Parachat Vaéra 17 Janvier 2015 26 Tévèt 5775 |
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(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
« Pour Moi, J’endurcirai le cœur de Paro et Je multiplierai Mes signes et Mes preuves de puissance dans le pays d’Egypte. »
Hachem envoie Moché chez Paro, et dès le début, Il annonce à son serviteur qu’Il va endurcir le cœur du roi et lui envoyer de nombreuses plaies jusqu’à ce qu’il libère les bnei Israël d’Egypte. Ceci paraît étonnant : pourquoi D. n’a-t-Il pas frappé Paro une fois pour toutes, délivrant ainsi les bnei Israël ? Quelle était l’utilité de tous les avertissements et plaies qui lui ont été envoyés ?
De plus, cette façon de faire a engendré une profanation du nom divin, car Paro a, si l’on peut dire, renié D. En effet, après chaque plaie il promettait de renvoyer Israël, puis il revenait sur sa décision et il fallait à nouveau le frapper, et ainsi de suite. Cela semble être du ‘hiloul Hachem, puisque Paro agit comme il l’entend tout en « méprisant » Hachem et Moché. S’il en est ainsi, pourquoi D. ne lui a-t-Il pas envoyé une seule grande et puissante plaie, ce qui aurait permis de libérer les bnei Israël immédiatement ?
A la réflexion, il semblerait que les bnei Israël qui étaient en Egypte se sont également posé cette question : Hachem ne peut-Il pas nous sauver ? Pourquoi ne frappe-t-Il pas Paro en une seule fois ?
Comme nous le savons, les membres de la tribu de Lévi n’ont pas été asservis, car ils étudiaient la Torah en terre de Gochen, c’est pourquoi l’esclavage leur a été épargné. Les autres tribus, en revanche, s’étaient un peu relâchées dans l’étude de la Torah, et c’est pourquoi elles ont été asservies. Nos Sages expliquent (Berakhot 5b) que si quelqu’un a des malheurs, il doit examiner ses actes. S’il l’a fait et n’a rien trouvé à se reprocher, qu’il attribue ses épreuves au manque d’étude. Il s’ensuit donc que les souffrances sont provoquées par un manque d’étude ou un manque de valorisation du labeur pour la Torah. Voici donc pourquoi toutes les tribus, hormis celle de Lévi, ont été asservies en Egypte.
Les bnei Lévi, qui étudiaient la Torah, n’ont pas eu besoin de procéder à un examen de conscience, mais les autres tribus, oui. Pourtant ces dernières ne l’ont pas fait, ayant l’esprit oppressé par une dure servitude. Alors D. a fait en sorte que les bnei Israël voient que Paro ne faisait pas d’examen de conscience, car il était dépourvu de Torah, or celui qui n’a pas de Torah ne mérite pas de pouvoir examiner ses actes. De plus, même s’il le faisait, il ne pourrait pas attribuer ses souffrances au manque d’étude ! Donc à quoi bon examiner ses actes ? Telle était la leçon adressée aux bnei Israël.
En réalité, quand Paro était frappé par les plaies, il n’avait pas l’intention de se soumettre. En effet, il se prenait pour un dieu, poursuivant aveuglément l’honneur, et cherchait toujours à se débarrasser de la plaie et à devenir à nouveau un dieu, en quelque sorte. Il ne faisait donc aucun examen de conscience quand il était l’objet d’une plaie, mais promettait seulement à Moché de renvoyer les bnei Israël, et dès la disparition de la plaie, il changeait d’avis. Ceci est un message puissant à l’adresse du peuple juif : lorsque D. envoie un coup à quelqu’un, à lui d’examiner ses actes et de se repentir. S’il ne le fait pas, il sera frappé d’une plus grande plaie, jusqu’à ce que son cœur souillé se soumette. Et lors de son examen de conscience, la première chose à rechercher est de savoir s’il étudie la Torah comme il le devrait.
Or dans sa recherche de l’honneur, Paro a complètement perdu son intelligence et n’a pas réussi à faire un examen de conscience et à renvoyer Israël, parce qu’il vivait dans une erreur profonde : il pensait que l’honneur était le centre et le but de la vie, et refusait de rechercher la vérité et la justice. C’est pourquoi il ne pouvait pas procéder à un examen de conscience et se dire « j’ai tort ».
C’est là un message important pour le peuple d’Israël : la Torah est l’essentiel, et sans elle, l’homme n’est rien et il ne peut même pas examiner simplement ses actes. C’est ce que D. a montré aux bnei Israël par les nombreuses plaies qu’Il a envoyées à Paro. A chaque fois, celui-ci promettait de laisser partir le peuple, puis il revenait sur sa décision, à cause de sa poursuite des honneurs. C’est la raison pour laquelle Hachem n’a pas voulu en finir avec lui avec une seule plaie, mais en a envoyé de nombreuses, afin que les bnei Israël remarquent à quel point l’honneur et le manque de Torah font chuter l’homme.
Il faut savoir que le véritable honneur qui existe en ce monde est celui de la Torah. Un jour, alors que j’assistais à un mariage à Chicago, un homme très aisé est arrivé, et je me suis mis de côté pour voir si les invités allaient l’honorer. Mais j’ai constaté que personne n’a fait preuve d’un respect particulier à son égard. Quelques instants plus tard est arrivé le Roch Yéchiva, lui qui n’avait pas un sou et habitait même à la yéchiva, et tous les convives lui ont témoigné un grand respect. A ce moment-là, j’ai compris quel était le véritable honneur en ce monde : il ne peut provenir que du labeur de la Torah. En effet, même si l’homme riche se sent honoré et voit les autres le respecter extérieurement, en réalité ils le méprisent et son honneur n’a rien de vrai. Par contre, l’honneur qui revient à celui qui fournit des efforts pour la Torah est authentique et révèle une réelle admiration, car la Torah qu’il a étudiée l’a élevé, et il est vraiment respectable.
Les gens simples ne font pas d’examens de conscience. Même s’ils sont accablés de malheurs, ils préfèrent vivre avec que de se mettre en cause. En effet, leur situation leur convient et ils ne ressentent pas de manque. Mais quelqu’un qui est empreint de Torah connaît son Créateur et sait quel est son rôle. Ainsi, à chaque fois que des épreuves le frappent, il examine ses actes et les rectifie.
Une fois, je suis allé rendre visite à un ami atteint de la grave maladie. En le voyant, je suis resté stupéfait, car un mois plus tôt, il était venu chez moi et tout allait bien pour lui… et maintenant, il était dans un état si grave ! Or cela peut arriver à n’importe qui, que D. nous en préserve ! Cette anecdote m’a immédiatement conduit à faire un examen de conscience et à analyser mes faits et gestes.
Il y a lieu de tirer une leçon de ce qui s’est passé avec Paro en Egypte : tout comme Hachem a envoyé Moché pour le frapper et le réveiller, Il nous réveille aussi par toutes sortes de moyens. Et il ne faut surtout pas réagir comme Paro qui n’a tiré aucune leçon de ce qui lui arrivait. Quand des signes du Ciel nous parviennent, à nous d’analyser profondément notre comportement et de changer nos voies, et toute notre vie nous sera bonne et agréable.
SUR LA PENTE ASCENDANTE
L’amour du prochain
En Argentine, il y a un endroit nommé « Lanus ».
Pendant de nombreuses années, les juifs de cet endroit appartenaient au mouvement réformé, jusqu’à ce qu’une famille orthodoxe vienne s’installer et mérite de changer, non sans de grands sacrifices, l’essence et le caractère de ce lieu. De juifs réformés, ils sont devenus des orthodoxes, hommes de Torah, pleins d’amour pour D. Même les chefs ont rejoint le chemin de D., et aujourd’hui, leurs enfants étudient dans les yéchivot.
Quand j’ai été amené à me rendre à Lanus, j’ai pensé que les membres de la communauté se réjouiraient d’aider financièrement nos institutions. Mais arrivé sur place, j’ai constaté que les habitants n’étaient pas riches, et j’ai même été sollicité par les chefs de communauté pour aider à la collecte d’argent organisée en faveur de leurs institutions.
Au début, mon mauvais penchant a tenté de m’en dissuader, mais je l’ai finalement surmonté et nous avons pu, grâce à D., faire participer la communauté à cette quête, avec des montants très élevés. Quand j’ai senti que mon yetser hara essayait à nouveau de m’influencer en prétendant que mes institutions devraient recevoir une part des gains de la collecte vu ma contribution à sa réussite, je me suis tout de suite adressé au public : « Mes amis, je ne me contente pas des grandes sommes que nous avons ramassées pour vos établissements. Maintenant je voudrais ajouter ma participation, d’une valeur de cinq mille dollars. »
J’ai agi ainsi afin d’introduire en moi l’amour d’Israël et d’aimer véritablement les membres de cette communauté. En effet, leurs institutions oeuvrent aussi beaucoup pour la diffusion de la Torah au sein du peuple juif ! Et ce véritable amour a le pouvoir de réparer la faute de la haine gratuite à cause de laquelle nous souffrons jusqu’à aujourd’hui dans cet amer exil.
Prends des nouvelles de chacun
Une fois, j’ai eu l’occasion de me rendre à New-York et d’y rester quelques jours afin de rapprocher des gens de la Torah et de collecter des fonds en faveur des institutions.
Sans m’y attendre, je me suis soudain senti faible, incapable de parler en public. Il m’était donc impossible de réaliser ce pour quoi j’étais venu, et j’ai pensé que je m’étais fatigué pour rien.
Une semaine après mon arrivée, j’ai rencontré quelqu’un, et au cours de la discussion, je lui ai demandé des nouvelles de son père. Il a été tellement touché de l’intérêt que je lui avais porté qu’il a décidé sur place de faire un don important qui compensait ainsi tout ce que je n’avais pas pu amasser pendant mon séjour !
Combien est grande la récompense de celui qui prend des nouvelles d’autrui ! Un bon sentiment procuré à quelqu’un peut l’amener à offrir un grand salaire à celui qui en est la source. Le Ciel m’a également accordé le mérite de m’intéresser à cet homme-là afin que les institutions de Torah puissent profiter de cette généreuse contribution.
De mes élèves plus que de tous
Il est dit dans le Yalkout Chim’oni (Proverbes Signe 934) au nom de Rabbi ‘Hanina : « J’ai beaucoup appris de mes maîtres, encore plus de mes amis, et de mes élèves plus que de tous. »
J’ai pensé à cette parole de nos Sages alors que je me rendais au mariage de l’un de mes élèves. Peu de temps avant d’entrer sous la ‘houpa, le ‘hatan m’a téléphoné pour que je bénisse quelques malades. Il m’a alors confié qu’il était en route pour aller leur rendre visite et espérait ainsi les réjouir.
J’ai béni les malades comme il me l’avait demandé, et après avoir raccroché, j’ai pensé à l’amour d’autrui dont faisait preuve cet élève par un tel dévouement. Je devais en prendre leçon.
En général, le jour de son mariage, le ‘hatan est quelque peu tendu, stressé, et occupé à se préparer. Mais voilà qu’au lieu de s’occuper de ses propres besoins et de se préparer pour le grand jour, toutes ses pensées étaient tournées vers autrui : comment s’occuper de ceux qui en ont besoin, comment améliorer leur moral, comment les réjouir à travers une visite ?
Il ne fait aucun doute que son comportement, qui témoigne de nobles et bonnes midot, a éveillé la miséricorde divine, et que grâce à cela, il méritera de fonder un foyer éternel et de voir la présence divine résider dans sa maison.
LA HAPHTARA DE LA SEMAINE
« C’est pourquoi, ainsi parle Hachem » (Yé’hezkel 28)
Le rapport avec la paracha :
La haphtara relate les prophéties sur la défaite du pays d’Egypte, ce qui est en rapport avec la paracha, qui raconte les malheurs qui se sont abattus sur ce pays avec les dix plaies envoyées par D.
« Voici, Je M’en prends à toi, Paro, roi d’Egypte » (Yé’hezkel 29, 3)
Cela ressemble à un invité qui entre dans la maison d’un homme très riche et y trouve le serviteur.
L’invité demande : « Qui est le maître de maison ? »
Le serviteur répond avec orgueil : « Je suis le maître de maison et tout ce que vous voyez là m’appartient. »
A ce moment-là, le véritable maître de maison entre et dit au serviteur : « Ne t’enorgueillis pas de mensonges ! Je suis ton maître et tu m’es soumis. »
Voici à quoi cela correspond : Paro l’impie s’enorgueillissait d’être le seul roi, le plus grand et le plus élevé. C’est pourquoi Hachem S’adresse à lui : « Sache que Je suis au-dessus de toi. Je te gouverne, tu M’appartiens et Je peux faire de toi ce que bon Me semble. »
C’est ainsi que conclut le prophète : « Tous les habitants d’Egypte sauront que Je suis D. », car jusqu’à présent, les Egyptiens donnaient de l’importance à Paro, qui était en fait un faux dieu.
(« Kokhav MiYa’akov »)
« Voici, Je vais susciter contre toi l’épée et retrancher de toi hommes et bêtes » (Yé’hezkel 29, 8)
Nos Sages ont dit dans le midrach (Vayikra Rabba 17, 4) : « En raison de Sa compassion, D. ne commence pas par envoyer de punition sur la personne directement. »
Ceci est valable justement si le but de la punition est de mener l’individu au repentir, comme par exemple lorsqu’un roi de chair et de sang contre qui ses sujets se sont rebellés envoie des soldats pour calmer la querelle et « récupérer » ses citoyens. Au début, il essaye de les punir par une petite chose, ensuite il envoie une punition plus grave. Mais s’il voit qu’ils ne reviennent pas sous son autorité, il les punit sévèrement en leur portant atteinte directement, en plus de l’atteinte portée à leur argent.
C’est ce que dit le prophète : « Voici, Je vais susciter contre toi l’épée et retrancher de toi hommes et bêtes. » Au début, Il va retrancher l’homme, ensuite la bête, c’est cela le jugement des impies qui se révoltent contre D.
GARDE TA LANGUE
Attrister par des paroles
Si quelqu’un profère des propos médisants devant l’individu concerné, lui causant ainsi de la peine, comme par exemple s’il parle de ses actions ou des façons d’agir de sa famille ou encore de son manque d’intelligence, il transgresse également « Ne vous lésez point l’un l’autre », mise en garde contre le fait de faire souffrir l’autre par ses paroles.
A LA LUMIERE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
L’importance de la reconnaissance
Cette paracha raconte que le Saint, béni soit-Il a ordonné à Moché de dire à son frère Aharon que c’est lui qui frapperait le fleuve, amenant ainsi sur l’Egypte la plaie du sang. Pourquoi est-ce Aharon qui devait frapper le fleuve et non Moché lui-même ? Le Sages expliquent (Chemot Rabba 9, 10) que c’est parce que le fleuve avait protégé Moché lorsqu’il était bébé. Les versets de la Torah rapportent qu’il y avait un décret de Paro de jeter au fleuve tout nouveau-né mâle (Ibid. 1, 22), c’est pourquoi Hachem a fait un miracle et Moché est né de Yokheved à la fin du sixième mois. Le petit Moché a été placé dans un couffin qui flottait sur le fleuve, et c’est ainsi qu’il a été sauvé du décret de Paro. C’est pour cela que Hachem lui a ordonné de ne pas frapper le fleuve. C’est une très grande leçon pour nous : « Un puits dont tu as bu, ne jette pas une pierre dedans » (Bemidbar Rabba 22, 4), c’est-à-dire que la reconnaissance est une belle qualité qui améliore et purifie le cœur de l’homme et le mène à des niveaux spirituels très élevés.
J’ai vu une question que posent les commentateurs : pourquoi Moché a-t-il été reconnaissant envers l’eau et le sable, mais pas envers Paro qui l’a élevé chez lui et a fait de lui un prince ? Si l’on est reconnaissant envers des choses inanimées, à plus forte raison doit-on l’être envers les hommes ! Or on trouve que non seulement il n’a pas été reconnaissant envers Paro de tout ce qu’il avait fait pour lui, mais c’est lui qui a eu la responsabilité de le frapper de dix plaies.
On peut l’expliquer à la lumière de quelque chose qui m’est arrivé. Un jour, quelqu’un m’a abordé pour me dire qu’il fallait être reconnaissant à Hitler parce que l’Etat d’Israël avait été fondé grâce à lui. En effet, s’il n’avait pas exterminé le peuple juif, tout le monde n’aurait pas ressenti le besoin d’établir un état pour les juifs. En entendant cela, j’ai été choqué au possible. Comment est-il possible de ressentir de la reconnaissance envers quelqu’un qui a assassiné six millions de juifs ? De telles pensées sont absolument insupportables.
Dans le même esprit, on peut répondre que Moché n’a pas été reconnaissant à Paro de toutes les années pendant lesquelles il avait été élevé chez lui, parce qu’il était l’ennemi du peuple juif et était totalement mauvais. Même s’il s’était conduit envers le petit Moché avec bonté et miséricorde, cela relève du verset « la générosité des peuples est une faute » (Michlei 14, 34). C’est pourquoi il n’y avait nullement lieu de lui en être reconnaissant, mais au contraire de le punir comme il faut de toute la souffrance et tout le mal qu’il avait causés aux bnei Israël en les asservissant. De même, quand on est reconnaissant à un homme mauvais, on exprime par là son accord avec tout ce qu’il fait de mal, et on devient l’associé de son impureté. C’est pourquoi si Moché avait exprimé de l’estime de ce que Paro avait fait pour lui, il aurait ainsi manifesté son accord de ses mauvaises actions et renforcé les pécheurs.
Je témoigne sur moi-même que je m’efforce dans toute la mesure du possible de ne pas utiliser l’argent de ceux qui profanent le Chabbat, parce qu’en ce faisant je les encouragerais et je semblerais leur donner la permission de continuer à profaner le Chabbat. Il est fréquent que quelqu’un qui transgresse le Chabbat en ouvrant sa boutique apaise sa conscience en donnant de l’argent dans des buts de tsedaka et de générosité, mais il faut se montrer ferme et savoir qu’utiliser de l’argent obtenu par une interdiction ne mène à aucune bénédiction. De plus, utiliser cet argent risque de décharger ceux qui l’ont donné et de les inciter à continuer dans cette mauvaise voie.
La leçon à tirer de ce passage est l’importance de la gratitude, parce que c’est une qualité qui purifie le cœur et mène à une élévation dans le service de D. Lorsqu’on est reconnaissant envers l’autre, on finit par être reconnaissant envers Hachem.
A LA SOURCE
« Aharon prit Elichéva fille d’Aminadav sœur de Na’hchon comme épouse » (6, 23)
Les liens familiaux de Na’hchon sont destinés, comme nous l’enseignent les Sages, à nous enseigner une façon de servir D. : quand on épouse une femme, il faut se renseigner sur ses frères.
Mais il y a lieu de demander pourquoi les Sages n’ont pas tiré cet enseignement de la parachat Toldot, lorsque Essav a pris pour femme Ma’halat fille d’Yichmaël sœur de Nevaïot, puisqu’il est écrit « sœur de Nevaïot » pour nous enseigner qu’il faut se renseigner sur les frères de la femme qu’on voudrait épouser !
Le livre « Min’hat Mar’hechet » explique qu’on ne peut tirer cet enseignement que de Na’hchon, dont l’importance est connue dans la Torah et qui était un prince en Israël. Quant à Nevaïot, il n’est dit nulle part dans la Torah qui il était, donc on ne peut pas donner cette explication, puisque dans ce cas il n’y avait chez le frère aucune marque d’importance.
« Les magiciens dirent à Paro : c’est le doigt de D. » (8, 15)
Du verset « qui a établi les dimensions du ciel par un empan » (Yéchayah 40, 12), nos Sages ont conclu (Erouvin 21a) que le monde entier est d’une demi-coudée sur une demi-coudée, ce qui représente l’« empan » du Saint, béni soit-Il. Une coudée contient six tefa’him, et un tefa’h cinq petits doigts. La coudée fait donc trente doigts, si bien que le monde fait quinze doigts.
Or comme, dans nos mesures à nous, le monde entier est de six mille parssa, il s’ensuit que chaque doigt représente quatre cents parssa. L’Egypte mesurant quatre cents parssa (Pessa’him 94a), elle fait donc très exactement un doigt (de Hachem, pour ainsi dire).
A la lumière de ce calcul, le livre « Derouch Chemouël » écrit que c’est ce que les magiciens ont dit à Paro. « C’est le doigt de D. » : la mesure du coup que reçoit l’Egypte est égale à un doigt de Hachem.
LA VIE DANS LA PARACHA
A partir de l’enseignement de Rabbeinou ‘Haïm ben Attar
« Je vous ferai sortir des souffrances de l’Egypte, Je vous délivrerai de la servitude, Je vous rachèterai avec un bras étendu et par des châtiments terribles. » (6, 6)
Il s’agit d’organiser les bienfaits. Au début, il y aura un allègement des souffrances (« Je vous ferai sortir des souffrances de l’Egypte »), qui sont le poids de l’esclavage. Cela s’est produit tout de suite : dès que le fleuve a été frappé, l’autorité des commissaires et des surveillants a disparu, mais les bnei Israël ont continué à travailler un peu, parce qu’ils avaient peur des Egyptiens. Ils exécutaient d’eux-mêmes des travaux faciles. « Je vous délivrerai de la servitude », implique qu’ils ne soient plus obligés de travailler du tout.
Ensuite « Je vous rachèterai », c’est la sortie d’Egypte, qui comprend également l’ouverture de la mer, sinon il n’y aurait eu après aucune délivrance. Ce n’est pas « Je vous ferai sortir d’Egypte » mais « Je vous rachèterai », pour nous dire que c’est une sortie qui comporte une délivrance. Si l’ennemi poursuit, ce sera avec une grande fureur, et ensuite « Je vous prendrai comme peuple », c’est le don de la Torah, qui est une union de D. avec le peuple.
LES CHEMINS DE LA FOI
Etudes sur les merveilles de la création de l’homme
Quand nous examinons la façon dont le monde entier est dirigé, fait observer le Rav Kook zatsal (dans le livre « ‘Havech Peer »), on a l’impression que la raison principale d’une amélioration véritable de l’homme et de la façon correcte dont il doit vivre n’est autre que d’exalter Celui qui en est digne.
Le respect envers les sages entraîne l’amour de la Torah et de la sagesse, les bonnes midot et une crainte du Ciel pure.
Le respect envers les parents entraîne une éducation droite qui porte des fruits de bénédiction dans le cœur des enfants lorsqu’ils grandissent.
Par-dessus tout cela, le respect pour les rois entraîne de façon générale un véritable perfectionnement de la vie de l’homme social.
Par conséquent le sentiment du respect est ce qui fait que le monde continue à exister, ce qui nous enseigne, dans la perspective des Sages, qu’il est indispensable pour mériter la vie du monde à venir tout en profitant de la vie de ce monde-ci, comme le dit Rabbi Eliezer à ses disciples : « Veillez à l’honneur de vos amis, cela vous vaudra la vie du monde à venir. »
En fait, nous constatons que cette attitude de respect envers autrui se retrouve dans la bouche du Créateur, qui l’exige de nous à de nombreuses reprises. C’est ce que dit le Midrach Chir HaChirim sur le verset « Toi qui te tiens dans le jardins, les amis sont attentifs à ta voix, fais-la moi entendre. » Bien que les bnei Israël se livrent à leur travail pendant les six jours de la semaine, le jour du Chabbat ils se lèvent tôt pour aller à la synagogue et lisent le Chema, disent le Chemonè Esré, lisent la Torah et la haphtara, alors le Saint, béni soit-Il leur dit : « Mes enfants, élevez la voix pour que vos amis vous entendent, et ces amis ne sont autres que les anges du service. Veillez à ne pas vous détester mutuellement, à ne pas vous jalouser, à ne pas vous quereller, à ne pas vous faire honte. Que les anges du service ne disent pas devant Moi : « Maître du monde, la Torah que Tu as donnée aux bnei Israël, ils ne l’étudient pas, puisqu’il y a parmi eux hostilité et jalousie, haine et rivalité. » »
Voici une leçon du beit midrach de Rabbi Yéhochoua ben ‘Hanania, telle qu’elle est racontée par la Guemara (Erouvin 53b). Rabbi Yéhochoua ben ‘Hanania a dit : « Jamais personne ne m’a vaincu, sauf une femme, un petit garçon et une petite fille. Qui est la femme ? Un jour j’étais descendu dans une auberge, et elle m’a fait des fèves. Le premier jour, j’ai mangé sans rien en laisser. La deuxième fois, je n’en ai rien laissé. Le troisième jour, elle a trop salé le plat. Après l’avoir goûté, je l’ai laissé.
Elle m’a dit : Rabbi, pourquoi ne mangez-vous pas ?
Je lui ai répondu : J’ai déjà mangé aujourd’hui. Elle m’a dit : Dans ce cas vous n’auriez pas dû prendre de pain ?
Nous voyons de là combien Rabbi Yéhochoua veillait à l’honneur de cette aubergiste, c’est pourquoi il a évité de lui donner la véritable raison, afin ne pas lui faire honte de ne pas avoir réussi à cuire un bon plat.
S’habituer à sourire
On raconte sur le gaon Rabbi Yitz’hak Arieli zatsal qu’il avait éduqué ses enfants à toujours faire bon visage aux autres et à exprimer de la joie à l’entrée d’un invité. D’après l’exemple personnel qu’ils pouvaient apprendre régulièrement de leur père, cela ne suffisait encore pas. Il leur faisait donc pratiquer des « exercices ». Lorsque l’un des habitants de la maison ouvrait la porte, les autres l’accueillaient cordialement et d’un visage souriant. Ces « entraînements » étaient répétés inlassablement. L’un des enfants sortait dans l’escalier et frappait à la porte. Les autres l’accueillaient chaleureusement. Si l’exercice n’était pas exécuté à la satisfaction de Rabbi Yitz’hak, il le faisait répéter encore et encore…
Lorsque l’un de ses amis lui demanda : « Est-ce que tu ne crois pas que tu apprends à tes enfants à se conduire de façon artificielle ? », il répondit : « Tout ce que je fais, c’est de les habituer à faire ce qu’il faut. J’attends que l’habitude se transforme en seconde nature, car dans ce domaine, la nature a beaucoup à dire. Quand ils grandiront, c’est eux qui devront travailler sur eux-mêmes, pour que la nature ne se transforme pas en habitude stérile. J’espère que sur ce point-là aussi je réussirai à les éduquer, avec l’aide de D. »
HOMMES DE FOI
Histoires des justes de la famille Pinto
Rabbi ‘Haïm Pinto, que son mérite nous protège, restait la nuit à étudier la Torah avec une assiduité qui suscitait le respect. A l’approche de minuit, il se renforçait comme un lion et commençait son ordre du jour dans le service divin. Les habitants de la maison savaient qu’il ne fallait pas le déranger pendant ces heures-là, qui étaient consacrées à l’étude de la Torah.
C’est exactement à ce moment-là que son chamach, Rabbi Aharon Ibn-‘Haïm, se présentait pour prendre son service en apportant un verre de thé à son Rav. Une nuit, il entendit deux voix qui sortaient de la chambre de Rabbi ‘Haïm. Il se dit : « Si cette nuit le Rav a une ‘havrouta, il faut que je lui prépare aussi un verre de thé. »
Sitôt dit sitôt fait, il rentra dans la chambre du Rav avec deux verres de thé.
Le lendemain, après la prière de cha’harit, Rabbi ‘Haïm appela son chamach et lui demanda : « Dis-moi donc pourquoi cette nuit, contrairement à ton habitude, tu es rentré chez moi avec deux verres de thé au lieu d’un ? »
« J’ai entendu, répondit celui-ci, que le Rav parlait avec quelqu’un, et j’ai pensé donner une boisson chaude à son invité aussi. »
Le tsaddik hocha la tête en silence, regarda Rabbi Aharon, et dit : « Heureux es-tu, mon fils, d’avoir mérité d’entendre la voix du prophète Eliahou. C’était lui la deuxième voix que tu as entendue cette nuit. Sache que je t’ordonne de ne le révéler à personne. »
Rabbi Aharon obéit à son Rav pendant plusieurs années, ne laissant absolument rien transparaître de ce que ses oreilles avaient entendu. Quand vint l’heure pour Rabbi ‘Haïm de quitter ce monde, Rabbi Aharon sentit que le moment était arrivé de raconter ce secret extraordinaire aux proches du Rav : la révélation du prophète Eliahou, qui étudiait en ‘havrouta avec Rabbi ‘Haïm Pinto.
(« Mekor Ha’Haïm »)