TOLDOT 17 Novembre 2012 3 Kislèv 5773 |
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Quiconque apprécie peut recevoir !
(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
Rachi explique selon le midrach que le jour-même où Essav est revenu fatigué du champ, Avraham est décédé afin qu'il ne voie pas son petit-fils emprunter une mauvais voie, ce qui aurait contrarié la vieillesse heureuse que D. lui avait promise. C'est pourquoi Hachem a abrégé son existence, et Ya'acov a préparé un plat de lentilles pour réconforter son père endeuillé.
Il est surprenant que D. ait raccourci de cinq ans la vie d’un tsaddik uniquement pour que celui-ci ne voie pas son petit-fils s'éloigner du droit chemin. Ainsi, on raconte sur le roi David (Chabbat 30a) qu’il a demandé à Hachem : « Maître du monde, quelle est la date de ma mort ? », et Il lui a répondu : « Tu mourras pendant Chabbat. » Mais David a demandé à mourir plutôt un dimanche. D. a rétorqué : « Ton fils Chelomo aura déjà atteint la royauté, et une royauté ne peut pas empiéter sur une autre. » Alors David a proposé : « Que je décède la veille du Chabbat ! », et Hachem a répondu : « Assurément, un jour dans Tes parvis vaut mieux que mille autres », en d'autres termes : « Un jour pendant lequel tu étudies la Torah M'est préférable à mille holocaustes que ton fils Chelomo M'offrira sur l'autel. »
Nous voyons donc l'importance d'un jour de vie d'un tsaddik dans ce monde : D. n'est pas prêt à le reprendre même un jour trop tôt. S'il en est ainsi, comment Hachem a-t-Il pu raccourcir de cinq ans la vie d'Avraham ? Il était pourtant le pilier de bonté du monde, et détournait chaque jour de nombreuses personnes de la faute ! Pourquoi D. n'a-t-Il pas empêché Essav de devenir impie pendant encore cinq ans, respectant ainsi la promesse d'une vieillesse heureuse pour Avraham, qui n'aurait pas vu son petit-fils mal agir ?
D'autre part, pourquoi Essav a-t-il demandé à Ya'acov de lui faire engloutir les lentilles, et n'a-t-il pas cherché à manger de manière ordinaire ? Nous n'avons jamais vu un être humain se nourrir ainsi ! Pourquoi Essav a-t-il donc cherché à manger de la sorte ?
Enfin, il est également très surprenant que Ya'acov ait demandé à Essav de lui vendre le droit d'aînesse. En effet, Essav était un parfait impie qui ne risquait pas de servir au Temple, car celui-ci était destiné au peuple d'Israël, qui descend de Ya'acov et non de lui : ce droit d'aînesse n'avait donc aucune utilité pour lui. De plus, il est écrit qu’Essav le méprisait. Dans ce cas, pourquoi Ya'acov était-il gêné que son frère soit appelé « aîné », alors que cela ne signifiait rien pour lui concrètement ?
L'explication réside dans la phrase de Rabbi Chim'on bar Yo'haï (Berakhot 7b) : « L'intrusion d'un mauvais chemin dans une maison est plus pénible que la guerre de Gog et Magog. » En effet, immense est la souffrance des parents qui voient leur enfant se détourner de la bonne voie, et plus précisément renier D.
Or c'est justement le jour du décès d’Avraham qu'Essav vient mépriser le service du Temple. Même face à la bénédiction que lui et Ya'acov s'apprêtent à recevoir, Essav ne renforce pas sa foi, et ne s'endeuille pas pour son grand-père Avraham. Au contraire, il se rend chez Ya'acov et il tourne en ridicule tout le bien qu'il a reçu.
Mais Essav l'impie agit ainsi justement auprès de Ya'acov, car chez ses parents, au contraire, il adoptait une attitude digne et les induisait en erreur par ses paroles. Or Ya'acov avait grandi avec lui et le connaissait. C'est pourquoi il s'est rendu chez lui pour se moquer et exprimer son mépris du bon chemin prôné par Avraham leur grand-père, précisément en ce jour du décès du tsaddik.
De surcroît, Essav n'a pas voulu manger de manière ordinaire, mais il a voulu qu'on lui verse les lentilles dans la bouche. Bien que Ya'acov les ait préparées en signe de deuil pour la disparition d'Avraham, Essav était plein de mépris et a voulu se nourrir comme les chameaux, qui ouvrent leur bouche pour consommer de grandes quantités. Il est évident que s’il avait demandé à manger normalement, Ya'acov ne l'en aurait pas empêché par la vente du droit d'aînesse. Mais en voyant avec quel dédain Essav considérait le décès de son grand-père le tsaddik, et comment il s'entêtait à vouloir se nourrir à la manière d’un animal, il n'a pas voulu le servir gratuitement et l'a bloqué par la vente du droit d'aînesse.
Nous comprenons à présent pourquoi Hachem a abrégé de cinq ans la vie d'Avraham : en effet, lui-même aurait voulu mourir prématurément plutôt que de voir son petit-fils Essav renier la bonté de D. et dénigrer la promesse « Des rois seront tes descendants. »
Même si, d'un point de vue halakhique, l'aînesse d'Essav n'avait aucune incidence puisqu'il n'avait aucune chance de servir au Temple, Ya'acov ne voulait pas le laisser détenteur de ce privilège quand il l'a vu négliger la bonté de Hachem. C'est pourquoi il l'a incité à vendre ce droit.
Une fois qu’il a vendu le droit d'aînesse par mépris, la bénédiction n'a plus eu aucune utilité pour lui, car elle ne pouvait plus avoir de prise sur lui. En effet, en tournant ce droit en dérision il avait provoqué la mort prématurée d'Avraham, et par là même empêché la venue de grandes délivrances dans le monde en l'honneur de D. Ainsi, Essav, qui est à l'origine de tout ce mal, n'est pas apte à être appelé « aîné », même si cela ne change rien dans la pratique.
Malgré tout, on voit qu’Yitz’hak a voulu bénir Essav avant son décès. Il avait certainement ressenti par esprit prophétique qu'Essav l'impie n'avait aucun mérite pouvant le protéger en ce monde-ci, puisqu'il avait renié la bonté de D. et vendu son droit d'aînesse. Mais il ne savait pas que son fils avait méprisé la bénédiction, c'est pourquoi il a voulu le bénir. Or D., qui en avait connaissance, a fait en sorte que les bénédictions reviennent à Ya'acov.
HOMMES DE FOI
Histoires des justes de la famille Pinto
Un samedi soir, Rabbi 'Haïm Pinto a quitté sa maison en compagnie de son encaisseur d’œuvres de bienfaisance. En chemin, ils ont rencontré Monsieur Krouchi, et Rabbi 'Haïm l'a invité à se joindre à eux. Tous trois sont entrés dans une maison où tout le monde récitait des psaumes au chevet d'un malade agonisant. Rabbi 'Haïm a demandé ce qui se passait, et on lui a répondu que l'homme en question avait avalé une épine, et qu'il était donc sur le point de mourir.
Le fils de Monsieur Krouchi a raconté à Rabbi David 'Hanania Pinto que Rabbi 'Haïm n'avait pas du tout paru inquiet. Il avait annoncé résolument aux membres de la famille : « Le moment de mourir pour lui n'est pas encore arrivé. »
Puis il avait demandé à Monsieur Krouchi de chanter des piyoutim avec lui. Dès qu'ils ont commencé, le souffrant s'est mis à vomir, pendant un long moment, jusqu'à rejeter l'épine.
HISTOIRE VECUE
L'extraordinaire lignée de la famille Teomim
« Il se trouva qu'elle portait des jumeaux » (Béréchit 25, 24)
Le seigneur de Koli Radziwil traversait la ville d’Eilia lorsqu'il égara sa bourse. Afin de ne pas avoir à se présenter aux notables de cette ville, il décida de se tourner vers un membre de la communauté juive qui lui prêterait le montant dont il avait besoin. On lui indiqua alors l'adresse de Rabbi Mintz, fils du Rav de Padoue, qui accéda à sa demande avec générosité. Avant de prendre congé, il demanda au Rav quel service il pourrait lui rendre dès son retour dans son pays. Le Rav lui répondit que son fils Chaoul, étudiant à la yéchiva de Lublin, aurait éventuellement besoin de ses bienfaits.
Dès son retour, le seigneur contacta Chaoul, qui lui plut. Il vanta ses grandes qualités auprès des ministres de Pologne, qui furent si impressionnés par sa grande sagesse et l'étendue de ses connaissances qu’après la mort du roi Bathory, ils nommèrent Rabbi Chaoul Wahl comme roi par intérim.
Rabbi Chaoul avait un fils très doué nommé Méïr qu'il chérissait et qu'il emmenait régulièrement avec lui à la cour royale, où il était aussi très aimé des princes.
Un jour, la fille du roi Sigmund tomba gravement malade. Les médecins, qui ne parvenaient pas à diagnostiquer le mal de la princesse, l'interrogèrent. Celle-ci leur avoua alors, en pleurs, qu'elle souhaitait ardemment épouser Méïr Wahl. Les médecins annoncèrent aux parents que tant que la requête de la princesse ne serait pas satisfaite, celle-ci serait en danger. A ce moment-là, les parents consultèrent le pape.
Alors qu'il ne se doutait de rien, Rabbi Chaoul remarqua, dans la cour royale, que les princes chuchotaient à son sujet. Il s'enquit de ce qui se tramait, et apprit la nouvelle.
Pour trouver une solution à cette situation compromettante, il décida de marier son fils à une autre jeune fille avant de recevoir une quelconque demande provenant de la cour royale. Il partit chercher à travers les hôpitaux une fille malade sans espoir de guérison : il y en avait une à l'hôpital de Varsovie ! Son fils s'y rendit, « épousa » la jeune fille, et revint satisfait.
Pendant ce temps-là, le pape avait donné son accord aux parents de la princesse, et ceux-ci formulèrent une demande à l’adresse de Rabbi Chaoul, qui se montra « désolé », en expliquant que son fils était déjà marié, mettant ainsi fin à la discussion.
Trois ans plus tard, une jeune fille se présenta à la maison d'étude de Rabbi Chaoul et demanda à parler à Rabbi Méïr. Rabbi Chaoul s'enquit de son identité, et la jeune fille lui raconta qu'elle était celle que Méïr avait épousée lorsqu'elle était malade. Quand elle avait appris que le fils de Rabbi Chaoul était venu l'épouser, une nouvelle vitalité avait jailli en elle, et petit à petit, son état s'était amélioré jusqu'à la guérison complète. A présent saine et sauve, elle réclamait de vivre avec son mari.
Sidéré, Rabbi Chaoul lui expliqua que ce mariage n'avait été qu'une mise en scène pour sauver son fils de la détresse, et qu'il était prêt maintenant à la dédommager financièrement selon ses exigences. Après négociations, la femme accepta de recevoir l'acte de divorce pour une somme de dix mille ducats.
Avant que l'acte de divorce ne soit émis, la jeune fille demanda à parler à son mari en privé.
Elle lui dit : « Ecoute-moi, Méïr ! Je sais qu'on te proposera d'excellentes filles, riches et de lignée respectable. Mais je voudrais te proposer une jeune fille instruite et emplie de la crainte de D. Elle est riche et fille d'érudits, et elle vient d'une bonne famille. »
« Qui est-ce ? » demanda Méïr.
Elle répondit : « Moi-même ! Je possède dix mille ducats que ton père m'a donnés pour le ‘guet’, et je suis la fille de Rabbi Pin'has Halévy Horowitz (de la famille du Chla), Rav de Cracovie et beau-frère du Rema. Suite au décès de mon père, je suis tombée malade sans espoir de guérison, jusqu'à que tu viennes me raviver d'un souffle nouveau.
Je m'apprête à présent à recevoir un guet de ta part : par cela tu me sépares de toi et de mon espoir de vie. Peut-être pourrais-tu évaluer la douleur que tu me causerais ainsi ? Tu m'as donné la vie, pour me la retirer à présent ! »
Méïr demanda alors aux dayanim d'interrompre la procédure de divorce, et s'adressa à son père : « Papa, cette fille est orpheline, et vient d'une famille d'érudits. Je ne veux pas lui causer de tort, et je suis prêt à vivre avec elle, car réjouir le cœur d'une orpheline est plus cher à mes yeux que tous les plaisirs de ce monde ! »
Ce discours déplut à Rabbi Chaoul, qui a répondit : « Mon fils, tu peux renoncer à tous tes plaisirs, mais tu ne peux pas faire fi des attentes que j'ai de toi. J'aimerai que tu épouses une fille jeune, et que tu aies des enfants, ce qui ne sera pas le cas avec celle-ci, qui est déjà âgée. »
Après une longue polémique, ils allèrent tous deux consulter l'oncle de la jeune fille, le Rema, pour qu'il tranche la question.
Celui-ci réfléchit, avant de répondre : « L'argument de Rabbi Chaoul n'est pas valable. En effet, selon les lois de la nature elle peut encore avoir des enfants. Il est possible qu'elle donne naissance à des jumeaux, des enfants de valeur... or un enfant de valeur équivaut à plusieurs enfants ! »
Rabbi Chaoul accepta l’argument du Rema, et enlaça son fils en lui disant : « Vous serez des enfants pour moi. Que s'accomplissent en vous les paroles de Rabbi Moché Isserles, et sa bénédiction. Que vous donniez naissance à des familles de 'jumeaux’ (teomim), des enfants pieux et de grande valeur comme toi ! »
Rabbi Méïr et sa femme décidèrent que l'enfant qui leur naîtrait aurait pour nom de famille « Teomim ». S'il s'agissait d'une fille, son mari changerait son nom de famille en « Teomim ».
Ils donnèrent naissance à une fille, qui, plus tard, épousa Rabbi Yona Frankel, qui a pris le nom de « Frankel Teomim ». Il s'agit de Rabbi Yona Frankel-Teomim, Rav de Metz et auteur de « Kikayon Deyona ».
GARDE TA LANGUE
Restriction de la parole
Chacun a la possibilité de s'éloigner de la médisance en évitant de parler beaucoup, car un excès de parole favorise la faute (« Zakhor LeMyriam).
J'ai entendu parler d'un des grands de la génération qui faisait très attention à ne jamais prononcer le nom d'une personne pour parler à son sujet. (« Cha'ar Hatevouna »).
A LA LUMIERE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
Tout juif a la possibilité de sentir l’odeur du Gan Eden
Les Sages disent sur Ya'akov (Tan’houma Toldot 11) quel lorsqu’il est entré auprès de son père avec le plat qu’il avait préparé pour recevoir sa bénédiction, l’odeur du Gan Eden est entrée avec lui. Et alors, son père Yitz’hak lui a dit (Béréchit 27, 27) : « Voyez, l’odeur de mon fils est comme l’odeur du champ que Hachem a béni. » Quelle est donc l’odeur de ce champ ? Les Sages nous disent (Ta’anit 29b) que c’est l’odeur d’un verger de pommiers. Et nous devons comprendre ce que c’est que « l’odeur du Gan Eden » et celle du verger de pommiers.
Nous pouvons l’expliquer de la façon suivante : On sait que toutes les mitsvot accomplies créent un ange qui sera notre défenseur, et de plus, à chaque instant où quelqu’un étudie la Torah, le souffle de sa bouche crée des anges bénéfiques. Où ces anges se trouvent-ils ? Evidemment dans le Gan Eden, où se rassemblent tous les anges qui ont été créés par la Torah et les mitsvot de chaque juif. Quand quelqu’un a besoin d’une protection ou d’une délivrance, ces anges qui le protègent l’accompagnent et veillent sur lui attentivement.
Par conséquent, tout juif a la possibilité de sentir l’odeur de ces anges, une « odeur de Gan Eden », quand ils l’entourent pour l’accompagner. En revanche, la faute entraîne l’incapacité à sentir cette odeur céleste, qui est toute entière faite de spiritualité. Cependant, le Chabbat, quand l’homme s’élève en spiritualité, il peut sentir un tout petit peu de cette « émanation du monde à venir », de ce parfum de Gan Eden, car l’écorce matérielle qui l’entoure est un peu amoindrie.
C’est pourquoi le Chabbat est seulement « un petit peu » du monde à venir, et pas vraiment le monde à venir lui-même, et peut-être plus encore : il est possible que le corps matériel ne soit pas capable de supporter ce parfum de sainteté, c’est pourquoi il ne lui est pas accordé de pouvoir le respirer. Cependant Ya'akov était totalement pur et purifié de toute faute, même lorsqu’il était en présence de son père Yitz’hak, qui était un holocauste saint, c’est pourquoi en ce qui le concerne il n’y avait aucune séparation qui fasse obstacle, aucun écran qui le sépare des anges. Par conséquent, Ya'akov percevait en tout temps l’odeur des anges, cette odeur de Gan Eden qui émanait d’eux, si bien que lorsqu’il est rentré chez son père, cette odeur l’y a accompagné.
Nous comprenons à présent ce que représente l’odeur du champ de pommiers, qui est également évoqué dans Chir HaChirim : Je t’ai éveillée sous le pommier (8, 5).
Cela signifie que lorsque l’homme s’efface totalement devant Hachem, comme s’il était « sous », en dessous, alors il prend l’odeur de ce champ, qui est le gan Eden béni par Hachem, à savoir le champ de pommiers.
A LA SOURCE
« Le plus grand servira le plus petit » (25, 23)
Ce verset est interprété par l’Admor Rabbi Avraham Ya'akov de Sadigora zatsal comme évoquant le fait qu’on doit grandement travailler sur soi, au point de se rendre petit et de mériter l’humilité, qui est la plus grande de toutes les qualités.
« Ya'akov donna à Essav du pain et un plat de lentilles, et il mangea et but » (25, 34)
Essav avait seulement demandé le plat de lentilles, pourquoi Ya'akov a-t-il ajouté du pain ? De plus, selon l’avis de ceux qui estiment qu’il a dit « je vais mourir » parce qu’il était malade de fatigue et de faim, de quelle utilité sera son serment, puisque la halakha est qu’un serment prononcé sous la contrainte n’a aucune validité, et puisqu’il était sous la contrainte, son serment n’était donc pas valable ?
Le Maharil Diskin explique que c’est pour cela que Ya'akov lui a donné du pain, pour le rassasier avant le plat de lentilles, qu’il mange d’abord et calme sa faim, si bien que son serment ne serait pas prononcé sous la contrainte de la faim C’est alors seulement qu’il lui a acheté le droit d’aînesse contre le plat de lentilles, alors qu’il était déjà en bonne santé et en possession de toutes ses facultés.
« Rivka prit les beaux vêtements d’Essav son grand fils qu’elle gardait à la maison et en revêtit Ya'akov son petit fils » (27, 15).
C’est surprenant : Ya'akov est né quelques instants après Essav, est-ce qu’à cause de cela il doit être appelé « petit », et Essav « grand » ?
Le Rav tsaddik de Zwella l’explique ainsi :
Si jamais on voit un homme grand couché sur un lit, c’est un signe qu’il est malade. Sa démarche est chancelante, et il éveille le souci et les craintes. Et s’il n’arrive plus à parler, il est certainement à l’agonie.
Alors que si un jeune enfant est dans son berceau, il n’est ni malade ni inquiétant, il va grandir et se mettre à marcher. Si sa démarche est chancelante, il n’y a rien à craindre, il va grandir et elle se raffermira. Et s’il ne parle pas encore, qu’est-ce que cela fait, il finira par grandir et ouvrir la bouche…
Donc « Ya'akov » est toujours « petit », tout défaut qui est en lui est appelé à se modifier, il va rapidement en guérir, alors qu’« Essav » est « grand », tout défaut qui est en lui est incurable, toute maladie qui est en lui ne va faire que s’aggraver…
LA VIE DANS LA PARACHA
Selon l’enseignement du Ora’h ‘Haïm
« Les fils s’agitaient en elle » (25, 22)
Il faut comprendre « ils s’agitaient », et aussi « pourquoi donc moi », que Rachi explique en disant : si la douleur de la gestation est si grande, pourquoi donc est-ce que moi j’ai aspiré et prié pour concevoir ?
On a du mal à accepter l’interprétation selon laquelle cette tsaddéket ne désirerait plus la grossesse à cause de la douleur qui l’accompagne.
De plus, à quoi a-t-elle pensé lorsque D. lui a dit qu’elle portait deux peuples ? Cela n’enlevait rien à sa douleur. Et nos Maîtres ont donné beaucoup d’explications (voir Rachi sur ces versets), mais on ne connaît pas le sens direct de ce verset. Le sens du mot « vaitrotsetsou » (ils s’agitaient) indique une course (ritsouts), ce qui signifie qu’ils étaient très serrés et ne pouvaient cohabiter dans son ventre, ce qui montre que sa grossesse n’était pas stable.
Et elle dit : « s’il en est ainsi, pourquoi donc (lama zé) moi », le « zé », c’est quelque chose qu’on montre du doigt, pourquoi suis-je enceinte alors que tout cela est en vain ?
Elle est allée consulter Hachem : cela veut dire implorer Sa miséricorde pour mener sa grossesse à bien, et apprendre ce qui pourrait l’empêcher de perdre l’enfant qu’elle portait, car du Ciel on ne lui avait pas fait un miracle pour ensuite la décevoir et porter un enfant qui ne viendrait pas au monde. Elle n’a jamais regretté la douleur de la gestation, car les tsaddikim souffrent beaucoup en ce monde-ci pour une cause bonne et éternelle.
LES CEDRES DU LIBAN
Rabbi Raphaël Kadir Sabban zatsal - "L'ange Raphaël"
L'une des personnalités associées particulièrement à la ville de Netivot est le Rav vénéré de cette ville, qui a occupé cette fonction jusqu'à son dernier jour : Rav Raphaël Kadir Sabban. Il est né le 1er Tevet 5670 dans la ville de Djerba, au sud de la Tunisie. Dans sa jeunesse, il a étudié la Torah chez les Rabbanim d'Afrique du nord, dont Rabbi Mekikats Cheli (auteur de « Midracho chel Chem ») et son brillant maître Rabbi Ra'hamim 'Haï 'Havita HaCohen (auteur de « Sim'hat Cohen »). Plus d'une fois, lorsqu’ils étudiaient tous les deux dans la cour, un vent soufflait et éteignait la mèche, mais ils poursuivaient leur étude à la seule lueur de la lune. En 5690, alors qu'il était âgé de vingt ans, Rav Raphaël devint le Dayan de sa ville natale. Deux ans plus tard, en 5692, il fut nommé directeur d'une école talmudique, et en 5699 membre du tribunal.
En 5711, il est devenu Rav de la ville de Madnin. Outre ses fonctions rabbiniques, il était également le représentant officiel de la communauté face aux institutions gouvernementales de Djerba, et était à la tête de diverses institutions de Torah et de 'hessed, comme la yechiva « Or Torah », « Bikour 'Holim », « Matan Basseter », « Va'ad Batei Haknesset » etc.
En 5717 il s'est installé en Israël, et dès lors, il a occupé pendant trente-huit ans le poste de Rav de Netivot. Durant toutes ces années, il s’est considéré comme responsable de la situation matérielle et spirituelle des habitants de la ville. Nombreux sont ceux qui trouvaient en lui une oreille attentive à leurs problèmes. Pendant trente-huit ans, il était tel un aigle protégeant ses oisillons, pour leur éviter toute difficulté halakhique ou autre dans la vie quotidienne. Il a créé des institutions toraniques et a diffusé la Torah dans les environs. Il s'est occupé de l'éducation religieuse dans sa ville, et a décrété, avec Baba Salé et d'autres grands en Torah, qu'il n'y aurait pas de cours mixtes dans la ville de Netivot.
Lorsque la « Yéchivat Haneguev » a été fondée par Rav Issakhar Méïr, il a apporté son aide, et a continué à la soutenir durant toute sa vie. Plus tard, quand la yéchivat « Kissé Ra'hamim » a été créée, il a œuvré de toute sa force pour la plus grande gloire de la Torah.
Soulignons qu'alors qu'il était directeur de la yéchivat « Kissé Ra'hamim », qui a formé de nombreux disciples à l'enseignement, il a mentionné dans son article « Chéva'h Hatorah Véderekh Halimoud » quelques principes pour les jeunes. En voici quelques-uns :
La précision – prêter attention à chaque mot dans le langage de nos Sages et des commentateurs, et plus précisément dans le langage de Rachi. Une étude simple et exacte, avant toute discussion dialectique raffinée et pointue.
L'écriture : il faut habituer les élèves à écrire dès le plus jeune âge. Il faut encourager même ceux qui n'étudient pas la Guemara à noter de nouvelles explications sur le 'Houmach. De manière générale, l'étude des principes de l'écriture de la langue.
Une attitude respectueuse envers les Sages que l’on cite et sur l’enseignement desquels on a une objection : par exemple, on ne doit pas traiter une remarque relativement insignifiante de « problème considérable ».
La correspondance : il y a lieu de développer la correspondance halakhique entre les disciples eux-mêmes, et entre les maîtres et les érudits. La correspondance développe la pensée, dans l’état d’esprit d’une saine concurrence.
La responsabilité : il faut faire partie de ‘ceux qui craignent l’enseignement.’
N’importe qui n’est pas apte à prendre une décision halakhique simplement parce qu’il étudie. Les jeunes qui organisent leurs propos sous la forme de Responsa doivent noter en marge qu’il ne s’agit ni d’enseigner la halakha, ni de conseiller une conduite à tenir, mais qu’il s’agit simplement de l’étude pour elle-même.
Le Rav était connu pour s'éloigner de tout honneur et de tout prestige exagéré. Le Rav Mordekhai Eliahou a dit de lui : « Plus d’une fois, quand je le rencontrais, je ne savais pas si je me tenais face à Rav Raphaël ou à l’ange Raphaël. »
Pendant la dernière année de vie, il était malade et très affaibli. Il est décédé le 4 Kislev 5755 après une bonne vieillesse. Les habitants honorent son souvenir, car il existe une rue à son nom, et également une yéchivat « Ohel Moché » à sa mémoire.