Chemini 21 Avril 2012 29 NISSAN 5772 |
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La racine du service d’Aharon
(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
« Aharon éleva les mains vers le peuple, les bénit, et descendit après avoir fait l’expiatoire, l’holocauste et les rémunératoires » (Vayikra 9, 22).
Les commentateurs s’interrogent sur le sens de l’expression « il descendit ». Aharon était-il donc sur un endroit surélevé pour devoir en descendre afin de bénir le peuple ? Ils expliquent que Moché a monté le Sanctuaire le matin et l’a démonté la nuit pendant sept jours, et le Saint béni soit-Il n’était pas venu faire reposer Sa Chekhina parmi eux, c’est pourquoi Aharon s’est mis à soupçonner que ce retard était peut-être dû au fait qu’Il lui en voulait d’avoir provoqué indirectement la faute du Veau d’Or. Bien qu’il ait eu de bonnes intentions, et qu’il ait cherché à détourner l’attention des bnei Israël en les occupant à chercher de l’or, pour que Moché soit revenu le temps qu’ils le rassemblent, comme ils étaient remplis d’enthousiasme pour la faute, ils ont trouvé le temps de faire le Veau encore avant que Moché ne descende, si bien que la faute retombait aussi sur Aharon. Il craignait que le Saint béni soit-Il lui en veuille et retarde en conséquence la venue de la Chekhina, et dans sa peine il s’est tourné vers Moché et lui a raconté son souci. Moché et Aharon entraient pour prier que Hachem fasse rapidement descendre la Chekhina, le souci d’Aharon grandissait, et Moché le consolait en lui disant que la faute n’avait pas dépendu de lui, la preuve en étant que le Saint béni soit-Il l’avait choisi pour être cohen gadol.
Aharon savait qu’il devait faire quelque chose qui provoquerait la descente de la Chekhina, c’est pourquoi il a cherché à s’élever dans la qualité de l’humilité, et à éliminer radicalement en lui toute trace d’orgueil. C’est ce que dit le verset : « Aharon descendit », cela signifie qu’il s’est fait descendre lui-même, il s’est abaissé devant le peuple et a élevé les mains pour le bénir. Nous devons encore expliquer pourquoi Aharon a voulu s’élever justement dans la qualité de l’humilité et se débarrasser de toute trace d’orgueil. L’explication en est qu’Aharon craignait que son statut de cohen gadol et les vêtements somptueux dont il était revêtu ne provoquent chez lui de la suffisance, c’est pourquoi il s’est débarrassé de tout soupçon d’orgueil pour être véritablement prêt et digne de ce que la Chekhina descende par l’offrande des sacrifices. Aharon se considérait comme un simple cohen et non comme le cohen gadol, il est descendu vers le peuple et l’a béni dans l’esprit que même la bénédiction d’un homme simple a une certaine importance. Quand le Saint béni soit-Il a vu l’intériorité d’Aharon, et son désir de s’élever dans l’humilité, qui est la racine de toutes les qualités, Il a immédiatement révélé Sa gloire aux yeux de tout le peuple, ainsi qu’il est dit : il descendit après avoir fait l’expiatoire, l’holocauste et les rémunératoires, et immédiatement après : « La gloire de Hachem se montra à tout le peuple. »
L’auteur de Noam Elimélekh explique ainsi ce verset : « Le tsaddik est constamment en état d’attachement aux mondes supérieurs, mais à cause de son aspiration constante à ce que Hachem fasse du bien au peuple d’Israël et lui accorde abondance et bénédiction, il descend un peu de son niveau et de son attachement. Pourtant, cette descente est en soi positif, car lorsque les hommes sont témoins de son attachement à D. et de son désir de leur faire du bien, cela fait entrer dans leur cœur la crainte et l’amour de D., et ils s’éveillent à vouloir Le servir. » Dans la suite, il ajoute que « Il les bénit et descendit après avoir fait l’expiatoire, l’holocauste et les rémunératoires » signifie qu’il est ainsi descendu de son niveau, car le tsaddik vérifie où il en est à chaque instant, de crainte d’avoir fauté de façon imperceptible ou en pensée, et il est sans cesse en état de repentir. Cela se trouve en allusion dans les expiatoires et les holocaustes, qui viennent pour expier les pensées, tandis que les rémunératoires font allusion à l’attachement à D. avec lequel il fait la paix dans les armées célestes. A cause de son désir, il descend un peu de ces niveaux.
Essayons d’expliquer cette notion que le tsaddik se trouve toujours attaché aux mondes supérieurs, mais que son désir de faire du bien aux bnei Israël entraîne un léger détachement des mondes supérieurs. Cela signifie que la bienveillance envers le peuple d’Israël qui se trouve en bas dans des mondes moins élevés le fait descendre de son attachement aux mondes supérieurs. Et en vérité, c’est une bonne chose, car lorsque le peuple d’Israël s’aperçoit que le tsaddik a un si grand amour pour lui, la crainte et l’amour de Hachem s’éveillent en son cœur et il désire Le servir de tout cœur. Aharon était également habité d’un grand désir du bien du peuple d’Israël et aspirait à le bénir. Mais pour le bénir, il fallait descendre un peu de son niveau élevé et de son attachement aux mondes supérieurs. L’auteur de Noam Elimélekh explique que les tsaddikim ont l’habitude de constamment s’examiner de peur qu’il y ait en eux un vague soupçon de faute, ou de mauvaises pensées. Aharon le faisait aussi, et dans sa grande humilité il ne se permettait pas de s’immobiliser, mais s’examinait de peur d’avoir déclenché la colère du Ciel et de devoir se repentir de quelque chose pour que le Saint béni soit-Il puisse faire descendre la Chekhina sur le peuple d’Israël. C’est le sens du verset « il descendit après avoir offert l’expiatoire et l’holocauste », allusion aux sacrifices qui viennent expier les mauvaises pensées, alors que les rémunératoires font allusion à l’attachement à Hachem, qui engendre la paix dans les armées célestes. Mais avec tout cela, son amour pour le peuple d’Israël l’a poussé à descendre un peu de son niveau.
Nous ne devons surtout pas dire qu’Aharon a failli par orgueil, ce qui correspond à la faute de l’idolâtrie, mais au contraire que c’est cela la voie du tsaddik : se trouver sans cesse en état de repentir même pour des fautes qu’il n’a pas commises. Et de cette façon, les fautes des bnei Israël sont effacées et ils s’élèvent dans les niveaux de la sainteté et de la pureté, au point d’engendrer la paix dans les armées célestes et que le Saint béni soit-Il puisse faire résider Sa Chekhina parmi eux. C’est pourquoi le peuple d’Israël a été rempli d’une grande joie en voyant descendre la Chekhina, il a pris conscience de l’importance du huitième jour, où la Chekhina était descendue, et a compris que ce n’était pas une sanctification unique, mais que cette Chekhina continuerait à l’accompagner à jamais, même dans son exil après la destruction du Sanctuaire et du Temple.
LES PAROLES DES SAGES
Les effets de la nourriture
« Ne contaminez pas vos personnes par tous ces reptiles qui se meuvent sur la terre. Car Je suis Hachem, Qui vous ai sortis du pays d’Egypte pour être votre D., et vous serez saints, parce que Je suis saint. » (11, 44-45)
Rav Benisti, directeur d’une école à Nice, a fait part de cette extraordinaire histoire à Rabbi David ‘Hanania Pinto au nom de sa mère Madame ‘Hanina, que D. lui accorde une longue vie.
Rabbi ‘Haïm Pinto avait coutume de jeûner d’un Chabbat à l’autre. Il s’abstenait de manger dès la sortie du Chabbat jusqu’au vendredi soir suivant, sans manger de pain ni boire d’eau.
Chaque vendredi soir, son épouse lui préparait une soupe chaude avec des boulettes de viande afin de le revigorer et de renforcer son corps affaibli par le service divin.
Un jour, la Rabbanit s’est rendue chez le boucher pour y acheter un morceau de viande, comme elle avait coutume de le faire une fois par semaine, en vue du repas de vendredi soir du tsaddik. Cette fois-là, le boucher a dérogé à son habitude et lui a donné de la viande simplement cachère au lieu de la viande glatt qu’elle s’attachait à acheter généralement.
Ne le sachant pas, la Rabbanit a rapporté la viande chez elle et a préparé une soupe en l’honneur de Chabbat pour son mari qui jeûnait durant toute la semaine. Mais alors qu’elle posait l’assiette de soupe sur la table et que Rabbi ‘Haïm s’apprêtait à en goûter, il l’a soudain appelée en s’exclamant :
« Retire la soupe d’ici ! Elle est interdite car elle contient des vers… »
La femme a regardé la soupe qui était alors limpide et propre, puis a observé attentivement l’assiette sans y distinguer de vers. Innocemment, elle a alors pensé que le Rav ne voulait pas en manger et plaisantait donc en disant cela.
Elle est repartie à la cuisine y chercher le second plat : les boulettes de viande.
Mais cette fois encore, le Rav a attiré son attention sur les vers qui grouillaient dans l’assiette :
« Veux-tu me faire manger quelque chose de non-autorisé ? La Torah affirme que quiconque mange un ver transgresse cinq interdits et tu me sers des boulettes de viande d’où émergent des vers vivants ! » Puis le Rav a pris la casserole avec la soupe et la viande et a tout jeté à la poubelle. A ce repas, après une semaine de jeûne, il ne s’est nourri que de pain et n’a pas touché à la viande. Son épouse a alors compris qu’il y avait une raison à cela et s’en est préoccupée.
Il guide les pas de ceux qui Le servent avec zèle
Le dimanche, la Rabbanit s’est précipitée chez le boucher pour lui demander si la viande qu’elle avait achetée chez lui était bonne et qui était le cho’het (abatteur rituel).
Le boucher lui a répondu que le cho’het était un homme empli de la crainte de D. mais que la viande n’était pas glatt mais simplement cachère. En effet, cette bête avait un défaut qui l’empêchait d’être glatt.
La Rabbanit a alors compris comment D. avait empêché son saint mari de manger de la viande dont la cacherout était douteuse. Ceci nous enseigne que quiconque se préserve des choses interdites sera également protégé par Hachem, Qui Se souciera de ne pas le faire trébucher, comme il est écrit : « Il guide les pas de ceux qui Le servent avec zèle »…
Allez vérifier du côté des cho’hatim
Voici une histoire extraordinaire arrivée au Rambam, qui apporte un précieux éclairage sur les enseignements de nos Sages selon lesquels les aliments interdits souillent l’âme humaine. Elle a été racontée par le Maguid de Ritowa, Rav Issakhar Ber, telle qu’il l’a entendue de Rav ‘Haïm Soloveitchik.
Comme on le sait, lors de sa visite au Yémen le Rambam a fait la connaissance d’un des plus grands gueonim de son temps. Même après son retour chez lui, il recevait régulièrement des Responsa du gaon. Un jour, il a reçu une lettre de sa part évoquant une grande question philosophique.
Le Rambam a été surpris par cette interrogation. Tout en se prenant la tête dans les mains, il a déclaré : « Comment une telle problématique peut-elle venir à l’esprit d’un juif ? Ces questions ne surviennent que chez une personne dont l’âme est impure ! » Il s’est donc abstenu d’apporter une réponse à la difficulté de son ami.
Pendant quelques temps, son correspondant a continué à lui envoyer des lettres, jusqu’à que le Rambam se sente obligé de lui répondre. Sa réponse a alors été la suivante : « Allez vous assurer de la fiabilité des cho’hatim et des vérificateurs de votre communauté. »
Le gaon a suivi l’instruction du Rambam et a alors découvert que depuis treize ans, on lui fournissait, à lui ainsi qu’à toute la ville, des viandes interdites à la consommation. Ceci avait souillé leurs âmes au point d’amener un gaon de son rang à poser des questions hérétiques.
GARDE TA LANGUE
Quiconque veut se préserver
Un des éléments qui nous incite à devenir coutumier des propos diffamatoires est un caractère acariâtre. Quelqu’un d’acariâtre se plaint et se fâche constamment, trouve toujours à redire sur les faits et paroles de son prochain, même si celui-ci est innocent et n’agit pas méchamment contre lui. C’est également quelqu’un qui juge toujours négativement, transforme toute faute involontaire en faute préméditée et soupçonne son prochain d’agir par haine pour lui. Ainsi, quiconque est empreint de ce vilain défaut ne sera pas épargné par le désir de médire, car il aura l’impression que tout ce que son ami fera ou dira provient d’une volonté de lui nuire. Quiconque veut se préserver de ce défaut devra méditer sur les conséquences de son attitude (Cha’ar Hatevouna).
A LA LUMIERE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
Qu’est ce qui a empêché la résidence de la Présence divine dans le Sanctuaire ?
Nos Maîtres ont dit dans le Midrach au nom de Rabbi Chemouël bar Na’hman : Durant les sept jours où Moché se trouvait au buisson ardent, D. essayait de le persuader de partir délivrer les bnei Israël d’Egypte, comme il est dit « ni depuis hier, ni depuis avant-hier, ni depuis que Tu parles à Ton serviteur », ce qui correspond aux six premiers jours. Le septième jour, Moché Lui a demandé : « Donne cette mission à quelqu’un d’autre. » Mais Hachem lui a répondu : « Par ta vie, Je jure que tu seras puni pour cela. » En effet, quand l’a-t-Il puni ? Lors des sept jours d’inauguration du Sanctuaire : Moché accomplissait le service du Grand prêtre, ce qui laissait supposer que ce rôle lui revenait. Mais le septième jour, D. lui a annoncé : « Cette fonction n’est pas la tienne mais celle d’Aharon », ainsi qu’il est dit : « Quand on fut au huitième jour, Moché manda Aharon et ses fils. »
Il me semble pouvoir ajouter que puisque Moché a refusé durant une semaine d’aller faire sortir les bnei Israël d’Egypte, D. a également refusé de faire résider Sa présence au sein du peuple durant les sept jours d’inauguration. C’est seulement le huitième jour qu’Il a fait demeurer Sa Chekhina sur eux. Les bnei Israël n’étaient certes pas fautifs, mais puisqu’ils étaient comme un seul homme et ne formaient qu’un seul corps avec Moché, ils ont également subi les conséquences de son acte. C’est pourquoi le texte dit : « Quand on fut (Vayehi) au huitième jour », en employant une expression qui dénote la douleur (Vayehi). En effet, durant tous les sept jours le peuple d’Israël était plongé dans une grande peine car la Présence divine tardait à s’installer parmi eux, alors que dès le premier jour ils aspiraient à percevoir D. Ils attendaient impatiemment le moment où Hachem résiderait parmi eux, mais en voyant que cet instant tardait à arriver, ils ont innocemment supposé qu’Il était en colère contre eux et qu’ils ne méritaient pas Sa présence : c’est ce qui les faisait souffrir. C’est seulement le huitième jour, lorsque Moché leur a annoncé « aujourd’hui Hachem doit vous apparaître » qu’ils ont éprouvé une immense joie.
On comprend mieux à présent pourquoi Moché a également appelé les anciens d’Israël. Il est vrai que d’après Rachi, il les a appelés afin de « les informer que c’est sur l’ordre divin qu’Aharon avait été nommé et fonctionnait comme Grand prêtre, et pour qu’ils ne disent pas qu’il s’était autoproclamé. » Mais selon ce que nous venons de dire, on peut supposer que lorsque Moché a tardé durant sept jours avant de tenter de délivrer les bnei Israël, les anciens sont également sortis perdants de ce retard, car ils étaient associés à cette mission auprès de Par’o avec Moché, qui avait reçu l’ordre « Va et assemble les anciens d’Israël. » Evidemment, la Présence divine résidait sur les anciens dans cette mission du fait que D. leur parlait, et tant que Moché refusait de l’accomplir, ils souffraient de l’absence de la Chekhina. C’est pourquoi lorsque celle-ci est revenue au sein du peuple d’Israël, la peine des anciens a été compensée, alors Moché les a appelés avec Aharon et ses fils et leur a octroyé un grand honneur.
Puisse la volonté de D. être de rendre nos jours semblables à ceux d’avant, et de même que la Chekhina a résidé en Israël, qu’Il la fasse résider à Jérusalem et S’installe parmi nous, amen.
A LA SOURCE
« Un feu s’élança de devant D. et les dévora, et ils moururent devant D. » (10, 2)
Le Midrach dit : « La disparition des tsaddikim est plus pénible pour Hachem que les quatre-vingt-dix-huit malédictions énoncées dans Devarim et que la destruction du Temple. »
Comment comprendre une chose pareille ?
Lors de l’oraison funèbre du ‘Hafets ‘Haïm, le Rav Pessa’h Proskin, président du tribunal rabbinique et directeur de la yéchivat Kovrin, a expliqué : « Lorsque le Temple a été détruit, D. trouvait une petite consolation dans l’existence des tsaddikim. En effet, tant que ceux-ci vivent, les maisons d’étude (qui sont de petits Temples) sont bien établies et les justes y sont installés et y étudient la Torah, ce qui n’est plus le cas lors de leur disparition, après laquelle il ne reste plus aucune consolation. C’est la raison pour laquelle le départ des tsaddikim est plus pénible pour D. que la destruction du Temple.
« Un feu s’élança de devant D. » (10, 2)
Voici ce que la Guemara enseigne au sujet de la manière dont sont morts Nadav et Avihou.
« Deux colonnes de feu sont sorties du saint des saints et se sont divisées en quatre. Puis deux sont entrées dans le nez de l’un et deux dans le nez de l’autre et les ont brûlés » (Sanhédrin 52a).
Rabbi Yehonathan Eibeschütz a expliqué :
« Nous savons que ‘Quiconque professe une halakha en présence de son maître mérite d’être piqué par un serpent.’ Or nos Sages ont affirmé : ‘Les fils d’Aharon ne sont morts que pour avoir professé une halakha en présence de Moché’. Ils auraient donc dû être punis par la morsure d’un serpent !
Seulement, à ce moment-là, il n’y avait aucun serpent pour les piquer : en effet nos Sages racontent que lorsque les bnei Israël sont arrivés dans le désert, ils craignaient les serpents. Deux colonnes de feu sont alors sorties du saint des saints, se sont divisées en quatre et les ont tous brûlés…
C’est la raison pour laquelle lorsqu’il a été décrété qu’ils devraient être punis par une morsure de serpent, ces mêmes deux colonnes de feu qui avaient brûlé les reptiles sont entrées dans le nez des fils d’Aharon et les ont brûlés, réalisant ainsi la mission des serpents tués par leur intermédiaire…
« Voici, parmi les oiseaux, ceux que vous repousserez » (11, 13)
Selon le Ramban, la Torah a interdit la consommation de certains aliments car ils sont nuisibles pour le corps. Mais Abrabanel le contredit en disant : « La Torah est-elle un ouvrage médical nous indiquant ce qu’il est bon de consommer et ce qui ne l’est pas ? » D’après lui, l’interdiction concerne la perfection et la santé de l’âme et non du corps.
Pour le Rav ‘Haïm Soloveitchik, les aliments interdits nuisent au corps mais uniquement parce que la Torah n’a pas autorisé leur consommation, et non l’inverse. Ainsi, on apprend au nom de son fils, Rabbi Yitz’hak Zéev, qu’une personne à qui il serait permis de consommer des aliments généralement interdits ne devra pas craindre une détérioration de son âme et de son corps, car c’est uniquement le fait que ce soit interdit qui est nuisible.
LA LUMIERE DU ZOHAR
« Ne vous rendez point vous-mêmes abominables par toutes ces créatures rampantes ; ne vous souillez point par elles, vous en contracteriez la souillure. » (11, 43)
Rabbi Yitz’hak a dit : « Quiconque se souille par des aliments interdits est comparé à un idolâtre, ce qui est une abomination pour Hachem, or il est écrit ‘Tu ne mangeras pas toute abomination.’ »
Un idolâtre s’exclut de la vraie vie, quitte le domaine de la sainteté pour appartenir à un autre. Plus encore, il est souillé dans ce monde-ci et dans le monde à venir ; non seulement cela, mais c’est la raison pour laquelle le mot « vénitmetem (vous en contracteriez la souillure) » est écrit sans « aleph ». Par ailleurs, il est dit : « Ne souillez pas vos personnes par les quadrupèdes et les différents reptiles de la terre, que Je vous ai fait distinguer en les déclarant impurs. » Que signifie « déclarer impur » ? Déclarer impures les nations du monde qui proviennent de l’impureté, or chacun adhère à sa racine.
(Chemini 42a)
SUR LA VOIE DE NOS PERES
Qui aime ceux qui font des reproches ?
Le Chla chérissait particulièrement la leçon de morale cachée dans le silence d’Aharon au moment où Moché a pris la parole, comme il est écrit « Moché a dit à Aharon : ‘C’est là ce qu’avait déclaré Hachem en disant : ‘Je veux être sanctifié par ceux qui M’approchent et glorifié à la face de tout le peuple !’ Et Aharon garda le silence’ » (Vayikra 10, 3). Rachi commente : « Il a été récompensé de son silence. Et quelle rétribution a-t-il reçue ? De se voir adresser à lui seul la parole divine, puisque le passage concernant ceux qui boivent du vin n’a été dit qu’à lui. » Il en conclut : « Chacun apprendra d’ici à ne pas dédaigner la morale et à l’accepter avec amour.»
Dans son ouvrage « Darkei Moussar », le gaon Rabbi Ya’akov Newman a écrit : « De par notre nature, nous n’aimons pas les faiseurs de remontrances. Nous pensons que nul n’est plus intelligent que nous et que nous n’avons plus besoin d’éducation ou de leçons de morale. Notre entêtement ne laisse pas de place aux reproches. »
On a l’habitude de dire sur le ton de la plaisanterie qu’un individu dont c’est le point de vue ne se relèvera pas lors de la résurrection des morts. En effet, si le Machi’ah vient le réveiller et frapper sur sa tombe en disant « Lève-toi ! », il lui répondra : « Justement, je ne me lèverai pas ! » Se considérant le plus intelligent de tous, il répliquera ainsi au Machia’h venu le ramener de sa sottise : « Je suis le plus sage des hommes ! Crois-tu pouvoir m’enseigner quelque chose ? »
C’est la nature humaine : nous n’aimons pas les reproches. Nous avons l’impression que si quelqu’un nous adresse une remontrance, il veut notre mal. Cependant, si l’impie déteste les prédicateurs et s’imagine qu’ils lui veulent du mal, l’homme sage les apprécie, car il sait qu’ils le préparent pour la vie future. En effet, sans leurs remarques il resterait aliéné par son mauvais penchant, ses pulsions et ses désirs.
Le livre « Darkei Moussar » raconte également la tragédie qui a frappé le Admour de Gour, auteur de ‘Hidouchei HaRim. Voici ce que ses disciples ont raconté : « Alors qu’il était un jeune avrekh, il était le disciple du Admour de Kojnitz. Au bout d’un certain temps, il l’a quitté pour aller s’épanouir auprès du Admour de Peschis’ha, et le Admour de Kojnitz en a été terriblement affecté.
Le Admour de Gour a perdu ses douze fils, et a affirmé : « Je suis persuadé que tous mes fils ont disparu suite à la rancoeur que le Admour de Kojnitz a développée vis-à-vis de moi.
Mais j’ai malgré tout quitté son école. Pour quelle raison ? Car là-bas à Kojnitz, on me complimentait, tandis qu’à Peschis’ha on se montre pointilleux envers moi. Je n’ai pas besoin d’un Rav qui me couvre d’éloges mais plutôt d’un maître qui m’aide à me hausser »
Pourquoi ne m’en dites-vous pas aussi ?
Le tsaddik Rabbi Hillel Lichtenstein de Kolomya avait l’habitude de se rendre dans les petites villes juives pour y réprimander le peuple.
Un jour, il est allé à Zanz et Rabbi ‘Haïm de Zanz lui a accordé de nombreux honneurs et a échangé avec lui quelques paroles de Torah et de ‘hassidout.
Durant la conversation, Rabbi ‘Haïm lui a demandé : « Vous faites des remontrances à tout le monde. Pourquoi ne m’adressez-vous pas également quelques reproches et leçons de morale ? »
Rabbi Hillel lui a répondu : « Je suis effectivement surpris de ne pas voir chez vous un carré d’une ama sur une ama en souvenir de la destruction du Temple ! »
Immédiatement, Rabbi ‘Haïm a ordonné que l’on apporte une échelle. Il est monté dessus et a déterminé un emplacement de la bonne dimension, face à l’entrée. Puis il a pris un couteau et a raclé toute la peinture avant de remercier Rabbi Hillel pour sa remarque et de lui dire : « Merci ! »
LES HOMMES DE FOI
Récits sur les tsaddikim de la famille Pinto
Faites attention aux enfants des pauvres
Rabbi ‘Haïm avait l’habitude de citer à chaque fois qu’il en avait l’occasion l’enseignement : « Faites attention aux enfants des pauvres, car c’est d’eux que découle la Torah. » Il ne se contentait pas d’énoncer simplement ces paroles mais recherchait constamment la proximité des hommes pauvres et indigents. Il préférait leur compagnie à celle des riches et des nobles, dans un seul et unique but : aider et soutenir les pauvres dans chaque domaine.
Il allait chaque jour rendre visite à des familles nécessiteuses dont le repas était constitué d’une simple salade, ou seulement de pain et d’un verre de bière. De cette manière, il montrait à tous qu’il préférait le pain sec des pauvres aux viandes délicieuses et aux mets succulents des gens aisés.
A la fin de chaque visite, le Rav avait coutume de bénir les membres de la maison et en particulier le père de famille. Il les encourageait en leur assurant qu’il profitait davantage chez eux que chez les familles fortunées. Puis il ajoutait que la crainte de D. s’acquiert par des souffrances, par une vie de pauvreté et de détresse. Enfin, il déclarait que comme on le sait, la Torah provient justement des enfants des pauvres. On raconte en effet que les élèves du Tanna Rabbi Yéhouda bar Ilaï se couvraient à six sous un même talit.
Ainsi, nombreux sont ceux qui ont rapporté à Rabbi David ‘Hanania Pinto, petit-fils du tsaddik, que le Rav avait coutume de manger chez les pauvres et de s’asseoir justement par terre comme eux.
La force de la foi
Rabbi ‘Haïm a un jour rencontré un juif du nom de Reb Ye’hia Cohen. Le tsaddik lui a dit : « Je sais que vous avez dans votre poche tant et tant d’argent. Donnez m’en une partie pour la tsedaka, et il vous restera une certaine somme (en désignant précisément ce qui lui resterait).
Reb Ye’hia a alors demandé au tsaddik : « Mais si je vous donne autant d’argent, que me restera-t-il finalement ? » et le Rav lui a répondu : « Je promets que la bénédiction reposera sur la somme qui vous restera pour vos enfants et vos petits-enfants. »
Reb Ye’hia Cohen a alors suivi l’instruction du tsaddik et la bénédiction de ce dernier s’est réalisée. Reb Ye’hia est décédé à un âge très avancé et a mérité de voir ses enfants et ses petits-enfants devenir immensément riches.
Tel est le mérite de la foi pure en un tsaddik, selon le verset « Ils eurent foi en Hachem et en Moché Son serviteur. »