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Chelah Lekha 1er Juin 2013 23 Sivan 5773 |
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Les façons d’agir du mauvais penchant (par Rabbi David Hanania Pinto Chelita) « Envoie pour toi des hommes pour explorer le pays de Canaan » (Bemidbar 13, 2) Cette paracha traite principalement de la sainteté de la force de la parole que peut avoir un homme. On y voit comment les explorateurs ont dit du mal sur la terre d’Israël et quelle grave punition ils ont reçu. Ainsi, si médire est déjà si grave pour la terre qui est quelque chose d’inanimé, qui n’a pas ressenti l’injure et n’a pas été blessée, a fortiori quand il s’agit d’un être humain vivant, qui se sent atteint. Il ne faudra donc pas médire de lui et craindre la punition qui risquerait de nous frapper. En réalité, la terre d’Israël est plus sanctifiée que tous les autres pays du monde et ne ressemble à aucun d’eux. Comme nous le savons, elle n’a pas d’égal, tant dans le domaine spirituel que matériel. Nos Sages évoquent longuement dans les midrachim la valeur de la terre d’Israël et expliquent comment s’est réalisée en elle la description « une terre où coulent le lait et le miel ». Dans le domaine spirituel, on dit « L’air de la terre d’Israël rend intelligent. » En d’autres termes, une personne qui étudie la Torah en Israël sera plus intelligente et raisonnable que quelqu’un qui étudie dans un pays étranger. Et même si l’air n’a pas de frontières et que nous ne faisons pas de différence, tel est le sens de ce principe. La terre d’Israël est la seule à être appelée « eretz » (terre), alors que les autres pays sont nommés « Maroc », « Pologne » sans qu’on y rajoute la dénomination « terre » comme par exemple « la terre du Maroc ». Ceci signifie qu’il s’agit du pays principal. Au Maroc, pour désigner la terre d’Israël on disait tout simplement « le pays », ou « la Terre sainte ». C’est aussi le nom qu’on lui donne dans d’autres langues que l’hébreu. Voici donc pourquoi les yeux du monde entier sont tournés justement vers la terre d’Israël et pourquoi toutes les nations du monde veulent y avoir une part. C’est la sainteté de la terre qui les attire vers elle et ils veulent tous se nourrir de la source de sainteté : la Terre sainte. La paracha décrit comment les explorateurs ont parcouru le pays. Il est écrit « Ils allèrent trouver Moché » (ibid. 13, 26) et Rachi explique « Ils sont partis comme ils sont revenus. De même que leurs intentions étaient mauvaises à leur retour, de même elles l’étaient à leur départ. » C’est difficile à comprendre, car il est écrit « Tous des hommes » (Bemidbar 13, 3) et Rachi explique « A ce moment-là, ils étaient irréprochables ». S’il en est ainsi, ils n’avaient pas de mauvaises intentions ! D’après moi, il s’agit d’un grand fondement du service divin : si quelqu’un méprise une mitsva, il finira par mépriser toute la Torah et par se rebeller contre D. Comme l’ont dit nos Maîtres (Chabbat 105b), « Telle est la façon de procéder du mauvais penchant : un jour il dit ‘‘agis ainsi’’, le lendemain il conseille ‘‘agis ainsi’’, jusqu’à recommander ‘‘Va servir des dieux étrangers’’. » C’est dans le même esprit que Rabbeinou Yona commente dans « Cha’arei Techouva » la michna de Pirkei Avot « Fais aussi attention à une mitsva légère qu’à une mitsva plus importante. » Il énumère plusieurs raisons et explique entre autres que quelqu’un qui néglige même la misva la plus quelconque se révolte contre le Roi qui l’a ordonnée et se débarrasse du joug de son Maître. Ainsi, d’une petite rébellion il en arrivera à se révolter complètement contre le Roi du monde. Revenons à notre sujet : les explorateurs avaient conscience de la valeur de la terre d’Israël, mais ils se sont tout de même révoltés contre les mitsvot qui lui sont liées. Et suite à cela, ils ont renié toute la Torah, comme il est écrit « Cela (véhi) ne vous réussira point ! » (Bemidbar 14, 41) : la valeur numérique du mot « cela » est de vingt-deux, pour signifier qu’ils ont renié les vingt-deux lettres de la sainte Torah. Puis finalement, ils en sont arrivés à renier le Maître du monde en disant « Car ce peuple est plus fort que D. ! » C’est pourquoi il a été décrété qu’ils restent quarante ans dans le désert, car ils ont exploré la terre pendant quarante jours et ont, de ce fait, méprisé la Torah qui a été donnée au bout de quarante jours au mont Sinaï et qu’ils ont fini par renier. Il a donc été décrété qu’ils restent quarante ans dans le désert : un jour d’exploration parallèlement à un an dans le désert. Voici ce que m’a raconté un habitant de Miami qui a rencontré à la synagogue un chalia’h venu d’Israël : « Le Rav local a demandé au chalia’h de renforcer la communauté dans le domaine de la pureté familiale. Celui-ci a donc évoqué l’importance des lois de nida, dont la transgression est passible de retranchement, pour soi-même ainsi que pour ses enfants. Il a également évoqué la gravité d’autres choses, au point qu’en plein milieu de son discours, ‘‘je ne pouvais plus supporter de l’entendre, je me suis levé et me suis écrié ‘‘Où ce que vous dites est-il marqué dans la Torah ? Tout ceci n’est pas vrai ! Je pensais jusqu’à présent faire un don à votre yechiva, mais plus maintenant…’’ » Surpris de cette réaction, le Rav a répondu qu’il n’avait vraiment pas eu l’intention de le blesser et que toutes ses paroles étaient conformes à la Torah. Mais il a ajouté que s’il avait été blessé et atteint par son cours, il devrait au contraire se repentir ! Alors l’homme continue à nous raconter : « Je suis sorti de là. Et quelques temps plus tard, ma femme est décédée de manière soudaine, et en six mois j’ai perdu mes cinq enfants de manière terrible : l’un s’est noyé, l’autre a eu un accident de voiture, un autre est tombé malade etc. Ainsi, je suis resté seul, sans postérité. Alors j’ai compris que ce que le Rav avait dit à Miami était juste, et qu’aucune parole de Torah n’est inutile, car Moché est vrai et sa Torah est vraie. » Voici donc un homme qui a négligé une seule mitsva et Hachem l’a considéré comme ayant méprisé toute la Torah. Puis il a renié les paroles des Sages énonçant ces lois. On apprend de là que chacun doit faire attention à ne négliger aucune mitsva. En effet, outre la faute qui consiste à mépriser cette mitsva, il dégringole alors jusqu’à en arriver au niveau le plus bas et à renier toute la Torah, que D. nous en préserve. Le mauvais penchant envie particulièrement les bnei Torah et cherche à les faire trébucher, justement par l’organe qui est le plus sanctifié chez eux et avec lequel ils étudient : il s’agit de la bouche, l’instrument de leur métier. Si la bouche de quelqu’un est détériorée, un esprit souillé repose sur sa parole, et comme le dit le saint Zohar, rend impur toute la Torah qu’il étudie. Le roi David dit (Psaumes 34, 13) « Quel est l’homme qui souhaite la vie, qui aime de longs jours pour goûter le bonheur ? Préserve ta langue du mal, et tes lèvres des discours perfides. » Le roi David nous enseigne ici que quiconque cherche le bon et la vie dans ce monde et dans le monde à venir devra se garder des mauvaises paroles. Comment y arrivera-t-il ? « En préservant ses lèvres des discours perfides (‘‘mirma’’ qu’on peut aussi décomposer en ‘mar’’ – ‘‘ma’’) ». En d’autres termes, si on élève (léromem) un homme (adam) (dont la valeur numérique est celle du mot « ma »), il deviendra « ram » (mêmes lettres que ‘‘mar’’) c’est-à-dire élevé. On lui évitera ainsi de prononcer des discours perfides. LES PAROLES DES SAGES Se garder de voir ce qui est interdit « Ne vous égarez pas à la suite de votre cœur et de vos yeux » (Bemidbar 15, 39) Veiller à ce que l’on regarde est au centre de la spiritualité de chacun de nous : tout découle de ce point. Nous apprenons des grands en Torah et de leurs écrits que garder nos yeux et notre bouche détermine notre personnalité. Comme nous le savons, le Chla avait assuré à ses élèves que s’ils évitaient les spectacles et les propos interdits, ils mériteraient d’atteindre des niveaux de sainteté d’une grande élévation. En effet, c’est de là que dépend l’essentiel de la pureté et de la sainteté d’une personne. Il y avait à Jérusalem un tsaddik connu, le gaon Rabbi Zéev Tchetchik, appelé Rabbi Velvel par ses proches. Il était connu comme quelqu’un empreint d’une grande crainte divine, et comme l’un des très proches du Rav Yitz’hak Zéev de Brisk. Une fois, Rabbi Velvel a raconté à sa famille ce qu’il avait entendu d’un vieillard qui avait encore pu connaître un des disciples du Maor Hagola, le « Ktsot Ha’hochen ». Voici ce que l’élève a raconté : « J’ai étudié pendant une certaine période chez mon maître et saint Rav, le Ktsot Ha’hochen. A la fin de cette période, avant de rentrer chez moi, je suis allé demander au Rav une bénédiction d’au revoir. Je lui ai annoncé que je m’apprêtais à le quitter et à rentrer chez moi. Le rabbi m’a regardé sans rien dire. Puis soudain il m’a pris la main et l’a saisie fortement en répétant avec douceur les paroles du plus sage de tous les hommes : ‘‘Réjouis-toi, jeune homme, dans ton jeune âge ; que ton cœur soit en fête au temps de ton adolescence. Suis librement les tendances de ton esprit et ce qui charme tes yeux.’’ Le rabbi s’est tu instant, puis il a rougi et une sorte de cri s’est échappé de sa bouche. Tout en remuant ma main avec force, il a scandé la suite du verset : Sache seulement, a-t-il répété alors qu’il était enflammé et plein d’ardeur, que ‘‘Dieu… t'appellera… en jugement… pour tout cela…’’ Voici comment le Ktsot Ha’hochen se séparait de ses élèves. Pas de discours moralisateur ni d’idée fine et pointue. Il ne montrait pas sa grandeur ni dans le ‘‘Hochen Michpat’’, ni par sa crainte du Ciel ou sa morale. Il disait juste un verset, un ‘‘simple’’ verset du livre de Kohélet. Sans Rachi ni midrachim… Des années ont passé depuis, raconte l’élève, et je suis toujours habité par la crainte de commettre même l’ombre d’une faute. La voix du rabbi résonne encore à mes oreilles. Chacun doit s’en rappeler en sortant dans la rue. Se rappeler que chaque faute comporte un prix à payer. » Des propos très similaires ont été entendus du gaon Rabbi Eliahou Lopian. Il a dit à une certaine occasion que les jeunes gens peuvent atteindre, en un court laps de temps, des niveaux très élevés, si seulement ils le souhaitent. « Ils doivent s’exercer à se protéger dans trois domaines : garder leurs yeux, leur bouche et leur pensée. Mais, a-t-il ajouté, tous les débuts sont difficiles, alors à eux de savoir que dans chaque chose, c’est par l’habitude qu’on acquiert la maîtrise de soi. » Le défenseur d’Israël, Rabbi Lévi Yitz’hak de Berditchev, a expliqué la juxtaposition des lettres « samekh, ‘ayin, pé, tsadik » en disant : « La lettre ‘‘samekh’’ est bien fermée de tous les côtés, contrairement aux autres lettres de l’alphabet hébraïque. De plus, elle est la première lettre du mot ‘‘seguira’’ qui signifie ‘‘fermeture’’. Voici donc l’allusion : ‘‘Ferme (segor)’’ ‘‘tes yeux (‘einekha)’’ et ferme ‘‘ta bouche (pikha)’’ afin de ne pas voir ce qui n’est pas à voir et ne pas dire ce qui n’est pas à dire… alors, tu mériteras d’être un ‘‘tsaddik’’… » A Jérusalem, beaucoup d’histoires circulaient sur la capacité de Rabbi Zundel de Salant à reconnaître si un ustensile acheté chez des non-juifs avait été trempé ou non. Quand on l’a questionné sur ce don, il a répondu tout simplement que quiconque fait attention à ne pas voir de scène interdite peut facilement atteindre ce niveau. Rabbi Aharon Rota, auteur de « Chomer Emounim », a dit : « Si un homme se trouve confronté à un spectacle impudique, qu’il se domine, détourne les yeux et s’empêche de regarder, alors toute requête qu’il adressera au Créateur à ce moment-là sera agréée.» Tu dois sauter par la fenêtre Il nous faut savoir clairement que même s’il nous est impossible d’éviter totalement un dommage, nous devons au moins l’éviter partiellement. Par exemple, emprunter le chemin le plus discret quand il en existe plusieurs. Dans le Traité Baba Batra (57b), la Guemara demande au sujet du verset « Il ferme ses yeux pour ne pas voir le mal » : s’il existe un autre chemin, plus propre, mais qu’il emprunte celui qui est moins pur, il s’appelle « impie » même s’il ferme les yeux. En effet, il n’aurait pas dû se rapprocher de la faute, mais plutôt s’en éloigner, comme il est dit « Eloigne-toi du mal » ! Les possibilités d’un « autre chemin » sont nombreuses. Si quelqu’un attend l’autobus, mais que celui-ci arrive complètement plein et qu’il sait qu’un autre va arriver dans quelques minutes, il doit considérer cette possibilité comme un « autre chemin ». En effet, personne ne fait attention à ces quelques instants d’attente. Un jour, l’Admor de Vijnitz (qui nous a quittés il y a peu de temps) a demandé à l’un des disciples de la yéchiva de Tel-Aviv s’il prenait parfois l’autobus (ils étaient à l’époque plus petits qu’aujourd’hui et on y était plus serrés). Lorsque l’élève a répondu par l’affirmative, l’Admor l’a interrogé : « Et si on y est très serré ? » Le jeune homme a souri et demandé avec confusion : « Qu’est-ce qu’on y peut ? » « Que signifie ‘‘Qu’est-ce qu’on y peut ?’’ Si tu vois que cela devient trop serré, tu dois sauter par la fenêtre ! » s’est écrié l’Admor résolument. Dans le livre du jubilé de « Vijnitz », les rédacteurs ont souligné que l’Admor lui-même ne prenait jamais l’autobus à cette période, malgré la distance qui séparait la yéchiva de son domicile. Il n’avait pas de quoi se payer un taxi, alors il marchait seul, ou accompagné d’un jeune homme, les yeux fermés, telle « une échelle posée à terre et dont le sommet arrive au ciel. » GARDE TA LANGUE Une profusion d’interdits Quiconque dit du mal d’autrui dans une synagogue transgresse le commandement « Et révérez Mon sanctuaire », qui est la mitsva de craindre Celui qui a fait résider Son Nom dans cette demeure. Les synagogues et les maisons d’étude sont également incluses dans ce commandement. Quiconque médit d’une personne âgée, même si elle est inculte, ou d’un érudit, même s’il est jeune, transgresse le commandement « Honore la personne du vieillard », qui est la mitsva de le respecter et de l’honorer. Ainsi, dire du mal sur un érudit d’un certain âge revient à commettre deux transgressions. Quiconque dit du lachon hara sur un cohen transgresse le commandement positif « Tu le sanctifieras », qui est la mitsva de respecter les cohanim. A LA LUMIERE DE LA PARACHAH Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita L’extraordinaire puissance de la force de la volonté Dans notre paracha, il est dit au sujet de Calev ben Yéfouné « puisqu’il a été animé d’un esprit différent », et Rachi explique « Il est question ici de deux esprits : celui de la bouche et celui du cœur. Il avait dit aux explorateurs ‘‘Je suis avec vous dans vos menées.’’ Mais il était résolu dans son cœur à dire la vérité, et c’est ainsi qu’il a eu la force de les faire taire, comme il est écrit ‘‘Calev fit taire le peuple soulevé contre Moché’’ ». Rachi explique « Il les fit tous taire. Contre Moché : Pour qu’ils écoutent ce qu’il allait dire de Moché. Il leur déclara : ‘‘Le fils d’Amram ne nous a-t-il fait que cela ?’’ Ils ont cru qu’il allait dire du mal de lui. Et comme ils étaient indisposés à son égard vu ce qu’avaient dit les explorateurs, ils se sont tous tus afin d’écouter ce qu’il allait dire pour le dénigrer. C’est alors qu’il a poursuivi : ‘‘N’a-t-il pas fendu pour nous la mer ? N’a-t-il pas fait tomber pour nous la manne ? N’a-t-il pas fait venir des cailles ?’’ » D’où Calev a-t-il puisé le courage et l’intelligence de rester fort face à ces explorateurs rebelles et d’adresser des réprimandes au peuple ? La réponse est : car la volonté de Calev d’adhérer à la vérité était très forte. Il voulait, de tout son être et de toute son âme, dire uniquement la vérité aux bnei Israël et il aspirait puissamment à leur dévoiler le bon et le beau de la terre d’Israël. C’est pourquoi il a commencé par faire croire aux explorateurs qu’il avait la même intention qu’eux et voulait aussi critiquer et mépriser la terre sainte. Mais soudain, en l’espace d’un instant, Calev a retourné sa veste, a changé d’état d’esprit et leur a révélé ce qu’il pensait réellement : il s’est mis à réprimander les explorateurs et a prouvé au peuple combien la terre était bonne et louable. Telle est la valeur de quiconque cherche à atteindre des sommets de perfection et des niveaux élevés de spiritualité, qui défendra, au péril de sa vie, la vérité, ne méprisera personne et restera acharné face aux menteurs, car sa seule aspiration est d’arriver à la perfection véritable et souhaitable. J’aimerais ajouter que si l’on prend les initiales et les dernières lettres d’« un esprit différent (roua’h a’heret) » avec l’unificateur, on obtient le mot « ‘hevrat » (groupe). Cela signifie que Calev s’associait en apparence au groupe des explorateurs aspirant à la grandeur, mais qu’il était en fait attaché, en s’effaçant totalement, aux morts enterrés à ‘Hevron. Ainsi, quand il a fait taire les bnei Israël (comme il est mentionné dans le verset), tous ont pensé qu’il voulait s’opposer à Moché, mais quand ils se sont tus, il leur a dévoilé qu’il était en réalité lié et attaché aux saints ancêtres. A LA SOURCE « Moïse avait nommé Hochéa, fils de Noun : Yéhochoua » (13, 16) Puisque Yéhochoua était de la tribu d’Ephraïm, c’est-à-dire de la descendance de Yossef qui avait fauté en rapportant à Ya'akov des médisances sur ses frères, Rabbi Yossef ‘Haver explique que Moché a craint que Yéhochoua ne dise, lui aussi, du mal de la terre. C’est pourquoi il lui a adressé une bénédiction particulière : « Veuille Hachem te sauver du complot des explorateurs ! » « Ils trouvèrent un homme ramassant du bois le jour du Chabbat » (15, 32) Voici ce qui est raconté dans Tanna DeBei Eliahou : après la faute du ramasseur de bois, Hachem a demandé à Moché « Pourquoi a-t-il profané le Chabbat ? » et Moché Lui a répondu « Je ne sais pas. » Alors Hachem a expliqué : « Pendant les six jours de la semaine, le ben Israël a les tefilin sur sa tête et sur son bras, et en les regardant, il se repent. Mais pendant Chabbat, il n’y a pas de tefilin et c’est pourquoi celui-ci a commis une transgression. Maintenant, va et choisis une mitsva que les bnei Israël accompliront pendant le Chabbat et les jours de fête. » Il s’agit de la mitsva de tsitsit. L’Admor Rabbi Arié Leib de Gour demande : La mitsva de Chabbat est déjà en elle-même un « signe » entre D. et Israël, exactement comme les tefilin ! Pourquoi donc a-t-il fauté ? Il répond : Une mitsva qui consiste à agir, à accomplir un acte concret, éveille davantage la personne, alors que la sainteté du Chabbat vient d’elle-même, naturellement… « Et d’ajouter à la frange de chaque coin un cordon d’azur » (15, 38) Dans le Séfer Hamilouim, Rabbi Yossef Haeizovi rapporte ces allusions au nom de Rabbi Chelomo ben Aderet : Sache que les tsitsit renferment une notion de regard, comme dans l’expression « qui observe (metsits) par le treillis », c’est-à-dire que nous devons regarder vers notre fin et tourner nos yeux vers la terre. C’est pourquoi le texte a ordonné « aux coins de vos habits », car le coin se trouve en bas du vêtement. Les quatre coins sont à mettre en parallèle avec les quatre points cardinaux : on ne pourra pas s’échapper, lors du jour du jugement, par l’un des quatre coins. Le cordon (ptil) correspond au mauvais penchant qui est tortueux (petaltol), têtu et qui détourne l’homme. Les huit fils sont comparables aux huit dizaines d’années de la vie d’un homme, comme il est dit « Et, à la rigueur, de quatre-vingts ans. » Enfin, les cinq nœuds sont à mettre en parallèle avec les cinq sens (vue, ouïe, goût, odorat et toucher) qui se perdent tous lorsque l’homme quitte le monde. LA VIE DANS LA PARACHA A partir de l’enseignement de Rabbeinou ‘Haïm ben ‘Attar « Alors Hachem parla à Moché en ces termes » (15, 37) De manière générale, la Torah dit « Vayedaber » pour signifier « parla », alors qu’ici il est écrit « Vayomer ». Pour quelle raison ? Cela s’explique par les paroles du Tanna Debeï Eliahou : quand Moché a vu l’acte du ramasseur de bois, il a dit à Hachem « Pendant les jours de semaine, les bnei Israël mettent les tefilin et se souviennent ainsi des mitsvot. Mais pendant Chabbat, comment s’en souviendront-ils ? » Et Hachem a répondu : « Je vais leur donner la mitsva de tsitsit pour les aider à se souvenir. » C’est pourquoi il est écrit « Vayomer », dans le sens d’une parole (amira) qui satisfait et répond à la demande. LES CEDRES DU LIBAN Notre maître Rabbi Mikhel Yéhouda Lefkovitz Dans une maison discrète, au 4 Rue Vilkomirer à Bnei Brak, la lumière de la Torah a brillé pendant plus de cinquante ans. Cinquante années de propagation d’étude de la Torah et de crainte divine, dans une maison qui était une place forte et au milieu de laquelle se trouvait une table où s’entassaient débats collectifs et problèmes personnels. Tous y recevaient un accueil tendre, bienveillant, amical, avec un amour gratuit provenant d’un cœur pur. Rabbi Mikhel Yéhouda Lefkovitz est né à Volojin où il a été imprégné, durant son enfance, d’un amour de la Torah extraordinaire. Son père, Rabbi Moché David, très vieux et sans moyens, avait engagé des professeurs privés pour enseigner la Torah à son fils en plus de ce qu’il apprenait au Talmud Torah local. A l’âge de douze ans, il est parti étudier à la yéchiva ketana de Lida. Il a fêté sa bar mitsva avec ses amis à la yéchiva, en l’absence de ses parents qui habitaient Volojin. Quelques temps plus tard, il est parti étudier à Vilna, à la yéchiva du Rav Chelomo Heymann. En discutant avec un partenaire d’étude, le Rav a évoqué avec nostalgie la période brillante du « ben yéchiva » qui se consacre corps et âme à l’étude, au point de vivre vraiment dans un monde spirituel et d’en oublier presque toutes les affaires de ce monde, alors qu’il est assoiffé d’élévation et de grandeur. Combien est heureux celui qui mérite de faire partie de ces gens-là ! « Lorsque j’ai quitté la yéchiva pour rentrer chez moi à l’approche de la fête de Pessa’h, a-t-il raconté, je suis monté en charrette. Les routes étaient faites de grosses pierres, les roues de la charrette étaient en métal et le voyage s’étendait sur plusieurs longues heures. En arrivant à la maison, on devait rester allongé pendant quelques jours pour se reposer d’un voyage si épuisant. » A une certaine époque où il n’y avait pas de carreaux de sucre pour le thé à la yechiva, certains ont demandé à Rav Heymann qu’on leur donne au moins du sucre ! Il a répondu « Alors buvez une tasse de thé avec les Responsa de Rabbi ‘Akiva Eiger ! » Et il disait cela le plus sincèrement et le plus sérieusement du monde, car la Torah était le chant de sa vie et il était particulièrement passionné par les paroles de Rabbi ‘Akiva Eiger. Ce qui leur permettait de réussir à vivre dans une telle misère tout en étant pleins de joie de vivre et en étudiant avec sérénité était le fait qu’ils pensaient davantage au but de l’homme, à la vie éternelle, à la vie de l’âme, qu’à la « matérialité ». A Lag Ba’omer de l’année 5700, quatre ans après s’être installé en Israël, il a épousé la fille de Rav Avraham Yitz’hak Guerchonovitz, chef du tribunal rabbinique de Gevinka, qui était également le Roch Yéchiva de Tiféret Tsion à Bnei Brak. C’est le ‘Hazon Ich qui avait organisé la rencontre entre eux et c’est lui qui a accompagné le ‘hatan sous la ‘houpa. Après son mariage, il a été nommé Roch Yéchiva de Poniewitz pour les jeunes avec Rabbi Aharon Leib Steinman. Il a occupé ce poste pendant environ soixante ans et formé des milliers d’élèves, dont des Rabbanim, des Rachei yéchivot et des grands érudits réputés. Le cours qui avait lieu de manière régulière dans la grande salle de la yéchiva n’a jamais été annulé, même dans des époques douloureuses. Par exemple, toute la yéchiva a été plongée dans un grand deuil suite au malheur qui a frappé le Roch Yéchiva quand il a perdu sa fille dans des conditions tragiques. Et pourtant, le soir même qui a suivi l’enterrement, Rabbi Mikhel Yéhouda est apparu dans la grande salle de la yéchiva pour continuer à transmettre la Torah, comme s’il n’avait pas enterré sa fille ce jour-là. C’est le ‘Hazon Ich qui lui avait permis d’agir ainsi, du fait que « beaucoup de gens avaient besoin de lui ». Rabbi David ‘Hanania Pinto a bénéficié d’une proximité particulière avec le Rav. A chaque fois qu’il allait lui rendre visite, le Rav lui prenait la main avec une affection évidente et l’attrapait de ses saintes mains pendant un long moment. Le lien qu’ils entretenaient allait bien au-delà d’un échange de réflexions ou de simples instructions. Il s’agissait presque d’un lien intime, familial. « J’ai eu le mérite d’avoir comme Rav et guide Rabbi Mikhel Yéhouda Lefkovitz. Je lui demandais conseil dans tous les domaines, aussi bien le rapprochement des éloignés et des milliers de Juifs auxquels nous nous consacrons que des points plus personnels, des ‘‘détails’’ de la vie quotidienne. Il répondait à tout. Il se penchait sur chaque question et, après mûre réflexion, y apportait une réponse lumineuse. » Rabbi Mikhel Yéhouda était comme Moché, empreint de l’amour des bnei Israël. Il recevait exactement de la même manière un ‘hassid, un ashkénaze, un sépharade, un homme avec ou sans barbe. Il adressait à chacun le même sourire, ce sourire qui n’a jamais changé. Voilà ce qui était si exceptionnel chez lui, comme chez Moché dont il est écrit « Moché était humble. » Il n’avait pas un sourire pour les riches, un autre pour les pauvres et un autre pour les moyens : il adressait le même sourire à tous. Rabbi ‘Haïm Kanievski שליט''א voyait en lui son maître et son Rav. A propos de la bénédiction des tsaddikim, Rabbi Mikhel Yéhouda disait que dans cette génération, Rabbi ‘Haïm pouvait assurer des bénédictions. Quand on l’a raconté au Rav Kanievski, il a souri et répondu : « Voilà bien l’humilité de Rabbi Mikhel Yéhouda. C’est évidemment lui qui est capable de bénir… » Rav Pinto a déclaré : « Quiconque entrait chez Rav Lefkovitz percevait la sainteté sur son visage. Il fallait mériter de voir sa lumière de sainteté. Je ne suis pas de ceux qui voient des ‘‘lumières’’, mais… comment dire ? Il y a des choses qui ne s’expliquent pas. » La lumière de la sainte Torah est unique en son genre. Ce n’est pas tout le monde qui mérite de la percevoir. Mais Rabbi Mikhel aimait tellement la Torah ! Il en recherchait non seulement le goût, le plaisir, la douceur, mais également la lumière qu’elle renfermait. Il est impossible d’expliquer à quiconque ne l’a jamais expérimenté de lui-même ce qu’est la « douceur de la Torah ». C’est comme si l’on essayait d’imaginer le goût d’un aliment en voyant autrui le manger. L’un mange et l’autre regarde. Cette observation, ni même une description orale ne permettront jamais de saisir réellement le goût de l’aliment. C’est ce qui s’est passé lorsque Rabbi Mikhel Yéhouda a organisé le siyoum du Traité Ta’anit. Il a lu la Guemara à voix haute : « Dans le monde à venir, Hachem organisera une danse pour les tsaddikim. » Puis, tout en lisant, il a éclaté en sanglots et a balbutié avec émotion « Vous ne savez pas combien cela sera extraordinaire. »
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