Parachat Korah 21 Juin 2014 23 Sivan 5774 |
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Tes actes te rapprocheront et tes actes t’éloigneront (par Rabbi David Hanania Pinto Chelita) « Kora’h, fils de Yitshar, fils de Kehat, fils de Lévi, prit » (Bemidbar 16, 1) La parachat Kora’h est l’une des parachiot les plus difficiles de la Torah. Elle explique la controverse qui est comparée au feu. Chaque année, en arrivant à cette paracha, nous nous étonnons à nouveau : qu’est ce qui a poussé Kora’h à fomenter une révolte si importante ? Il est difficile de comprendre ses motivations. Il a allumé un feu au sein du peuple d’Israël, causant ainsi une hécatombe. Constatons à quel point cette polémique était grave : en effet, le tribunal terrestre punit quelqu’un à partir de l’apparition de la puberté, le tribunal céleste punit quelqu’un à partir de l’âge de vingt ans, mais ici, même des nourrissons sont morts (Tan’houma 3). Il faut donc comprendre ce que Kora’h pensait. Il avait pourtant l’esprit prophétique et il faisait partie des porteurs de l’arche sainte. Or qui pouvait porter l’arche sainte tout en restant en vie ? Seule l’élite y était apte. Les bnei Kehat étaient peu nombreux, car l’Arche les anéantissait. Quant à Kora’h, il portait l’arche sainte avec ses frères, mais il n’est pas mort, ce qui prouve qu’il était un tsaddik. Il y a donc lieu de comprendre ce qui l’a poussé à s’opposer à Moché et Aharon. Nos Sages ont dit (Avot 5, 20) : « Toute controverse qui vise la gloire du nom de D. subsistera, tandis que la controverse qui ne vise pas le nom de D. ne subsistera pas. Quelle controverse vise la gloire du nom de D. ? Celle d’Hillel et de Chamaï. Et la controverse qui ne vise pas le nom de D., c’est celle de Kora’h et toute son assemblée. » Or il n’est pas écrit « la controverse de Kora’h et Moché », comme c’est le cas pour Hillel et Chamaï, mais c’est évident car Kora’h n’a pas trouvé à qui s’opposer. En effet, Moché était d’une extrême humilité, comme il a dit (Chemot 16, 7) « Mais nous, que sommes-nous ? ». Au contraire, quand il a vu Kora’h et son assemblée qui cherchaient à se révolter contre lui, il est dit (Bemidbar 1, 4) qu’il « se jeta sur sa face » : il n’a fait que déplorer ce qui se passait et a essayé de toutes ses forces de les calmer, mais en vain. En effet, quand on entame une dispute, on perd toute capacité de réflexion à cause de la colère ou de la moquerie ; en l’occurrence, ici, ils se sont moqués de Moché. Il était également difficile de les calmer à cause des honneurs qui avaient fait perdre la tête à Kora’h. Il s’était ainsi retrouvé à s’opposer à Hachem en « se prenant » lui-même pour passer de l’autre côté, pour se séparer de la communauté et se rebiffer contre la prêtrise. Or face à cette situation, il n’y avait d’autre solution que de le punir, pour qu’il n’entraîne personne d’autre avec lui. Son nom en est la preuve : le nom « Kora’h » et le mot « ra’hok (loin) » sont composés des mêmes lettres, et aussi étonnant que cela puisse paraître, la valeur numérique de « Kora’h » est identique à celle du terme « karov » (proche). C’est ce qui va nous permettre de comprendre la caractéristique intéressante de ce personnage. Celui-ci a prétendu (Bemidbar 16, 3) : « C’en est trop de votre part ! Toute la communauté, oui, tous sont des saints, et au milieu d’eux est Hachem ; pourquoi donc vous érigez-vous en chefs de l’assemblée de Hachem ? » Kora’h, qui était l’un des porteurs de l’arche sainte, connaissait le but de la construction du Sanctuaire : « Ils Me construiront un Sanctuaire pour que Je réside au milieu d’eux » (Chemot 25, 8). Il n’est pas dit « en lui », mais « au milieu d’eux », pour nous enseigner qu’il y a en chaque ben Israël un petit sanctuaire. C’est pourquoi Kora’h a prétendu que chaque membre du peuple méritait d’être proche de D., et dans ce cas, « pourquoi donc vous érigez-vous en chefs de l’assemblée de Hachem ? » Mais il s’est fourvoyé, car son intention n’était pas pure. Alors il a provoqué exactement le contraire de ce qu’il revendiquait, c’est-à-dire qu’il a causé un éloignement de la présence divine en se prenant lui-même pour passer de l’autre côté et s’opposer. Par sa controverse, il a éloigné D. du sein du peuple d’Israël. C’est ce que dit la michna « Tes actes te rapprocheront et tes actes t’éloigneront » (Edouyot Chapitre 5, michna 7). Kora’h avait la possibilité de rapprocher le peuple d’Israël de D., car comme nous l’avons dit, il portait l’Arche et reconnaissait que « Toute la communauté, oui, tous sont des saints, et au milieu d’eux est Hachem ». Mais ses actes, au lieu d’être réparateurs, n’ont causé que dégâts et dommages. Au lieu de favoriser la proximité avec D., ils n’ont fait que créer un éloignement. C’est pourquoi il a été puni mesure pour mesure : il a été éloigné du camp et englouti par la terre. En revanche, Hillel et Chamaï illustrent parfaitement une conduite diamétralement opposée à celle de Kora’h. Leur controverse ne visait que la gloire du nom de D. et avait lieu uniquement dans la maison d’étude. Et malgré tout, les disciples de Hillel, avec humilité, étudiaient les paroles de ceux de Chamaï et les approfondissaient avant d’analyser celles de leur propre maître. C’est pour cette raison que la halakha a été fixée selon Beit Hillel. C’est seulement après avoir conclu qu’elles n’étaient pas conformes à la halakha qu’ils exprimaient leur point de vue avec dignité. Puis, en sortant de la maison d’étude, ils se réconciliaient. C’est ce que disent nos Sages (Yebamot 14b) : « Même si Beit Hillel et Beit Chamaï s’opposaient au sujet des ‘‘tsarot (co-épouses)’’, cela ne les empêchait pas de se marier entre eux. » Ceci nous enseigne qu’ils se comportaient entre eux avec affection et amitié pour accomplir ce qui est dit « Chérissez la vérité et la paix ! » Ainsi, cette controverse était, du début jusqu’à la fin, pour l’amour du Ciel, et c’est pourquoi elle a subsisté. Ceci n’a pas été le cas de Kora’h, qui ne cherchait que sa propre gloire : sa controverse n’a donc pas subsisté et il est mentionné en opprobre éternel. Voici ce qu’on raconte au sujet de Rabbi ‘Haïm Pinto le grand. Quand il a atteint l’âge de quatre-vingt quinze ans, les Rabbanim de la communauté d’Essaouira ont voulu vérifier que son esprit était encore lucide. Mais de peur de se sentir trop impliqués, ils ont convié les dayanim de Marrakech à venir le faire. Dès qu’ils sont arrivés chez lui, il leur a dit : « Avez-vous oublié ce que disent nos Sages ? ‘‘En ce qui concerne les gens âgés, érudits, plus ils vieillissent, plus ils retrouvent leurs esprits.’’ » Immédiatement, ils ont compris à quoi il faisait allusion, lui ont embrassé la main et sont repartis. Tout ceci vient nous enseigner à nous comporter toujours pour la gloire du nom divin. En effet, d’un côté, les Rabbanim de la communauté auraient pu évaluer eux-mêmes les capacités du tsaddik. Mais malgré tout, ils ont craint de se sentir trop impliqués par l’affaire, ou ils ont eu peur de le tester, car « la crainte de ton maître doit être comparable à la crainte du Ciel ». Or s’ils ne le testaient pas, le Rav aurait pu être atteint par la vieillesse et se tromper dans la halakha. C’est pourquoi ils ont fait venir d’autres Rabbanim qui s’assureraient qu’il avait toujours l’esprit lucide est clairvoyant. Mais le tsaddik ne leur en a pas du tout voulu et n’y a vu ni affront ni injure, car ils avaient raison de venir le tester : il était vraiment âgé et la vieillesse aurait pu porter atteinte tant à son corps qu’à son esprit, l’amenant à des erreurs de jugement, que D. préserve ! Bien au contraire, il a accepté leur démarche sans problème. Voici un exemple de controverse sans querelle, qui vise le nom divin, et qui est destinée à subsister. Puisse Hachem nous aider à éviter les controverses qui n’ont pas pour but la gloire du nom de D., et efforçons-nous autant que possible d’augmenter l’amour, la fraternité, la paix et l’amitié parmi nous. Amen. LES PAROLES DES SAGES Ne nous induis pas en tentation « Au matin, Hachem fera connaître celui qui est à Lui » (Bemidbar 15, 5) L’histoire suivante s’est passée à ‘Holon, et tous ceux qui en ont entendu parler ont été ébranlés devant la constatation qu’il y a un D. en Israël, qu’il y a un juge, il y a un jugement, et que l’homme ne peut pas faire tout ce qui lui passe par la tête. C’est arrivé chez quelqu’un qui avait fait venir un menuisier pour exécuter un travail chez lui. C’était un artisan de qualité, qui faisait un travail particulièrement soigné. Le maître de maison lui avait donné la clef de chez lui et lui avait permis d’entrer pour faire son travail même s’il n’y avait personne à la maison. Un jour, alors que le menuisier était déjà rentré chez lui, le maître de maison arriva chez lui avec une grave accusation : sur la table du couloir était posé un bijou précieux de sa femme, et il avait des témoins qu’il s’y trouvait encore le matin même. Comme personne d’autre que vous n’est entré dans l’appartement, dit-il, nous vous soupçonnons d’être le voleur, et nous vous demandons de nous rendre ce bijou. Malgré les dénégations énergiques du menuisier, le maître de maison continua à l’accuser, et quand il refusa de payer, il l’assigna en justice. Or bien que nous ayons su depuis longtemps que les tribunaux civils sont très loin de juger en toute équité et droiture, beaucoup de gens se sont étonnés d’entendre la stupidité de leur décision : sur la foi des témoins qui avaient vu ce matin-là le bijou posé dans le couloir, le menuisier fut condamné à payer au maître de maison la totalité du prix du bijou, soit 70.000 chekalim. Le tort qui lui était ainsi causé était double. D’abord, il n’est pas facile de trouver une telle somme, surtout pour un artisan qui travaille dur pour gagner sa vie. Et ensuite, quand ce jugement serait connu, cela éloignerait de lui les clients, et personne ne voudrait plus travailler avec ce menuisier, désormais connu comme un voleur de bas étage, qui avait eu l’audace de voler un bijou précieux. La deuxième partie de cette histoire a été que le menuisier a été très affecté par tout cela, au point qu’il en est mort. Mais l’histoire n’est pas encore terminée. Elle a à peine commencé. Quelques jours après le décès du menuisier, la femme du maître de maison ouvre son coffret, et y trouve son bijou précieux ! Apparemment, elle avait oublié l’avoir mis là elle-même, c’est pourquoi elle et son mari étaient certains que le menuisier l’avait volé. Maintenant, il s’avérait a posteriori que toutes les accusations portées contre lui étaient dénuées de tout fondement. Le femme était bouleversée de ce qui s’était passé, et prit conseil d’un Rav sur ce qu’on pouvait faire maintenant pour réparer dans le cadre de la Torah. Le Rav lui conseilla de rassembler un mynian et d’aller sur la tombe du menuisier pour lui demander pardon de tout ce qu’ils lui avaient fait. La femme accepta ce conseil, mais son mari s’y opposa, car il estimait que lorsque sa demande de pardon sur la tombe serait connue, cela risquait d’être interprété négativement, c’est pourquoi il s’y refusa. C’est maintenant qu’on arrive à la dernière phase de l’histoire. Au bout de quelques jours à peine, la famille de celui qui avait commandé le travail étaient eux aussi en « chiva » pour porter le deuil du maître de maison, qui était mort subitement. Outre la conclusion inévitable qu’il y a un juge et qu’il y a un jugement, il y a une autre leçon à tirer de cette histoire. Le Chla écrit que parfois, un décret de mort frappe quelqu’un, mais les défenseurs qui ont été créés dans le ciel par ses mérites et ses bonnes actions intercèdent pour qu’on lui donne une chance supplémentaire. Et effectivement, les défenseurs avaient agi, et du Ciel il avait été décidé de donner à cet homme une chance supplémentaire. S’il l’utilisait au mieux, on aurait pitié de lui et le décret serait annulé. S’il s’était soumis et était allé sur la tombe du menuisier, il est possible que du Ciel on aurait eu pitié de lui. Comme il ne l’a pas fait, le décret le plus sévère avait été pris. En général, dit le Chla, on envoie dans ce genre de cas une épreuve sous la forme d’un pauvre qui vient demander de la tsedaka de façon très impolie, faisant sortir la personne de ses gonds. Et bien qu’il ait déjà reçu de la tsedaka, il revient une deuxième et une troisième fois, et ne se contente pas de ce qu’on lui donne. Alors, dit le Chla, l’homme est mis à l’épreuve : va-t-il exploser et se fâcher contre le pauvre, ou malgré le dégoût naturel qu’il lui inspire, va-t-il avoir pitié de lui et vaincre son mauvais penchant ? C’est pourquoi quand on rencontre un pauvre de cette espèce, dont la conduite risque vraiment d’exaspérer quelqu’un de normal, il faut comprendre qu’il est très possible qu’on l’ait envoyé du Ciel pour mettre la personne à l’épreuve, pour voir si elle va contenir ses tendances naturelles et le traiter avec indulgence, auquel cas le décret qui a peut-être été pris contre elle serait annulé. Il est important de se rappeler cela aussi en ce qui concerne les appels qui sont constamment faits dans les synagogues, quand des ramasseurs de fonds dévoués et merveilleux passent d’une synagogue à l’autre pour essayer d’attendrir le public par leurs paroles d’éveil, afin de ramasser un capital de tsedaka pour des orphelins. Parfois, il nous monte à l’esprit une pensée du genre « Combien peut-on déjà venir demander ? Combien ? Est-ce qu’il peut venir à l’esprit de quelqu’un que les portemonnaies de bnei Torah représentent une source d’argent illimitée ? » Il y a des cas où à cause de ces idées-là, on décide de ne plus donner. On proteste en soi-même contre ceux qui ramassent de la tsedaka, et on arrive à la conclusion que cela suffit, on n’en peut plus, cette fois-ci je ne donne rien. Il faut savoir que par cette décision, on scelle peut-être son propre décret. (« Barkhi Nafchi ») GARDE TA LANGUE Il faut faire attention Quand on voit quelqu’un de simple venir acheter de la marchandise chez un vendeur qui a l’habitude de tromper, il faut le mettre en garde pour qu’il n’achète pas là, même s’il a déjà engagé un achat avec ce vendeur. Et à plus forte raison s’il voit le vendeur engager son client à acheter de la marchandise de mauvaise qualité en débitant des mensonges, il faut lui dire de ne pas acheter. A LA LUMIERE DE LA PARACHAH Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita Kora’h et la segoula On connaît l’enseignement des Sages (Yérouchalmi Sanhédrin 10, 1) selon lequel Kora’h avait présenté deux cent cinquante hommes enveloppés dans un talit entièrement bleu, et avait demandé à Moché si ce talit, entièrement bleu, devait porter des tsitsit (avec un fil bleu) ou en était exempté. Il avait répondu qu’il fallait y mettre des tsitsit. On s’est mis à se moquer de lui, en disant : est-il possible qu’un talit entièrement fait de laine blanche soit rendu casher par un seul fil bleu, alors que s’il est entièrement bleu, il n’est pas automatiquement casher de ce fait ? Or c’est très surprenant. Comment Kora’h a-t-il eu le courage de se moquer d’une mitsva explicite de la Torah ? De plus, les Sages ont expliqué à propos de cette même mitsva (Mena’hot 43b), sur laquelle il est écrit « vous verrez, vous vous rappellerez et vous ferez », que la vue mène au souvenir, et le souvenir à l’action et à l’accomplissement des mitsvot, alors que Kora’h, au lieu de s’éveiller et de faire suivre la vue des tsitsit du souvenir et de l’accomplissement des mitsvot, a osé de plus se moquer en public de cette mitsva. L’explication en est qu’il a réfléchi en fonction de ce que voyaient ses yeux, et non en fonction de ce qui est dit dans le passage des tsitsit (Bemidbar 15, 39) : « Ne vous égarez pas après votre cœur et après vos yeux. » C’est pourquoi la segoula que contient la vision des tsitsit n’a pas fonctionné pour lui, comme le raconte la Guemara, parce qu’il ne regardait les tsitsit que de l’extérieur, sans intériorité dans son cœur ni désir d’observer les mitsvot. C’est pourquoi cette vision n’a eu aucun effet, mais a au contraire provoqué cette attitude superficielle de se moquer de la mitsva, tout en continuant à se considérer lui-même comme un tsaddik, et les choses sont allées en empirant, jusqu’à ce que la terre l’avale. Nous apprenons de là que la Torah dit de celui qui se laisse guider par ce que voient ses yeux sans veiller à leur imposer des limites qu’il s’égare après son cœur et ses yeux en se laissant séduire par eux. A LA SOURCE « Ils se levèrent devant Moché avec deux cent cinquante hommes des bnei Israël, princes de la communauté » (16, 2) Kora’h, Datan et Aviram ont voulu contester l’autorité de Moché, qui était le Rav d’Israël. Or d’après la loi, on doit se lever devant son Rav dès qu’on le voit.Mais Kora’h, Datan et Aviram, dans leur insolence, ont voulu montrer qu’ils étaient aussi grands que lui, c’est pourquoi « ils se levèrent devant Moché », c’est-à-dire seulement quand il a été vraiment en face d’eux. Là aussi, ils ont montré qu’ils ne s’étaient pas seulement levés pour lui, mais aussi en l’honneur des deux cent cinquante princes de la communauté (Melo HaOmer). « Moché fut extrêmement irrité » (16, 15) D’après Rachi, « il fut très peiné ». Cette explication étonne le Rav Chelomo Kluger : pourquoi Rachi a-t-il modifié le sens direct, en disant que cette « colère » était une « peine », plutôt que de dire qu’il a été très fâché contre eux ? Nos Sages ont dit (Erouvin 65) que Rabbi ‘Hanina, lorsqu’il était en colère, ne priait pas cette journée-là, et c’est ce qui était difficile pour Rachi : si Moché s’était vraiment mis en colère comme le verset semble le suggérer, comment a-t-il prié immédiatement après, en demandant : « Naccueille pas leur offrande » ? S’il était en colère, il lui était interdit de prier ! C’est pourquoi Rachi explique qu’ici il ne s’agit pas de colère, mais de douleur, et dans ce cas il pouvait se tenir en prière devant Hachem. « Moché fut extrêmement irrité et il dit à Hachem : n’accueille pas leur offrande » (16, 15) Ici, la Torah vient nous enseigner à quel point Moché était humble. Même dans une situation où il était « extrêmement irrité », il n’a pas parlé avec emportement, mais a seulement demandé « n’accueille pas leur offrande ». (D’après RabbeinouMoché Alcheikh) « Moché entendit et se jeta sur (al) sa face » (16, 4) Pourquoi Moché s’est-il prosterné sur sa face ? Rabbi Ya'akov Ben Naïm de Salonique l’explique ainsi dans son livre « Michkenot Ya'akov » : Les Sages ont dit qu’il est interdit de regarder un impie » (Meguila 28a). Dans ce cas, lorsque Kora’h a renié Hachem, Son serviteur Moché et Sa Torah du Ciel, il était interdit de le regarder. C’est ce qui est dit : « Moché entendit et se jeta ». Pourquoi cela ? « à cause de (al) sa face ». Non sur sa propre face, mais il a dû se prosterner à cause du visage de Kora’h, pour ne pas le regarder. « Retirez-vous, je vous prie, des tentes de ces impies, et ne touchez à rien de ce qui est à eux, de peur que vous périssiez à cause de toutes leurs fautes » (16, 26) Par nature, lorsque l’homme a besoin de demander quelque chose à quelqu’un, il tombe d’accord avec tout ce que celui-ci dit, pour qu’il lui donne ce qu’il veut, et parfois même il tombe dans la faute du lachon hara, car quand l’autre dit qu’Untel est un méchant homme, il approuvera, dans l’espoir qu’en fin de compte il acceptera de lui donner ce qu’il veut. C’est ainsi que Rabbi ‘Haïm Nissim, dans son livre « Matsa ‘Haïm », explique la signification de « ne touchez à rien de ce qui est à eux », c’est-à-dire « ne leur empruntez rien ». Pourquoi ? « De peur que vous périssiez à cause de toutes leurs fautes », car si vous venez leur emprunter quelque chose, il est inévitable que vous approuverez tout ce qu’ils diront pour qu’ils vous prêtent ce que vous voulez, et il est possible que leur contestation de Moché soit discutée et que vous tombiez d’accord avec eux et partagiez leur faute. LA VIE DANS LA PARACHA A partir de l’enseignement de Rabbeinou ‘Haïm ben Attar « Moché se leva et alla vers Datan et Aviram » (16, 25) Il faut connaître la raison pour laquelle il est dit qu’il se leva, car si c’est pour nous informer qu’il était assis, qu’est-ce que cela change pour nous ? On peut l’expliquer à la lumière du verset (Michlei 18, 12) « L’orgueil précède la ruine et l’honneur suit de près l’humilité », ainsi que de l’enseignement des Sages (Chemot Rabba 45, 5) selon lequel « du fait que je me suis abaissé, j’ai été élevé. » C’est ce que signifie que Moché s’est levé. Il a eu une élévation du fait qu’il était allé vers Datan et Aviram, les mauvais qui l’avait insulté et n’avaient pas voulu venir vers lui, si bien que lui s’est abaissé et est allé les trouver. C’est d’eux qu’il est dit « l’orgueil précède la ruine », et de Moché « l’honneur suit de près l’humilité ». LES SENTIERS DES JUSTES Pour acquérir les valeurs et les bonnes midot On trouve d’innombrables segoulot pour le chalom bayit, la paix du foyer, dans les bureaux des divers modérateurs et coachings, sur la façon d’arriver à une vie heureuse entre conjoints, dépourvue de luttes et de conflits. Il se peut que ces segoulot et autres choses du même genre aident à tenir pendant un certain temps. Ils se peut aussi qu’ils aient dans leur sac des conseils et des idées, des défis et des stratagèmes pour ramener la paix entre les murs de la maison. Mais en tant que juifs pratiquants, nous devons savoir que la meilleure des segoulot dans ce domaine réside dans l’étude de la sainte Torah, qui est l’unique garant de la véritable paix entre les conjoints. Tendons l’oreille à une histoire racontée par le gaon Rabbi Yossef Messas זצ''ל, qu’il l’avait entendue de son père le gaon Rabbi ‘Haïm Messasזצ''ל . Un jour, mon père étudiait avec moi, et après la fin de l’étude s’est présenté à moi un ‘hakham tsaddik et droit, le Rav Elisha Na’hamni זצ''ל, accompagné d’un homme respectable, qui se mit à raconter à mon père en pleurant et en soupirant que sa femme lui empoisonnait la vie et qu’il ne pouvait rien faire pour la calmer. Elle n’était sensible ni aux supplications ni à l’argent, ni aux bijoux ni aux autres cadeaux, et il était impossible de divorcer. Alors je vous en supplie, Rabbi, j’ai le cœur brisé, apprenez-moi ce que je dois faire et demandez miséricorde pour moi. Le ‘hakham en question (Rabbi Elisha) confirma ces propos. Il connaissait la méchanceté de cette femme et désespérait de pouvoir faire la paix entre eux. Et voilà qu’hier au soir lui était apparu plusieurs fois en rêve un homme à l’aspect redoutable, qui lui avait dit : « Fais une grande mitsva et un grand ‘hessed, amène cet homme chez Rabbi ‘Haïm Messas, et il le guérira de son mal. » Le matin suivant, il avait obéi à son rêve. Mon père leur dit d’un air affable : Sachez, mes enfants, que j’ai reçu de mon père une segoula d’une efficacité prouvée : quiconque fixe des temps d’étude de la Torah le jour et la nuit trouvera grâce aux yeux de sa femme et aura toujours la paix dans son foyer. Il y a là-dessus un verset explicite : « Une grande paix pour ceux qui aiment Ta Torah, ils n’ont pas de cause de chute » (Téhilim 119, 165). Celui qui aime la Torah fixe des temps d’étude tous les jours. Mon père a ajouté : une fois, j’ai objecté à mon père le cas d’un Rav qui étudiait la Torah tout le jour et toute la nuit, et dont la femme le rendait malheureux, comme le raconte la Guemara dans le traité Yébamot (63a). Il m’a répondu qu’il y a une différence. Les anciens sages aimaient les épreuves et s’en réjouissaient, comme on le sait de Rabbi Elazar le fils de Rabbi Chimon bar Yo’haï, qui appelait les épreuves en disant : « Venez, mes amies ! », comme il est dit dans la Guemara (Baba Metsia 84b). Il l’explique par l’enseignement de Rabbi Yéhochoua ben Lévi dans la Guemara (Ta’anit 8a) : « Quiconque se réjouit dans les épreuves apporte le salut au monde par son mérite. » Mon père a dit tout cela, a demandé miséricorde pour lui et a pris congé de lui. Cet homme a fait ce qu’il avait entendu et a fixé des temps d’étude de la Torah tous les jours. Au bout d’une quinzaine de jours, je me souviens qu’il est revenu chez mon père avec son ami le ‘hakham, tout heureux. Il a raconté que cela avait été efficace dès le premier jour, et que grâce à D., ils étaient maintenant totalement en paix. Une dissension pour éviter la dissension On connaît l’adage des Sages cité dans la Guemara (Yébamot 122b) que nous avons bien en bouche dans la prière du matin : « Les talmidei ‘hakhamim augmentent la paix dans le monde, ainsi qu’il est dit : tous tes enfants étudient pour se rapprocher de Hachem et tes enfants sont en grande paix. » Et il faut comprendre : en quoi les talmidei ‘hakhamim augmentent-ils la paix du monde ? Est-ce qu’ils vont de maison en maison pour faire la paix entre un homme et sa femme ou entre un homme et son prochain ? D’ailleurs, Rabbi Yochiyahou Pinto (dans son commentaire sur Ein Ya'akov sur le traité Berakhot) demande pourquoi ils augmentent la paix. Si c’est à cause de leur étude de la Torah, c’est chez eux-mêmes qu’ils augmentent la paix et non pour le monde. Et si c’est parce que du fait qu’ils étudient la Torah ils maintiennent le monde à l’existence, car on sait que le monde existe par le mérite de l’étude de la Torah, les Sages auraient dû dire : « Les talmidei ‘hakhamim maintiennent le monde à l’existence », que signifie qu’ils « augmentent la paix dans le monde » ? Le ‘Hatam Sofer explique dans ses sermons qu’en réalité, toutes les qualités et tous les défauts que l’on trouve chez les hommes ont été créés par Hachem, et chaque caractéristique, comme l’orgueil et l’humilité, la paix et la discorde, a été créé dans un but particulier, et doit être utilisée là où c’est nécessaire. Par exemple, la discorde est utile pour étudier la Torah et en discuter, chacun donnant son opinion et sa compréhension du sujet, et ainsi la question sera éclaircie et on arrivera à la vérité de la Torah, comme dans la dissension entre les partisans de Chamaï et ceux d’Hillel. Désormais, quand cette caractéristique de la dissension est utilisée dans le monde, chez les talmidei ‘hakhamim, automatiquement la dissension s’amoindrit chez les autres. Il en va de même pour toute qualité qu’on utilise dans la sainteté, elle diminue pour l’impureté. Par conséquent, du fait que les talmidei ‘hakhamim discutent de la Torah et utilisent la dissension dans un contexte de sainteté, par là-même ils augmentent la paix partout dans le monde. Le moindre mal On raconte sur Rabbi Zéev de Zbardj זצ''ל qu’on lui a une fois demandé pourquoi il faisait de lui-même un paillasson pour sa femme. Il répondit : Si on me méprise, c’est un décret du Ciel, et où est-ce que l’homme reçoit habituellement le mépris qui lui est dû ? Sur les routes, les marchés et dans les endroits publics. Et si du Ciel on a eu pitié de moi et que je reçois ce que je mérite à la maison, sans avoir besoin de me fatiguer à l’extérieur, je dois l’accepter volontiers…
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