'Houkat 1er Juillet 2017 ז סיון תשע"ז |
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Un service divin parfait
Rabbi David Hanania Pinto
« Voici la règle, lorsqu’il se trouve un mort dans une tente : quiconque entre dans cette tente, et tout ce qu’elle renferme, sera impur durant sept jours. » (Bamidbar 19, 14)
Nos Sages (Brakhot 63b) ont interprété ce verset en expliquant que la « tente » se réfère nécessairement à la Torah, comme il est dit (Béréchit 25,27) : « Yaakov, homme inoffensif, vécut sous la tente ». On en déduit que l’homme doit aspirer toute sa vie à investir toutes ses forces dans la Torah. Si l’on inverse les lettres du terme tam (inoffensif), on obtient le mot mèt (mort) ; cela nous enseigne que Yaakov Avinou s’est « tué à la tâche », à savoir qu’il a investi toutes ses forces dans la Torah, et c’est ainsi qu’il a réussi à devenir un pilier de Torah.
Retenons également que si l’on peut se contenter de demi-mesure dans divers domaines, lorsqu’il s’agit de l’étude de la Torah et de l’accomplissement des Mitsvot, cette notion n’est pas concevable : il faut accomplir les propos de la Torah tels qu’ils sont écrits, à la lettre, en visant la perfection. Lorsqu’il y a une faille dans le service divin ou dans l’accomplissement des commandements, elle peut provoquer une dégradation chez l’homme, lui faisant perdre ses acquis. C’est pourquoi la Torah a ordonné à l’homme de consacrer ses forces à l’étude de la sainte Torah et à l’accomplir dans son intégralité, au point de « se tuer à la tâche » pour la Torah.
On pourrait penser que le concept de demi-mesure ne peut s’appliquer à la mort, car l’homme est soi vivant soi mort, et tant qu’un souffle de vie vibre en lui, il a l’obligation d’étudier la Torah. C’est ce qu’écrit le Rambam (Talmud Torah 1, 8) : même un malade en danger n’est pas dispensé de l’obligation d’étudier la Torah, car tant que l’homme vit sur terre, le mauvais penchant est présent en lui et risque de le faire trébucher – ce n’est que lorsque l’homme quitte ce monde que le yétser hara l’abandonne. C’est pourquoi l’homme doit continuer à étudier la Torah même s’il est malade, pour que son mauvais penchant n’en vienne pas à le dominer. Je me souviens d’une fois où je souffrais d’une forte fièvre. Malgré cela, je ne me suis pas dispensé d’étudier la Torah et j’ai continué à l’étudier avec autant d’enthousiasme et de constance, jusqu’à ce qu’avec l’aide de D.ieu, je réussisse à trouver un grand ‘hidouch, répondant à une question difficile que je n’avais pas réussi à résoudre jusque-là. Nous constatons que même un malade a la possibilité d’étudier la Torah et que s’il s’efforce de réaliser cette obligation, ses efforts sont couronnés de succès.
Ainsi, le seul moyen d’échapper à l’emprise du mauvais penchant est d’étudier la sainte Torah, et lorsque l’homme ne se « tue » pas pour l’étude de la Torah, il est dénué de vitalité, tel un mort. L’inverse est vrai et, de même que le mort ne peut fauter puisque le mauvais penchant ne se trouve plus en lui, un homme qui « se tue » pour étudier la Torah est à l’abri de la faute, puisque la Torah le protège et le sauve du mauvais penchant.
J’ai pensé à Rabbi Akiva qui, à l’âge de quarante ans, a commencé à étudier la Torah en partant de zéro. Sans tenir compte de son honneur ou de son statut, il se mit à étudier avec les tout jeunes enfants, l’essentiel était de pouvoir s’élever dans la Torah.
Mais qu’est-ce qui poussa Rabbi Akiva à prendre un tournant aussi majeur dans sa vie ? Voyant une pierre creusée par une lente érosion, il déclara : « De même que l’eau a usé la pierre et y a laissé son empreinte, de même l’eau de la Torah peut faire son chemin dans mon cœur de pierre et y laisser l’empreinte d’une Torah d’eau vive. » (Avot DéRabbi Nathan 6, 2) On pourrait s’interroger : ce n’était certainement pas la première fois que Rabbi Akiva observait ce phénomène, pourquoi est-ce à quarante ans seulement qu’il comprit cette leçon ? Il semblerait que lorsque Rabbi Akiva vit les sacrifices consentis par Ra’hel, qui était prête à quitter le luxe de la maison de son père, Calva Savoua, pour l’épouser, il comprit que la Torah qu’elle lui demandait d’étudier devait contenir la vérité. En fait, Ra’hel avait perçu le fort potentiel de Rabbi Akiva, et pressenti qu’il allait devenir un grand érudit, et c’est pourquoi elle accepta de renoncer à toute la richesse et aux honneurs au profit de la richesse spirituelle de la Torah.
Lorsque Rabbi Akiva vit les sacrifices de son épouse Ra’hel, il ouvrit les yeux et jeta un autre regard sur le monde ; il pouvait dès lors tirer leçon de la vision des pierres et de l’eau. Celle-ci enclencha en lui de profonds changements, jusqu’à ce qu’il s’élève et devienne l’un des plus grands Maîtres de notre peuple, qui forma de nombreux élèves.
Comme nous l’avons déjà mentionné, le concept d’appliquer la Torah à moitié n’existe pas, mais il faut l’accomplir en visant la perfection, et Rabbi Akiva, qui le savait, se sacrifia pour la sainte Torah et s’exila de son foyer pendant vingt-quatre ans, dans le but d’acquérir la Torah dans sa perfection.
PAROLES DE TSADIKKIM
On ne divorce pas !
« Toute la maison d’Israël le pleura [Aharon] pendant trente jours » (Bamidbar 20, 29)
Les Sages relèvent qu’il a été dit, au sujet d’Aharon, que « toute la maison d’Israël » le pleura, ce qui n’a pas été le cas lors de la mort de Moché Rabbénou, où « les enfants d’Israël pleurèrent Moché » (Dévarim 34,8). Pourquoi n’est-il pas dit « toute la maison d’Israël », comme pour Aharon ? Car à la disparition de Moché, seuls les hommes pleurèrent sa perte, tandis que pour Aharon, qui recherchait la paix et instaurait l’amour entre l’homme et son prochain, entre une femme et son époux, « toute la maison d’Israël » pleura sa disparition, les hommes comme les femmes.
Le notable Yossef Charachevsky, un proche du gaon Rabbi Méir Sim’ha de Dvinsk (auteur du Or Saméa’h), relate qu’un jour, entrant à l’improviste chez Rabbi Méir Sim’ha, il assista à une scène incroyable : le gadol hador dansait en cercle au milieu de la pièce avec un mari, sa femme et un jeune enfant. Le Rav tenait d’une main celle du mari, et de l’autre, celle de l’enfant, tandis que le mari et l’enfant tenaient la main de la femme…
Reb Yossef ne sut que faire, il était ébahi par cette scène inoubliable et déroutante.
Une fois la danse terminée et la famille partie, Rabbi Méir Sim’ha se mit à lui expliquer les événements étonnants pour dissiper l’étonnement de Reb Yossef :
Le mari et sa femme étaient venus la veille chez le Rav pour recevoir un guet (acte de divorce). Le mari présenta ses arguments et la femme de son côté exposa également les siens. Le Rav Méir Sim’ha leur demanda alors : « Avez-vous des enfants ? »
Et le couple de répondre : « Oui, nous avons un fils. »
Rabbi Méir Sim’ha revint à la charge : « Chez qui vivra l’enfant après que le guet sera donné, chez son père ou sa mère ? » Mais avant de leur laisser le temps de répondre, il répondit lui-même : « Revenez chez moi demain avec l’enfant »…
Le lendemain, mari et femme réapparurent, accompagnés par un jeune enfant. Le Rav Méir Sim’ha prit l’enfant, l’assit sur ses genoux, et alors que des larmes coulaient sur ses joues, il s’adressa à lui : « Mon petit enfant, tes parents ont décidé de faire de toi à partir d’aujourd’hui un orphelin vivant, sans papa ni maman. S’ils font de toi un orphelin, s’il te plaît, ne traîne pas dans les rues, mais viens chez moi, et tu seras mon enfant… »
L’enfant se mit également à pleurer, suivi de peu par sa maman qui se mit à verser des larmes amères. Le papa se joignit aux pleurs, puis les parents s’écrièrent ensemble : « Nous ne divorçons pas ! Nous ne divorçons pas ! »
« Et alors, conclut le Rav Méir Sim’ha, nous avons tous commencé à danser, tant nous étions joyeux ! »
GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA
Émissaires d’une mitsva
Lors d’un séjour à Miami chez le fils de M. Amram Benhamou zal, je reçus comme à mon habitude le public.
Un couple se présenta. Prenant la parole la première, la femme me rappela que l’année précédente, je leur avais donné une brakha pour qu’ils aient un fils, et grâce à D.ieu, ils avaient été exaucés. À présent, ils attendaient la venue d’un autre enfant, et voulaient donc me remercier pour mes bénédictions en m’offrant une belle bouteille de whisky.
J’appréciai d’autant plus le geste que j’avais eu l’intention d’acheter cette boisson en l’honneur de Chabbat. J’avais même demandé à mon accompagnateur de me rappeler d’en acheter, en route pour l’aéroport. Or, voilà que, du Ciel, on m’envoyait cette bouteille sans que j’eusse à fournir le moindre effort. Je les remerciai pour le présent, mais pour une raison obscure, j’ajoutai : « Vous allez prochainement rentrer à Paris, où vous habitez. Reprenez donc cette bouteille et vous me la rendrez là-bas. »
Étonnés par cette demande, ils s’exécutèrent cependant, conscients d’être ainsi, en quelque sorte, émissaires d’une mitsva, puisque cette bouteille allait être utilisée en l’honneur du Chabbat. C’est ainsi qu’ils montèrent à bord de leur avion, et la femme confia alors à son mari : « Par ce mérite, si D.ieu veut, tout se passera bien. »
Au bout de deux heures de vol, l’avion rencontra un problème et se mit à perdre de l’altitude à une vitesse vertigineuse.
À bord, la panique la plus totale régnait, nombre de passagers avaient été blessés et certains avaient perdu connaissance à cause du manque d’oxygène.
Au souvenir de la bouteille confiée à leur garde, ils restèrent calmes, encouragés par la pensée que « les émissaires d’une mitsva ne subissent aucun préjudice ».
Après quelques instants de grande tension au cours desquels il sembla que l’avion allait s’écraser, le pilote parvint par miracle à en reprendre contrôle et le stabiliser. C’est ainsi que, grâce à D.ieu, ils arrivèrent à Paris sains et saufs.
Le lendemain, à l’aéroport, je demandai à mon accompagnateur d’acheter une bouteille de whisky pour Chabbat. « Mais pourquoi, hier, ai-je refusé celle qu’on m’offrait ? me suis-je alors demandé. Je ne la récupérerai que la semaine prochaine ! »
Quand j’arrivai à Paris, j’appris le miracle dont ce couple avait bénéficié. C’était apparemment le mérite de la mission-mitsva que je leur avais confiée qui les avait sauvés, et c’est pourquoi, du Ciel, on m’avait poussé à leur remettre cette bouteille pour le voyage.
CHEMIRAT HALACHONE
Même si on n’en a pas l’intention
L’interdit de colportage s’applique également lorsqu’on n’a pas l’intention d’inspirer à notre interlocuteur de la haine à l’égard de celui qui a parlé ou agi contre lui, et même si l’on pense que celui-ci a agi ou parlé conformément à la Loi.
Par exemple, si Chimon fait des remontrances à Réouven pour avoir parlé de lui ou lui avoir fait telle ou telle chose, et que Réouven se justifie en expliquant qu’il était dans son droit, puisque Yéhouda a rapporté les mêmes propos sur lui, ceci risque de susciter la haine de Chimon à l’égard de Yéhouda, et Réouven entre dans la catégorie des colporteurs.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « Il y avait alors un vaillant guerrier, Yifta’h de Guilad (…) » (Choftim 11)
Lien avec la paracha : Dans la haftara, il est question des guerres d’Israël contre le peuple d’Amon et de la terre conquise par Israël de Si’hon, qui l’avait conquise d’Amon. Cela constitue l’un des thèmes de la paracha où il est relaté qu’Israël n’a pas mené la guerre contre le peuple d’Amon, mais a combattu Si’hon et conquis la terre qui lui appartenait, qu’il avait lui-même conquise d’Amon.
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
Rabbi David Hanania Pinto
L’examen de conscience des dirigeants
« Car ‘Hechbon était devenue la ville de Si’hon, roi des Amoréens, celui-ci ayant fait la guerre au précédent roi de Moav, et lui ayant pris tout son territoire jusqu’à l’Arnon. » (Bamidbar 21, 26)
Nos Sages s’interrogent (Baba Batra 78b) : pourquoi la Torah s’est-elle donné la peine de préciser que ‘Hechbon se trouvait d’abord sous le contrôle du premier roi de Moav, jusqu’à l’arrivée de Si’hon, roi des Amoréens, qui la lui confisqua ? On sait que la Torah est concise dans le choix de ses mots, et seules des informations utiles pour les générations futures et qui renferment une leçon de morale pour tout le peuple ont été consignées. En conséquence, quelle est la raison pour laquelle la Torah désirait que nous soyons informés de l’historique de la ville de ‘Hechbon, et comment le roi des Amoréens l’avait-il conquise des mains du premier roi de Moav ?
Nos Sages nous expliquent que la ville de ‘Hechbon fait allusion au « ‘hechbon néfech », l’examen de conscience que l’homme est tenu de faire en privé. Si nous y réfléchissons, nous parviendrons à la conclusion que la plupart des actes répréhensibles que nous faisons, nous les effectuons en sachant clairement qu’ils sont interdits et que ce sont des fautes ; et pourtant, nous sommes tentés et poussés par notre penchant à accomplir ces actes. D’où notre étonnement : si nous savons pertinemment qu’un acte est interdit et inconvenant, pourquoi continuons-nous à le faire malgré notre conscience ? Si un enfant sait que toucher le feu peut brûler ses doigts, entrera-t-il intentionnellement en contact avec une flamme ? S’il possède du discernement et est responsable de ses actes, il gardera ses distances avec le feu et se protégera, à plus forte raison s’il s’est déjà brûlé suite à un tel contact.
L’explication, c’est que notre comportement ressemble à celui d’un chien qui piétine sa vomissure, car nous ne prenons pas la peine de procéder à un examen de conscience. Si nous prenions la peine et le temps à la fin de chaque journée de passer en revue les événements des heures précédentes, il ne fait aucun doute que nous serions beaucoup plus prudents et méfiants vis-à-vis des fautes. Mais lorsque la vie ressemble à un marathon, sans pause pour méditer et approfondir nos actes, il nous est impossible de connaître la réalité authentique de notre vie, ni de réaliser à quel point la fin des fauteurs est mauvaise.
À nous de procéder à un examen de conscience et d’ancrer clairement dans nos esprits qu’au final, toute faute est sanctionnée, et c’est pourquoi il faut revoir nos actes un par un, pour éviter, que D.ieu préserve, de faillir.
Ajoutons également que le nom de « Si’hon » fait allusion au mot si’ha (conversation) ; cela nous enseigne qu’une discussion vaine, qui n’a ni but ni visée spirituelle, peut faire dégénérer l’homme progressivement. Nos sages affirment (Sota 42a) que la catégorie des moqueurs, des menteurs, des flatteurs et des médisants n’accueillent pas la Présence divine, à savoir que ces personnes dont les conversations sont sans intérêt, dénuées de réflexion et de crainte divine, ressemblent à un feu dévorant. Si l’on veut préserver son âme, on prendra ses distances vis-à-vis d’eux.
À MÉDITER
Ce n’était pas la première fois que le chauffeur dévoué avait le mérite de conduire le Tsaddik Rabbi Israël Abou’hatsira, Baba Salé, en divers lieux du pays pour se répandre en prières sur les tombes des Tsaddikim.
Le vacarme d’un moteur de véhicule se fit entendre au loin et s’approcha de la voiture où était assis le Tsaddik. Par la fenêtre, il aperçut un camion portant une lourde charge, des cartons d’oranges fraîches.
« Arrête-toi », ordonna le Tsaddik à son chauffeur.
Le chauffeur arrêta son véhicule, et s’approcha pour écouter la demande de son maître : « Adresse-toi au conducteur du camion devant nous et demande-lui une orange pour moi. »
Le chauffeur fut très étonné, il savait très bien que les plaisirs de ce monde n’avaient aucune place dans le monde austère et secret du Tsaddik, mais il s’empressa de faire signe au chauffeur du camion de s’arrêter pour lui parler.
Un jeune homme robuste, basané et torse nu descendit du camion.
« Que veux-tu ? demanda-t-il d’une voix forte.
– Ici, dans ma voiture se trouve un grand Tsaddik… Il te demande de bien vouloir lui donner une orange de la récolte qui se trouve dans le camion, expliqua le chauffeur au jeune homme devant lui.
– Non, répondit fermement le chauffeur. Il n’y a pas de cadeau – seul celui qui paie reçoit de la marchandise ! »
Le chauffeur du Tsaddik retourna vers sa voiture en silence.
Une petite heure plus tard, la voiture du Rabbi arriva au carrefour suivant, où des policiers bloquaient la route.
« Que s’est-il passé ? s’informa le chauffeur.
– Il y a quelques minutes, un camion rempli d’oranges a foncé à cette intersection, le conducteur a perdu le contrôle de son véhicule et a heurté un pilier électrique central, la cabine à l’avant du camion a été complètement écrasée et à présent les forces de secours tentent péniblement d’extraire son corps du véhicule, » expliqua le policier.
Le chauffeur était stupéfait. Il se tourna vers le Tsaddik pour lui demander une explication de la scène dont ils avaient été témoins une heure plus tôt.
Baba Salé s’expliqua alors : « Lorsque le camion passa devant nous, je vis l’ange de la mort, l’épée dégainée au-dessus du camion, et je compris que l’attribut de Rigueur avait été lancé contre le chauffeur de camion, prêt à ravir son âme. Je voulus le sauver, c’est pourquoi je t’ordonnai de lui demander une orange ; j’aurais récité avec l’intention appropriée la bénédiction boré péri haèts, le chauffeur aurait répondu Amen avec kavana, et le mérite d’avoir répondu Amen lui aurait permis d’être sauvé du décret qui le visait dans les Cieux. »
« Mais ce chauffeur n’a pas accepté ma proposition. Le mérite lui a échappé, et tu vois ce qui lui est arrivé », conclut le Tsaddik à voix basse.
DES HOMMES DE FOI
Un des quatre fils de Rabbi ‘Haïm était le Tsaddik Rabbi Yossef. C’était un homme intègre et droit, qui étudiait constamment la Torah et ne s’intéressait pas aux questions de ce monde. Sa femme gérait tous les besoins du foyer.
La situation financière du couple n’était pas reluisante. Rabbi Yossef appliquait pour lui-même les termes du principe : « Du pain rassis trempé dans du sel tu mangeras, de l’eau en quantité mesurée tu boiras et dans la peine tu vivras ». Son épouse vertueuse ne se plaignit jamais, grâce à l’amour de la Torah qu’elle portait en elle. Elle permit à son mari de s’adonner toute sa vie à l’étude, en restant complètement détaché des vanités de ce monde.
Le mois de Nissan était arrivé et le foyer de Rabbi Yossef était vide. Il n’y avait ni matsot, ni vin, ni fruits, ni légumes, ni même vêtements ou chaussures pour les enfants. L’épouse s’approcha de son mari et lui adressa une modeste requête :
« La situation devient difficile, va s’il te plaît sur la tombe de ton saint père et prie pour toi et pour la famille, que nous ayons des matsot et du vin, de la viande, des vêtements et des chaussures pour les enfants, un costume pour toi et une robe pour moi. Note tout afin de ne rien oublier. »
Le lendemain matin, comme le lui avait demandé son épouse, il se leva de bonne heure et, immédiatement après la prière, partit au cimetière, emportant avec lui un livre de Téhilim. Arrivé près de la tombe de son père, il y déposa la liste et lut des chapitres de Téhilim qui commençaient par les lettres composant le nom du Tsaddik.
Puis il rentra à la maison et dit à sa femme qu’il avait agi conformément à sa demande. Il ne leur restait plus qu’à attendre la délivrance qui ne tarderait pas à arriver.
La même nuit, son père, Rabbi ‘Haïm, lui apparut en rêve et lui annonça que le secours était imminent.
« Demain, lui annonça-t-il, tiens-toi près de la fenêtre. Un commerçant inconnu va venir et t’apporter tout ce que tu as demandé. La raison de sa générosité est que, durant sa traversée de la mer, une tempête a éclaté et son navire a presque sombré. Dans ce moment de détresse, il s’est mis à prier : “D.ieu de Rabbi ‘Haïm, exauce-moi” et il a promis que s’il s’en sortait sain et sauf, il donnerait la moitié de ses biens à ma famille. Il en a réchappé et demain, il va accomplir son vœu. »
Au matin, Rabbi Yossef se hâta d’obéir à l’ordre de son père et se posta près de la fenêtre. Exactement comme son père l’avait prévu, un inconnu s’approcha et lui demanda s’il faisait partie de la famille du Tsaddik Rabbi ‘Haïm Pinto.
« Oui, je suis son fils », répondit-il.
Le commerçant lui raconta son aventure et son sauvetage miraculeux après avoir prononcé sa promesse.
« Je suis prêt maintenant à accomplir mon serment, dit-il à Rabbi Yossef, et à te donner la moitié des biens qui se trouvaient sur le bateau pour remercier D.ieu de m’avoir épargné d’une mort certaine. »
Rabbi Yossef écouta son histoire, qui lui était déjà familière, et lui dit : « Sache que je ne prendrai que ce qui m’est nécessaire pour la fête qui approche. »
Il lui fit l’énoncé détaillé de tous ses besoins. Le commerçant lui promit que, sitôt arrivé chez lui, il enverrait son serviteur lui livrer tout cela.
La joie fut au rendez-vous ce Pessa’h dans le foyer de Rabbi Yossef. De temps à autre, son épouse lui rappelait :
« Tu vois, tu as bien fait de m’écouter et d’aller prier sur la tombe de ton père… »
EN PERSPECTIVE
Pourquoi le ‘Hafets ‘Haïm était-il affligé ?
Un jour, une énorme explosion avait eu lieu quelque part qui, grâce à D.ieu, n’avait pas fait de victimes. Seules des vitres s’étaient brisées en conséquence de la déflagration.
Le ‘Hafets ‘Haïm se mit à remercier Hachem tout d’abord parce qu’on ne déplorait ni morts, ni blessés. Le ‘Hafets ‘Haïm exprima son désarroi pour les pertes financières subies par ses frères juifs : « Des vitres ont certainement été brisées dans des maisons juives, s’exprima-t-il avec regret, et il y a certainement parmi eux des pauvres, qui n’ont pas les moyens de remplacer ces vitres. Ils boucheront les trous avec des planches en bois. »
Le Rav expliqua ensuite pourquoi il était tellement peiné :
« Les planches de bois cacheront à coup sûr le soleil, et il fera sombre dans la maison, situation qui peut engendrer des tensions au sein du couple. Nos Sages ont affirmé que l’allumage des bougies du Chabbath est une Mitsva qui contribue à l’entente conjugale, car il est triste de s’assoir dans l’obscurité [comme le rapporte la Guémara Chabbath 23b]. Lorsque l’obscurité règne à la maison, on se cogne et on tombe, l’atmosphère est triste, on perd sa patience, on se plaint, et des disputes peuvent s’ensuivre… »