Balak 4 Juillet 2015 17 Tamouz 5775 |
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Le paradox Bil'am
(par Rabbi David Hanania Pinto Chelita)
Il y a une discussion chez les Sages (Sanhédrin 105a) sur la question de savoir si Bilam était le fils de Lavan, ou bien Lavan lui-même. Quoi qu’il en soit, il avait un lien de consanguinité entre le peuple d’Israël, étant donné que Lavan, étant le père de Rah’el et de Léa, épouses de Ya'akov, qui ont engendré les saintes tribus, se trouvait être le grand-père des tribus. D’après l’avis selon lequel Bilam était le fils de Lavan, il était l’oncle des tribus, étant le frère de Ra’hel et Léa, or on sait qu’en général, l’oncle aime les enfants de sa sœur.
Les Sages disent également (voir Zohar III 194b) que Bilam puisait l’impureté directement du serpent de la Genèse, qui est la quintessence de la force de l’impureté, c’est pourquoi toute sa force était dans la bouche. Or on mène l’homme sur le chemin qu’il veut prendre (Makot 10b), c’est pourquoi, comme il avait manifesté sa volonté de s’attacher à l’impureté, du Ciel on l’a aidé à être le plus impur de tous. Ainsi, son impureté est allée en s’accroissant, au point qu’il en a atteint le maximum.
A la lumière de ce fait, on peut poser la question suivante : s’il avait une telle force d’impureté, en particulier par la bouche, pourquoi n’a-t-il pas cherché lui-même à maudire Israël, pourquoi a-t-il fallu que Balak l’appelle ? Par-dessus tout, pourquoi a-t-il conseillé à Balak d’envoyer les filles de Moav pour faire fauter les bnei Israël, alors qu’il savait que leur D. détestait la débauche (Sanhédrin 106a), et donc qu’il aurait pu directement conseiller à son propre peuple d’envoyer ses filles aux bnei Israël pour les faire fauter, comme il est arrivé ensuite à Chittim, ce qui lui aurait permis de faire du mal à Israël. Pourquoi, au lieu de le faire lui-même, a-t-il fallu que Balak envoie les filles de Moav pour faire trébucher les bnei Israël ?
Il s’ensuit donc deux questions : d’abord, pourquoi Bilam n’a-t-il pas voulu maudire Israël de sa bouche, qui avait puisé l’impureté directement du serpent, et ensuite, pourquoi a-t-il dit à Balak roi de Moav d’envoyer les filles de son peuple pour faire fauter les bnei Israël et ne l’a-t-il pas fait lui-même ?
Il faut en outre objecter que Balak lui-même savait que la force des bnei Israël résidait dans la pureté du regard et du corps, comme il l’a envoyé dire à Bilam (Bemidbar 22, 5) : « Voici qu’un peuple est sorti d’Egypte, il couvre la face du pays. » J’ai vu dans le livre « Tiféret Chelomo » sur la Torah qu’il voulait dire à Bilam : Un peuple est sorti d’Egypte, l’endroit de la nudité de la terre, et bien que l’Egypte soit le lieu de la débauche et de l’impureté, cependant le peuple d’Israël a réussi à en sortir et à en être délivré, parce qu’il avait gardé ses yeux et ne s’était pas laissé entraîner par eux. C’est pourquoi il est dit « il couvre la face [« ayin », littéralement « l’œil »] du pays ». Le peuple d’Israël s’est couvert les yeux pour ne pas voir l’impureté de l’Egypte, c’est pourquoi il a mérité d’être sauvé par une main forte et un bras étendu.
Or bien que Balak ait su de quelle façon on pouvait faire trébucher le peuple d’Israël, en le poussant à endommager la sainteté des yeux et du corps, il a tout de même voulu envoyer des émissaires à Bilam pour demander son avis sur la façon dont on pouvait faire chuter les bnei Israël. C’est étonnant ! Si Balak savait que la pureté des yeux était à l’origine de la protection dont ils bénéficiaient, et que lorsque les yeux n’étaient plus gardés la Chekhina les abandonnait, pourquoi n’a-t-il pas cherché lui-même à leur tendre un piège dans ce domaine, plutôt que d’avoir recours à l’aide de Bilam ?
L’explication en est qu’en réfléchissant, on s’aperçoit que Balak et Bilam avaient une force considérable, chacun séparément, et que normalement, ils n’auraient pas dû avoir besoin l’un de l’autre pour faire tomber Israël, mais grâce à la grande bonté de Hachem, il leur est venu la pensée que seul, aucun n’avait assez de force pour agir contre le peuple d’Israël sans l’aide d’une autre nation. En réalité, c’était une grande bonté de la part du Créateur, que bien que Bilam ait puisé sa force au serpent et soit devenu le chef de l’impureté, et bien qu’il ait amplifié son impureté en ayant des relations avec son ânesse, malgré tout il n’avait pas la possibilité de frapper seul le peuple d’Israël, mais avait besoin de l’aide de Balak. Et par ailleurs, bien que Balak ait su que la force du peuple d’Israël résidait dans la pureté des yeux, et qu’il ait connu la bonne façon de faire tomber le peuple d’Israël, et la plus rapide, malgré tout il n’a pas agi seul mais a eu besoin de l’aide de Bilam pour ce faire.
On peut dire que parfois, il y a des ennemis qui ont la force de faire du mal au peuple d’Israël par eux-mêmes, sans avoir besoin de l’aide d’un autre peuple, mais le Saint, béni soit-Il, dans Sa grande miséricorde, les affaiblit et divise leur impureté, afin qu’ils ressentent le besoin de se joindre à un autre peuple pour faire du mal à Israël. Et jusqu’à ce que ces deux peuples se retrouvent pour persécuter Israël, ils ont le temps de se battre et de se disputer entre eux, si bien que le peuple d’Israël est délivré de leurs méchants projets. C’est exactement ce qui s’est passé entre Balak et Bilam. Bien que chacun d’entre eux ait su comment blesser le peuple juif, un esprit de faiblesse les a envahis, au point qu’ils ont senti qu’ils n’étaient pas capables de frapper Israël seuls, mais avaient besoin de l’aide d’un autre peuple, si ce n’est qu’avant d’avoir eu le temps de conclure une alliance avec cet autre peuple, le Saint, béni soit-Il a envoyé une discorde entre eux, si bien qu’au lieu de lutter contre Israël, ils se sont mis à lutter l’un contre l’autre, oubliant l’ennemi principal qui était l’objet de leur accord.
Si nous prenons les deux premières lettres des noms de Bilam et BaLak, nous obtenons le mot « balbel » (trouble), pour nous dire que le Saint, béni soit-Il les a troublés pour qu’ils ne se découvrent pas mutuellement, et se trouvent en conflit permanent entre eux. Et bien qu’ils se soient unis pour maudire les bnei Israël, ils se sont disputés entre eux une fois de plus, afin qu’éclate la justice de Hachem.
HOMMES DE FOI
Histoires des justes de la famille Pinto
Reb Yéchoua Dérhy est arrivé à Mogador en 5759 avec sa femme pour participer à la hilloula du tsaddik Rabbi ‘Haïm Pinto, que son mérite nous protège. Avant d’arriver à la hilloula, il a voulu entrer chez notre maître chelita pour lui demander une bénédiction, mais il n’avait pas d’argent à lui donner pour la tsedaka, il ne possédait qu’une petite épargne qu’il avait mis de côté pour lui-même. Sa femme sentit son hésitation, et lui dit : « Ne rentre pas chez le Rav, puisque tu n’as rien à lui donner. » Mais Reb Yéchoua n’a pas accepté ce conseil et a répondu : « J’ai des économies, et je vais les donner au Rav. »
Sa femme n’était pas d’accord : « Si tu donnes toutes tes économies au Rav, comment auras-tu de l’argent pour les fêtes qui approchent, Roch Hachana, Yom Kippour et Soukot ? », objecta-t-elle. Il écouta cette protestation et lui dit : « Hachem aura pitié. »
Sa femme essaya de nouveau de l’empêcher d’entrer chez le Rav, mais il ne l’écouta pas et entra.
Quand il pénétra dans la pièce où se tenait le Rav chelita, il posa sur la table une enveloppe contenant mille francs. Quand il sortit de la pièce, sa femme éleva la voix : « Comment as-tu donné au Rav toutes nos économies ! »
Il répliqua fermement : « Comment était-il possible d’aller à la hilloula du tsaddik sans donner à son petit-fils le tsaddik de l’argent pour la tsedaka ? »
« Dans ce cas, tu aurais pu ne donner au Rav que le quart de cette somme, mais pas tout l’argent que tu as épargné ! »
Il calma sa femme en lui disant : « Par ce mérite, Hachem nous fera de grands miracles, pour que nous puissions accueillir les fêtes dans la joie et la paix. »
Après la hilloula, le couple rentra chez lui à Casablanca. Alors qu’ils étaient encore en route vers leur domicile, un juif totalement inconnu les rencontra et demanda à Reb Yéchoua : « Avez-vous de l’argent pour acheter ce qu’il faut pour les fêtes et les passer en paix ? »
« Non ! » répondit-il.
Il sortit alors de sa poche une somme de mille francs et la lui donna.
Qui était ce juif ? D. seul le sait.
Quoi qu’il en soit, la femme de Reb Yéchoua, qui avait vu de ses yeux un grand salut très spécial, on leur avait restitué la même somme qu’il avait donnée en l’honneur du tsaddik, se réconcilia avec son mari, et toute cette nuit-là ils parlèrent de la sainteté du tsaddik, comment par son mérite leur avait été restituée la somme dont ils avaient besoin pour les fêtes, alors que la récompense de la mitsva de tsedaka leur était gardée pour le monde à venir.
SUR LA PENTE ASCENDANTE
Là où il se trouve
L’histoire suivante m’est arrivée à Yom Kippour, le grand et terrible jour du repentir, et j’en ai tiré une grande leçon sur le merveilleux cadeau de la techouva que nous avons reçu du Créateur.
La veille de Yom Kippour est arrivé à notre yéchiva de Lyon un veuf qui s’est joint aux prières. Pendant toute la journée de Kippour, on l’a vu dans le beit hamidrach, en prière devant D.
Vers la prière de néïla, je me suis adressé aux élèves de la yéchiva pour leur demander : « Est-ce que vous connaissez cette personne ? »
« Non », ont répondu les garçons. « Nous ne le connaissons pas, et il n’est pas non plus d’ici. »
En entendant cela, je me suis approché de lui et je lui ai demandé d’où il venait, où il avait dormi cette nuit et où il pensait manger à la fin du jeûne.
Il m’a raconté qu’il était arrivé de Paris, et que la nuit de la fête, comme il n’avait pas trouvé d’endroit où dormir, il avait posé sa tête à la yéchiva pour s’assoupir un peu.
Je l’ai immédiatement invité chez moi, pour qu’il mange avec nous après le jeûne et se repose un peu avant de reprendre la route.
Mais il a poliment refusé mon invitation, en me disant que certes, il était fatigué des prières de la journée, mais qu’il devait arriver à Marseille cette nuit même, c’est pourquoi il ne pouvait pas s’attarder chez moi.
J’ai essayé de le convaincre de ne partir que le lendemain, mais il a tenu bon et m’a dit qu’il était pressé, parce qu’on avait organisé pour lui un rendez-vous important cette nuit même.
J’ai cessé d’insister. Mais en parlant avec lui de ses projets, je me suis aperçu que le rendez-vous en question n’était pas un rendez-vous d’affaires mais un rendez-vous coupable.
A ce moment-là, je me suis demandé si pendant Yom Kippour le Saint, béni soit-Il avait accepté sa techouva, bien que dès le lendemain soir il ait eu l’intention de fauter, immédiatement après cette sainte fête !
Je me suis dit que le Saint, béni soit-Il est un père miséricordieux Qui connaît l’âme de Ses créatures, et sait quel combat incessant se déroule en elles. C’est pourquoi dans Sa grande miséricorde, quand Il vient juger les créatures sur leurs actes, Il juge chaque juif « ba’acher hou cham », à l’endroit où il se trouve en ce moment, c’est-à-dire d’après son niveau à ce moment-là. Même si cette personne a dans le cœur des intentions ou des pensées de transgresser dans l’avenir certaines interdictions, il semble que pendant ce jour saint il regrette et ne désire plus ces actes. Et tant qu’il ne s’est pas vraiment attaché à la faute, le Créateur le lui compte comme s’il n’avait pas fauté.
C’est pourquoi il n’y a aucun doute que le repentir de ce juif au cours de Yom Kippour ait été accepté volontiers, parce qu’à Yom Kippour il n’avait pas encore fauté, cela ne lui était donc pas reproché.
LA HAPHTARA DE LA SEMAINE
« Le reste de Ya'akov sera… » (Mikha 5, 7)
Le rapport avec la paracha :
La haphtara parle de la bonté de Hachem envers Israël, lorsqu’Il a inspiré à Bilam de bénir les bnei Israël, ce qui évoque la paracha, lorsque Balak roi de Moav et Bilam ont voulu maudire le peuple d’Israël, mais qu’en fin de compte il s’est trouvé béni.
« J’extirperai tes images sculptées et tes statues de ton sein » (Mikha 5, 12)
Le Rambam a écrit (Hilkhot Deot 2, 3) que quiconque se met en colère, c’est comme s’il pratiquait l’idolâtrie, la raison en étant que la colère provient de la bile, qui se répand dans tout le corps.
Or on connaît les paroles du Rambam selon lesquelles si l’on sert Hachem par amour pour l’argent ou pour toute autre raison, ce n’est pas considéré comme servir Hachem, mais comme si l’on servait l’argent. En effet, il est possible que si l’argent venait à manquer, on ne servirait plus Hachem.
On peut expliquer de cette façon le verset « J’extirperai tes images sculptées et tes statues de ton sein », c’est-à-dire que dans l’avenir, Hachem extirpera l’idolâtrie « de ton sein », par exemple la colère ou l’amour de l’argent, qui sont considérés comme l’équivalent d’adorer une statue, et dans l’avenir ce défaut sera extirpé.
(« Ahavat Yehonatan »)
« On t’a dit, homme, ce qui est bien » (Mikha 6, 8)
Il y a beaucoup de mitsvot dans lesquelles le mauvais penchant aveugle les yeux de l’homme pour qu’il ne voie pas le bien de la mitsva, mais quelqu’un d’autre peut voir ce bien qui lui reviendra une fois qu’il aura accompli la mitsva correctement. Ceci pour la simple raison que le mauvais penchant n’atteint pas l’autre personne afin de l’aveugler, mais seulement celui qui pense accomplir la mitsva.
C’est ce que dit le prophète : « On t’a dit ce qui est bien. »
Qui te l’a dit ?
Seulement « l’homme », quelqu’un d’autre qui regarde de l’extérieur et voit le bien qui te reviendra une fois que tu auras accompli la mitsva. C’est pourquoi : « L’homme – l’étranger – t’a dit ce qui est bien. »
« De te conduire discrètement avec ton D. »
Les Sages ont expliqué dans la Guemara (Makot 24a) : « Te conduire discrètement, c’est accompagner un mort et réjouir une mariée. »
Dans la vie habituelle quotidienne, on ne connaît pas vraiment le caractère de quelqu’un. Quand peut-on observer sa véritable nature et son caractère ? Seulement lorsqu’on sort de l’ordinaire, par exemple quand il y a chez lui un grand bonheur, alors on peut connaître son intériorité, car les Sages ont dit « quand rentre le vin, le secret sort ». Et aussi au moment d’une catastrophe, on peut connaître son intériorité, s’il n’est pas brisé et s’il ne perd pas sa foi en D.
C’est pourquoi si quelqu’un se conduit discrètement même pour « réjouir une mariée », c’est-à-dire dans un moment de joie, ou pour « accompagner un mort », c’est-à-dire dans des moments de douleur et de deuil, c’est un signe que c’est quelqu’un d’un haut niveau.
(« Kokhav MeYa’akov »)
GARDE TA LANGUE
Ne pas rendre public et ne pas détester
Quelqu’un de moyen qui a l’habitude de faire attention à la plupart des interdictions que l’on voit commettre une faute délibérément, s’il est possible de le juger favorablement, par exemple en se disant qu’il ne connaissait pas la gravité de cette faute ou choses de ce genre, il faut le faire, et il est interdit de faire connaître sa faute, ainsi que de le détester pour cela.
A LA LUMIÈRE DE LA PARACHAH
Extrait de l’enseignement du gaon et tsadik Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita
La grandeur de l’homme par rapport à la bête
« L’ânesse vit l’ange de Hachem debout sur son passage, une épée nue à la main, elle s’écarta de la route pour aller dans le champ, et Bilam frappa l’ânesse pour la ramener sur la route. » (Bemidbar 22, 23).
La Torah explique que l’ânesse de Bilam a mérité de voir ce que lui n’a pas mérité de voir : elle a vu l’ange de Hachem qui se tenait face à elle sur le chemin avec une épée, c’est pourquoi elle s’est écartée au lieu de continuer sur la route que lui avait indiquée Bilam. Celui-ci, qui n’avait pas vu l’ange, a frappé l’ânesse à plusieurs reprises, mais elle a tenu bon et a continué à tendre vers le côté du chemin. Ensuite, le Saint, béni soit-Il a ouvert la bouche de l’ânesse, qui a demandé à Bilam : « Qu’est-ce que je t’ai fait pour me frapper par trois fois », et une fois le dialogue entamé, elle lui a expliqué qu’elle avait vu l’ange de D. face à elle, c’est pourquoi elle ne pouvait pas continuer tout droit.
Ceci nous enseigne que l’ânesse avait atteint un niveau supérieur à celui de Bilam, puisqu’elle avait vu l’ange de D., qui était caché à ses yeux à lui. Comment peut-on expliquer que Bilam, qui était prophète, n’ait pas vu ce que l’ânesse avait vu ? L’explication en est que Bilam n’a pas cherché à modifier ses mauvaises voies, mais il a choisi la voie de l’impureté et du mal, car comme il ressort des paroles de la Torah, il se dirigeait vers Balak pour se concerter avec lui sur la façon de vaincre les bnei Israël et de les faire chuter. S’il avait utilisé les forces célestes qui lui avaient été données pour s’améliorer, il aurait mérité de voir l’ange de D. dès le début, mais comme il avait choisi de s’attacher au mal et à l’impureté, le Saint, béni soit-Il l’a abaissé en faisant parler son ânesse avec colère, et non seulement cela mais Il a ouvert sa bouche et elle lui a reproché son opposition.
Les Sages (Sanhédrin 38a) objectent que si l’homme est la couronne de la création, pourquoi Hachem a-t-Il créé les animaux avant lui ? Apparemment, il aurait mieux convenu que l’homme soit créé avant eux, afin de montrer son importance et sa supériorité sur eux. Les Sages expliquent que le Saint, béni soit-Il a délibérément créé les animaux avant l’homme pour nous enseigner que lorsque l’homme marche dans les voies de D., s’attache à Sa Torah et accomplit Ses mitsvot, il est la couronne de la création, il la gouverne et il a un niveau plus élevé que les animaux, qui n’ont pas été doués d’intelligence ni de discernement. En revanche, si par malheur il choisit de céder à ses désirs, alors il n’y a aucune différence entre lui et la bête des champs, et elle lui est même supérieure en cela qu’elle a été créée avant lui.
Par conséquent, l’homme a le devoir de s’observer lui-même et de préserver en lui l’étincelle divine qui lui a été donnée, l’esprit parlant qui le distingue et le sépare des animaux et lui confère une supériorité sur eux. Et lorsqu’il perd la part spirituelle qui est en lui en se laissant aller à ses instincts animaux, alors il renforce en lui la partie animale, et le verset dit de lui (Kohélet 3, 19) : « L’homme ne vaut pas mieux que l’animal », c’est-à-dire que dans une situation comme celle-ci, il n’a aucun avantage sur la bête, et elle est même supérieure à lui en cela qu’elle est apparue avant lui dans la création.
A LA SOURCE
« Un ange de Hachem se mit sur son chemin pour lui faire obstacle » (22, 22).
Rabbi Aharon Zakaï chelita donne un grand principe dans son livre « Torat HaParacha », en s’appuyant sur le Midrach. C’était un ange de miséricorde, et il voulait l’empêcher de fauter et de se perdre.
De là, nous apprenons l’ampleur de la miséricorde du Saint, béni soit-Il, qui a envoyé un ange spécialement pour empêcher Bilam de fauter et lui donner la possibilité de se repentir de ses mauvaises actions.
Bien que Bilam n’ait pas été un homme ordinaire pour qu’on puisse dire que sa faute était involontaire, mais un très grand homme, ainsi qu’il est écrit « qui connaît la pensée du Tout-Puissant », et que tous ses actes aient été délibérés, parce qu’il avait une grande et profonde compréhension, malgré tout cela du Ciel on a eu pitié de lui.
Disons donc qui si telle est la miséricorde envers un non-juif, à combien plus forte raison pour tout juif. C’est pourquoi lorsque l’on sent qu’on est vaincu par ses instincts et qu’on désire fauter, on doit se renforcer, et alors on recevra évidemment la pitié et l’aide du Ciel.
« Hachem ouvrit la bouche de l’ânesse » (22, 28)
L’ânesse doit être condamnée à mort, parce que le Saint, béni soit-Il veille à l’honneur de cet impie, afin qu’on ne dise pas : « C’est elle qui a réduit Bilam au silence par ses remontrances » (Bemidbar Rabba 20, 14).
Le livre « Torat Avraham » fait remarquer : de quel « honneur des créatures » est-il question ici ? Tout le monde savait qu’une ânesse ne parle pas, et que c’était un miracle évident. Et comme Hachem avait ouvert la bouche de l’ânesse, c’était une voix du Ciel qui l’avait réprimandé, alors qu’importe par quel intermédiaire cette voix s’était faite entendre, que ce soit par un animal, une plante ou un objet inanimé ? Et s’il en était ainsi, en quoi cela portait-il atteinte à l’honneur de Bilam ?
De plus, il est question de l’honneur de Bilam l’impie, et du moment où il partait pour maudire Israël et le détruire. Est-ce qu’à cause d’une atteinte à l’honneur le concernant l’ânesse devait mourir, même si c’était une souffrance infligée à une bête ?
De là nous devons apprendre qu’en vérité, l’intelligence humaine ne peut pas concevoir l’ampleur de l’honneur qui est dû à tout homme, parce qu’il a été créé à l’image de D. Et s’il en est ainsi pour tout homme, que peut-on dire de l’honneur dû à un juif, au « peuple élu », dont il est dit : « Les bnei Israël sont chers, car ils s’appellent enfants de D. »
Cette distinction implique donc un changement de valeurs en ce qui concerne l’honneur d’Israël dans la pratique.
« Parole de celui qui entend les paroles de D. et connaît la connaissance du Très-haut » (24, 15).
Rachi explique ce que recouvre « connaît la connaissance du Très-Haut » : pour fixer le moment où Il se met en colère.
C’est ce que disent les Sages (Berakhot 7a) : « Aucune créature ne peut fixer ce moment, à l’exception de Bilam, dont il est écrit qu’il « connaît la connaissance du Très-Haut ».
On a demandé au machguia’h Rabbi Méïr ‘Hadach zatsal pourquoi Moché ne connaissait pas ce moment mais que Bilam le connaissait.
Il a répondu : Moché lui-même ne voulait pas connaître cela, c’est pourquoi il ne le savait pas.
LA VIE DANS LA PARACHA
A partir de l’enseignement de Rabbeinou ‘Haïm ben Attar
« Il vit de là les dernières lignes du peuple » (22, 41)
Or les Sages ont dit (Ta’anit 9a) que les nuées recouvraient Israël, si bien qu’on ne pouvait pas le voir. Quand Aharon est mort et que les nuées ont disparu, alors Israël est apparu aux yeux, et les Cananéens ont su où il se trouvait et l’ont attaqué. Ensuite les nuées sont revenues par le mérite de Moché, comme l’ont dit les Sages, donc les bnei Israël étaient recouverts par elles. Alors comment le verset peut-il dire « il vit de là les dernières lignes du peuple » ? Au contraire, Hachem aurait dû redoubler de protection envers eux contre le mauvais œil de Bilam !
Mais il est évident qu’il a pu le voir par sorcellerie, par un certain oiseau qui les révélait. La sorcellerie a ce pouvoir, comme le disent les Sages (Sanhédrin 67b), que les sorcières révélaient ce qui est caché aux yeux. Et le verset nous informe que c’est seulement les dernières lignes qui se sont trouvées découvertes, et non le coin des tsaddikim et des grands.
LES CHEMINS DE LA FOI
Etudes sur la droiture dans les midot
Les qualités de l’homme et son caractère s’appellent dans la langue sainte « midot »
La question se pose d’elle-même : apparemment, quel rapport y a-t-il entre le caractère d’un homme et les « midot », mot qui s’apparente littéralement au fait de mesurer, la longueur, la largeur et la hauteur ? Il faut d’ailleurs comprendre pourquoi une mauvaise mida ne s’appelle pas « une tendance mauvaise » ou même « un mauvais caractère » ?
Nous trouvons la réponse à cela dans les paroles instructives du Rav Zamir Cohen chelita : c’est que selon la perspective juive il ne s’agit pas d’un caractère défectueux ; de même qu’il est impossible de définir le feu comme quelque chose de mauvais, il est tout aussi impossible de définir des caractéristiques du caractère humain comme mauvaises.
Mais alors ? Cela dépend comment nous utilisons nos traits de caractère. Si par exemple nous utilisons la jalousie, le désir ou l’amour des honneurs convenablement et en les canalisant positivement, alors ils nous sont fort utiles. Mais si ces traits brûlent en nous exagérément, au point de nous conduire dans des régions mauvaises, alors nous devons briser leur excès et leur rendre la mesure appropriée.
C’est-à-dire que la nature avec laquelle on naît s’appelle « un trait de caractère », et la façon dont on l’utilise est une « mida ».
C’est la raison pour laquelle les sages du moussar utilisent souvent le terme de « briser les midot ». C’est parce que lorsque l’on découvre qu’on a une tendance qui agit en soi de façon trop radicale, et qui tend manifestement vers le négatif, alors la tâche nous incombe de briser cette mauvaise mida et de lui enlever ce qu’elle a d’extrême, jusqu’à ce qu’elle agisse en nous avec mesure.
Voici un exemple : trop d’indifférence n’est pas bon, c’est pourquoi nous trouvons dans les paroles des Sages que « la jalousie des érudits augmente la sagesse ». Quand il y a une jalousie entre des élèves qui étudient au beit hamidrach, et que l’un du groupe regarde de côté et se dit : « Pourquoi est-ce que mes amis se développent dans l’étude alors que moi je perds mon temps et je reste en arrière », alors cette jalousie est positive dans son essence, car elle permet d’ajouter de la sagesse à celui qui la ressent. Mais par contre, si nous utilisons la jalousie pour envier le nouveau salon que viennent de s’offrir les voisins, ou la voiture étincelante d’un ami, c’est une jalousie négative.
Nous avons pris comme exemple la jalousie, mais il est clair que l’idée de base concerne toutes les midot : il faut les utiliser positivement, en quantité adéquate et là où il faut. Dans le cas contraire, c’est une mauvaise mida.
Dans cette rubrique, nous rencontrons toutes les semaines certaines qualités ou défauts, qu’il nous est demandé de vaincre pour nous élever, ou comme nous l’avons défini ici, de « briser les midot ». Nous nous sommes plusieurs fois demandé si l’homme est vraiment capable d’aller au combat, de lutter contre ces défauts qui agissent et brûlent en lui et de les vaincre, ou si c’est un combat perdu d’avance, parce que ce sont des traits de caractère avec lesquels nous sommes nés et que nous avons sucé avec le lait de notre mère.
Dans le traité Chabbat, la Guemara affirme clairement qu’effectivement, il n’est pas au pouvoir de l’homme de modifier les qualités et défauts avec lesquels il est né, en revanche il est capable de modifier les midot. L’un des exemples très connus de la Guemara est que celui qui est né avec un mazal « rougeoyant », un trait de caractère appelant le versement du sang, peut effectuer un changement de mida dans le sens positif et devenir mohel ou cho’het.
Notre maître le gaon Rabbi Ben Tsion Abba Chaoul zatsal a merveilleusement expliqué cette idée en donnant l’image frappante d’une montagne où l’eau de pluie qui coule a creusé un chemin vers un oued, où elle va se perdre.
Un sage est arrivé qui s’est dit : est-ce que ce n’est pas dommage que toute cette eau soit perdue ? Qu’a-t-il fait ? Par le travail de ses mains, il a canalisé l’eau vers son champ qui était à proximité. Le premier lit creusé par l’eau a petit à petit séché, et un nouveau chemin est apparu, qui la menait vers une utilisation positive.
Il en va exactement de même des qualités de l’âme qu’on reçoit à la naissance. Il est demandé à l’homme de les canaliser vers des voies positives de façon à ce que toutes les midot constituent un grand moteur qui le conduit vers le but désiré.