Vayeira 3 Novembre 2012 18 Hechvan 5773 |
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Investissons dans l’éducation
(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
A la fin de cette paracha, nous constatons la grandeur d’Avraham, avec quelle abnégation il est parti offrir son fils, en faisant abstraction de tout son amour pour ce fils qui devait prolonger sa démarche. Avraham a mis de côté les cent ans pendant lesquels il avait attendu et espéré proclamer le Nom de D. dans le monde, il a évacué tout son amour et tout ce qui le reliait à son fils, et à partir du moment même où D. lui a ordonné de sacrifier Yitz’hak, celui-ci appartenait entièrement au Saint, béni soit-Il, comme s’il n’était plus son fils. C’est la raison pour laquelle Avraham l’appelle « na’ar » (jeune garçon) dans la phrase « Moi et le jeune garçon nous irons jusque là-bas. »
Nous trouvons quelque chose du même genre dans une halakha citée par le Rema (Ora’h ‘Haïm 98 11) selon laquelle il est interdit d’embrasser ses jeunes enfants à la synagogue, afin d’imprimer en eux la notion qu’il n’y a pas de plus grand amour que l’amour de D. C’est pourquoi quand Avraham est allé pour accomplir l’ordre de Hachem, il a maîtrisé son grand amour pour son fils, qui n’était plus qu’un simple « jeune garçon », afin de lui insuffler la notion qu’il n’y a pas de plus grand amour que celui de D. Et effectivement, la Torah témoigne qu’il a caché sa pitié à son fils Yitz’hak.
Avraham n’a prêté aucune attention à ce que diraient les gens, qui verrait dans son acte celui d’un idolâtre offrant son fils au Molekh, non plus qu’à ce que lui disait le mauvais penchant, et qui était tout à fait logique : hier Tu m’as dit « en Yitz’hak sera ta descendance » (Béréchit 21, 12), et maintenant Tu me dis « Prends ton fils (…) et offre-le en holocauste (Ibid. 22, 2) !
Il ne s’est pas laissé habiter par de telles pensées, il s’est levé tôt et avec empressement pour accomplir la mitsva. Il a lui-même sanglé son âne, sans faire appel à ses serviteurs, à cause de son grand amour. En chemin, il a traversé un fleuve dont l’eau lui est monté jusqu’au cou et il a continué de tout cœur et avec joie pour accomplir la volonté de D..
C’est pourquoi, même si en fin de compte il n’a pas égorgé Yitz’hak, c’est considéré comme s’il l’avait fait, et à Roch Hachana nous évoquons le mérite de la akéda, comme le disent les Sages (Roch Hachana 16a) au nom de Rabbi Abahou : « Pourquoi sonne-t-on le chofar avec la corne d’un bélier ? Le Saint, béni soit-Il a dit : Sonnez devant Moi un chofar de bélier, pour que J’évoque en votre faveur le sacrifice d’Yitz’hak. Et nous disons dans la prière de Moussaf : « Souviens-Toi aujourd’hui avec miséricorde du sacrifice d’Yitz’hak. »
Cette abnégation d’Avraham nous montre l’ampleur de son amour pour D. et son désir de Le servir, au point qu’il ne lui restait plus aucun amour pour les vanités de ce monde, comme il l’a témoigné sur lui-même (Béréchit 18, 27) : « Je suis poussière et cendre. » Bien que la mitsva ait été très difficile, et hérissée d’obstacles, il l’aimait tant qu’il l’a trouvée facile.
Avraham a transmis cet amour à son fils Yitz’hak, et le verset témoigne effectivement à quel point il a investi dans l’éducation de ses proches (Ibid. 18, 19) : « Si je l’ai distingué, c’est pour qu’il prescrive à ses fils et à sa maison après lui d’observer la voie de Hachem, en pratiquant la vertu et la justice. »
Dans le même ordre d’idées, on raconte sur le ‘Hatam Sofer qu’un jour, il était malade et ne pouvait pas assurer son étude habituelle avec ses élèves. Alors il leur a proposé de demander à son fils, le gaon Rabbi Chemouël Binyamin (qui fut plus tard connu sous le nom de « Ketav Sofer » et qui devait prendre sa place) de donner le cours à sa place.
A cette époque-là, Rabbi Chemouël Binyamin n’était pas encore connu, et les élèves furent très étonnés. Comment pourrait-il remplacer son père le gaon ? Pourtant, quand sur l’ordre de son père il lui adressèrent cette demande, il accepta immédiatement et donna un cours qui englobait tous les domaines de la Torah, un cours qui émerveilla les meilleurs des élèves.
Les élèves du ‘Hatam Sofer vinrent lui demander comment il savait que son fils était capable de donner un pareil cours, alors que personne ne le connaissait. Il répondit : « Les larmes et les prières pour que mon fils devienne un talmid ‘hakham et grand en Torah ne sont donc rien pour vous ? J’ai tellement investi en lui que j’étais certain que ces investissements porteraient leurs fruits. »
C’est ce que nous avons dit ci-dessus. Avraham avait investi dans son fils tant d’amour et de véritable crainte de D. pure que lorsque est arrivée l’épreuve de la akéda, il n’a pas eu besoin de lui demander s’il était d’accord pour être sacrifié, il était évident qu’il irait au sacrifice dans la joie, et effectivement : « Ils allaient tous deux ensemble », ensemble avec la même joie pour accomplir l’ordre de Hachem.
Chez nous, quand un père investit toutes ses forces dans l’éducation de ses enfants et leur insuffle l’amour et la crainte de D., cela porte ses fruits et les enfants aiment Hachem de tout leur cœur et de toute leur puissance. Quand le père se lève le matin pour prier en vivant cela comme une obligation plutôt que comme une joie, quand il réveille son fils pour aller à la prière en leur montrant un visage sombre et non la joie de l’accomplissement des mitsvot, alors le fils aussi accomplira les mitsvot de façon sèche, sans amour, tout cela parce que son père n’a pas investi en lui le véritable amour de D., qui mène à la joie d’accomplir les mitsvot, au point d’être prêt à donner sa vie pour elles.
LES CEDRES DU LIBAN
Rabbi ‘Haïm Pinto « le petit », que son mérite nous protège
Cette semaine verra la hilloula de l’un des géants de l’esprit, un rejeton de la noble dynastie des Pinto, au Maroc, à savoir le tsaddik habitué aux miracles Rabbi ‘Haïm Pinto « le petit », qui a mérité et fait mérité le grand nombre, à la fois dans le domaine spirituel et matériel, en faisant revenir le cœur des juifs à leur Père des Cieux, de son vivant ainsi qu’après sa mort.
Rabbi ‘Haïm, que son mérite nous protège, avait la renommée d’être un tsaddik qui amenait des délivrances, à la suite de quoi des centaines et des milliers de gens venaient le trouver pour recevoir de lui une bénédiction ou une délivrance, par le mérite de sa grande piété. Il se sentait également très proche des pauvres, comme l’un d’entre eux, et ils leur donnait même à sentir que ce n’était pas de leur faute s’ils étaient pauvres. En même temps, il ne cessait d’exiger des riches et des opulents du pays de faire davantage pour leurs frères démunis qui se trouvaient dans la détresse. Rabbi ‘Haïm Pinto le deuxième (« le petit »), que son mérite nous protège, vivait simplement et avec grande discrétion. Il s’habillait comme un pauvre et fréquentait beaucoup les pauvres. Il ne modifiait cette coutume que pendant les Chabbats et fêtes, pendant lesquels il s’habillait magnifiquement en l’honneur du Chabbat ou de la fête.
De plus, il s’occupait des pauvres spirituellement aussi. L’histoire suivante en témoigne :
Pendant l’une des années de disette que le pays connaissait souvent et qui provoquaient une grande détresse, il demanda à son épouse d’enlever toutes les housses des matelas des lits de la maison et de les utiliser pour en coudre des vêtements. Il expliqua qu’il fallait donner ces vêtements aux femmes pauvres dont les vêtements étaient usés.
En fait, beaucoup de gens venaient chez lui pour prier et recevoir une bénédiction. Ceux d’entre eux qui se voyaient délivrés après sa bénédiction revenaient chez lui pour le remercier, mais Rabbi ‘Haïm rectifiait immédiatement les choses en leur disant simplement de ne remercier que le Créateur du monde.
La somme exacte
Rabbi ‘Haïm se souciait beaucoup des nécessiteux de sa ville. Il avait un emploi du temps fixe : tous les matins, après la prière, il se rendait sur la tombe de son grand-père, le tsaddik et kabbaliste Rabbi ‘Haïm le grand, que son mérite nous protège, au vieux cimetière, et il évoquait toujours son nom lorsqu’il bénissait les gens. Il leur disait : « Que le mérite de mon grand-père vous protège. »
Ensuite, il allait au nouveau cimetière, où il priait sur la tombe de son père, le tsaddik et saint Rabbi Yéhouda (Hadan) zatsal, et de là il revenait en ville vers les magasins pour acheter des marchandises pour les pauvres de la ville.
Sa station suivante était la porte de la ville. Il se tenait là pendant quelques heures en attendant les passants ou les invités qui arrivaient de l’extérieur, pour réaliser la mitsva de tsedaka. Rabbi ‘Haïm leur demandait une bonne contributions pour les pauvres de la ville, en leur expliquant qu’ils accompliraient ainsi la mitsva de donner en secret, ceux qui donnaient ne sachant pas à qui allait l’argent, et les pauvres n’ayant pas honte de prendre l’aide proposée par le tsaddik.
Les juifs qui passaient par là savaient que Rabbi ‘Haïm Pinto avait le don extraordinaire de dire à chacun la somme d’argent exacte qu’il avait dans son porte-monnaie. C’est pourquoi ils ne pouvaient se dérober, et chacun lui donnait en fonction de ses possibilités.
Au bout de quelques heures, il comptait l’argent et demandait à son accompagnateur d’aller dans les boutiques où ils se servaient et de payer aux propriétaires ce qui leur était dû. Ensuite, il lui disait d’aller chez telle dame ou tel monsieur apporter à l’une de la viande et du pain, à l’autre des fruits et des légumes. Il distribuait ainsi toute la nourriture aux nécessiteux, et épargnait la honte de la faim aux pauvres de la ville.
« Le prophète »
A la fin de sa vie, Rabbi ‘Haïm perdit la vue. Et malgré tout, même alors il distinguait parfaitement, au-delà des sens naturels, si bien qu’il sentait et savait ce qui se passait autour de lui, qui se tenait auprès de lui et qui se rapprochait de lui.
Ceux qui venaient lui demander un conseil ou une bénédiction étaient également stupéfaits de recevoir de lui des détails exacts sur leur santé ou l’état de leurs finances. Il n’est donc pas étonnant que pendant la période où il a été aveugle, les grands de la ville l’aient surnommé « le prophète ».
Peu de jours avant son décès, tôt le matin, les habitants de la maison furent réveillés par un coup brutal. Ils se levèrent rapidement et trouvèrent leur père le tsaddik, Rabbi ‘Haïm, que son mérite nous protège, enveloppé de son talit et portant ses tefilin, debout au milieu de la prière de cha’harit, qui s’était écroulé et était étendu à terre. Ils s’empressèrent de le relever et de le coucher sur son lit. Et alors, il appela ses fils et leur dit « le moment est venu où il faut bénir les enfants. »
Il se mit à les bénir alors qu’ils se tenaient à ses côtés, ainsi que son fils Rabbi Moché Aharon zatsal, bien qu’il ait été chez lui à Mogador, loin de Casablanca. Et quand il en arriva à bénir son fils Rabbi Raphaël zatsal, il pleura et dit : « Je pleure de la façon dont il mourra, il sera un sacrifice pour tout le peuple d’Israël. » Entre autres, il prononça certaines paroles surprenantes et terribles que ce n’est pas ici le lieu de rapporter.
Et effectivement, en 5740, une nuit où Rabbi Raphaël dormait, un criminel cruel rentra chez lui tout à coup et le frappa avec une barre de fer, l’assassinant dans de terribles douleurs. Puisse Hachem le venger.
Le soleil s’est couché à midi
Le tsaddik resta couché pendant trois jours, jusqu’à ce que son âme monte au ciel, le 15 ‘Hechvan 5698, à l’âge de soixante-treize ans.
Quand la mauvaise nouvelle de sa mort se répandit, toutes les yéchivot et institutions de Torah fermèrent, et tous les élèves sortirent avec leur rabbanim pour participer à la mise en bière. Dans la ville de Casablanca aussi, sans que personne l’ait ordonné, comme Rabbi ‘Haïm était estimé de tous, juifs et non-juifs, la totalité des commerces fermèrent, et tout le monde vint participer à l’enterrement. Dans toutes les synagogues, on enleva le rideau qui recouvrait l’Arche, et la ville était plongée dans le deuil comme à Ticha BeAv, car le soleil s’était couché en plein midi.
Une immense foule accompagna le tsaddik de sa maison jusqu’au vieux cimetière de la ville de Casablanca, où il repose jusqu’à la venue du Machia’h, puisse-t-elle être rapide. On raconte que pendant l’enterrement, il plut à torrents, des éclairs illuminaient le ciel, qui pleurait son départ. Dans son oraison funèbre, le gaon Rabbi Chimon Aboucassis zatsal demanda que la pluie s’arrête, pour qu’on puisse l’enterrer dignement, cette prière fut exaucée et la pluie s’arrêta d’un seul coup. D’autres grands de la génération firent son oraison funèbre au moment de l’enterrement.
En vérité, les fils de Rabbi ‘Haïm voulaient l’enterrer à Mogador, à côté de son saint grand-père Rabbi ‘Haïm le grand, car lui-même avait demandé quelques jours avant sa mort qu’on l’emmène dans sa ville natale, mais les rabbanim de la ville, et parmi eux le Av Beit Din de Casablanca, le gaon Rabbi Moché ‘Haï Eliakim zatsal (le responsable de la communauté, monsieur Yi’hiya Zaguri, s’était joint à eux), demandèrent que Rabbi ‘Haïm soit enterré à Casablanca, parce qu’à Mogador il y avait déjà son grand-père le tsaddik, et ici son mérite protégerait la ville. Et effectivement, en fin de compte il fut enterré à Casablanca dans la concession de Rabbi ‘Haïm Dahan, qui lui donna sa place.
Que son mérite nous protège, nous et tout Israël, Amen.
LES PAROLES DES SAGES
Demander la permission au patron
Nous allons poursuivre cette semaine le sujet abordé dans la parachat Noa’h, pour faire l’éloge du peuple d’Israël et de ses qualités de générosité, qu’il s’agisse de donner de leur énergie ou de leur argent, en examinant quelle immense importance les Sages d’Israël ont accordé à l’amour de l’argent, et à quel point ils ont fui le moindre soupçon de conduite ayant le moindre relent de vol ou d’usage d’un argent qui ne serait pas véritablement à eux.
Lorsque le gaon Rabbi Avraham Yitz’hak Hacohen Kook zatsal était Rav de la ville de Jaffa et des environs, un couple qui désirait se séparer se présenta à lui. Au début, le Rav confia l’affaire à d’autres dayanim du beit din. Ces derniers prirent leur temps parce qu’ils voulaient essayer de les réconcilier, mais quand ils virent que c’était inutile, ils se mirent à préparer le guett.
Pour prendre une décision, les dayanim se réunirent chez le Rav Kook, mais il leur dit d’attendre encore quelques jours. Ils ne comprirent pas pourquoi, surtout en vue du fait que le couple souffrait tellement.
Et voici que quelques jours plus tard arriva au beit din quelqu’un d’autre qui était mêlé à cette histoire, et il s’avéra que c’était lui le véritable mari de la femme, alors que celui qui voulait lui donner un guett n’était pas le mari, et que les témoins qui avaient témoigné de son identité avaient menti. Tout le monde vit clairement que le Rav avait fait un « miracle ».
Plus tard, le Rav Chemouël Kook zatsal, le frère du Rav, révéla la véritable raison pour laquelle il avait retardé le guett. L’un des témoins travaillait dans un ministère, et il est fréquent que les fonctionnaires prennent pour leur usage personnel des objets comme du papier, des stylos ou des choses de ce genre, sans demander la permission des responsables. C’est pourquoi le Rav avait craint qu’il y ait un vol qui le rende inapte à témoigner. Il avait donc cherché à vérifier s’il y avait quoi que ce soit qui puisse rendre son témoignage invalide, et entre temps le véritable mari était arrivé.
Dans un autre cas de préparation d’un guett à Jaffa, le Rav Moché Méïr Yachar a raconté que les deux témoins ne s’étaient pas présentés. Les employés du beit din s’étaient proposés comme témoins, mais il avait refusé, en disant qu’il arrive parfois que les fonctionnaires prennent pour leur usage personnel des choses qui appartenaient à l’endroit où ils travaillaient, comme des crayons ou des stylos, du papier ou du scotch, et cela constituait une crainte de vol qui rend la personne inapte à témoigner.
Voici une autre histoire extraordinaire à ce propos : lorsqu’il était à Jérusalem, pendant une prière de min’ha (« min’ha guedola », au milieu de la journée), le Rav Kook avait prolongé la prière de la amida, et tout en priant, il avait fait signe au ‘hazan de commencer la répétition de la prière sans attendre qu’il ait terminé, comme c’est l’usage.
Le ‘hazan s’était exécuté, mais même après la fin de la prière, tout le monde s’aperçut que le Rav était encore en train de prier. C’est seulement au bout de six heures environ qu’il termina la prière et fit trois pas en arrière.
Sur quoi le Rav avait-il prié ce jour-là pendant tellement longtemps ? Personne ne le savait. Un jour, le tsaddik de Jérusalem Rabbi Arié Léwin zatsal raconta que ce jour-là, le beit din du Rav avait pris une décision sur un guett compliqué et que le processus touchait à sa fin. Avant de finaliser l’écriture du guett, le Rav avait vu que l’un des témoins écrivait une lettre personnelle sur du papier à lettres à en-tête. Le Rav craignait que la valeur de ce papier soit supérieure à une perouta, auquel cas l’homme aurait un statut de voleur et serait donc inapte à témoigner.
Il ne voulait pas faire honte à ce témoin potentiel, si bien qu’il donna l’ordre d’interrompre les débats et de prier min’ha, il prolongea sa prière jusqu’aux approches du coucher du soleil, et comme on n’écrit pas de guett pendant la nuit, on fut obligé de reporter la fin des débats au lendemain, moment où il serait devenu possible d’amener d’autres témoins.
Tout le monde le fait…
Un matin arriva aux bureaux de la rabbanout quelqu’un qui voulait poser au Rav une question halakhique. Le Rav Kook vit que l’horloge marquait exactement dix heures du matin. Il demanda à l’homme quel était son travail. « Je suis fonctionnaire à la municipalité », répondit-il. « Est-ce que vos supérieurs vous ont autorisé à quitter votre travail à une heure pareille ? » lui demanda le Rav. L’homme reconnut qu’il n’avait pas demandé la permission, et ajouta que presque tout le monde se conduisait de cette façon et arrangeait ses affaires personnelles pendant les heures de travail.
Le Rav Kook refusa de répondre à sa question, et lui dit que comme il touchait de l’argent pour ces heures-là, il s’agissait d’un risque de vol, et qu’il ne voulait pas aider quelqu’un à commettre une faute.
Un Rav est le serviteur de tous
Le gaon Rabbi Moché Leib Cha’hor zatsal a raconté que dans les premiers temps de l’aliya du Rav à Jérusalem, ses proches et ses amis avaient été témoins du fait que beaucoup de gens venaient le déranger avec diverses requêtes. Comme on s’était aperçu qu’il s’efforçait d’aider tout le monde, cela se prolongeait à toute heure du jour. Ses proches en arrivèrent à la conclusion qu’il était souhaitable de spécifier à la porte d’entrée des heures de réception, et placèrent immédiatement un écriteau sur la porte. Mais cet écriteau disparut au bout d’un jour. On le plaça de nouveau et il disparut de nouveau.
Les proches se mirent à surveiller ce qui se passait, et qui faisait cela. Ils s’aperçurent que c’était le Rav lui-même qui enlevait l’écriteau. Quand on lui demanda pourquoi il ne voulait pas d’une disposition qui pourrait l’aider et lui alléger la tâche, il répondit : « Un Rav n’est pas son propre maître, un Rav est un serviteur de tous, et un serviteur doit être à la disposition de ses maîtres à chaque instant où ils ont besoin de lui et à toute heure où il est nécessaire. »
GARDE TA LANGUE
Il y a des occasions
Il y a quatre moments propices à la techouva : 1) Tous les jours avant de s’endormir, c’est le meilleur moment de tous, alors que rien n’est encore inscrit en haut ; 2) La veille du Chabbat ; 3) La veille de Roch ‘Hodech ; 4) La veille de Yom Kippour. Il faut se demander en soi-même si on s’est conduit correctement en ce qui concerne la parole. Si on constate qu’on n’a pas commis de faute avec sa langue, il est bon de noter dans un carnet qu’on a reçu l’aide de Hachem dans ce domaine, on s’en réjouira et on remerciera Hachem pour le passé en lui demandant Sa protection pour l’avenir. Et on aura constamment devant les yeux l’enseignement de nos Sages selon lequel le Saint, béni soit-Il a dit : « Mes enfants, si vous voulez être sauvés du Guéhénom, gardez-vous du lachon hara ! » On ne cherchera pas à trouver le moyen d’être indulgent dans ce domaine et on fera tous les efforts possibles pour ne pas être pris au piège du mauvais penchant.
(Zakhor leMyriam)
A LA LUMIERE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
La mitsva de l’hospitalité était un remède pour Avraham
« Il était assis à l’entrée de la tente dans la chaleur du jour » (Béréchit 18, 1).
Avraham attendait des invités, bien que ç’ait été le troisième jour après sa circoncision. Il était très malade, au point que même le Saint, béni soit-Il en personne était arrivé pour lui rendre visite, comme l’explique Rachi sur le verset « Hachem lui apparut », à la suite des Sages qui disent (Baba Metsia 86b) que le Saint, béni soit-Il était venu s’enquérir de sa santé, il faut donc croire qu’il souffrait vraiment beaucoup.
Et c’est surprenant : comment est-il possible qu’un homme dans une situation semblable réussisse à se tenir debout, et plus encore, à courir pour recevoir les invités ? Non seulement cela, mais il se dépensait lui-même pour activer les préparatifs, il a couru pour chercher un veau, et il était encore debout auprès d’eux pour les servir, comme le dit le verset. C’est que c’est justement cette volonté d’Avraham d’accomplir la mitsva de l’hospitalité qui l’a guéri. Il voulait proclamer le Royaume du Créateur dans le monde entier, et faire ainsi entrer le maximum de gens possible sous les ailes de la Chekhina, pour qu’ils profitent de l’éclat de la présence divine qui l’entourait. Quand il a eu la chance de pouvoir le faire maintenant avec ses invités, il en a eu une grande joie, au point qu’il en a complètement oublié ses douleurs.
C’est comme quelqu’un qui doit subir une opération ou une intervention douloureuse : on lui injecte un anesthésique pour qu’il ne souffre pas. De même Avraham, pour oublier ses douleurs, devait faire profiter autrui de l’éclat de la Chekhina à travers la mitsva de l’hospitalité, et sans cette mitsva, il aurait souffert encore plus.
D’après cela, il faut comprendre que l’ange qui a été envoyé pour le guérir, c’était effectivement par la mitsva de l’hospitalité, car c’est cela qui était susceptible de guérir Avraham de ses maux.
A LA SOURCE
« Il prit du beurre, du lait et le veau qu’il avait préparé. » (18, 8)
Le ‘Hatam Sofer écrit dans une réponse à son disciple Rabbi Aharon Polack :
Quand j’étais enfant, j’ai fait un exposé devant mon maître le gaon Rabbi Nathan Adler, et ce que j’ai dit lui a plu. Les Sages ont enseigné qu’Avraham a accompli toute la Torah avant qu’elle ait été donnée, même les « erouvei tavchilin ». Et les Ba’alei HaTossefot ont expliqué dans la parachat Vayéra qu’il prenait soin de ne pas mélanger les plats de lait avec les plats de viande, car il est écrit « du beurre et du lait », et ensuite « le veau ». J’ai ajouté que ce qui accroissait encore le mérite d’Avraham, c’est qu’un « ben Noa’h » doit se garder de manger une partie d’une bête vivante, et avant que la Torah soit donnée et qu’il soit permis de boire le lait d’une bête, on n’en avait pas le droit, mais le fait qu’Avraham avait donné du lait à ses invités indique qu’il s’était déjà tellement renforcé dans l’observance de la Torah qu’il n’était plus considéré comme un « ben Noa’h », même quand il s’agit de se montrer plus indulgent. Et cela ne s’appliquait pas seulement lui, mais à tous ceux qui étaient invités sous son toit : ils en avaient le droit, si c’était du lait « chamour ».
On pourrait dire que le lait de la bête égorgée qui se trouvait devant eux ne comportait pas d’interdiction de ce qui provient d’une bête vivante. Mais s’il en était ainsi, il n’aurait pas été nécessaire de veiller à ne pas mélanger la viande et le lait, car le lait d’une bête égorgée n’est pas interdit par la Torah, et il n’y avait pas non plus à faire attention à ne pas boire du lait après avoir mangé de la viande (comme on le trouve chez les décisionnaires). C’est donc qu’il leur a certainement fait boire le lait d’une bête vivante, et ce n’était permis que pour lui, qui n’était plus un « ben Noa’h » et était considéré comme un juif…
« Je suis poussière et cendre » (18, 27)
Rabbi Méïr Yé’hiel Halévi d’Ostrowtsa a donné l’explication suivante :
Parce qu’il avait dit « Je suis poussière et cendre », Avraham a mérité que dans sa guerre contre les quatre rois, chaque grain de sable qu’il lançait devenait un sabre, et chaque brin de paille devenait une flèche meurtrière, comme le disent les midrachim.
De même qu’il avait considéré son corps comme de la poussière, le Saint, béni soit-Il lui a rendu la pareille et a considéré la poussière comme son corps. De même que son corps abritait des forces cachées, pour lutter pour sa vie avec bravoure, la poussière en était capable aussi. En ce qui concernait Avraham, la poussière et le corps étaient la même chose.
Car on renvoie à l’homme l’image de sa propre conduite…
« Un ange de D. l’appela du Ciel et dit : Avraham, Avraham, et il dit : Me voici » (22, 11)
Ensuite vient : « Il dit : n’envoie pas la main sur le garçon et ne lui fais aucune blessure. »
C’est surprenant : Pourquoi, lorsque Avraham a reçu l’ordre d’offrir en holocauste son fils unique, est-ce D. Lui-Même Qui lui a donné cet ordre, alors que celui de ne pas l’égorger effectivement a été donné par un ange ?
C’est une grande leçon. Le livre « Hizaharou Bikhvod ‘Havereikhem » (« Veillez à l’honneur du prochain ») rapporte au nom des Sages d’Israël :
« Il y a là une allusion, pour nous enseigner que l’ordre de porter atteinte à l’honneur d’autrui, ou de lui causer de la peine ou un dommage quelconque, on ne doit pas l’entendre d’un homme, même s’il est comme un ange céleste, mais uniquement de la voix de Hachem personnellement.
Mais quand il s’agit de ne pas faire de mal à quelqu’un, et même si c’est D. Qui avait donné l’ordre inverse, il suffit de s’en abstenir même en écoutant un simple ange…
La vie dans la paracha
L’enseignement de Rabbeinou ‘Haïm ben Attar, le saint Or Ha’Haïm
« Il leur fit un repas, fit cuire des galettes et ils mangèrent » (19, 3)
Cela signifie qu’il a préparé un festin en leur honneur, mais ils n’ont mangé que des galettes, car Lot ne respectait pas la Torah comme Avraham. C’est pourquoi ils ne voulaient pas manger la viande qu’il avait égorgée, comme ils avaient mangé la viande préparée par Avraham, mais seulement les galettes. Et les anges savaient qu’il avait effectué les prélèvements nécessaires.
Ou bien, comme il n’y avait pas encore de cohanim, ils sont devenus cohanim et ont mangé la terouma, mais pas ce dont on n’avait pas pris les prélèvements.
D’après ce qu’ont dit nos Maîtres (Béréchit Rabba 50, 12), c’était le 16 Nissan, et il leur a fait manger des matsot. Et comme il faut bien les surveiller, il a dû les faire cuire lui-même, et c’est ce qui est écrit : « il a fait cuire des galettes. »