Parachat Ki-Tetsei 6 Septembre 2014 11 Elloul 5774 |
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La guerre contre le mauvais penchant (par Rabbi David Hanania Pinto Chelita) « Quand tu partiras en guerre contre ton ennemi, que Hachem ton D. te le livrera et que tu feras des prisonniers » (Devarim 20, 11). Les commentateurs ont expliqué (voir entre autres « Torat Moché » du Alcheikh zatsal) qu’il s’agit ici de la guerre bien connue du juif contre son ennemi éternel, le mauvais penchant, et qu’ici dans notre paracha on trouve en allusion de nombreux conseils sur la façon de lutter contre lui et de le vaincre. Je vais les exposer en suivant l’ordre des versets. Quand il est écrit « que Hachem ton D. te le livrera », cela renvoie à ce qu’ont dit les Sages (Kidouchin 30b) : « Le yetser de l’homme est plus fort que lui chaque jour et cherche à le tuer, et si le Saint, béni soit-Il ne l’aidait pas, il ne pourrait rien contre lui. » Cela signifie que les forces individuelles insignifiantes de l’homme ne suffisent pas pour vaincre le mauvais penchant, mais en revanche il a le devoir de commencer et d’entamer la lutte contre lui, et alors le Saint, béni soit-Il l’aide à le vaincre, comme l’ont dit les Sages (Yoma 38b) : « Celui qui veut se purifier, on l’aide. » Dans ce cas, le Saint, béni soit-Il le lui livre certainement. On sait qu’habituellement, quiconque lutte contre un ennemi cherche à obtenir des détails et à découvrir les secrets de l’armée adverse, pour savoir avec quelles armes il faut lutter pour le vaincre, par exemple avec un armement encore plus sophistiqué. Il en va de même dans la guerre de l’homme contre son yetser, qui a une force extraordinaire et connaît toutes les ruses de guerre, car alors il faut l’aborder avec un armement encore plus sophistiqué, comme l’ont dit les Sages (Kidouchin 30b) : « J’ai créé le mauvais penchant et Je lui ai créé la Torah comme antidote. » C’est elle qui va vaincre le mauvais penchant et le faire tomber à terre. Cette idée se trouve en allusion dans le verset « Quand tu partiras en guerre contre ton ennemi » ; le mot « mil’hama » (guerre) peut être partagé en deux, « le’hem » (pain) et « ma » (quoi). La Torah s’appelle « le’hem » (Yalkout Chimoni Michlei 9, 5), ainsi qu’il est écrit (ibid.) : « Venez, mangez de mon pain », alors que les lettres « mem hé » (ma) ont la même valeur numérique que le mot « adam » (homme). Cela signifie, comme nous l’avons dit ci-dessus, que lorsque l’homme part en guerre contre son mauvais penchant, il ne réussira à le combattre que grâce à la Torah. Alors, s’il est de pierre, il fondra, et s’il est de métal, il éclatera (Kidouchin 30b). Il faut encore dire à ce propos qu’il y a encore une autre façon de vaincre le mauvais penchant pour qu’il ne fasse pas trébucher l’homme en le faisant tomber dans les abîmes, c’est de veiller à la pureté des mœurs, et de vivre dans une grande sainteté de ce point de vue-là, alors on réussit à le vaincre. Cela aussi se trouve en allusion dans les mots « quand tu partiras en guerre ». Le mot « lamil’hama » (en guerre) est fait des mêmes lettres que « le’hem » (pain) et « mila » (circoncision), c’est-à-dire que si l’on préserve la pureté des mœurs (symbolisée par la circoncision) et qu’on se renforce aussi dans la Torah (le « pain »), alors on vaincra le mauvais penchant. C’est l’explication de la suite de l’enchaînement des versets : « Si un homme a deux femmes, l’une aimée et l’autre détestée » (Devarim 21, 16). La Torah nous enseigne que lorsqu’on étudie la sagesse de la Torah, il faut veiller à toujours le faire pour l’amour du ciel, comme il est dit dans Pirkei Avot (6, 1) au nom de Rabbi Méïr : « Quiconque étudie la Torah de façon totalement désintéressée mérite beaucoup de choses. » Et même s’il ne l’étudie pas avec toute l’abnégation nécessaire, il s’efforcera d’en arriver à ce niveau, car il est dit (Pessa’him 50b) que d’agir même de façon intéressée finit par déboucher sur un désintéressement total. Mais on fera très attention à ne pas s’enorgueillir, car dans le cas contraire, si l’on est un sage, la sagesse disparaîtra (Pessa’him 66b). C’est un défaut qui est en horreur à Hachem, comme en témoigne Michlei (16, 5) : « Tout cœur hautain est en horreur à Hachem. » Une seule chose est aimée de Hachem, tandis que la deuxième, la Torah qui s’accompagne d’orgueil, est détestée. Et si malgré tout on se comporte avec suffisance, alors : « Si un homme a un fils rebelle » (Devarim 21, 18). Cela signifie que lorsqu’on s’unit à une femme détestée, c’est-à-dire qu’on étudie avec orgueil, alors on aura un fils rebelle, car qui se ressemble s’assemble, et tout ce qu’engendre cette Torah ira aux forces de l’impureté et ne restera pas dans la sainteté. Dans le passage qui suit, il est dit : « Tu ne verras pas le bœuf de ton frère ou son mouton égarés en en faisant abstraction, tu dois absolument les rendre à ton frère » (Devarim 22, 1). Comment peut-on reconnaître qu’on étudie la Torah de façon désintéressée, et qu’on vise uniquement la « femme aimée », et non la « femme détestée » ? Par le fait de « rendre ce qui a été perdu ». Cette mitsva est entièrement faite d’intériorité et de droiture, puisqu’il n’y a pas de témoins et que seule la personne elle-même et le Maître du monde savent qu’elle a trouvé quelque chose, et si elle l’a identifiée ou non. C’est effrayant : combien de piété et de pureté il faut pour en arriver à cette mitsva de rendre ce qui a été perdu ! Ainsi, on trouve chez les Sages (Yérouchalmi Baba Metsia ch. 2 halakha 5) que Rabbi Chimon ben Cheta’h avait acheté à un Arabe un âne avec son bât. Quand il a ouvert le bât, il a trouvé à l’intérieur une grande quantité d’argent et d’or. Il est allé rendre tout ce trésor au vendeur, en lui disant : « Je vous ai acheté un bât mais pas de l’or et de l’argent. » Alors, ce non-juif l’a beaucoup glorifié. De tels actes, qui proviennent de la pureté du cœur et de la piété, prouvent si l’étude de la Torah est désintéressée ou non, s’il s’agit de la « femme aimée » ou de la « femme détestée ». Nous devons encore apprendre de là qu’il faut rendre un objet trouvé avec joie et de tout cœur, comme on le raconte le traité Ta’anit (25a) à propos de Rabbi ‘Hanina ben Dossa, chez qui un invité de passage avait laissé des poules. Il a ordonné à sa femme de ne pas manger de leurs œufs. Pendant très longtemps, ces poules ont pondu des œufs qui ont donné des poussins et Rabbi ‘Hanina s’en est occupé jusqu’à ce qu’ils le dérangent beaucoup, alors il les a vendus, et avec l’argent il a acheté des chèvres. Au bout de plusieurs années, le propriétaire des poules est revenu, et Rabbi ‘Hanina ben Dossa lui a demandé un signe, à la suite de quoi il lui a rendu les chèvres. Cela nous enseigne que lorsque quelqu’un étudie la Torah pour l’amour du ciel et avec joie, c’est avec la même joie et la même droiture qu’il doit rendre un objet perdu, car il accomplit toutes les mitsvot avec joie et enthousiasme, et ce qu’il fait dans un domaine est un signe de ce qu’il fait dans les autres. LES PAROLES DES SAGES La pudeur est le rempart qui nous protège « Qu’on ne voie pas chez toi une chose impudique, Il Se retirerait d’avec toi » (Devarim 23, 15). La couronne spéciale du peuple d’Israël est celle qui est sertie de pierres précieuses et de perles rares, nous voulons parler de la « couronne de la pudeur ». C’est une véritable couronne. On n’a jamais vu une reine, dans quelque pays que ce soit, avoir honte de la couronne qui lui ceint la tête et désirer l’enlever. C’est une indignité épouvantable de voir des filles de Sion ôter la couronne de la pudeur, à cause de l’ignorance et d’un manque d’appréciation de cette qualité, en faveur de laquelle la Torah crie sa mise en garde : « Qu’on ne voie pas chez toi une chose impudique », car alors, pour notre malheur, « Il se retirerait d’avec toi ». Le Saint, béni soit-Il ôterait Sa providence du camp d’Israël. Rabbi Réouven Karlenstein chelita a raconté une histoire terrible (citée dans le livre « Aleinou Lechabea’h » sur notre paracha), qui doit nous faire toucher du doigt la gravité de la faute dans ce domaine. Il y a des dizaines d’années, le gaon Rabbi Chelomo Zalman Auerbach zatsal élevait chez lui une petite orpheline. Le moment venu, il lui chercha lui-même un chidoukh avec un garçon ben Torah de haut niveau, et il la conduisit sous la ‘houpa. Une fois la cérémonie du mariage terminée, les invités s’étonnèrent de voir que le gaon zatsal allait jusqu’à l’endroit où se trouvait la pièce où les jeunes époux étaient isolés, et attendait longtemps qu’ils en sortent. C’était un spectacle si surprenant que les témoins craignirent que Rabbi Chelomo Zalman ne leur fasse pas confiance. Les parents du jeune homme essayaient également d’imaginer toutes sortes d’hypothèses sur ce qui avait pu le déranger. Le gaon s’aperçut de l’inquiétude qui planait et calma tout le monde, mais tout en continuant à attendre patiemment à côté de la pièce en question. Et voici que lorsque les jeunes mariés ouvrirent la porte et que le photographe s’apprêta à rentrer pour les photographier, Rabbi Chelomo Zalman lui demanda d’attendre un peu au dehors, parce qu’il avait quelque chose de personnel à dire au jeune couple. Quand il entra dans la pièce, il ferma la porte derrière lui, puis s’adressa à la jeune femme en secouant le doigt en signe de mise en garde : « C’est la dernière fois que je te vois avec une perruque pareille ! » Terrible. Rabbi Chelomo Zalman, zatsal, avec tout l’amour d’Israël qui était en lui, avec toute la chaleur et l’affection qu’il manifestait aux orphelins, au point que lui-même avait élevé une orpheline dans sa maison, ne tenait compte de rien de tout cela cette fois-ci. Quand il avait vu que la mariée portait une perruque dont la décence laissait un peu à désirer, il l’avait grondée devant son jeune époux, et l’avait prévenue de ne plus jamais la porter... Il avait trouvé bon d’agir ainsi pour éduquer cette jeune mariée orpheline et la mettre sur le chemin d’un bonheur et d’une joie véritable pendant toute sa vie. Est-ce que nous devons avoir honte de quelque chose ? Est-ce que nous devons avoir honte de la couronne de notre pudeur ? Qu’est-ce que c’est que cette honte-là ? Les problèmes commencent dès le jeune âge, quand les petites filles s’habillent de façon qui n’est pas conforme aux règles de la pudeur, et disent : « Maman, même ma meilleure amie porte ce genre de vêtements, alors pourquoi je dois être la seule à avoir l’air de n’avoir que des vieux habits, qui ne sont plus du tout à la mode ? Même ma cousine s’habille comme ça, et d’ailleurs ma tante aussi… » Qu’est-ce que sa mère doit répondre à cela ? « Ma chérie, si tu voyais ta meilleure amie ou ta cousine en train de profaner le Chabbat, ou de manger de la viande interdite, est-ce que tu dirais encore : « Mais ma meilleure amie en fait autant » ? C’est tout. Est-ce qu’il y a quelque chose à ajouter à une pareille réponse ? Est-il possible que nous ayons perdu le sens des proportions ? L’absurde a atteint un tel point que les gens ne font tout simplement plus attention à ce qu’ils font. Le gaon Rabbi Yéhouda Adès chelita, Roch Yéchiva de « Kol Ya'akov », a raconté que des parents viennent souvent le trouver pour lui faire part de leur profonde douleur de ce que leur fils s’écarte de la voie de la Torah, quitte la yéchiva et adoptent une conduite répréhensible. Ils lui demandent conseil : que faire, comment se comporter ? Alors, dit le Rav Adès, je les regarde, et en général il s’agit d’un avrekh ben Torah et d’une femme issue du Beit Ya'akov, et je suis stupéfait : voici que la femme, la mère de ce garçon, n’est pas habillée selon les lois de la pudeur, et elle a encore des questions ? Elle s’étonne de ce que son fils ait quitté la bonne voie ? Par exemple ! Comment aurait-il pu faire autrement ? Est-ce qu’il avait quelqu’un de qui apprendre une conduite morale ? C’est ce que nous disions : à force de parler de pudeur, il se peut que nous ayons perdu le sens des proportions. Si nous en sommes arrivés à une situation où la mère ne fait pas le rapport entre la chute spirituelle de son enfant et sa propre absence de pudeur, qu’est-ce qu’on peut encore lui dire ? On a un jour demandé au ‘Hafets ‘Haïm zatsal, à propos d’une certaine sévérité quant à la pudeur, si cela valait la peine de se montrer sévère à ce point, et il a répondu que comme cette mitsva de la pudeur avait une influence directe sur la totalité du peuple d’Israël, il est tout à fait certain que cela vaut certainement la peine de faire du mieux possible. En effet, tout sévérité qui embellit la mitsva entraîne que le Saint, béni soit-Il « soit avec toi à l’intérieur de ton camp », et tout manque aux lois de la pudeur risque d’amener à une situation où Il Se retirerait. Par conséquent il est clair que tout embellissement dans la mitsva de la pudeur a une portée considérable. Ce qui est très important de se rappeler est que le Saint, béni soit-Il souffre beaucoup de tout foyer juif où l’on ne pratique pas la pudeur, et la plus grande souffrance est que cette grande dégénérescence a atteint même les foyers orthodoxes. On peut comparer cette situation à celle d’un père que plusieurs de ses fils auraient abandonné, trahi, et avec qui ils auraient rompu tout lien. La profondeur de sa peine est absolument indescriptible. Or ce père avait un fils qui avait promis de ne jamais le quitter ni l’abandonner, et il se consolait de sa présence et de son amour. Mais si ce fils-là aussi le trahit et l’abandonne, alors la profondeur de sa peine est véritablement indicible, et quiconque chercherait à le consoler et à l’encourager perdrait son temps. GARDE TA LANGUE Il ne faut pas s’appuyer là-dessus Certains disent qu’un chose qui a été dite devant trois personnes ne comporte plus d’interdiction de médisance, mais dans la pratique il ne faut pas s’appuyer là-dessus, et c’est interdit. L’interdiction vaut même quand on raconte à quelqu’un d’autre, si c’est dans l’intention que la chose en arrive aux oreilles de la personne dont on a parlé. A LA LUMIERE DE LA PARACHAH Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita Quelques bons conseils contenus dans la paracha « Quand tu construiras une nouvelle maison, tu feras une rampe autour du toit afin de ne pas mettre de sang dans ta maison si quelqu’un en tombait » (Devarim 22, 8). Cela signifie qu’on doit ériger une rampe de protection contre le mauvais penchant, pour l’empêcher d’attaquer, car il fera toujours tomber celui qui n’est pas sur ses gardes, c’est-à-dire qu’à cause du mauvais penchant on peut retomber du niveau spirituel que l’on avait atteint, et il faut faire attention et s’en protéger. Cette paracha nous guide sur la meilleure voie possible, qui nous a été tracée par le Créateur. En voici plusieurs exemples : « Ne sème pas dans ta vigne des espèces différentes » (22, 9). Cela signifie que parfois, le mauvais penchant se présente sous l’aspect du bon penchant afin de nous faire trébucher, c’est pourquoi il nous est ordonné de ne pas tout mélanger et de ne pas semer la vigne d’Israël avec un mélange de bon penchant qui est en réalité un mauvais penchant. C’est aussi ce que dit le verset : « Tu ne laboureras pas avec un bœuf et un âne ensemble » (ibid. 10). Il ne faut pas mélanger le bœuf, qui est la Torah (le mot « chor » (bœuf) peut aussi être compris comme provenant de la racine « chour » (voir), or la Torah est une lumière qui éclaire l’homme), et l’âne, qui est le mauvais penchant, comme le suggère le verset « restez assis ici avec (im) l’âne » (Béréchit 22, 5), que la Guemara (Yébamot 62a) explique comme signifiant « le peuple (am) qui est semblable à l’âne ». Il ne faut pas se tromper entre les deux penchants, le bon et le mauvais. La Torah continue en disant (Devarim 22, 11) : « Tu ne porteras pas de cha’atnez » (laine et lin ensemble). C’est la même idée, de ne rien mélanger et de ne pas prendre une faute pour une mitsva, car l’homme doit voir et distinguer entre le bien et le mal, et ne faire que le bien. Comment va-t-il y parvenir ? La Torah nous l’enseigne (ibid. 12) : « Tu feras des franges aux quatre coins de ton vêtement. » C’est la mitsva de tsitsit, qui a autant de valeur que toutes les autres mitsvot ensemble (Nedarim 25a), et à propos de laquelle la Torah dit (Bemidbar 15, 39) : « Vous le verrez, vous vous souviendrez de toutes les mitsvot de Hachem et vous les observerez. » En effet, grâce à la mitsva de tsitsit nous nous souviendrons toujours de toutes les mitsvot, et ce souvenir nous amènera à les accomplir effectivement. De plus, seuls les tsitsit peuvent nous amener à distinguer entre le bien et le mal, comme l’ont dit les Sages (Mena’hot 44a) à propos d’un homme qui avait voulu fauter, mais dont les tsitsit lui avaient frappé le visage. En effet, les tsitsit nous éclairent la voie en ce monde, et alors nous distinguons entre le bien et le mal, car le mal est le symbole de l’obscurité, alors que les mitsvot et la Torah sont la lumière, ainsi qu’il est écrit (Michlei 6, 23) : « La mitsva est une lampe et la Torah est la lumière. » A LA SOURCE « Que Hachem ton D. te les livrera et que tu feras des prisonniers » (21, 10). Dans la guerre contre le mauvais penchant, disait le Ba’al Chem Tov, il est nécessaire de « faire des prisonniers », à savoir d’étudier la façon dont il fait la guerre et les moyens qu’il emploie pour piéger l’homme. Et nous devons employer ces mêmes moyens à son égard. D’un autre point de vue, disait le ‘Hatam Sofer, nous devons apprendre des façons de procéder du yetser. De même qu’il n’incite pas l’homme à se détourner du bon chemin en une seule fois, mais aujourd’hui lui dit « fais ceci » et demain « fais cela », de même dans la guerre contre lui nous devons procéder progressivement. « Si un homme a un fils rebelle qui n’écoute pas la voix de son père » (21, 18) L’auteur de « Toldot » l’explique allégoriquement : « Si un homme a un fils rebelle », pareille chose est-elle possible ? Mais la raison en est que cet homme, qui a un fils rebelle, lui-même « n’écoute pas la voix de son père », de son Père des cieux, c’est pourquoi il a un tel fils. « Tu ne laboureras pas avec un bœuf et un âne ensemble » (22, 11) La raison pour laquelle la Torah interdit de labourer avec un bœuf et un âne ensemble est donnée explicitement dans le Séfer Ha’Hinoukh : « On sait que les diverses espèces de bêtes et d’oiseaux ont horreur de côtoyer un animal d’une espèce différente, et à plus forte raison d’effectuer un travail avec lui. Nous le constatons de nos yeux chez ceux qui ne nous appartiennent pas. Les oiseaux se regroupent par espèces, ainsi que toutes les sortes de bétail, ils s’attachent toujours à leur propre espèce. » Cette remarque a une conséquence morale : « Quiconque a le cœur sage doit en tirer la leçon et ne pas considérer deux personnes comme identiques. Elles sont éloignées l’une de l’autre dans leurs goûts et ont des comportements différents, comme par exemple le juste et l’impie, le misérable et l’honorable. Si la Torah a tenu compte de la peine que cela cause aux animaux, qui n’ont pas d’intelligence, à plus forte raison en ce qui concerne les hommes, qui ont une âme intellective… » Le Ibn Ezra l’explique d’une autre façon : « Hachem a pitié de toutes Ses créatures, or la force de l’âne n’est pas égale à celle du bœuf. » Comme l’âne est plus faible que le bœuf, s’ils labouraient ensemble, cela lui causerait de la peine parce qu’il serait obligé de faire de trop grands efforts pour essayer d’imiter la force naturelle du bœuf. « Pour te protéger et pour te livrer tes ennemis » (23, 15) Les initiales de ces mots en hébreu forment le mot « Elloul ». Le livre « Beer La’haï » y voit une merveilleuse allusion au fait que pendant le mois d’Elloul, quand le juif revient vers D., Il lui permet de vaincre ses ennemis, qui sont les anges accusateurs, et lorsque ceux-ci s’inclineront, les ennemis feront de même, comme on le sait. LA VIE DANS LA PARACHA A partir de l’enseignement de Rabbeinou ‘Haïm ben Attar « Si ton frère n’est pas à proximité, etc. » (22, 2-3) Il est question de la période du dernier exil, qui n’est pas proche, comme dans l’expression (Bemidbar 24, 17) : « Je le vois, mais il n’est pas proche. » « Ou si tu ne le connais pas », car le moment de la fin nous est caché, personne ne sait quand il viendra, et cela provoquera un éloignement des cœurs de la foi et un affaiblissement, comme nous le constatons dans nos générations. Malgré tout, « tu le recueilleras dans ta maison », il s’agit du Temple. Et on lui enseignera la façon de vivre et d’attirer la lumière, pour qu’il ne s’en écarte pas et que son ennemi ne le trouve pas plongé dans des pensées trompeuses, car la lumière de la Torah le sauvera. Ce sera un signe qu’il est agréable à Hachem, Qui le recherchera. C’est le sens de « jusqu’à ce que ton frère le réclame, alors tu le lui rendras », ce qui signifie que l’Ecriture le lui compte comme s’il avait rendu quelque chose de perdu. LES SENTIERS DES JUSTES Pour acquérir les valeurs et les bonnes midot Le Maharam de Rottenbourg écrit dans une réponse halakhique que le devoir pour un homme de respecter sa femme est plus grand que celui de respecter une autre personne, parce que pour elle, cela s’applique à tous les domaines, ce qui n’est pas le cas pour une autre personne. Dans cet esprit, le Maharal écrit dans Netivot Olam : « On doit toujours veiller à ne pas peiner sa femme, car comme elle pleure facilement, il est facile de la blesser. » Cela concerne particulièrement son épouse, car comme elle se trouve sous l’autorité du mari, elle pleure très facilement, alors que blesser une autre personne ne provoque pas une réaction aussi émotive. Mais une femme qui est sous l’autorité de son mari, tout en ayant une importance personnelle, est extrêmement sensible, c’est pourquoi elle pleure facilement. » (Beit Yé’hezkel p. 32) C’est là la véritable paix du foyer dans un couple de justes, qui veillent à ne pas s’offenser mutuellement, même quand les deux sont également affectés. Nous entendons souvent des conjoints qui disent : « Qu’est-ce que cela fait si j’ai vexé l’autre ? Ce n’est pas si terrible, ensuite je lui demanderai pardon. » Nous devons savoir que de tout affront envers l’autre, même si ensuite on demande pardon, il restera toujours une cicatrice dans le cœur, parfois pour toute la vie. La sagesse consiste à veiller à l’honneur de l’autre, et à ne pas l’offenser. Le Rav Avner Kavas raconte dans ses cours l’histoire d’un couple dont le mari ne faisait pas attention à l’honneur de sa femme, il avait la langue acérée et la blessait fréquemment. Un jour, il est allé se reposer dans le jardin de leur maison, et il a vu sur l’un des arbres un grand nombre de clous plantés à moitié. Cela l’a étonné, et il a demandé à sa femme ce que cela signifiait. Elle lui a répondu : « C’est un rappel pour moi ; à chaque fois que tu me blesses et que tu me vexes, je plante un clou à moitié dans l’arbre, ainsi je me souviens du nombre de fois où tu m’as offensée ! » Le mari a regardé l’arbre, qui était rempli de clous sur toute sa longueur et sa largeur, et a été épouvanté. Il avait donc blessé sa femme un nombre incalculable de fois sans y faire attention ! Il l’a immédiatement regretté et a promis à sa femme que désormais, il allait améliorer sa conduite et lui manifester le respect qui lui était dû. Mais il avait une demande à lui faire : « A chaque fois que je me conduirai respectueusement envers toi, enlève un clou de l’arbre, jusqu’à ce qu’en fin de compte il n’en reste plus un seul. » Elle a accepté, et effectivement, à partir de ce jour-là son mari s’est conduit avec beaucoup de déférence envers elle. De son côté, elle a tenu sa promesse, et à chaque fois qu’elle sentait du respect de la part de son mari, elle enlevait un clou de l’arbre. Des jours et des années ont passé, et un beau jour, le mari est sorti dans le jardin pour examiner l’arbre : il n’y avait plus un seul clou ! Cela lui a fait un grand plaisir et il a immédiatement appelé sa femme pour lui dire : « Regarde, ma très chère épouse, j’ai réussi à me comporter si bien envers toi que l’arbre est déjà entièrement débarrassé de ses clous ! » Sa femme lui a répondu avec sagesse : « C’est vrai, il n’y a plus de clous sur l’arbre, mais les trous… les trous sont restés ! » La blessure causée par un comportement désagréable, par des paroles déplacées, est difficile à guérir. Il est vrai que le temps agit, mais la blessure qui saigne agit également, et un sentiment qui a été blessé ne revient pas si vite que cela. Faire une remarque, puis réconforter Demander pardon et s’excuser n’est pas réservé à la période des seli’hot au mois d’Elloul. C’est tous les jours de l’année le bon moment. Quand on sent qu’on s’est mal conduit ou mal exprimé et qu’on a vexé quelqu’un, il faut s’excuser, se repentir et obtenir le pardon de l’intéressé. On a demandé à Rabbi Yéchaya Horowitz chelita, auteur du livre « Or’hot Rabbeinou », comment il faut se comporter quand on a commis la même erreur un très grand nombre de fois envers son épouse. « Il n’y a aucun doute qu’il faut demander pardon encore et encore. Mais ici, on doit éclaircir un point important : demander pardon ne consiste pas seulement à dire « Excuse-moi ». Il s’agit de montrer véritablement et sincèrement qu’on reconnaît qu’on s’est trompé dans son attitude ou sa conduite. Si l’on ne s’est pas conduit convenablement à de nombreuses reprises, on a le devoir d’obtenir le pardon encore et encore. Et comme nous l’avons dit, cela peut se faire d’innombrables autres façons que par le fait de prononcer les mots « excuse-moi ». « A ce propos, les gens ont l’habitude d’utiliser l’expression « chalom bayit », la paix du foyer, pour caractériser des moments où il n’y a pas de paix dans le foyer. C’est une expression toute faite qui est synonyme de cas où règne dans le foyer le contraire de la paix… et la vérité est que la paix du foyer n’est pas un processus auquel on fait appel uniquement en des moments de dispute, mais à chaque fois que quelqu’un fait quelque chose de positif chez lui, il pose une pierre de « chalom bayit ». Pour cela, il faut s’y prendre avec intelligence, car rien n’empêchera un sot qui ne comprend rien de refaire constamment les mêmes erreurs. « On raconte sur le Rav Chelomo Zalman Auerbach zatsal que pendant l’enterrement de sa femme, il a dit qu’il n’avait à lui demander pardon de rien. Il faut tirer une leçon des anecdotes aussi. Le Rav était entièrement un homme de halakha, et en toutes circonstances il se conduisait en accord avec la halakha, avec droiture et honnêteté. Quand on se conduit conformément à la halakha et avec droiture, même si l’on blesse quelqu’un par inadvertance, on lui demande pardon immédiatement. Par exemple, si un mari s’aperçoit que sa femme a transgressé l’interdiction de « borer », de trier le Chabbat, et lui dit immédiatement « borer ! » la femme va avoir un sentiment désagréable et même être vexée. Dans un cas de ce genre, le mari doit dans un premier temps se conduire comme il l’a fait, mais ensuite il doit réconforter la personne. C’était ce que voulait dire le Rav Auerbach en affirmant qu’il n’avait aucun pardon à demander : chez quelqu’un qui se conduit toujours avec droiture, il ne reste plus de quoi demander pardon. » Le Rav Horowitz ajoute : « Il peut y avoir un sentiment que du fait que le père est le maître de la maison et porte la responsabilité de ce qui s’y passe, le devoir de demander pardon ne s’applique qu’à lui. Mais il est clair que la femme aussi a le même devoir, car elle n’est pas exemptée des mitsvot qui régissent les rapports des hommes entre eux, et il lui est interdit de l’oublier. »
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