Matot Massei 21 Juillet 2012 2 Av 5772 |
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Durant le mois d’Av, nous faisons davantage preuve d’unité
(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
La parachat Mass’ei est généralement lue aux alentours de Roch ‘Hodech Av, et la michna Ta’anit (26b) dit : « Lorsque le mois d’Av arrive, on réduit les manifestations de joie », à l’opposé du mois d’Adar au sujet duquel il est dit : « A l’approche du mois d’Adar, on intensifie les joies », car c’est un mois de chance pour Israël. Rachi a expliqué (ibid. 29a) : « Pourim et Pessa’h ont été des périodes de miracles pour le peuple d’Israël », puisqu’il a accepté la Torah de bon gré, pour les juifs, ce n’étaient que joie rayonnante, contentement, allégresse et marques d’honneur. A l’inverse, l’arrivée du mois d’Av impose une diminution des réjouissances, car de par nos fautes, notre Temple a été détruit à cause de la haine gratuite. Or le fait qu’il ne soit pas reconstruit prouve que la haine gratuite existe toujours parmi nous. C’est cela qui doit nous affliger. Nos Sages ont dit que « toute génération qui ne voit pas le Temple reconstruit est considérée comme ayant vécu sa destruction. »
En réalité, nous devons toujours être un tant soit peu joyeux, car la joie est une condition permettant l’accomplissement du service divin. Le roi David a dit : « Adorez Hachem avec joie, présentez-vous devant Lui avec des chants d’allégresse », et la Guemara enseigne (Chabat 30a) que la présence divine ne réside ni dans la tristesse, ni dans la paresse, elle se trouve uniquement dans la joie de l’accomplissement d’une mitsva. Il est d’ailleurs écrit (Devarim 28, 47-48) : « Et parce que tu n’auras pas servi Hachem, ton D. avec joie et contentement du cœur, au sein de l’abondance, tu serviras tes ennemis. » Seulement, nous réduisons les manifestations de joie en cette période, car il nous incombe de nous affliger à cause de la punition que nous avons méritée pour avoir cultivé la haine gratuite et la désunion au sein de notre peuple, et avoir servi D. sans enthousiasme. Nous trouvons également dans notre paracha une allusion à la notion d’unité. Il est écrit : « Ils repartirent de ‘Harada et campèrent à Makélot ; ils repartirent de Makélot et campèrent à Ta’hat » (Bemidbar 33, 25-26). Les noms de ces arrêts n’ont pas été donnés par hasard, ils ont un lien avec ce qu’y ont vécu nos ancêtres. Ainsi, le nom « ‘Harada » évoque la crainte de D., car on désigne un homme empli de crainte divine comme craignant (‘hared) la parole de D. Leur crainte de Hachem les a unis, ce à quoi le nom « Makélot » fait référence : ils se sont rassemblés (nikalou) et se sont unis, car quiconque craint D. veille à ne pas porter préjudice à autrui et crée ainsi l’unité au sein du peuple. C’est pourquoi les bnei Israël, qui étaient empreints de la crainte de D., ont préservé l’honneur de leurs proches et installé l’unité au sein du peuple. Or lorsque nous vivons ensemble et en bonne entente, nous nous soumettons à l’autre et l’harmonie règne alors. C’est pourquoi le verset continue le récit de leurs voyages en disant : « Ils repartirent de Makélot, et campèrent à Ta’hat », sous-entendant qu’ils ont accepté de se soumettre (lihyot ta’hat) mutuellement l’un à l’autre. De nos jours, le peuple d’Israël doit acquérir ces qualités afin de remédier à la haine gratuite et de mériter la rédemption. La soumission, à laquelle le terme « Ta’hat » fait allusion, est indispensable à la pérennité de la communauté : sans elle, des querelles peuvent éclater à tout moment. Après la destruction du deuxième Temple, une grande ville nommée Beitar, située à proximité de Jérusalem, résistait toujours à la conquête des Romains. Cependant, les habitants de cette ville n’avaient pas chassé les Samaritains, et ceux-ci leur ont finalement causé du tort, comme il est raconté dans Eikha Rabba (2, 4) : un jour, un Samaritain s’est rendu chez Adrien en lui disant : « Tant que cette poule (il faisait allusion au fameux Rabbi Elazar, qui se mortifiait afin que Beitar ne soit pas détruite) se roule dans la poussière, vous ne pourrez pas conquérir la ville. Mais laissez-moi le temps de faire en sorte que vous la soumettiez aujourd’hui même. » Sa stratégie a été couronnée de succès et la Guemara relate (Guittin 57a) que les Romains n’ont pas hésité à tuer hommes, femmes et enfants, jusqu’à ce que le sang de toutes ces personnes, ne cessant de couler, rejoigne la mer Méditerranée, qui était à une distance de quatre milles. Le Midrach ajoute : « Trois cents crânes de bébés ont été trouvés sur une seule pierre et trois cents boîtiers de tefilin ont été trouvés à Beitar… ce qui fait un poids total de trois cents séin. » Ceci nous interpelle : en quoi ces enfants étaient-ils coupables ? Il est pourtant écrit : « Les enfants ne doivent pas être mis à mort pour les pères » (Devarim 24, 16) ! Mais dans ce cas, les habitants de Beitar étaient en conflit avec ceux de Jérusalem. Pour quelle raison la ville de Beitar a-t-elle été détruite ? Parce que sa population allumait des bougies pour prier pour la destruction du Temple. Nos Sages enseignent (Tan’houma Kora’h 3) : « Rends-toi compte de la gravité de la dissension ! En effet, le tribunal terrestre punit uniquement à partir de la puberté, le tribunal céleste attend l’âge de vingt ans, alors qu’ici, même les bébés ont été tués ! » Cela avait également été le cas lors de la controverse de Kora’h, comme il est dit : « avec leurs femmes, leurs fils et leurs jeunes enfants » (Bemidbar 16, 27). Ainsi, puisque les habitants de Beitar ne se sont pas unis avec le reste du peuple d’Israël et ont voulu conclure séparément une alliance avec les autres nations, ils ont été punis durement et amèrement.
De même, les disciples de Rabbi ‘Akiva, qui étaient des tsaddikim, ont subi une mort terrible à cause du manque de respect dont ils faisaient preuve les uns envers les autres. Or si l’on ne respecte pas, on méprise et on finit par haïr. C’est ce que j’ai pu observer dans la vie quotidienne : au début, nous accueillons autrui chaleureusement, mais au fur et à mesure, nous négligeons de le saluer et nous lui réservons un accueil froid, puis finalement, nous ne le saluons plus du tout, nous rapprochant du jour où nous le détesterons et deviendrons son ennemi !
D’après ce que nous venons de dire, nous comprenons mieux pourquoi Ya’akov a conclu une alliance avec Lavan, ainsi qu’il est écrit : « Maintenant, tiens, concluons une alliance, moi et toi » (Béréchit 31, 44). Il s’agit ici d’une alliance de séparation, comme le dit le verset (ibid. 52) : « Que cette pierre en soit témoin, je ne dépasserai pas de ton côté ce monceau, et tu ne dépasseras pas de mon côté ce monceau ni cette pierre, dans de mauvaises intentions. » Dès lors, leurs chemins se sont séparés et ils ne se sont plus revus. Le Ben Ich ‘Haï explique (Parachat Vayétsé) que contrairement aux alliances de paix avec les nations du monde, ce genre d’alliance est autorisé.
Puissions-nous mériter d’intensifier l’unité parmi nous, de bannir la haine gratuite de notre camp et de mériter la rédemption absolue et la construction du Temple prochainement, amen.
LES PAROLES DES SAGES
Comment surmonter sa colère ?
A trois occasions dans la Torah, on constate que Moché s’est mis en colère et qu’une halakha lui a échappé de ce fait.
Une de ces situations est relatée dans notre paracha : lorsque les bnei Israël sont partis combattre Midian et qu’il a appris à leur retour que les soldats avaient laissé vivre toutes les femmes, contrairement à toute attente, Moché s’est mis en colère, comme il est dit : « Moché se mit en colère contre les officiers de l’armée, chiliarques et centurions, qui revenaient de l’expédition de guerre. »
Le gaon Rabbi ‘Haïm Schmulevitch déclare sans hésiter que la colère de Moché dans la guerre contre Midian était justifiée. En effet, l’expédition avait pour but de venger D. contre ce peuple, qui avait tendu un terrible piège à Israël par l’intermédiaire de ses femmes. Laisser en vie les femmes de ce camp revenait donc à faire entrer ce même piège à l’intérieur du camp d’Israël.
Cependant, bien que sa colère ait été justifiée et malgré sa grande piété, Moché, le dirigeant du peuple d’Israël, a été puni par l’oubli de certaines halakhot. Pour quelle raison ? En réalité, le fait qu’une personne en colère perde sa sagesse n’est pas une « punition » pour s’être fâché, c’en est plutôt une conséquence naturelle : la colère entame l’intelligence de la personne concernée. C’est pourquoi, que la colère soit justifiée ou non, l’homme qui s’emporte se voit privé de sa propre sagesse. Ainsi, même Moché, qui s’est montré jaloux pour l’honneur de Hachem et ne cherchait qu’à sauver les bnei Israël de la faute, n’a pas été préservé de la conséquence destructrice de sa colère.
Voici ce que rapporte la Guemara dans le traité Pessa’him (66b) :
« Reich Lakich a dit au sujet d’une personne qui se met en colère : s’il s’agit d’un homme sage, sa sagesse le quitte ; s’il s’agit d’un prophète, sa prophétie l’abandonne. En ce qui concerne l’homme intelligent, nous le déduisons de l’incident qui s’est produit avec Moché, comme il est écrit ‘Moché se mit en colère contre les officiers de l’armée’ et plus loin ‘Elazar le cohen dit aux hommes de la milice, qui avaient pris part au combat, Ceci est un statut de la loi que Hachem a donnée à Moché’, ce qui signifie que la loi avait été cachée à Moché. »
Afin de surmonter la colère qui nous emplit parfois, Rabbi ‘Haïm Schmulevitch nous conseille de méditer sur les propos de nos Sages, qui ont longuement critiqué ce trait de caractère (Traité Nedarim 22a) : « Quiconque se met en colère est dominé par toutes sortes d’enfer », ou encore « Quiconque se met en colère ne perçoit même plus la valeur de la présence divine, oublie son étude et augmente sa bêtise. »
La colère apparente
Nous avons beaucoup à apprendre des comportements des grands d’Israël, de leurs nobles traits de caractères et de leur application extrême à s’éloigner de l’emportement.
Dans ses écrits, Rabbi ‘Haïm Vital, un des principaux disciples du Ari zal, a beaucoup critiqué la colère et a témoigné en ces termes sur le comportement de son maître :
« Mon maître faisait attention à la colère plus qu’à toutes les autres transgressions, même lorsque celle-ci concernait l’accomplissement d’une mitsva. Même quand j’enseignais à mon frère, que j’étais déçu par son étude et que cela m’irritait, mon maître me mettait en garde et me le reprochait fortement. Il justifiait ainsi son point de vue : « Toutes les autres fautes ne détériorent qu’un membre du corps, alors que la colère détériore l’âme entière. »
On raconte que chez Rabbi Israël Lipkin de Salant, le « père du Moussar », on ne trouvait pas la moindre trace de colère ni de rancœur. Il veillait particulièrement à déraciner complètement de son cœur la contrariété et avait coutume de dire :
« Presque toutes les transgressions commises entre un homme et son prochain découlent de la rancœur et de la rigidité. »
On ne l’a jamais vu s’énerver ou invectiver quiconque, malgré sa nature très émotive et sensible. Il avait déraciné de son cœur tout ressentiment ou animosité : ce type de sentiment ne le concernait plus ! Si quelqu’un lui causait du tort ou le vexait, non seulement il laissait passer et lui pardonnait, mais en plus il s’empressait de lui faire du bien…
Selon Rabbi Israël Lipkin, l’ordre de ne pas se mettre en colère est inclus dans le commandement de la Torah « Tu marcheras dans Ses voies » : nous devons nous attacher aux midot de Hachem et les imiter. Or quand nous éveillons le courroux de D., Il ne Se contente pas de Se montrer longanime mais continue à nous accorder la vie et à satisfaire tous nos besoins et désirs.
Il est déjà arrivé, au sein de la communauté, que Rabbi Israël ait eu l’air de s’emporter afin de réprimander un individu ou une assemblée, mais toute sa colère n’était que superficielle et simulée.
Certains ont même remarqué qu’en plein emportement, le Rav se tournait vers le mur en chuchotant « Colère apparente, mais pas colère de cœur… »
On raconte que Rabbi Sim’ha Zissel Ziv de Kelem s’était imposé de ne jamais se mettre en colère sans revêtir au préalable un habit spécialement réservé à cet effet… Le machguia’h Rabbi Eliahou Lopian a affirmé quant à lui n’avoir jamais puni ses enfants ou qui que ce soit d’autre au moment de la faute, de peur que son reproche ne soit encore empreint de colère. Il attendait donc d’être certain d’avoir banni tout ressentiment envers le fauteur, et alors seulement, il le réprimandait.
Goûter le levain et le miel
Toujours à ce sujet, le Roch Yéchiva de « Porat Yossef », Rabbi Yéhouda Tsadka, avait l’habitude d’expliquer le verset « Car nulle espèce de levain ni de miel ne doit fumer, comme combustion » (Vayikra 2, 11) en rapport avec le trait de caractère de la colère. Ainsi, il disait : le « levain » fait allusion à un visage courroucé, à un air revêche. Le « miel » est quant à lui évocateur de douceur et de plaisir.
Ainsi, quiconque désire atteindre la perfection doit s’inspirer du levain et prendre un air fâché au bon moment, c’est-à-dire par exemple lorsqu’il se heurte à des fauteurs. Mais il doit également savoir afficher une mine rieuse et parler avec douceur à ceux qui accomplissent la volonté du Créateur. En revanche, à propos d’un individu qui correspondrait à l’image de « tout levain », c’est-à-dire qui serait toujours contrarié et courroucé, même envers ceux qui observent la Torah et les mitsvot, ou alors qui serait entièrement « miel », agirait avec douceur même avec ceux qui délaissent la voie de Hachem, le texte dit « il ne doit pas fumer, comme combustion, en l’honneur de Hachem. »
GARDE TA LANGUE
Nous éliminons trois mille accusateurs
Réduire de dix mots par jour nos paroles interdites revient à s’abstenir de plus de trois mille mots par an. Or de même que dans l’étude de la Torah chaque mot constitue une mitsva en soi, chaque parole interdite est une faute à part entière. Mais chaque faute entraîne la création d’un ange accusateur. Ainsi, en combattant notre mauvais penchant et en supprimant trois mille paroles interdites, nous éliminons trois mille accusateurs et créons des défenseurs à la place, ainsi qu’il est dit : « quand on s’abstient de commettre une faute, on reçoit la même récompense que si l’on avait accompli une mitsva. »
A LA LUMIERE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
La faute que Yom Kippour ne rachète pas
« Les enfants de Gad et de Reouven vinrent et dirent : si nous avons trouvé grâce à tes yeux, que ce pays soit donné en part à tes serviteurs. Ne nous fais pas traverser le Jourdain. Et Moché dit aux enfants de Gad et de Reouven : est-ce que vos frères partiront en guerre et vous resterez installés ici ? »
C’est très étonnant : Pourquoi Moché n’a-t-il pas laissé les enfants de Gad et de Réouven lui dire immédiatement ce qu’ils demandaient, mais les a-t-il interrompus en commençant à les admonester ? Peut-il venir à l’esprit qu’ils ne voulaient pas entrer en Erets Israël, mais souhaitaient au contraire se révolter contre Hachem de la même façon que leurs ancêtres s’étaient révoltés ?
Ce passage, qui est toujours lu entre le 17 Tamouz et le 9 Av, contient un rapport avec la destruction du Temple, dont nous devons tirer la leçon. A un autre endroit, les Sages ont dit (Yoma 9b) : « Pourquoi le Deuxième temple a-t-il été détruit, alors qu’à cette époque on étudiait la Torah et on pratiquait les mitsvot et la générosité ? A cause de la haine gratuite. »
Il faut toujours prêter plus d’attention aux rapports avec les autres qu’aux rapports avec D. Ainsi, quand on se repent de ses fautes envers D., elles sont pardonnées à Yom Kippour, mais même si l’on se repent et se confesse de ses fautes envers le prochain, Yom Kippour ne les rachète pas jusqu’à ce que celui-ci les ait pardonnées (Yoma 85b). C’est pourquoi à l’époque du Temple, D. a pardonné les fautes envers Lui mais pas celles commises envers le prochain. Par ailleurs, les Sages ont dit (Berakhot 5a) qu’Erets Israël ne s’acquiert que par les difficultés, si bien que Moché n’a pas annexé immédiatement les territoires de Si’hon et Og à Erets Israël, parce qu’ils ne s’acquièrent pas par les difficultés comme Erets Israël. Et quand les enfants de Gad et Reouven lui ont dit « Ne nous fais pas traverser le Jourdain », il en a conclu qu’ils ne voulaient pas prendre sur eux les difficultés en même temps que tous les autres bnei Israël, et préféraient s’installer dans le pays de Si’hon et Og, qui ne s’acquiert pas par les difficultés. C’est pourquoi il les a interrompus immédiatement en leur disant : est-ce que vous vous imaginez que vous allez rester ici en paix sans aucun problème alors que les autres bnei Israël affrontent des épreuves en Erets Israël ? « Est-ce que vos frères partiront en guerre et vous resterez installés ici ? » nous enseigne qu’il craignait qu’il n’y ait pas la paix entre eux, ca r il n’y a pas de plus grande séparation que de ne pas se soucier de la peine de l’autre.
Immédiatement, les enfants de Gad et Reouven lui ont dit : « Nous passerons en armes devant les bnei Israël jusqu’à ce que nous les amenions dans leur domaine, et nos enfants resteront dans les villes fortifiées contre les habitants du pays. » Cela signifie qu’ils avaient pris sur eux de vivre la peine de leurs frères en Erets Israël, et ils n’en ont pas dévié jusqu’à ce que tout le pays ait été conquis et partagé, et que les bnei Israël y soient installés en paix.
Mais comme ils avaient mal formulé leur requête et qu’ils avaient dit « ne nous fais pas traverser le Jourdain », le Saint béni soit-Il les en a punis, et lorsque San’heriv a exilé les dix tribus, ils ont été les premiers à être exilés. Pourquoi ? Parce qu’ils auraient pu éviter de dire « ne nous fais pas traverser le Jourdain », ce qui semblait indiquer qu’ils ne souhaitaient pas partager les difficultés des autres tribus. Comme ils avaient utilisé cette expression, ils ont été punis en premier.
A LA SOURCE
« Il y restera jusqu’à la mort du cohen gadol qu’il a oint de l’huile sainte » (35, 25).
Dans le traité Makot (11b), la Guemara pose la question suivante : « Est-ce qu’il l’a donc oint ? Est-ce que c’est l’assassin qui a oint le cohen gadol ? Mais cela signifie : qui était oint à son époque. »
Une question s’impose : pourquoi n’est-il pas dit dans le verset qui nous occupe : « jusqu’à la mort du cohen gadol qui a été oint de l’huile sainte ? »
Le gaon Rabbi Méïr Sim’ha de Dvinsk, auteur de Méchekh ‘Hokhma, répond à cela que ce verset fait allusion aux voies par lesquelles le Créateur dirige le monde. Il arrive que quelqu’un soit nommé cohen gadol à cause du destin d’une autre personne, qui a tué involontairement, car il a été décrété du Ciel combien d’années le meurtrier resterait dans la ville de refuge, et donc la providence doit choisir un cohen gadol dont les années ont été comptées pour correspondre aux années d’exil du meurtrier.
Il est donc juste que le verset dise : « Il y restera jusqu’à la mort du cohen gadol qu’il a oint », car les voies de la providence veulent que ce soit le meurtrier qui provoque l’onction du cohen gadol !
« Et après la mort du cohen gadol, le meurtrier retournera dans le pays de sa possession » (35, 28)
Le verset l’appelle « meurtrier » même une fois qu’il a subi son châtiment par l’exil dans les villes de refuge. Le livre « Siftei Cohen » explique que c’est en accord avec les paroles du Rambam (Hilkhot Rotsea’h 7, 14), qui écrit à propos du meurtrier qui a été exilé dans une ville de refuge : « Bien que sa faute ait été expiée, il ne retournera jamais à son statut social antérieur. Il restera toute sa vie déchu de sa position, parce qu’il a été l’instrument de ce drame. »
C’est pourquoi le verset utilise l’expression de « meurtrier », pour enseigner que bien qu’il se soit repenti et que sa faute ait été pardonnée, il doit reconnaître en lui-même qu’il est un « meurtrier ».
« Il n’en manque pas un seul » (31, 49)
C’est quelque chose de très étonnant, écrit le Ramban, et cela fait partie des grands miracles qui sont arrivés à Israël, entre autres ici, dans la guerre contre Midian. Les Midianites étaient aussi nombreux que le sable de la mer, pourtant les juifs en ont tué et capturé des milliers et des myriades, et le verset témoigne que pas un seul ben Israël n’est tombé à la guerre : « Il n’en manque pas un seul. »
Si l’on se demande ce qui leur a valu ce miracle, le Ramban répond qu’il a eu lieu parce que leur mérite était entier. C’est ce qu’ont expliqué les Sages (Chabbat 64a) : « Il n’en manque pas un seul » – pas un seul de nos frères qui sont à l’armée n’est parti vers un autre endroit pour commettre une faute. Moché leur a dit : « S’il en est ainsi, pourquoi amener un sacrifice ? » et ils ont répondu : « Pour expier » – les pensées du cœur.
« Que ce pays soit donné à tes serviteurs en propriété, ne nous fais pas traverser le Jourdain » (32, 5)
Certains ont posé la question : pourquoi les enfants de Gad et de Reouven ont-ils attendu la fin de la guerre de Midian pour demander l’autre rive du Jourdain ? Ils auraient pu le faire après la guerre de Si’hon et Og !
Rabbi Moché Sofer explique dans son livre « ‘Hatam Sofer », à la suite du Rambam, que les bnei Israël n’ont reçu l’ordre de cachériser leurs ustensiles qu’après la guerre de Midian et non après les guerres de Si’hon et Og, parce que le pays de Si’hon et Og est soumis aux mêmes lois qu’Erets Israël (du point de vue halakhique). Pendant la conquête d’Erets Israël, des ustensiles non cachers étaient permis, si bien qu’il n’était pas nécessaire de les cachériser.
C’est pourquoi, dit le ‘Hatam Sofer, après avoir reçu l’ordre de cachériser leurs ustensiles après la guerre de Midian, ils ont compris que les pays de Si’hon et Og étaient soumis aux mêmes lois qu’Erets Israël, c’est pourquoi ils sont venus demander : « que ce pays soit donné à tes serviteurs en propriété. »
SUR LA VOIE DE NOS PERES
La machine à laver ne tombe pas en panne
Dans son ouvrage « Kessef Niv’har » (premier commentaire sur la parachat Mass’ei) Rabbi Yochiyahou a expliqué le verset « Moché inscrivit leurs départs (motsaéhem) et leurs stations sur l’ordre de Hachem » : si nos dépenses (hotsaot) sont destinées à notre voyage vers le monde à venir, c’est-à-dire que nous nous suffisons de l’indispensable, tant dans le domaine de la nourriture que dans celui de l’habillement, alors nous sommes dans l’esprit de ‘l’ordre de Hachem’. « Leurs départs et leurs stations (motsaéhem) » : l’objectif de nos déplacements et de nos voyages d’affaires doit être uniquement de subvenir à nos dépenses obligatoires (hotsaot) et non d’accéder à une vie de luxe, de nous enrichir et de satisfaire nos désirs. Voici le fondement de la vie pour quiconque veut mériter d’acquérir la couronne de la Torah et servir D. Ce sont-là les paroles d’un sage.
Rabbi ‘Haïm de Volojine gardait chez lui une lettre intéressante que le Ba’h avait envoyé à son gendre le Taz, et la lisait à haute voix à ses disciples : « D. m’a octroyé le mérite de pouvoir confectionner un nouvel habit d’été en l’honneur de Yom Tov. Mais pour le terminer il me manque une certaine somme. J’ai donc à présent besoin de mes quatre pièces d’or qui se trouvent chez toi. Je te demande de me les envoyer et d’en retirer six petites pièces pour que ton épouse, ma fille, puisse acheter des noix et se réjouir pendant la fête. »
A chaque fois que Rabbi ‘Haïm lisait cette lettre, il pleurait en disant : « Nous apprenons de là que ces gueonim étudiaient la Torah dans la pauvreté et la misère, qu’il se suffisaient de peu et étaient contents de leur sort. »
Un comportement différent
Un avrekh qui vivait dans une grande misère s’est rendu chez le Rav Shakh il y a quelques années, lui faisant part de son projet naissant d’aller travailler en soirée : il continuerait d’étudier en journée, alors que le soir il s’adonnerait à une activité lui rapportant un revenu honorable.
Le Roch Yéchiva lui a déconseillé d’agir ainsi, mais l’avrekh s’est entêté et a mis son projet à exécution. Quelques mois plus tard, il est retourné chez le Rav pour rendre compte de sa situation présente : « Certes, mes revenus ont bien augmenté, mais lorsque je procède à mon bilan mensuel, le résultat est surprenant. Lorsque je me consacrais à la Torah pendant toute la journée, il me restait un peu d’argent. Aujourd’hui, alors que je travaille et que je gagne bien, il ne me reste plus rien à la fin du mois. » Le Rav a répondu : « C’est très simple. Là-Haut on adopte un comportement particulier envers un avrekh qui se consacre entièrement à la Torah. Si D. a promis d’assurer la subsistance de ceux qui étudient la Torah, c’est qu’Il a de nombreux moyens de répandre la bénédiction sur la petite bourse que l’avrekh reçoit au kollel. Mais depuis que vous avez voulu sortir du cadre de l’étude et que vous avez commencé à travailler, le comportement vis-à-vis de vous a changé. On vous considère comme quelqu’un qui travaille, qui se donne du mal pour nourrir sa famille. Alors évidemment, pour pouvoir subvenir aux besoins de votre famille avec le métier que vous avez choisi, quelques heures en soirée ne suffisent pas : il faut fournir beaucoup plus d’efforts pour atteindre la somme nécessaire ! » Le Roch Yéchiva a souvent expliqué comment D. agit avec ceux qui étudient la Torah : il répand bénédiction et réussite sur la bourse du kollel. Cette attitude évite également toute panne à la machine à laver ainsi qu’aux autres appareils ménagers de la maison et protège les membres de la famille de toute maladie, afin d’économiser au avrekh des dépenses superflues.
HOMMES DE FOI
Histoires des justes de la famille Pinto
Rav Chim’on Cohen, le fils de Rabbi Ye’hia Cohen, qui était un bon ami du tsaddik Rabbi Moché Aharon Pinto, a raconté à notre maître chelita qu’il avait une fois voyagé avec son père vers un village reculé du Maroc, en passant par le désert. Ils se rendaient chez un Arabe qui leur devait de l’argent.
Au milieu du chemin, au plus profond de la nuit, la voiture tomba en panne et ils se retrouvèrent tous deux dans un endroit désert, obscur et dangereux, sans téléphone, sans électricité et sans aucune aide. Ils craignaient pour leur vie, redoutaient les brigands, les renards, les loups et les scorpions qui habitaient le désert. Lorsque Rabbi Ye’hia prit conscience de la situation, il se mit à prier pour que le mérite de Rabbi ‘Haim Pinto les protège de tout malheur.
Puis un miracle se produisit : alors qu’ils étaient encore en train de prier près de la voiture en panne, ils aperçurent au loin un motocycliste qui avait à la main tous les outils nécessaires à la réparation d’une voiture.
Le motocycliste s’approcha d’eux et demanda à Rabbi Ye’hia Cohen : « Que faites-vous dans le désert en pleine nuit ? » En guise de réponse, le Rav a pointé du doigt la voiture incapable d’avancer et plantée au beau milieu du désert.
Le motocycliste sortit son matériel, manipula certaines parties du moteur avant de dire à Rabbi Ye’hia : « Entrez dans la voiture et essayez de la faire démarrer. » Sitôt dit, sitôt fait ! La voiture démarra ! Il en sortit alors pour remercier l’homme qui les avait sauvés, mais… ils ne le trouvèrent plus… il avait disparu comme il était venu !
Ils avaient, dans cette situation, mérité deux choses.
Tout d’abord, leur prière avait été acceptée et avait eu un effet immédiat. Mais en plus, ils avaient mérité de voir un ange ! En effet, qui pouvait être cet homme sinon un ange venu du Ciel pour les sauver par le mérite du tsaddik ? Le désert n’est qu’une grande étendue de plusieurs centaines de kilomètres, sans village ni maisons d’habitation, donc d’où viendrait un motocycliste équipé d’outils ?
Lorsque notre maître chelita a eu écho de cette histoire extraordinaire, il a dit à son élève Rabbi Chim’on Cohen : « Tu as beaucoup de mérite, Chim’on, d’avoir vu un ange de Hachem. Puisque tu as bénéficié d’un tel miracle, ne perds jamais de vue qu’il y a un Créateur, et sois scrupuleux dans l’accomplissement de chaque mitsva, la plus légère comme la plus importante. »