d’autres ont agi comme Rabbi Chim’on bar Yo’haï l’a préconisé, et n’ont pas réussi. » » Les commentateurs ont alors expliqué que ce dernier parlait en fonction de son propre niveau : toute le monde n’est pas en mesure de dépendre uniquement de D. Cette vision des choses ne convient qu’à des justes parfaits.

Nous en déduisons que deux niveaux existent dans la foi en D. : il y a les hommes simples qui doivent fournir un effort personnel pour subvenir à leurs besoins, et les justes parfaits qui ne doivent pas faire des efforts pour assurer leur subsistance, et qui commettent une faute s’ils le font.

Or Yossef faisait partie de cette deuxième catégorie citée par Rabbi Chim’on bar Yo’haï : il ne devait aucunement s’efforcer par des moyens naturels, mais simplement se contenter de croire en D. ! Il a d’ailleurs agi ainsi pendant toutes ces années, mais le fait de s’être une fois rendu dépendant du maître échanson et d’avoir cherché des moyens naturels lui a été considéré comme une faute.

C’est ce que dit le midrach au sujet du verset des Psaumes :

« Heureux l’homme qui met sa confiance en Hachem » : il s’agit de Yossef, qui ne s’était jamais tourné vers les Egyptiens, mais lorsqu’il l’a fait, deux années de prison supplémentaires lui ont été ajoutées. Avant cela, il avait toujours placé sa confiance uniquement en D. C’est pourquoi la seule fois où il s’est adressé aux Egyptiens, cela a été considéré comme une faute.

A LA SOURCE

 « Ya’akov demeura dans le pays des pérégrinations de son père, dans le pays de Canaan. » (37, 1)

Nos Maîtres commentent dans le midrach :

« Ya’akov avait l’intention de mener le reste de sa vie paisiblement, et c’est alors que le malheur de Yossef lui est arrivé. En effet, D. a dit : ‘Les tsaddikim ne se suffisent-ils pas de la récompense qui les attend dans le monde à venir, pour vouloir mener une vie tranquille ici-bas également ?’ »

A quoi correspond cette volonté des tsaddikim ? Hachem ne veut-Il vraiment pas que les justes soient heureux à la fois dans ce monde-ci et dans le monde futur ?

Rabbi Moché Feinstein explique : Ya’akov a voulu mener une existence sereine dans le domaine de l’éducation des enfants. Les voyant tous tsaddikim, empreints de la crainte de D. et loués par Hachem, il pensait ne plus avoir à s’en soucier.

C’est à ce moment qu’il a été frappé par le malheur de Yossef.

Ceci nous enseigne que nous ne devons jamais détourner notre esprit de nos enfants, aussi grands, justes et craignant D. soient-ils. Il faut sans cesse les réprimander et leur apprendre comment se conduire.

« Réouven leur dit donc : ‘Ne versez point de sang !’ » (37, 22)

Le Chlah rapporte ces magnifiques paroles au nom de Rabbeinou Lévi bar Guerchom :

« Si l’on voit une ou plusieurs personnes se préparer à mal agir, il faudra les détourner de leur projet progressivement. En effet, si l’on tente de les dissuader totalement d’agir, ils le prendront comme prétexte pour ne pas écouter le conseil et exécuteront leurs projets mauvais.

Par exemple, lorsque Réouven a vu ses frères se préparer à tuer Yossef, il a compris que, du fait de leur haine intense, ils ne l’écouteraient pas s’il tentait de les dissuader d’agir ainsi. C’est pourquoi il les a éloignés peu à peu de leur intention première en leur recommandant de ne pas verser de sang mais plutôt de le jeter dans un puits où il mourra par lui-même.

En agissant ainsi, il espérait les dérouter complètement et épargner Yossef afin de pouvoir le ramener à son père sans que ses frères le sachent. Ces derniers ont suivi le conseil de Réouven, se sont détournés de leur intention première et ont fini par obéir à Yéhouda qui a dit : « Allons, vendons-le aux Yichmaélites et ne portons pas la main sur lui. »

« Le puits était vide, il n’y avait pas d’eau dedans. » (37, 24)

Il était vide d’eau mais rempli de serpents et scorpions. D’après Rabbi Zalman Sorotskine, ce verset nous enseigne que le puits où Yossef a été jeté, comportait un avantage et un inconvénient. L’avantage : il était sans eau ; l’inconvénient : s’y trouvaient des serpents et des scorpions. Le bon côté de ce puits est écrit explicitement (« il était sans eau ») alors que l’inconvénient est évoqué seulement par allusion : « vide », terme réducteur, « sans eau », encore un terme restrictif. Sachant que deux mots réducteurs ne viennent que pour intensifier l’idée, nous déduisons qu’il était rempli de serpents et de scorpions. S’il en est ainsi pour un simple puits, a fortiori cela doit être le cas pour un être humain : nous devons faire des éloges sur notre prochain dans un langage clair et explicite… En revanche, si nous sommes parfois obligés de révéler un certain défaut, nous le ferons uniquement par allusion…

« Yéhouda dit à ses frères : ‘Quel profit tirerons-nous à tuer notre frère et à cacher sa mort ?’ » (37, 26)

Trois raisons peuvent pousser à tuer son prochain :

La première, pour lui voler sa richesse, son argent et son or.

La seconde, pour se venger de quelque chose. La troisième, pour la gloire : pour montrer à tous qu’on a agi avec bravoure en tuant un autre homme.

D’après Rabbi Yits’hak Abravanel, c’est à cela que pensait Yéhouda en demandant à ses frères : « Quel avantage tirerons-nous à tuer notre frère et à sceller sa mort ? » En effet, si c’est pour la première raison (la richesse), il a dit ‘Quel profit’, soit ‘Quel bénéfice’, selon la traduction du Targoum. Quant à la deuxième raison, il a précisé ‘notre frère’ : puisqu’il est notre frère, nous ne pouvons pas exercer sur lui la vengeance. Enfin s’il s’agit de la troisième raison, Yéhouda a déclaré ‘et à cacher sa mort’ : malgré nous, ce geste devra rester secret et nous ne pourrons pas le diffuser et le révéler publiquement. S’il en est ainsi, « Quel profit tirerons-nous à tuer notre frère et à cacher sa mort ? »

La lumière du Zohar

« D. fut avec Yossef, et il devint quelqu’un qui réussit. » (39, 2)

Rabbi Yossi a dit : la présence divine suit et n’abandonne pas les tsaddikim, où qu’ils aillent !

Yossef a été conduit en Egypte, la vallée des ténèbres, mais la Chekhina l’accompagnait. C’est ce que dit le verset : « D. fut avec Yossef. » Puisque la présence divine était avec lui, tout ce qu’il entreprenait réussissait. Par exemple, s’il tenait déjà quelque chose dans sa main et que son maître le lui demandait sous une autre forme, l’objet se transformait afin de convenir à ce dernier. Il est écrit « Son maître a vu que D. était avec lui et qu’Il lui envoyait la réussite dans tout ce qu’il entreprenait (matslia’h béyado) : ce qu’il avait effectivement dans la main (yad) ! Constatons qu’il est écrit « son maître a vu » et non « son maître a su » : il voyait de ses propres yeux les miracles qui se produisaient dans toute action et que D. accomplissait en faveur de Yossef.

SUR LA VOIE DE NOS PERES

Reconnaître la vérité

« Yéhouda le reconnut et dit : elle est plus juste que moi. »

Pourquoi est-il si difficile à l’homme de reconnaître son erreur et de changer d’avis ?

Le gaon Rabbi ‘Haïm Schmulewitz zatsal estime que la première idée qui vient à l’esprit se fixe chez la personne, et alors elle n’écoute plus une autre opinion et n’essaie pas de peser s’il se peut que ce soit plus juste, et à partir de là il fera tout pour justifier son opinion. Cette attitude est en fait désastreuse pour l’homme, qui se trouve asservi à sa première impression, dont il a l’impression que c’est une vérité dont il n’y a pas à démordre.

Ce défaut délimite toute la conduite de l’homme au cours de sa vie, et même lorsqu’il sait qu’il s’est trompé, il lui est difficile de reconnaître son erreur et de changer d’avis. Il prouve qu’il a raison par toutes sortes de justifications. C’est la raison pour laquelle les Sages disent (Avot 4, 2) : « une faute entraîne une autre faute ». Pourquoi ? Parce que si le pécheur ne continue pas dans sa mauvaise voie, c’est comme s’il reconnaissait qu’il s’est trompé, il continue donc en se laissant entraîner de plus en plus, l’essentiel étant de ne pas être obligé de reconnaître son erreur.

Les tsaddikim savent se maîtriser et reconnaître ce qu’ils ont fait de mal, et méritent alors d’hériter du monde à venir. Yéhouda n’a pas eu honte de reconnaître sa faute. Qu’en est-il résulté ? Il a hérité de la vie du monde à venir (Sota 7b).

Parmi les meilleurs talmidei ‘hakhamim de la ville de Jérusalem, le gaon Rabbi Guershon Lapidot zatsal, qui comptait parmi les directeurs de la yéchivah « ‘Hayé Olam », se distinguait par son extraordinaire assiduité et son érudition sans pareille dans tous les domaines de la Torah. Il lui arrivait d’étudier à la synagogue « Chochanim LeDavid », où se développa une profonde amitié entre lui et le gaon Rabbi Yéhouda Tsadka zatsal.

Un jour, raconte le livre « Vézot LiYhouda », c’était un vendredi soir, et tous deux étaient en train d’étudier, chacun dans son coin, à la synagogue « Chochanim LeDavid ». Quelqu’un entra et posa une question à Rabbi Yéhouda. Il s’agissait d’une question pratique concernant les dinim du prêt à intérêt (ribit). En général, Rabbi Yéhouda évitait de trancher et de donner des directives pratiques, mais en cas de besoin il répondait si quelqu’un posait une question. Il estima donc devoir dire à son interlocuteur quelle était la halakha.

Celui-ci ne s’en contenta pas, il s’adressa à Rabbi Guershon Lapidot et lui exposa le même problème. Il reçut une réponse différente. Rabbi Yéhouda, qui s’était aperçu de ce qui se passait, s’approcha de Rabbi Guershon, et pendant longtemps ils discutèrent de cette halakha, jusqu’à ce qu’il voie clairement qu’il ne réussirait pas à le convaincre, alors il retourna à sa place.

Quelques jours passèrent. Rabbi Yéhouda était installé à midi comme d’habitude en train d’étudier avec ses élèves à la synagogue « Tsofiof » dans le quartier des Boukharim. Tout à coup, Rabbi Guershon Lapidot entra en tenant à la main le livre de Responsa « Maharit Tsahalon ».

Il s’approcha vivement de Rabbi Yéhouda en proclamant avec joie : « Tu avais raison, Rabbi Yéhouda, le Maharit aussi a donné la décision que tu as retenue ! »

L’humilité de Rabbi Guershon et l’amour de la vérité qui était implanté en lui l’avait poussé à venir en pleine journée annoncer à Rabbi Yéhouda qu’il avait trouvé quelqu’un de la même opinion que lui et qui donnait la même décision halakhique que lui.

Je n’ai rien à dire

Dans l’un des cours que donnait le gaon Rabbi Isser Zalman Meltzer zatsal à la yéchivah Ets ‘Haïm, on lui a posé une question qui démolissait tout le cours.

Il interrompit immédiatement le cours et descendit de l’estrade. Une semaine plus tard, l’un des élèves posa de nouveau une question qui demandait une réflexion approfondie, et cette fois-là aussi, il mit fin au cours.

En une autre occasion, il raconta l’histoire suivante au nom de son maître, le gaon Rabbi ‘Haïm Soloveitchik zatsal :

« Quand j’étais jeune enseignant à Volojine, un jour je suis monté sur l’estrade pour donner un cours. J’ai lu une page de Guemara devant les élèves de la yéchivah, je leur ai dit : « Je n’ai rien à vous dire sur cette page », et je suis descendu de l’estrade. Naturellement, les élèves étaient effarés. » Il avait expliqué son attitude de la façon suivante :

« Quand j’avais préparé le cours, je me suis posé une question que personne n’avait songé à poser, et ensuite il m’est venu une explication, et cette explication-là non plus, personne ne l’avait imaginée. J’avais donc quelque chose à dire, mais j’avais l’impression que ce n’était pas la vérité, c’est pourquoi j’ai décidé de ne pas donner le cours. » Rabbi ‘Haïm s’était alors tourné vers son élève Rabbi Isser Zalman en disant : « Est-ce que tu es aussi capable de cela ? Si oui, tu pourras être un Roch Yéchivah ! »

 

 
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