Parachat Balak 5 Juillet 2014 7 Tamouz 5774 |
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Le doute au cœur de l’homme (par Rabbi David Hanania Pinto Chelita) La haine de Balak et de Bilam envers les bnei Israël et leur volonté profonde de les éliminer ressort avec insistance de notre paracha, tout cela malgré le fait que le monde n’a été créé que pour Israël (Béréchit Rabba 1, 4), et que si ce peuple venait par malheur à être détruit, rien n’aurait plus d’existence et eux-mêmes seraient détruits. Pourtant, cela n’a pas empêché Balak et Bilam de comploter sa perte, parce que le mal et la haine régnaient en eux sans freins et qu’ils ne se maîtrisaient plus. Mais il convient de se demander comment et pourquoi ils en étaient arrivés à un tel degré de haine. A propos des deux, il y a un verset qui parle du moment où ils ont vu les bnei Israël. Pour Balak, il est écrit (Bemidbar 22, 2) : « Balak ben Tsippor a vu tout ce qu’Israël avait fait au Emori », et à propos de Bilam il est écrit (Ibid. 24, 2) : « Il vit Israël établi en fonction de ses tribus. » Ces deux impies ont vu la grandeur du peuple d’Israël dans le désert, son étude de la Torah, son obéissance aux paroles de la Torah de la bouche de Moché, dont ils répétaient les paroles et les lisaient aussi par écrit, si bien qu’ils réussissaient à vaincre leur mauvais penchant, car quand on lit et qu’on répète la Torah, comment le mauvais penchant pourrait-il dominer l’homme ? Il ne peut pas le jeter dans la confusion. C’est cela qu’a vu Balak, tout ce qu’avait fait Israël à l’Emori, qui est le mauvais penchant (voir Béréchit Rabba 97). Par la force prodigieuse de la Torah, ils l’ont vaincu haut la main. Balak et Bilam ont encore vu qu’il n’y avait chez les bnei Israël ni vol ni débauche, les deux choses qui ont amené le déluge sur le monde (Sanhédrin 108a). Bilam a vu les bnei Israël camper selon leurs tribus, il a vu que l’ouverture des tentes ne se faisait pas face, pour que personne ne puisse voir ce qui se passait dans la tente d’un autre, si bien qu’ils n’en venaient à convoiter ni la maison ni la femme du prochain, et n’envisageaient pas de les lui dérober, non plus que ses biens. Balak et Bilam ont donc vu que les bnei Israël s’écartaient de la débauche et du vol en campant selon ses tribus. Et quand ils les ont vus sous leur meilleur jour, c’est cela même qui les a irrités et a exacerbé leur haine, au point de vouloir détruire ce peuple, même en sachant que de cette façon, ils allaient eux-mêmes disparaître du monde, comme Chimchon lorsqu’il a décidé de mourir en entraînant avec lui les Philistins. Pourquoi tout cela ? Parce que lorsque les bnei Israël étudient la Torah et de cette façon soumettent l’Emori, qui est le mauvais penchant, et qu’ils observent avec attention la moindre mitsva, cela oblige les autres nations à observer tout au moins les sept mitsvot des bnei Noa’h, car ce serait pour eux une honte extrême que les bnei Israël soient attentifs à toutes les 613 mitsvot alors qu’eux, qui connaissaient la vérité, ne la choisissaient pas. De plus, ils faisaient abstraction de cette vérité et se désintéressaient des mitsvot qui leur avaient été ordonnées. Ils préféraient une vie de débauche méprisable dans le mensonge et la fausseté en se cachant derrière l’idée qu’ils péchaient par inadvertance et n’étaient pas conscients de leurs devoirs. A cause de toute cette honte, Balak et Bilam, qui était prophète, ne trouvaient pas leur place, et leur haine devant ce que leur avaient causé les bnei Israël ne connaissait aucune limite. C’est pourquoi ils ont cherché un moyen d’éliminer ce peuple, en sachant qu’eux-mêmes en subiraient les conséquences, car le monde entier n’a été créé que pour la Torah et pour Israël (Béréchit Rabba 1, 4). En fait, c’est cela l’attitude d’Amalek (le mauvais penchant) : faire entrer le doute dans le cœur de l’homme et le tromper en lui faisant imaginer qu’il pèche par inadvertance, ainsi qu’il est écrit dans la parachat ‘Houkat (Bemidbar 21, 1) : « Le Cananéen, roi d’Arad, qui habitait dans le Néguev », et Rachi explique qu’il s’agit d’Amalek, ainsi qu’il est dit (Ibid. 13, 29) : « Amalek habite le Néguev », mais les Amalécites ont changé de langage et se sont mis à parler en Cananéen pour que les bnei Israël prient Hachem de leur livrer les Cananéens, alors qu’en réalité ce n’étaient pas des Cananéens. Quand nous observons ce Midrach, nous voyons combien ces choses sont terribles. En effet, Amalek croyait dans la force de la prière possédée par Israël et savait que le Saint, béni soit-Il acceptait leur prière, c’est pourquoi il a changé de langage pour les tromper. Mais s’il croyait que le Saint, béni soit-Il aidait les bnei Israël et acceptait leurs prières, comment a-t-il pu lui venir à l’esprit qu’il puisse tromper le Saint, béni soit-Il ? S’Il veut livrer Amalek à Israël, les bnei Israël auront beau demander dans leur prière qu’Il leur livre les Cananéens, Il leur livrera tout de même Amalek, en connaissant leurs intentions, qui est de vaincre ce peuple ! Et même si Amalek change non seulement sa langue mais aussi sa façon de s’habiller ou toute autre chose, cela ne trompera pas Hachem. Et c’est effectivement ce qui s’est passé. Les bnei Israël ont prié Hachem, ainsi qu’il est dit (Bemidbar 21, 2) : « Si tu livres ce peuple en mon pouvoir », et le Saint, béni soit-Il a entendu leur prière, ainsi qu’il est écrit (Ibid. 3) : « Hachem entendit la voix d’Israël. » Par conséquent, comment a-t-il pu venir à l’esprit à Amalek qu’il pourrait tromper D., est-ce qu’il se moque de Lui ? Quand le Saint, béni soit-Il est passé en Egypte pour frapper les premiers-nés et qu’Il a sauté par-dessus les maisons des bnei Israël, Il savait parfaitement où il y avait un Egyptien (Baba Metsia 61b), même s’il se trouvait dans la maison d’un juif. Il est certain qu’Amalek savait lui aussi qu’il ne pourrait jamais tromper le Créateur du monde, et qu’aucun subterfuge ne servirait à rien, et pourtant il a tout de même essayé de tromper et de ruser. C’est la façon de procéder d’Amalek, qui est le mauvais penchant : faire entrer des doutes dans le cœur de l’homme, comme si l’on pouvait tromper D., et qu’Il ne distingue pas entre un acte délibéré ou un acte involontaire. Et nous sommes effectivement témoins du fait que parfois, Amalek réussit, quand nous voyons des gens qui accomplissent la Torah et les mitsvot, mais qui parfois commettent une certaine faute, tout en sachant que c’est interdit. Mais ils s’imaginent qu’ils le font involontairement, sans tenir compte du savoir qui sonde les cœurs et les reins et qui connaît parfaitement leurs intentions et toutes leurs pensées, jusqu’à la moindre idée qui leur passe par la tête. C’est cela la force du mauvais penchant, qui lutte continuellement contre nous. Pour le contrer, la seule façon est de servir Hachem avec droiture, et quand l’homme se montre sincère avec Lui, Il le fait réussir. Heureux qui le mérite. HISTOIRE VECUE La voie sur laquelle on le mène « L’ange de Hachem dit à Bilam : va avec ces gens » (Bemidbar 22, 35) L’un des principes de base du service personnel de Hachem est construit sur l’hypothèse suivante : « Dans la voie que l’homme veut emprunter, on le mène. » C’est ce qui s’est passé avec Bilam quand tout ce qu’il désirait était de suivre les dignitaires de Balak pour maudire Israël, et du Ciel la permission lui a été donnée de suivre la voie qu’il désirait emprunter. Et si cela a été dit à propos d’une mauvaise attitude, à combien plus forte raison quand on cherche à marcher sur la voie qui nous a été tracée par nos saints ancêtres ! Dans ce cas, il est évident que D. nous mènera sur la voie qui est bonne et droite. Il en va de même en ce qui concerne l’étude de la Torah, le ressort central de tout ben Torah. Un véritable ba’hour yéchiva ne se sépare pas un seul instant de l’étude de la Torah, de la vie elle-même, même quand il a besoin de repos il continue à respirer la Torah. Dans le livre qui a été écrit à la mémoire du jeune Eliezer Schlesinger, on trouve l’histoire suivante : Les Rachei Yéchivot ont l’habitude de demander aux garçons, lorsqu’ils ferment la Guemara, de ne pas fermer leur tête en même temps… Mais même après minuit, quand Eliezer fermait son livre et se rendait du beit hamidrach dans sa chambre, il ne s’arrêtait pas d’étudier. Au contraire, il protestait contre l’ami avec lequel il partageait sa chambre, demandant comment il était possible qu’il n’y ait pas de livres dans leur chambre pour pouvoir les consulter dans les périodes de repos. Il avait même joint l’action à la parole en installant une étagère pour pouvoir y poser des livres. Ceux-ci étaient à la disposition de tous, mais en pratique c’était Eliezer qui les consultait assidûment. Un jour, il avait reçu en cadeau le livre de Responsa de Rabbi Akiva Eiger. La nuit même, il avait commencé à l’étudier dans son lit, et au matin il avait raconté à celui qui lui avait offert le livre qu’il avait déjà réussi à traverser de nombreux sujets, à faire des remarques et à exprimer des étonnements. L’un de ses camarades de chambre raconte : Eliezer n’allait pas dormir avant une heure du matin. Tous les soirs, avant que nous allions nous coucher, il me demandait de lui faire entendre une nouvelle explication. Une fois, je lui ai répondu que ce jour-là, rien de nouveau ne m’était venu à l’esprit. Eliezer s’est étonné : comment était-il possible de passer un jour entier sans une nouvelle explication ? Lui aussi nous racontait les nouvelles explications qu’il avait trouvées ce jour-là, et malgré l’heure tardive il vivait cette nouveauté comme s’il se trouvait en plein pendant le Séder aleph ! Celui qui consulte les notes prises par Eliezer est stupéfait. En effet, lui aussi avait des moments de faiblesse et de fatigue spirituelle, mais ce qui était absolument extraordinaire était qu’il luttait contre eux avec une telle obstination, un tel entêtement, qu’extérieurement en tout cas, on ne voyait aucun changement ni déclin. « Un jour je m’élève, écrit-il dans son carnet, et je dois savoir qu’il s’agit de maîtriser le mauvais penchant justement pendant les moments de faiblesse, car alors il n’y a pas autant d’aide de Hachem que dans les moments d’élévation… et il faut juger toute chose que je fais aussi aux moments de faiblesse, et pas seulement aux moments où la raison l’emporte sur le cœur. » Le mercredi il a écrit : « Je ressens un affaiblissement », et le lendemain : « D. merci, aujourd’hui j’ai reçu l’aide du Ciel et je me suis senti bien, je sens encore un peu de faiblesse, mais avec l’aide de D. cela va passer. Je ressens l’obligation de remercier Hachem de tout ce qu’Il m’a accordé. Je vais m’efforcer de m’élever encore et encore, tout cela avec Son aide, merci à D. constamment, pourvu que je continue à m’élever ! » Tout son désir était de s’élever, toute sa crainte de retomber. Un garçon qui a mal aux dents a peur du dentiste et du traitement. Mais Eliezer craignait le chemin qui menait au dentiste : « Je craignais beaucoup de quitter la yéchiva et de me trouver en ville, surtout dans des rues aussi sales et remplies d’indécence, peut-être cela allait-il me faire chuter. Mais D. merci, j’ai reçu l’aide du Ciel pour poursuivre mon élévation, et même ces derniers temps, je sens une élévation par rapport à ce que j’étais il y a deux mois, et j’ai senti que je m’élève uniquement grâce à l’aide du Ciel. D. merci. L’essentiel dans la prière est que grâce à cette aide manifeste ces derniers temps, je prie avec concentration, sans être trop dérangé. Puisse Hachem m’accorder de ne pas être vaincu dans l’avenir, Amen qu’il en soit ainsi. » Le jeune Moché Berguilovsky zal, étudiant de la yéchiva de Slobodka, qui est mort le jour de Roch ‘Hodech Tévet 5713, est arrivé à des niveaux extraordinaires à la fois dans la Torah et sa compréhension et dans le travail sur lui-même. Il écrit dans une lettre à un ami : « Il ne nous reste rien d’autre que cette Torah. Quand on étudie avec satisfaction et plaisir, et renouveau, on se revivifie, on est vivant, on crée, on sent, la tête fonctionne. On est totalement différent. On sent que l’on sait, qu’on agit, qu’on est vivant. Et alors, on est totalement différent dans son caractère aussi. On est content de son sort, on se réjouit de créer et rien ne vous manque, cette joie est le commencement de tout. Mais c’est justement parce que l’étude dans la satisfaction et le plaisir, approfondie et fructueuse, est l’essentiel, c’est justement pour cela que le mauvais penchant investit toutes ses forces et ne permet pas qu’on entre dans un lieu de sainteté. Il trouve toutes sortes de ruses et d’empêchements qu’il faut ignorer. Et il vous fait croire faussement qu’une fois qu’on aura réglé tout cela, on aura la paix, et alors on pourra étudier. Et quand arrive cet « alors », le mauvais penchant le repousse avec autre chose du même genre, et on en vient à perdre ses forces, et en vérité aussi à un léger sentiment de vide dû à l’absence d’étude. Ce qui est absolument essentiel, c’est l’étude en profondeur avec plaisir et satisfaction, et plus l’étude est ardue au début, plus elle finit par devenir agréable. » Le jeune David Raphaël Rubinstein zal, qui est mort le 14 Eloul 5764, est parti jeune, après avoir été longtemps immobilisé par la maladie. Voici ce que le livre « Dror Ikra » écrit sur lui : Nous sommes les élèves de David Raphaël zal dans la façon dont il a affronté les épreuves. Voilà un jeune homme qui avait grandi dans un cocon, et qui, à cause de longs séjours à l’hôpital pour des traitements douloureux, s’est trouvé exposé à l’univers des « films orthodoxes », des journaux douteux, des voyages dans des hôtels organisés par diverses structures de ‘hessed, et qui n’a pas dévié le moins du monde de l’éducation qu’il avait reçue à la maison. Un ordinateur se trouvait à sa disposition avec des dizaines de disques attirants, des volontaires lui proposaient « ce monde-ci » dans une cuiller en argent, lui offraient un sac rempli de toutes sortes d’hebdomadaires, mais lui, dans sa fermeté, est resté dans sa chambre d’hôpital avec l’âme aussi pure que s’il se trouvait à la yéchiva et il ne voulait rien prendre de tout cela. La seule chose qu’il acceptait de lire était les livres du gaon Rabbi Yitz’hak Zilberstein chelita. Un des organismes de ‘hessed lui arrangea, avec quelques autres malades, un voyage d’agrément à l’étranger, pour leur faire oublier leur situation, mais il refusa énergiquement de partir. « Je n’ai rien à chercher en Suisse, je préfère le beit hamidrach », dit-il. Le temps lui était précieux, pendant ces jours-là il avait organisé une étude avec des ‘havroutot, et il rayonnait de bonheur quand il pouvait étudier tranquillement. GARDE TA LANGUE Ne pas placer d’obstacle Il est interdit de conseiller à autrui de s’associer ou d’envisager un chidoukh avec une certaine personne quand on sait que cela pourrait entraîner pour lui une perte, par exemple parce que cette personne est pauvre ou n’est pas très honnête. Et bien qu’il y ait des cas où si on le lui demandait, il lui serait interdit de citer les défauts en question, il est tout de même interdit de conseiller de le faire, car en donnant un mauvais conseil on transgresse « ne place pas un obstacle devant un aveugle ». A LA LUMIERE DE LA PARACHAH Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita Face à la douloureuse réalité « Viens donc, je te prie, et maudis-moi ce peuple » (Bemidbar 22, 6) Cette paracha décrit comment Bilam a essayé par tous les moyens de maudire le peuple d’Israël. Mais il n’y a pas réussi et Hachem, dans Sa grande bonté, a transformé la malédiction en bénédiction, comme il est dit (Devarim 23, 6) : « Car Il a de l’affection pour toi, Hachem ton D. » Pendant toute cette période, Hachem a, si l’on peut dire, retenu Sa colère, et comme l’a dit Bilam, « Comment maudirais-je celui que D. n’a point maudit ? Comment menacerais-je, quand Hachem est sans colère ? » (Bemidbar 23, 8). Mais il y a tout de même lieu de comprendre pourquoi Bilam voulait attaquer les bnei Israël. Ces derniers ne l’avaient jamais combattu et ne lui voulaient aucun mal ! Plus encore, même Moav n’avait rien à craindre de la part d’Israël, comme il est dit « Ne provoque point une guerre contre eux. » Mais ce peuple n’avait certainement pas connaissance de cette injonction, et après la mort des deux grands rois Si’hon et ‘Og, il s’est senti menacé par Israël, impuissant face à lui. Mais pourquoi Bilam, lui, en voulait-il aux bnei Israël ? Quel mal lui avaient-ils fait ? Nous pouvons répondre à cette question selon le principe énoncé par nos Sages (Pessa’him 49b) : « La haine que portent les ignorants à un homme sage est plus grande que celle que ressentent les non-juifs envers Israël. » Un homme sage respecte la Torah et les mitsvot, se conduit évidemment selon le principe qui veut que « le savoir-vivre précède la Torah », est empreint de belles qualités et accomplit de bonnes actions : il renvoie donc aux yeux de tous l’image de ce qu’un être humain digne de ce nom doit représenter. Un érudit est comme un livre de moussar ambulant, car quiconque le voit se sent obligé de lui ressembler. Quand un ignorant rencontre un homme érudit rempli de qualités et à la conduite droite et juste, il se sent très honteux de ne pas réussir à surmonter lui-même ses mauvais instincts et à se comporter comme ce sage dont les actes et les voies sont agréables. Etant incapable de corriger ses défauts, il ressent alors une haine puissante envers cet homme qui, par sa simple existence, lui rappelle à quel point il a besoin de s’améliorer. Il est donc à présent plus aisé de comprendre pourquoi le camp d’Israël dérangeait tant Bilam et Balak : le fait de les voir camper en face d’eux et d’être confrontés à leur piété était en soi une accusation contre eux, et ils n’ont pas dissimulé leur haine contre Israël. A LA SOURCE « Balak, fils de Tsipor, a vu » Qu’a vu Balak ? D’après le Ba’al Hatourim, il a vu que le soleil s’était arrêté pour Moché. Mais en réalité, qu’a perçu Balak dans ce miracle, qu’il n’avait pas vu dans les autres miracles réalisés jusque-là ? Le Rabbi de Satmar explique : « Nos Sages ont dit que la force de Bil’am était de cibler le moment où D. Se met en colère chaque jour, comme il est dit ‘‘Le Tout-Puissant fait sentir Sa colère tous les jours.’’ Or, il s’agit du moment où le soleil brille et où les rois de l’ouest se prosternent devant lui. Voilà donc ce que Balak a craint. En voyant que le soleil s’était arrêté pour Moché, il a eu peur que cela ne se reproduise et que Bilam ne puisse plus cibler le moment précis et maudire le peuple d’Israël. » « Qu’elles sont belles tes tentes, Ya’akov, tes demeures, Israël ! » Nos Sages expliquent qu’à partir des bénédictions de Bilam, nous pouvons déduire quelles malédictions il avait projeté de faire. Mais Rabbi Réouven Elbaz s’étonne : comment pouvons-nous imaginer à partir de là les malédictions qu’il avait en tête ? On n’y voit pourtant que des bénédictions pour Israël ! Il donne alors une belle explication selon laquelle il s’agit ici d’un dialogue entre Bilam et Hachem : Au fond, Bilam savait qu’il ne pourrait pas maudire les bnei Israël et que ses malédictions ne se réaliseraient pas, car ils étaient aidés par le Ciel, c’est pourquoi il a voulu au moins amoindrir leur réussite et réduire leur bénédiction. Ainsi, en disant « Qu’elles sont belles tes tentes, Ya’akov », il voulait faire passer le message que de même que le mot « tente » désigne quelque chose de provisoire, l’étude des bnei Israël n’est que provisoire et n’a rien de fixe. A cela, Hachem a répondu qu’il n’en est pas ainsi, mais plutôt « tes demeures, Israël ! » : ils ont établi leur demeure dans l’étude de la Torah. Bilam a dit à son tour « Elles se développent comme des vallées » pour les comparer à un torrent intermittent qui est fécond en hiver, mais pratiquement inexistant en été. Alors D. a alors répondu « comme des vergers le long d’un fleuve » pour signifier qu’ils étudient la Torah telle une source intarissable durant toute l’année. Bilam a ajouté « D. les a plantés comme des aloès » : en d’autres termes, même les tsaddikim et les érudits sont comparables à de petites tentes, et leur piété n’est pas reconnue. Mais D. a rétorqué « comme des cèdres au bord des eaux » : les tsaddikim ne sont pas petits comme des tentes, mais plutôt grands et hauts comme des cèdres, et au bord des eaux, ce qui est un endroit permanent et de croissance. Enfin, Bilam a dit « La sève ruisselle de ses branches » pour dire que même quand ils étudient la Torah et accomplissent les mitsvot, ils le font en toute petite quantité comme la sève qui ruisselle, goutte à goutte, de ses branches. A cela, Hachem a répondu que « la descendance d’Israël est abondamment arrosée » en Torah et mitsvot, tant en quantité qu’en qualité. « Amalek est le premier des peuples, mais sa fin est vouée à la perdition. » (24, 20) Rabbi Daniel Palavni chelita explique ce verset sur le mode de l’allusion : il est bien connu que toute la vie accordée aux impies n’est due qu’au mérite des tsaddikim. Ainsi, Amalek a reçu sa vie uniquement grâce à Amram, Moché, Lévi et Kehat. Or, les initiales des noms de ces tsaddikim forment le nom « Amalek ». C’est donc d’eux que provient la vie d’Amalek. Les dernières lettres de ces noms (Mem, Hé, Youd, Tav) forment, quant à elles, le mot « mita » (mort). C’est à cela que fait allusion le verset « Amalek est le premier (réchit) des peuples » : la vie d’Amalek est due aux premières lettres (rachei tevot) du nom de ces tsaddikim. « Mais sa fin (a’harito) est vouée à la perdition » : quant à la mort de cet impie, elle provient des dernières (a’harit) lettres des noms des tsaddikim. LA VIE DANS LA PARACHA A partir de l’enseignement de Rabbeinou ‘Haïm ben ‘Attar « Il attaqua Israël » Pourquoi est-il dit « Il attaqua Israël (Vayila’hem béIsraël) » et non pas « Il entra en guerre avec Israël (Vayila’hem im Israël) », comme il est dit dans la parachat Bechala’h (Chemot 17, 8) « Amalek survint et entra en guerre avec Israël » ? En réalité, les bnei Israël étaient eux-mêmes la raison de cette guerre, à cause de leur faute. De même pour ce qui est dit à la suite : « Il en (mimeinou) fit quelques-uns prisonniers » : le terme « mimeinou » désigne la cause de cette captivité. Quelle était leur faute ? Ils étaient à l’origine de l’absence de Moché en terre d’Israël à cause de l’épisode de Mei Mériva, comme il est écrit (Psaumes 106, 32) : « Ils suscitèrent le courroux divin aux eaux de Mériva, et il advint du mal à Moché à cause d’eux. » Comme on le comprend, cela concerne également Aharon, mais on ne mentionne que Moché car il est le principal. LES SENTIERS DES JUSTES Pour acquérir les valeurs et les bonnes midot L’histoire de la réussite de la yéchiva de Volojine a eu des échos dans la totalité du monde juif, qui a vu dans sa fondation une source d’inspiration et d’émulation. On a fait demander au gaon Rabbi ‘Haïm de Volojine par un collègue quel était le secret de l’influence de sa yéchiva sur les autres yéchivot du monde et ce qui en faisait le berceau de la Torah en diaspora et une source d’attraction pour quiconque est habité d’un désir brûlant pour la Torah et dont la lumière brille au loin. Ce Rav avait lui aussi avait fondé une yéchiva et ne voyait aucune réussite dans son existence. Rabbi ‘Haïm lui a répondu par une question : « Dites-moi donc ce que vous avez fait au moment de l’inauguration de la yéchiva ? » « Quelle question ! a répondu l’autre ; j’ai organisé une belle cérémonie avec la participation d’invités et de dignitaires, il y a eu une grande fête grâce à une publicité convenable en l’honneur de cette journée. » Rabbi ‘Haïm l’interrompit : « C’est cela la réponse à votre question. A la yéchiva de Volojine, l’inauguration a eu lieu de façon totalement différente. Cette nuit-là, je n’ai pas fermé l’œil, mais je me suis couché sur la pierre inaugurale et toute la nuit j’ai prié et j’ai versé des larmes brûlantes pour la réussite de la yéchiva, qu’elle accomplisse sa mission d’être un lieu de Torah. Le lendemain, c’est peut-être avec ces larmes qu’on a lié le mortier de la pierre inaugurale », termina Rabbi ‘Haïm. C’est là que réside le secret de la réussite de la yéchiva. Si l’on veut, c’est donc là le contenu intérieur de la construction d’un foyer juif : établir des fondations de dévouement à la Torah, la prière venant des profondeurs du cœur pour mériter d’accomplir le véritable but de l’établissement d’un foyer juif dans les murs duquel règnent la paix et la sérénité. D’une guerre à l’autre On trouve dans les écrits de l’Admor Rabbi Moché Mordekhaï de Lelow זצ''ל un principe solide pour la fondation d’un foyer juif. Il s’étonnait de ce que la Torah dispense le jeune marié de participer à la guerre pendant la première année de son mariage ! Quand un homme construit un foyer, explique l’Admor, et qu’il veut le baser sur une vie de Torah et de crainte du Ciel, tout dépend de ses fondations et de sa construction. Si au début il l’élève sur des piliers de Torah, ce comportement continuera pendant toute sa vie. C’est seulement de cette façon qu’il peut vaincre dans la grande guerre, celle contre le mauvais penchant. Le ‘Hovot HaLevavot cite les paroles du sage au roi qui revient de la guerre. Il lui dit qu’il revient d’une petite guerre et que maintenant il doit affronter la grande guerre, celle contre le mauvais penchant. C’est pourquoi la première année du mariage, dont dépendent les bases du foyer, la Torah l’a dispensé de la « petite guerre » pour qu’il puisse élever son foyer sur les socles de la Torah et de la crainte du Ciel, et vaincre dans la « grande guerre ». Les plaies dans les murs de la maison Voici un très bon conseil pour préserver les murs de la maison juive et protéger ses bases solides : veiller à la sainteté du foyer. Le machguia’h de la yéchivat « Kefar ‘Hassidim », le gaon Rabbi Eliahou Lopian זצ''ל, raconte : Je me souviens que dans ma jeunesse, j’ai étudié à la yéchivat de Lomze. Il y avait dans la ville un vieil hôpital construit en bois. Il était tellement vétuste que même les vieillards de la ville n’en connaissaient pas l’âge. Il arrivait plus d’une fois qu’un malade qui y restait longtemps y attrape d’autres maladies qu’il n’avait jamais eues auparavant. C’était surprenant. Pour expliquer ce phénomène étrange qui se produisait entre les murs de l’hôpital, la direction alerta de grands professeurs de Varsovie. Ceux-ci siégèrent pour examiner la question et arrivèrent à la conclusion qu’à cause du grand âge de l’hôpital, plusieurs sortes de maladies contagieuses avaient été absorbées par ses murs, à la suite de quoi les malades hospitalisés pour des maladies différentes étaient contaminés. Les spécialistes ordonnèrent immédiatement de détruire tout le bâtiment jusqu’aux fondations, d’enlever tout le bois qui avait servi à la construction, de l’emmener en dehors de la ville et de brûler le tout, jusqu’à ce qu’il ne reste plus aucune trace des matériaux de construction de l’hôpital, si bien que les maladies absorbées par eux ne seraient plus en contact avec les habitants de la ville en bonne santé. Or s’il en est ainsi des maladies du corps, à combien plus forte raison des maladies de l’âme ! C’est pourquoi, en concluait le Rav Lopian, nous devons savoir que dans la maison où habite une famille qui n’observe pas les lois de la pureté familiale ou qui profane le Chabbat ou des choses semblables, de grande plaies apparaissent et sont absorbées par les murs, toutes sortes de maladies spirituelles, et si l’on rentre dans une telle maison, il y a lieu de craindre d’être contaminé. Le machguia’h ajoutait une histoire : on connaît des tsaddikim qui lorsqu’ils se rendaient dans des lieux éloignés et descendaient dans des auberges, veillaient à ne pas dormir dans une chambre avec quelqu’un d’autre, sauf s’ils le connaissaient et savaient que c’était un homme pieux. Car bien qu’on n’ait aucun rapport avec lui et qu’il s’agisse seulement de dormir dans le même lit, s’il n’est pas honnête, alors l’air devient empoisonné et peut causer du tort au tsaddik. Il y a de nombreuses années, un certain talmid ‘hakham est arrivé chez le gaon Rabbi ‘Haïm Kaniewski chelita, et lui a raconté les tentatives qu’il avait faites pour construire une yéchiva dans une ville en diaspora. Et malgré tous ses efforts, il n’y était absolument pas arrivé. Et voici que lorsque Rabbi ‘Haïm a entendu le nom de la ville, il s’est immédiatement levé, a ouvert le « Séfer ‘Hassidim » et lui a montré qu’il y était dit explicitement que dans cette ville aucune yéchiva ne s’élèverait jamais, et pourquoi ? A cause de la force de l’impureté qui y régnait ! C’est cela le secret du foyer juif : les murs de la maison absorbent les paroles, les spectacles, les voix et les comportements. Quand tout cela est fait dans un esprit de Torah, la maison est sanctifiée et crée une atmosphère positive où la Chekhina vient reposer, ou alors malheureusement c’est l’inverse. Si les paroles ne sont pas des paroles de sainteté, la musique ne tend pas vers la sainteté, et les actes commis entre les murs de la maison sont opposés à l’esprit de la Torah, alors l’influence négative provoque que la Chekhina s’éloigne de la maison et de ses habitants. Ce n’est pas pour rien que les Sages ont décidé que quiconque allait habiter dans une nouvelle maison avait une mitsva d’inaugurer la maison par des paroles de Torah. Que le premier repas, le premier rassemblement dans la maison, soit sur des paroles de Torah et de sainteté. En effet, les murs de la maison absorbent la première fois les paroles de Torah, entendent des sons agréables de chants et de piyoutim. Tout cela est la recette pour que la Chekhina et la paix reposent sur le foyer juif.
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