Parachat Va'ethanane 20 Août 2016 ט"ז אב תשע"ו |
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La gravité du lachone hara
Rabbi David Hanania Pinto
« Mais l’Eternel, irrité contre moi à cause de vous, ne m’exauça point ; et l’Eternel me dit : “Assez ! Ne Me parle pas davantage à ce sujet.” » (Dévarim 3:26)
La section de Vaet’hanan commence par la requête de Moché pour entrer en Terre Sainte et le refus de D.ieu, qui manifeste même de la colère à son encontre. Nous savons que Moché fut puni par cette fin de non-recevoir parce qu’il modifia l’ordre divin : au lieu de parler au rocher pour en faire sortir de l’eau, il le frappa. En dépit de toutes les supplications de Moché pour pouvoir fouler la Terre Sainte, D.ieu refusa de l’exaucer et ajouta même : « Assez ! Ne Me parle pas davantage à ce sujet. »
Ce passage suscite plusieurs interrogations. Tout d’abord, pourquoi Moché dit-il : « l’Eternel, irrité contre moi à cause de vous » ? Nous savons que la colère divine éclata en raison du changement de l’ordre divin par Moché. Alors pourquoi en rejeta-t-il la responsabilité sur les enfants d’Israël ?
Afin d’éclaircir cela, précisons que Moché était, au départ, apte à entrer en Terre Sainte. Or, le Tout-Puissant savait que s’il y entrait, il serait également celui qui construirait le Temple. Dans ce cas, D.ieu n’aurait pas pu le détruire car toutes les réalisations de Moché étaient vouées à durer éternellement. Aussi, D.ieu aurait été contraint, suite aux fautes des enfants d’Israël, de leur porter directement atteinte, afin de réparer leurs égarements.
Mais D.ieu eut pitié de Son peuple et préféra déverser Sa colère sur le bois et les pierres, en détruisant le Temple. Pour cette raison, Il organisa l’épreuve des eaux de Mériva, faute qui retira à Moché l’insigne privilège d’entrer en Terre Sainte. Dès lors, les enfants d’Israël n’étaient plus en danger puisque D.ieu avait la possibilité de détruire le Temple à leur place. C’est donc bien à cause des enfants d’Israël que Moché trébucha, car si ces derniers n’étaient pas destinés à pécher dans le futur et à être condamnés à l’exil, le mérite d’entrer en Terre Sainte ne lui aurait pas été ôté.
A présent, nous comprenons pourquoi Moché, dans le verset précité, accusa les enfants d’Israël d’être responsables de la colère divine à son encontre. N’eussent été leurs errements futurs, leur leader n’aurait pas fauté lors de l’épisode des eaux de Mériva et aurait eu le mérite de pénétrer en Israël.
LA VOIE TRACÉE
Grâce à Yaakov
La lettre suivante nous est parvenue dans nos bureaux en France :
Je me suis rendu chez le Rav Pinto pour demander une bénédiction concernant ma santé. J’avais passé une année difficile, et souffrais de plusieurs problèmes médicaux qui n’étaient encore pas résolus. Je me suis dit qu’une bénédiction du Rav m’aiderait. Je suis arrivé chez lui sans trop savoir à quoi m’attendre ; c’était la première fois que j’allais chez le Rav pour une bénédiction. J’entrai dans son bureau et lui fis part de mon état. Il commença alors à me poser toutes sortes de questions et me promit de manière sûre que ma parnassa (subsistance) et mon chalom bayit (paix du ménage) iraient bien. J’étais très content de l’entendre mais j’étais venu pour des questions de santé. Je commençai à lui parler du pontage que j’avais subi et des complications qui s’ensuivirent. Il m’interrompit et me demanda ce qui n’allait pas avec mes plantes de pied. Je fus stupéfait. J’avais eu en effet des problèmes neurologiques dans les pieds et les plantes de pieds comme conséquence à une maladie appelée myélite transverse. Comment pouvait-il le savoir ? Je commençai à lui décrire le problème lorsqu’il me demanda qui était Yaakov. Je lui répondis que je ne savais pas de qui il s’agissait. Nous poursuivîmes notre conversation et il me dit de faire attention à ma consommation de sucre ainsi qu’à mon cholestérol. J’étais à nouveau stupéfait car les médecins m’avaient justement recommandé dernièrement de surveiller mon taux de sucre. L’entretien se poursuivant, le Rav Pinto paraissait soucieux. Il me dit que j’avais bénéficié d’un grand miracle. Il le répéta plusieurs fois puis me révéla que j’aurais dû mourir un Chabbat plusieurs mois auparavant, mais comme j’avais accompli une grande mitsva, j’avais été sauvé. Il n’était pas certain du caractère de cette mitsva, mais elle m’avait sauvé la vie. Comment pouvait-il savoir que j’étais tombé malade pour la première fois un Chabbat après-midi ? Il me conseilla de continuer à faire des mitsvot et d’augmenter mon étude de la Torah. L’entretien se termina sur la bénédiction du Rav me souhaitant réfoua chéléma, une guérison complète.
De retour à la maison, je racontai à ma femme ce qui m’était arrivé et lui dis que nous devions continuer à faire des mitsvot et étudier encore plus de Torah. La seule chose qui me perturbait était d’ignorer l’identité de ce Yaakov.
Au milieu de la nuit, je me réveillai soudain : ca y est ! L’image de Yaakov m’apparut clairement. Le Chabbat où je fus malade pour la première fois, je participais à un séminaire qui se déroulait du mercredi au dimanche. Le jeudi, je rencontrai un autre participant qui portait également une kippa. Je me présentai à lui et lui demandai ce qu’il avait l’intention de faire pour les repas de Chabbat. Il me dit qu’il n’était pas encore prêt, il devait se procurer de la nourriture cachère. Je lui dis alors que ce n’était pas nécessaire car j’en avais plus qu’il n’en fallait pour nous deux. Il accepta et me dit qu’il apporterait ce qu’il pourrait. Nous avons bien profité de ce Chabbat passé ensemble ; ce fut là le début d’une nouvelle amitié. Cet homme s’appelait Yaakov.
Je retournai le matin chez le Rav pour lui raconter qui était ce Yaakov et comment nous nous étions rencontrés. Le Rav Pinto sut immédiatement identifier cette mitsva qui m’avait sauvé la vie : c’était hakhnassat ore’him, l’accueil des invités. Le Rav m’expliqua avec beaucoup d’émotion combien cette mitsva était importante et comment les gens ne comprennent pas la force de simples actes de ‘hessed.
Il insista auprès de moi pour que je diffuse l’importance de cette grande mitsva. Il me souhaita encore réfoua chéléma et je le quittai, renforcé dans ma émouna.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « Consolez, consolez, Mon peuple (…) » (Yéchaya 40)
Lien avec le Chabbat : il fait partie des sept Chabbatot de consolation, thème de la haftara, qu’on lit à partir du Chabbat suivant le 9 Av. Cette haftara fait par ailleurs partie des sept haftarot de consolation issues du livre de Yéchayahou.
AU PARFUM DES MINHAGUIM
Après la Birkat Halévana, on a l’habitude de dire : « David, mélekh Israël, ‘haï vékayam – David, roi d’Israël, roi vivant et qui subsiste ».
A cela, plusieurs raisons :
• le fait que la royauté de David soit comparée à la lune, et qu’elle sera appelée à se renouveler dans le futur tout comme elle ;
• en outre, de même que la lune va en diminuant de taille après 15 jours, la royauté de David régressa après 15 rois ;
• enfin, allusivement, la Guématria des mots « David, mélekh Israël, ‘haï vékayam » équivaut à celle de « roch ‘hodech ».
CHEMIRAT HALACHONE
Une courte adaptation
On a remarqué, par expérience, que le fait de tenir sa langue et de de s’abstenir d’écouter des propos interdits n’est difficile que pendant quelques semaines. En effet, après cela, lorsque les gens constateront que cette personne se garde de prononcer ou d’écouter du lachone hara ou des moqueries, ils cesseront de lui en rapporter, sentant qu’ils ne font ainsi que se déprécier, et iront proposer leur « marchandise » de médisance et de commérage ailleurs, à plus offrant.
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
Rabbi David Hanania Pinto
Miracles du passé et du présent
Après la victoire des enfants d’Israël dans la guerre contre Si’hon et Og, Moché adressa à D.ieu prières et louanges, et Lui dit : « Tu as rendu Ton serviteur témoin ». Ceci ne manque de nous interpeller. N’était-ce qu’à ce moment-là, après cette guerre, que Moché remarqua les miracles accomplis par D.ieu en faveur de Son peuple ? Lors de la sortie d’Egypte et des pérégrinations du désert, D.ieu démontra constamment Sa puissance. Alors pourquoi n’a-t-il prononcé ces paroles qu’à cet instant ?
Pour tenter de l’expliquer, commençons par la remarque suivante : les gens ont un attachement particulier pour les objets anciens, qui éveillent en eux des sentiments de nostalgie. En outre, plus un objet est ancien et plus sa valeur marchande augmente. Ainsi, une poterie fabriquée il y a des siècles aura une valeur beaucoup plus élevée qu’une pièce contemporaine.
Or, si ce principe se vérifie concernant les objets matériels, il n’est pas du tout valable lorsqu’il est question des traditions ancestrales qui guidaient la vie de nos pères dans les générations passées. Au contraire, la tendance est plutôt de s’en détacher, les jugeant anciennes et démodées, pour se lier à des valeurs qui insufflent un vent de nouveauté et de progrès. C’est à ce titre que les dirigeants sionistes proclamèrent fièrement qu’ils voulaient détruire le vieux monde jusqu’à sa racine. Leur intention était de bâtir une génération nouvelle, dépourvue de Torah, et d’éradiquer tout souvenir de « l’ancien monde ».
A ce sujet, ajoutons que pour pouvoir s’attacher au riche passé de notre peuple et à la substance spirituelle sur laquelle il repose – les miracles de la sortie d’Egypte et du désert –, un homme doit au préalable ressentir les miracles de son quotidien, par lesquels D.ieu, dans Sa bonté et Sa miséricorde, maintient son corps en vie. Toutefois, nous nous sommes habitués à n’y voir que l’action de la nature. Mais il suffit d’observer le fonctionnement de notre corps pour nous apercevoir que nous vivons au-delà des lois de la nature. Il existe un Etre suprême qui la gère et veille sur notre corps pour lui permettre d’accomplir ses fonctions. C’est ce que nous disons dans la bénédiction « acher yatsar », prononcée après avoir satisfait ses besoins naturels : « Si l’un d’entre eux s’ouvrait ou si l’un d’entre eux se fermait, il serait impossible de vivre et de se tenir devant Toi, ne serait-ce qu’une heure. » Si ces affirmations sont exactes concernant tous les petits orifices situés dans la partie inférieure du corps de l’homme, à plus forte raison le sont-elles au sujet des fonctions vitales, comme celles assurées par l’appareil respiratoire ou par le cœur.
Cette réflexion menée sur les miracles, petits et grands, de notre quotidien va nous permettre d’appréhender la véritable valeur des prodiges accomplis par D.ieu en faveur des enfants d’Israël lors de la sortie d’Egypte et dans le désert. En revanche, si un homme reste insensible aux miracles de son quotidien, comment pourra-t-il ressentir ceux du passé ? Dans le même esprit, dans la prière, nous disons : « Notre D.ieu, D.ieu de nos Pères », c’est-à-dire qu’au préalable, nous mentionnons le fait que le Créateur est notre D.ieu, puis, seulement ensuite, qu’Il est le D.ieu de nos Pères. A travers ce sentiment que le Créateur est son D.ieu, l’homme va ressentir qu’Il est également celui de ses saints ancêtres. Fort de cette conscience, il servira le Créateur dans un esprit de pureté, à la manière des illustres patriarches.
A présent, nous comprenons la remarque de Moché : « Tu as rendu Ton serviteur témoin ». Il voulait dire que l’émotion ressentie à la vue des miracles que D.ieu accomplit en sa faveur à ce moment-là – lors de la guerre contre Si’hon et Og – éveilla en lui une émotion à l’égard des prodiges du passé. Il se mit alors à en ressentir la puissance et la grandeur avec beaucoup plus d’intensité.
Habituons-nous à remarquer les miracles de notre quotidien, grands et petits. De la sorte, nous réussirons à témoigner de la reconnaissance à notre Créateur pour les prodiges qu’Il accomplit en faveur de nos ancêtres, dont le souvenir nous rattache à la chaîne des générations.
ENTRE LES LIGNES
Des cadeaux gratuits
« Je suppliai l’Eternel » (Dévarim 3:23)
Tel est le sens du verset « Tu entendras les supplications (té’hina) de Ton serviteur » (Mélakhim I 8:30).
La prière répond à plusieurs noms : téfila, té’hina, tsaaka, zéaka, chava, rénana, péguia, naaka, kria, atira, amida, ‘heilo.
Mais pourquoi Moché n’eut-il recours qu’aux ta’hanounim, comme le souligne l’emploi du verbe vaet’hanan (« je suppliai ») ?
Au moment où Moché se dressa pour demander au Saint béni soit-Il « Montre-Moi Ta gloire », il voulait en quelque sorte savoir par quelle mida (attribut) Il dirigeait le monde. Le Créateur accéda à sa requête et lui dit : « C’est Ma bonté tout entière que Je veux dérouler à ta vue (…) » (Chémot 33:19). « Je ne dois rien à la création, lui déclare ainsi le Saint béni soit-Il, mais Je lui donne à titre gratuit (‘hinam), comme il est dit : “(…) alors Je ferai grâce à qui Je devrai faire grâce (vé’hanoti et acher a’hon)” (ibid.).
– Dans ce cas, lui répondit Moché, accorde-moi une faveur à titre gratuit ! » – d’où l’emploi de vaet’hanan.
(Midrach Tan’houma)
La première fois
« Tu pourrais aussi porter tes regards vers le ciel et, en voyant le soleil, la lune, les étoiles, toute la milice céleste, tu pourrais te laisser induire à te prosterner devant eux et à les adorer (…) » (Dévarim 4:19)
Car ils n’avaient pas encore vu le soleil ni la lune, couverts par la nuée.
Moché leur dit : « Vous verrez à l’avenir le soleil et la lune, mais ne pensez pas que ce sont des divinités ; le Saint béni soit-Il les a créés pour éclairer la terre, comme il est dit : “(…) Or, c’est l’Eternel, ton D.ieu, qui les a donnés en partage à tous les peuples (…)”, lesquels les vénèrent.
Même si vous voyez que le Saint béni soit-Il ne punit ni ne détruit ces divinités, et êtes alors tentés de croire qu’elles auraient un pouvoir, détrompez-vous, car Il laisse ainsi les choses afin de donner à penser aux idolâtres qu’elles sont capables de les secourir, de sorte qu’ils continuent à les servir et qu’Il puisse ainsi leur donner un châtiment.
(Midrach Agada)
Un message personnel
« Je suis l’Eternel, ton D.ieu » (Dévarim 5:6)
Pourquoi les dix Commandements furent-ils énoncés au singulier ? Afin que chacun dise : « J’ai été personnellement sommé. C’est pour moi que la Torah a été donnée, afin que je l’accomplisse », et ne cherche pas, au contraire, à se défiler en prétendant qu’il suffit que les autres s’en chargent.
Autre explication : parce que des individus isolés ont transgressé les dix Commandements :
Mikha transgressa le « anokhi – Je suis l’Eternel, ton D.ieu » par l’idole qu’il construisit ;
Yérovam transgressa le « lo yihyé lékha – tu n’auras pas d’autre D.ieu que Moi » par les deux veaux d’or ;
Le fils de l’Israélite transgressa « lo tissa – tu n’invoqueras pas le Nom de l’Eternel à l’appui du mensonge » ;
Celui qui tailla du bois le Chabbat transgressa le commandement « zakhor – souviens-toi du jour du Chabbat pour le sanctifier » ;
Avchalom transgressa l’interdit de « cabed – honore ton père et ta mère » ;
Yoav transgressa l’interdit « lo tirtsa’h – ne commets pas d’homicide » ;
Amnon transgressa l’interdit « lo tinaf – ne commets pas d’adultère » ;
Akhan transgressa l’interdit « lo tignov – tu ne commettras pas de vol » ;
Tsiva transgressa l’interdit « lo taané – tu ne rendras point contre ton prochain un faux témoignage » ;
A’hav transgressa l’interdit « lo ta’hmod – tu ne convoiteras pas » en jetant son dévolu sur le vignoble de Nabot.
(Psikta Zoutrata)
L’ÉDUCATION
Le Chabbat Na’hamou symbolise, dans notre génération de l’exil et du voilement de la face divine, l’annonce du début du « ben hazemanim », période destinée à s’aérer et à engranger de nouvelles forces à l’approche de la nouvelle année d’étude des talmudé Torah et des Yéchivot, pour les jeunes garçons, ainsi que des Collelim pour les Avrekhim.
Nous devons savoir, en tant que parents, que si ces moments sont perçus comme des moments de vacances et de détente, c’est tout le contraire qui est vrai : il s’agit en fait de la période la plus intense et la plus tendue, pas seulement d’un point de vue technique et financier, mais du point de vue de la responsabilité éducative qu’elle implique pour nous.
Ces moments constituent en quelque sorte le véritable « test » des parents. En effet, pendant ces trois semaines où ils accueillent leurs fils de retour de la Yéchiva, certains défis mettant en danger l’avenir spirituel de ces enfants risquent de surgir. Aussi, celui qui ne se sent pas armé pourra s’adresser à des Rabbanim à même de lui donner des directives brèves et précises sur la manière d’éduquer pendant cette période.
Outre la responsabilité éducative concernant ce qui se passe au sein même du foyer, nous allons également nous pencher sur ce qui se passe à l’extérieur, lorsqu’on quitte la chaleur de la maison, ce refuge protégé, pour l’espace public, et plus particulièrement lorsqu’on se rend dans des sites touristiques, où les conséquences sont bien plus lourdes. Il faut alors réfléchir à l’avance : est-ce que la fréquentation de ces lieux de plaisance et de distraction en vaut la peine au vu des dommages spirituels qu’ils peuvent causer, véritable catastrophe pour l’avenir de notre éducation ?
La protection du regard est le pilier central sur lequel repose l’image spirituelle de chacun d’entre nous. D’après les écrits des Grands en Torah, nous avons appris que le fait de préserver ses yeux et sa bouche a un impact fondamental sur la personnalité de l’homme. On sait à cet égard que le Chla promit à ses élèves que s’ils étaient précautionneux dans ces deux domaines, ils auraient le mérite d’atteindre de très hauts niveaux de sainteté, celle-ci, ainsi que la pureté de l’homme, dépendant essentiellement des organes de la vue et du langage.
A Jérusalem vivait un Tsaddik connu, le Gaon Rabbi Zeev Tsatsik zatsal, surnommé par son entourage « Rabbi Velvel ». Il faisait partie des proches du Gaon Rav Its’hak Zeev de Brisk et se distinguait par sa remarquable crainte du Ciel. Un jour, Rabbi Velvel rapporta aux membres de sa famille le témoignage d’un vieillard qui avait eu le mérite de connaître l’un des élèves de « l’astre de la Gola » – l’auteur du Ktsot Ha’hochen zatsal. En voici la teneur :
« J’ai étudié pendant une certaine période chez mon saint maître, le Ktsot Ha’hochen. A l’issue de celle-ci, alors que je m’apprêtais à regagner ma demeure, je me présentai au Rav pour recevoir sa berakha avant de le quitter.
Il me regarda en silence, puis me prit soudain la main et, la serrant fortement, il se mit à reprendre avec douceur les propos du plus sage des hommes (Kohélèt 11:9) : “Réjouis-toi, jeune homme, dans ton jeune âge ; que ton cœur soit en fête au temps de ton adolescence. Suis librement les tendances de ton esprit et ce qui charme tes yeux (…)”.
A ce moment, le Rav marqua une pause, puis il devint rouge et la suite de la citation jaillit dans un cri, tandis qu’il secouait ma main, toujours prisonnière de la sienne. “(…) Mais sache”, déclama-t-il, “sache… que… D.ieu… t’appellera… en jugement… pour tout cela”. Son visage était semblable à une torche, vision pour le moins bouleversante. »
C’est ainsi que le Ktsot Ha’hochen se séparait de ses disciples. Non pas en leur faisant un long sermon ou en leur présentant une idée brillante, ni en leur donnant une idée de l’étendue de sa sagesse dans le ‘Hochen Michpat ou dans le Moussar. Mais par un « simple » verset du livre de Kohélèt, sans Rachi ni le Midrach…
Les années passèrent depuis ce jour, allait par la suite confier cet élève, mais ce moment resta à jamais gravé dans son esprit, et cette peur, cette crainte de transgresser ne serait-ce que l’ombre d’une faute n’allait plus jamais le quitter. A ses oreilles résonne encore la voix du Rav, une voix qui, semblant venir d’ailleurs, rappelait ce principe fondamental que chacun doit avoir à l’esprit lorsqu’il sort au-dehors : chaque faute a un prix.
Toujours Plus Haut
Le Rav Elyahou Lopian zatsal, maître du Moussar, affirma qu’à condition de le vouloir, les jeunes ba’hourim peuvent parvenir en un court laps de temps à de très hauts niveaux. Ils doivent s’habituer, ajoutait-il, à être précautionneux dans trois domaines – le regard, la parole et les pensées –, à exercer là-dessus un contrôle strict.
De fait, concédait-il, tous les débuts sont difficiles, mais il faut savoir qu’en toute chose, l’habitude est synonyme de maîtrise.