Parachat Matot Massei 6 Août 2016 ב' אב תשע"ו |
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La vie : un voyage
« Voici l’itinéraire des enfants d’Israël, depuis qu’ils furent sortis du pays d’Egypte, selon leurs légions, sous la conduite de Moché et d’Aharon. » (Bamidbar 33:1)
Dans la section de Massé, la Torah retrace l’itinéraire du peuple juif, depuis sa sortie d’Egypte jusqu’à son entrée en Terre Sainte. Nous pouvons nous demander pourquoi elle s’attarde tant sur le détail de chacun de ces voyages ; qu’est-ce que cela peut nous apporter ? De même, au sujet du premier d’entre eux, en l’occurrence celui d’Egypte à Ramsès, une autre précision peut nous surprendre : le fait qu’à ce même moment, leurs anciens oppresseurs étaient en train d’enterrer leurs morts – les premiers-nés, tombés lors de la dernière plaie. Là encore, quel est donc l’intérêt d’une telle mention ?
Proposons une interprétation de ces diverses précisions à la lumière du Moussar. Nous allons voir en quoi elles nous indiquent, sous forme allusive, le devoir de l’homme de connaître et de définir sa mission, sa raison d’être dans ce monde. A cet égard, combien est-il dommage que tant de personnes perdent stupidement leur temps dans des vanités, alors qu’« une heure de repentir et de bonnes actions dans ce monde vaut plus que toute la vie du monde futur » ! A l’inverse, celui qui s’investit, lors de son existence terrestre, dans le service de son Créateur, jouira d’une grande satisfaction dans le monde à venir.
Si la Torah a détaillé les nombreuses étapes par lesquelles les enfants d’Israël durent passer, dans le désert, c’est afin de mettre en valeur la destination finale où elles devaient mener – la Terre Sainte. Celle-ci exigeait néanmoins le respect d’une condition : l’étude de la Torah et le respect des mitsvot, y compris de celles qui y sont afférentes.
En outre, à travers le détail de ces voyages, nous pouvons lire les difficultés auxquelles le Saint béni soit-Il a volontairement confronté Ses enfants afin qu’ils apprécient ensuite l’étape finale – cette terre où coulent le lait et le miel.
Enfin, une fois qu’ils seraient installés dans ce pays béni et y jouiraient de la sérénité, après avoir enduré les fatigues et péripéties de leurs voyages passés, ils réaliseraient combien il serait regrettable d’en être exilés, l’exil étant encore plus éprouvant que des pérégrinations. En effet, avec toutes les difficultés qu’elles représentaient, elles étaient toutefois accompagnées de miracles divins, comme les nuées de gloire qui escortaient le peuple juif, la manne qui lui tombait quotidiennement du ciel, et le puits de Myriam qui l’accompagnait.
Ainsi, cette longue traversée du désert était à la fois caractérisée par une protection et une assistance divines particulières, et par de multiples étapes, parfois pénibles, notamment lorsque, à peine campés à un endroit, la nuée s’élevait pour leur signifier de démonter les tentes et de repartir. Pourtant, ceci n’avait pas de commune mesure avec la souffrance qu’ils risquaient de connaître s’ils n’écoutaient pas l’Eternel et devaient alors être exilés de leur terre et de la voir ravagée.
Il nous incombe de nous vouer, toute notre vie durant, à l’étude de la Torah, appelée « voyage », conformément à l’interprétation du Or Ha’haïm du verset « ils partirent de Refidim » (Chémot 19:2) – ils quittèrent leur relâchement (rifion) en Torah pour s’engager à s’y consacrer à nouveau pleinement. Il appartient à l’homme de constamment « voyager » dans la Torah, et d’aller toujours d’une performance à l’autre, sans jamais s’arrêter dans ses progrès. Et même s’il doit parfois marquer une pause, cela doit être dans l’intention d’engranger de nouvelles forces pour être en mesure de poursuivre son élévation spirituelle.
Or, ce qui permet à l’homme de progresser perpétuellement, c’est le souvenir du jour de la mort, qui l’incitera à enterrer ses désirs personnels, vains et fugitifs. C’est pourquoi le texte précise qu’au moment même où les enfants d’Israël quittèrent l’Egypte, les Egyptiens étaient occupés à enterrer leurs morts, allusion au fait qu’avant de partir de ce pays, nos ancêtres veillèrent eux aussi à enterrer leurs « morts », c’est-à-dire leurs attaches à ce vain monde.
Allégoriquement parlant, la vie d’un Juif peut être assimilée à un long voyage, chacun de ses actes en constituant les étapes. Un acte qui engendre un résultat positif pourra être considéré comme une étape positive, tandis qu’un acte engendrant un résultat négatif sera lui-même qualifié de négatif, que Dieu préserve. Si l’homme emprunte le droit chemin, se voue à l’étude de la Torah et observe les mitsvot, son voyage sera constructif, mais s’il choisit la voie du matérialisme et de ses vanités, il fera certes mauvaise route.
LA VOIE TRACÉE
Un double sauvetage
Dans ma jeunesse, j’étudiais à la Yéchiva du Gaon Rav Guerchon Liebman zatsal. Au fil des ans, cette institution fut en proie à des difficultés financières, et les dettes accumulées devenaient trop lourdes à assumer, si bien qu’elle était menacée de fermeture.
Ses dirigeants, parmi lesquels le Rav Elyahou Senior chelita, vinrent me trouver pour solliciter mon aide. Ils désiraient même que je prenne la Yéchiva sous ma tutelle.
Cette demande me mit mal à l’aise : d’un côté, par reconnaissance pour cette Yéchiva dans laquelle j’avais grandi et été éduqué, j’aurais aimé pouvoir régler ses dettes. Mais d’un autre côté, j’assume moi-même la responsabilité de multiples institutions de Torah. Comment, dans ce cas, en aider également une autre par un apport extrêmement important, au risque de mettre en danger mes propres institutions ?
Cependant, les Rabbanim qui se présentèrent à moi n’étaient pas prêts à baisser les bras, et m’implorèrent de leur faire tout au moins un don ponctuel. C’est ce que je fis, n’étant pas en mesure de tirer la Yéchiva de ses dettes. La collecte que j’organisai par ailleurs à Lyon en sa faveur ne permit pas même de ramasser 1 % de la somme nécessaire pour qu’elle se sorte de l’impasse.
Finalement, je décidai de m’engager coûte que coûte à la tirer de ses dettes, décision dont je fis part à ses dirigeants. Ceux-ci se réjouirent grandement. Le soulagement pouvait se lire sur leur visage, et je me réjouis également à l’idée que mon Maître le Gaon Rav Guerchon Liebman zatsal partageait cette joie depuis le Monde de Vérité.
Lorsque je me pris à penser d’où j’aurais cette somme, je compris que le Saint béni soit-Il me plaçait face à une épreuve de taille dans le domaine de la émouna. Je m’efforçai donc de renforcer ma foi dans le fait que le Saint béni soit-Il est tout-puissant et que je n’étais qu’un instrument entre Ses mains, tel un canal pour apporter la berakha à l’institution sainte qui en avait besoin.
J’appris par la suite que l’immeuble de la Yéchiva avait pris feu, de sorte qu’en plus de ses immenses dettes s’ajoutait le besoin de se soucier au plus vite de la réfection des locaux : les élèves de la Yéchiva, soudainement privés de toit, avaient été contraints de se disperser momentanément dans d’autres Yéchivot en attendant que la leur soit restaurée.
Je décidai évidemment de m’occuper également de ce problème, plaçant ma confiance en D.ieu, Qui ne manquerait sûrement pas de m’envoyer les fonds nécessaires.
Quelque temps après, le téléphone sonna chez moi. A l’autre bout du fil, mon interlocuteur me fit part de la situation extrêmement dangereuse dans laquelle il se trouvait, et c’est pourquoi il était intéressé par une berakha. Je lui souhaitai alors la réussite, et il ajouta : « Si, dans quelques heures, je parviens à me tirer d’embarras, je vous ferai un don très conséquent pour la tsédaka. »
Je me retins de demander de quelle somme il était question, ce qu’il précisa de lui-même : il s’agissait, au centime près, de la somme dont la Yéchiva avait besoin pour se remettre sur pied.
Grâce à D.ieu, après quelques heures, ce Juif me rappela pour me dire qu’il était à présent hors de danger. Tout s’était arrangé pour le mieux et il allait m’envoyer la somme à laquelle il s’était engagé.
Dès que je la reçus, je m’empressai de la transmettre intégralement aux Rabbanim de la Yéchiva, heureux de pouvoir être l’émissaire du sauvetage de la Yéchiva de ma jeunesse.
Cela m’apprit en outre une grande leçon : au moment où je m’en remettais complètement à D.ieu en promettant que j’aiderais coûte que coûte la Yéchiva à se tirer de cette mauvaise passe, Il influa sur le cours des évènements de telle sorte que je reçoive l’appel d’un Juif en détresse, par lequel allait me parvenir l’argent dont la Yéchiva avait besoin.
AU PARFUM DES MINHAGUIM
Contrairement aux deux premiers repas dont le nom ne découle pas de leur place, le troisième repas porte le nom de séouda chlichit – le « troisième repas ».
La raison en est que l’homme montre ainsi qu’il a accompli la mitsva de manger les trois repas de Chabbat. Car il a mangé les deux premiers pour soulager sa faim, et c’est pourquoi il en jouit. Par contre, en prenant le troisième repas, il révèle qu’il mange surtout au nom du Ciel, et non par faim.
GARDE TA LANGUE
La guérison par le silence
Le silence est bénéfique aux Sages, et à plus forte raison aux gens simples. Fais attention de garder ta langue comme la prunelle de tes yeux, car « le silence est le rempart de la sagesse » et « le silence est le remède à tous les maux », ainsi que : « celui qui garde sa bouche et sa langue protège son âme de bien des tourments ». « La bouche du sot cause sa ruine, et ses lèvres sont un piège pour sa personne. » (Michlé 18:7)
Si tu te trouves parmi un groupe, il est préférable qu’on te dise : « Parle ! Pourquoi te tais-tu tellement ? » plutôt que de parler au risque que tes paroles soient malvenues et qu’on te dise de te taire.
LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « Ecoutez la parole d’Hachem (…) » (Yirmyahou 2:4 et suivants)
Lien avec la paracha : Cette haftara est la seconde des trois instaurées par nos Sages pendant les Chabbatot précédant Ticha Béav. Elles traitent de la punition que prédit Yirmyahou, à savoir la destruction de Jérusalem.
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
La vertu de la paix
« Aharon Hacohen monta sur cette montagne par ordre de l’Eternel, et y mourut. C’était la quarantième année du départ des enfants d’Israël du pays d’Egypte, le premier jour du cinquième mois. Aharon avait cent vingt-trois ans lorsqu’il mourut à Hor-la-Montagne. C’est alors que le Cananéen, roi d’Arad, qui habitait au midi du pays de Canaan, apprit l’arrivée des enfants d’Israël. » (Bamidbar 33:38-40)
Dans la section de Massé, la Torah passe en revue les voyages successifs des enfants d’Israël dans le désert. Pour certains d’entre eux, elle décrit la raison de l’étape en question et ce qui s’y est passé, alors que pour d’autres, elle ne fait que mentionner le lieu d’arrêt et le départ de celui-ci.
En ce qui concerne celui qui mena nos ancêtres de Kadech à Hor-la-Montagne, il est précisé qu’Aharon mourut à cet endroit, puis que le Cananéen, roi d’Arad, entendit cette nouvelle. Et Rachi de commenter : « Cela nous enseigne que la mort d’Aharon est la nouvelle qui provoqua la disparition des nuées de gloire (…) ».
Je me suis posé la question suivante : si les Cananéens craignaient de combattre les enfants d’Israël du fait qu’ils étaient entourés par les nuées de gloire, comment ont-ils osé les combattre dès l’instant où celles-ci ont disparu ? Pensaient-ils réellement que l’Eternel ne pouvait protéger Ses enfants que par l’intermédiaire de ces nuées ? Il semble évident, au contraire, que celles-ci n’étaient qu’un symbole de cette protection divine qui, même en leur absence, s’exerçait de manière constante. Il nous faut donc expliquer pourquoi le roi de Canaan vit, dans la disparition de ces nuées, l’occasion rêvée pour s’attaquer contre le peuple juif.
Comme nous le savons, les enfants d’Israël vivent et se maintiennent en vie par le mérite de la solidarité. Plus encore, l’univers entier repose sur le pilier de la paix, sans lequel il ne pourrait subsister. Or, Aharon Hacohen incarnait la vertu de la paix, comme le soulignent nos Maîtres : « Il aimait la paix, la poursuivait, aimait les hommes et les rapprochait de la Torah. » (Pirké Avot 1:12)
Ainsi, lorsqu’éclatait une querelle au sein du peuple juif ou entre des conjoints, Aharon déployait tous ses efforts et se dévouait pour rétablir la paix. Dans le même esprit, il fuyait la querelle. Nous trouvons, à cet égard, que lors du soulèvement de Kora’h, il ne réagit pas aux propos désobligeants que celui-ci prononça à son encontre. C’est la disparition de cette exceptionnelle personnalité pacifique que tous les membres du peuple juif, hommes, femmes et enfants, pleurèrent amèrement.
Dès lors, nous comprenons mieux l’expression du verset : « le Cananéen (…) apprit » : il fut informé de la mort d’Aharon, lui qui représentait et assurait la paix au sein de ses frères, et pensa donc, en l’absence de celle-ci, être dorénavant en mesure de prendre le dessus sur les enfants d’Israël. Par conséquent, même aux yeux des Cananéens, la disparition des nuées de gloire n’était qu’un signe de celle d’Aharon qui, pensaient-ils, entraînerait des dissensions au sein du peuple juif, le rendant ainsi, à leurs yeux, vulnérable.
ENTRE LES LIGNES
Une double vengeance
« Exerce sur les Midyanites la vengeance due aux enfants d’Israël ; après quoi tu seras réuni à tes pères. » (Bamidbar 31:2)
Ensuite, il est écrit : « Et Moché parla ainsi au peuple : Qu’un certain nombre d’entre vous s’apprêtent à combattre ; ils marcheront contre Midyan, pour exercer sur lui la vindicte de l’Eternel. » Le Saint béni soit-Il la mentionne en tant que vengeance des enfants d’Israël, tandis que pour Moché, c’est celle de D.ieu.
Le Saint béni soit-Il dit : « Cela s’impose de votre part puisqu’ils ont causé que Je vous fasse du mal ! »
Moché, de son côté, s’écria : « Maître du monde, si nous étions des idolâtres ou des personnes qui renient les mitsvot, on ne nous poursuivrait ni ne nous haïrait, mais maintenant on ne nous persécute qu’à cause de la Torah et des mitsvot que Tu nous as données. C’est donc Ta vengeance, d’où les termes du verset “pour exercer sur lui [Midyan] la vindicte de l’Eternel” ». (Yalkout Chimoni)
Un double cadeau
« Or, les enfants de Réouven et ceux de Gad possédaient de nombreux troupeaux, très considérables. » (Bamidbar 32:1)
Nos Sages demandent combien de cadeaux bénéfiques ont été créés dans le monde.
Trois : la sagesse, la puissance et la richesse. Si l’homme mérite l’un d’entre eux, il a tout le bien du monde. Quand ? Lorsqu’ils viennent du Saint béni soit-Il et du pouvoir de la Torah. Mais la puissance et la richesse de l’homme ne sont rien, car, comme l’a dit Chelomo : « J’ai encore observé sous le soleil que le prix de la course n’est pas assuré aux plus légers, ni la victoire dans les combats aux plus forts, ni le pain aux gens intelligents, ni la richesse aux sages (…), car mêmes destinées et mêmes accidents sont le lot de tous. » (Kohélet 9:11)
Et voici les paroles de Yirmya : « Ainsi parle l’Eternel : Que le Sage ne se glorifie pas de sa sagesse, que le vaillant ne se glorifie pas de sa vaillance, que le riche ne se glorifie pas de sa richesse ! » (Yirmya 9:22) Ces cadeaux ne venant pas du Saint béni soit-Il, ils finissent par le quitter. (Midrach Tan’houma)
La mort des grands Tsaddikim
« Aharon avait cent vingt-trois ans lorsqu’il mourut à Hor-la-Montagne. » (Bamidbar 33:39)
A quels honneurs eut droit Aharon Hatsaddik ! En effet, tous l’ont pleuré, alors que quand Myriam décéda, elle n’eut pas droit à des éloges funèbres ni à des funérailles publiques – seuls Moché et Aharon se chargèrent de son enterrement.
De même, quand Moché mourut, tous les enfants d’Israël ne pleurèrent pas sa disparition comme ils l’avaient fait suite à celle d’Aharon, car Moché les réprimandait à chaque faux pas. A propos de son décès, il est écrit : « les enfants d’Israël ont pleuré Moché », tandis que pour Aharon, il est écrit : « toute la maison d’Israël », du fait qu’il ne les jugea jamais négativement ni ne leur fit de reproches.
Lorsque Moché constata l’honneur et la gloire dont jouissait son frère, dont la dépouille se trouvait au summum, entourée par le Saint béni soit-Il et les anges qui en faisaient l’éloge, il s’assit en pleurant. « Malheur à moi, qui suis resté seul ! Quand Myriam disparut, aucun de nos coreligionnaires ne vint nous consoler. Nous seuls, avec Aharon et ses fils, nous sommes tenus devant sa dépouille, l’avons louée et enterrée. Quand Aharon est décédé, son fils et moi nous sommes impliqués et tenus devant sa dépouille. Mais lorsque viendra mon heure, qui se tiendra à mes côtés – ni père, ni fils, ni frère, ni sœur ? Qui me pleurera ? »
A cet instant, le Saint béni soit-Il lui répondit : « N’aie crainte, c’est Moi-même qui vais t’enterrer avec beaucoup d’honneur, comme il est écrit : “Il l’enterra dans la vallée du pays de Moav”.
« Et de même que la grotte où fut enseveli Aharon disparut, la tienne ne sera pas connue, comme il est écrit : “nul n’a connu sa sépulture jusqu’à ce jour”. Et de même que l’ange de la mort n’eut pas d’emprise sur Aharon, qui mourut par baiser divin, l’ange de la mort n’aura pas d’emprise sur toi et tu mourras par baiser divin, comme il est dit : “sur l’ordre (al pi) de l’Eternel”, le terme pi désignant par ailleurs la bouche. »
Moché fut immédiatement rasséréné.
Heureux les Tsaddikim que l’Eternel Lui-même rappelle à Lui, comme il est dit : « la gloire d’Hachem t’escortera » (Yéchaya 58:8) ! Plus, les anges de service sortent à leur rencontre, se réjouissent à leur venue et les reçoivent avec affabilité en leur disant : « Venez en paix », comme il est dit : « Il entre dans la paix, repose sur la couche (…) ». (Yalkout Chimoni)
ÉDUCATION
La Guémara, dans Baba Métsia (85b), raconte les mesures que prit Rabbi ’Hiya pour que la Torah ne soit pas oubliée d’Israël, en l’enseignant aux enfants juifs. Il sema dans ce but du lin et le fit pousser jusqu’à ce qu’on puisse le filer. A cette étape, il le cueillit et le laissa tremper dans de l’eau. Il le sécha et en sépara les fibres. Il les tissa alors en fils, qu’il tressa en filets de chasse.
A l’aide de ceux-ci, il se lança à la chasse aux gazelles, qu’il ramena chez lui vivantes, après quoi il leur fit la Che’hita et partagea leur chair aux pauvres. Il garda leur peau, dont il confectionna des parchemins, sur lesquels il inscrivit les cinq livres de la Torah.
Lorsque les ‘houmachim furent fin prêts, Rabbi ’Hiya passa dans des villes où il n’y avait pas d’enseignants en Torah, et remplit cet office en apprenant aux jeunes enfants juifs le ‘Houmach et la Michna.
Quand Rabbi Yéhouda Hanassi vit tout ce qu’avait fait Rabbi ’Hiya, il déclara : « Combien sont grands les actes de ’Hiya ! »
Si Rabbi ‘Hiya désirait enseigner la Torah aux jeunes enfants, peut-on se demander, il aurait pu acheter du parchemin, le travailler pour la mitsva et y inscrire les cinq livres de la Torah. Pourquoi fournit-il tant d’efforts et passa-t-il tant de temps en préparatifs préalables, a priori superflus ?
En vérité, du fait que Rabbi ‘Hiya voulait amplifier le pouvoir de sainteté des Méguilot, de sorte qu’elles puissent avoir une importante influence dans le cœur des enfants, dès le départ, il les confectionna dans la sainteté, bien en amont de l’étape imposée par la Halakha, à savoir le travail de la peau en parchemin. Déjà au moment où il sema les graines de lin, il agissait au nom de la mitsva d’étudier la Torah avec les enfants juifs. De même, à chaque étape liée à la préparation à cet objectif suprême qu’il s’était donné, il agit avec une intention pure et sainte, au nom de la mitsva de l’étude de la Torah.
A ce propos, le Rav Eliahou Lopian disait au nom du Gaon de Vilna que si l’on construisait une synagogue avec des matériaux confectionnés à la base en vue de cette tâche sacrée et que tout le gros œuvre était fait avec cette intention pure, toutes les prières émises en ce lieu seraient certainement pleines de ferveur.
On raconte à ce propos, sur plusieurs grands Maîtres en Torah, qu’avant de louer un appartement, ils avaient l’habitude de se renseigner au préalable sur ses occupants précédents – observaient-ils les mitsvot et les lois de pureté familiale convenablement ?
Le Rav Elyahou Lopian raconta l’anecdote suivante : « Dans ma jeunesse, à l’époque où j’étudiais à la Yéchiva de Lomze, se trouvait dans la ville un hôpital si ancien et délabré que même les autochtones les plus âgés ignoraient quand il avait été construit. Il arriva pourtant plusieurs fois que des malades qui y avaient fait un séjour prolongé contractent d’autres maladies que celles qui leur avaient valu cette hospitalisation. Les habitants de la localité ne laissaient de s’étonner de ce phénomène, que même les médecins ne parvenaient à expliquer.
Mis en alerte par la survenue de plusieurs cas d’affilée, des professeurs de grand renom vinrent de Varsovie et restèrent un certain temps sur place afin d’enquêter. Ils parvinrent finalement à la conclusion que le bâtiment abritant l’hôpital étant extrêmement ancien, ses murs avaient vraisemblablement absorbé au fil des ans les microbes de différentes maladies contagieuses, à l’origine des infections en question. Il fut alors décidé sans retard de détruire l’ensemble du bâtiment et d’en sortir toutes les poutres, les pierres et les gravats en dehors de la ville, où on allait les brûler jusqu’à ce qu’il ne reste plus une trace de l’édifice.
Or, si, concernant les maladies corporelles, nous voyons que des microbes ont pu pénétrer les murs d’une maison et y rester, en continuant à faire du mal après des dizaines, voire des centaines d’années, il en est de même, à plus forte raison, concernant les maladies spirituelles. Les germes impurs des maladies spirituelles touchant le pécheur ont certainement le pouvoir d’empoisonner l’atmosphère d’une impureté bien plus grande.
DES HOMMES DE FOI
Un homme arriva un jour chez notre Maître avec le bras plâtré, suite à un grave accident de la circulation. Il était désemparé, car les médecins pensaient lui amputer la main. Il confia au Rav son chagrin en pleurant. « Comment pourrais-je continuer à vivre avec une main en moins ? » se lamenta-t-il.
Lorsqu’il se calma un peu, le Rav lui demanda : « Que puis-je y changer ?
– Vous êtes le petit-fils de Rabbi ‘Haïm Pinto, n’est-ce pas ? dit-il.
– C’est juste, mais je ne suis pas Rabbi ‘Haïm Pinto, répondit le Rav.
– Quoi qu’il en soit, vous êtes son petit-fils et je crois fermement que D.ieu peut me faire bénéficier d’un miracle par le mérite du Tsaddik, » conclut-il avec confiance.
Notre Maître le conforta dans sa émouna : « Si vous avez une telle foi, avec l’aide de D.ieu, un miracle ne manquera pas de se produire. » Lorsqu’ils se séparèrent, l’homme lui dit : « J’espère que la prochaine fois que nous nous rencontrerons, ma main sera guérie. »
Une année passa. Un jour, notre maître donna un cours à un certain endroit et eut besoin d’un stylo pour noter un verset. Il demanda si quelqu’un dans le public pouvait lui en prêter un. C’est alors qu’un homme s’approcha et lui en tendit. Au passage, le Rav remarqua qu’il avait une grande cicatrice sur la main et lui en demanda la raison.
L’homme se mit à lui rappeler son histoire :
« Vous souvenez-vous de ma visite de l’année dernière ? J’étais venu vous demander de me bénir, car les médecins voulaient m’amputer la main. Grâce à D.ieu, ils ont changé d’avis, sans comprendre, d’ailleurs, comment j’ai pu subitement guérir ! C’est pourquoi je vous offre aujourd’hui ce stylo en souvenir de ce miracle, qui, j’en suis persuadé, est dû au mérite du Tsaddik Rabbi ‘Haïm Pinto. »