Vayéhi 30 Décembre 2017 י"ב טבת תשע"ח |
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La supériorité d’un acte accompli par obligation
Rabbi David Hanania Pinto
« Yaakov vécut, dans le pays d’Egypte, dix-sept ans. Les jours de Yaakov, les années de sa vie, furent de cent quarante-sept ans. » (Béréchit 47, 28)
Nos Sages, de mémoire bénie, affirment (Béréchit Rabba 86, 2) que tout ce qui arriva à Yossef – depuis ses rêves, jusqu’à son arrivée en Egypte, en passant par le moment où il fut jeté dans le puits et où on le vendit à des Ismaélites – avait pour but de mener à la venue de Yaakov en Egypte. Autrement dit, ce dernier événement était le but, alors que toutes les péripéties subies par Yossef ne représentaient qu’un moyen pour parvenir à cette fin. Il nous reste donc à comprendre pourquoi le Saint béni soit-Il désirait que Yaakov descende en Egypte, plutôt que de lui accorder une mort sereine en Terre d’Israël, au même titre qu’Avraham et qu’Its’hak. En effet, si la descente du patriarche en Egypte avait elle-même eu pour but l’asservissement égyptien, l’Eternel aurait tout aussi bien pu faire en sorte qu’il reste en terre d’Israël, et que seuls ses descendants se rendent en Egypte, poussés par une famine. Par conséquent, si le Maître du monde a choisi de provoquer une famine en Israël à l’époque de Yaakov et a agencé tous les événements menant à la vente de Yossef, nous en déduisons que le séjour de Yaakov en Egypte était nécessairement important en soi.
Proposons l’explication suivante. De même qu’à l’époque de l’empire grec, on chercha à empêcher le peuple juif de pratiquer sa religion et d’étudier la Torah, de même, au temps de l’exil égyptien, on essaya d’assimiler les enfants d’Israël, de les corrompre et de leur faire perdre leur identité juive. Toutefois, alors que nombreux sont les Juifs qui se laissèrent assimiler à la culture grecque – à l’exception d’une petite minorité d’Hasmonéens, par le biais desquels l’Eternel nous apporta le salut –, les Egyptiens, quant à eux, ne parvinrent pas à assimiler complètement les enfants d’Israël. En effet, même si ces derniers pratiquaient l’idolâtrie, ils avaient néanmoins préservé leur identité et s’étaient refusé à suivre les habitudes des Egyptiens, et ce, grâce à trois points d’ancrage dans leur tradition, à savoir les noms, les habitudes vestimentaires, et la langue.
Pourtant, nous pouvons nous demander d’où les enfants d’Israël ont puisé les forces nécessaires pour préserver leur identité et empêcher leur flamme de s’éteindre, alors qu’ils se trouvaient dans un pays corrompu et que la Torah n’avait pas encore été donnée au monde. A priori, en l’absence de Torah, ils n’avaient aucune chance de se mettre à l’abri de l’assimilation.
Il semble que les enfants d’Israël aient puisé cette force dans la lumière que Yaakov avait diffusée en leur sein, durant les années de son séjour en Egypte. Le peuple juif n’avait certes pas encore reçu la Torah, mais les saints patriarches, ainsi que les tribus, l’avaient reçue en héritage depuis Adam, et c’est cette Torah qu’ils étudiaient en terre de Gochen. L’asservissement égyptien n’a pas commencé avant que le dernier des chefs de tribus ne meure ; néanmoins, ce sont ces lumières et étincelles de sainteté, que Yaakov et ses enfants ont diffusées par leur étude, qui ont transmis au peuple juif la force de préserver son identité et de résister à l’assimilation égyptienne.
Nous comprenons, à présent, pourquoi le Saint béni soit-Il désirait que Yaakov descende en Egypte : Il savait que sans la lumière de sainteté générée par l’étude de la Torah du patriarche, le peuple juif ne serait pas en mesure d’affronter l’opacité intense de cet exil. En effet, rationnellement, il n’était pas possible que les enfants d’Israël parviennent à se fixer des limites, alors qu’ils ne détenaient pas la Torah. Or, l’asservissement égyptien avait pour but de les purifier, de les rendre aptes à recevoir la Torah et à devenir le peuple de prédilection. C’est pourquoi Dieu a jugé nécessaire d’occasionner la venue de Yaakov en Egypte, afin que son étude puisse protéger ses enfants de l’assimilation complète. Tel était le but des Yéchivot qu’il a établies en terre de Gochen, où la tribu de Lévi – de laquelle il est dit : « Ils enseigneront Tes lois à Yaakov » (Dévarim 33, 10) – s’est consacrée à l’étude de la Torah.
À l’époque de l’exil égyptien, les lumières de la Torah n’étaient pas encore descendues dans le monde – elles ne furent efficientes qu’au moment du don de la Torah, lorsque le Tout-Puissant se révéla au mont Sinaï. C’est pourquoi l’étude de Yaakov possédait un caractère si précieux aux yeux de l’Eternel, car étudier la Torah sans percevoir ses lumières représentait une tâche extrêmement difficile et exigeait un sacrifice personnel remarquable.
À l’époque de l’exil égyptien, notre patriarche Yaakov et ses enfants n’avaient pas l’obligation d’étudier la Torah ; ils l’ont fait, stimulés par l’amour de Dieu qui brûlait en eux. Pour cette raison, ils n’étaient pas confrontés au mauvais penchant, lequel est descendu dans le monde en même temps que la Torah. Par contre, à l’époque de l’empire grec, la Torah avait déjà été donnée au monde et, simultanément, le mauvais penchant était lui aussi présent, en force, tentant par tous les moyens de nuire à la Torah. Le petit groupe de Juifs hasmonéens, qui parvint à maîtriser les attaques du mauvais penchant et à faire face à l’opacité de la culture hellénistique dominante, donna au peuple juif le mérite d’accéder au salut divin. Ainsi donc, la fête de ’Hanoukka, qui commémore ce miracle, mérite bien d’être célébrée jusqu’à la fin des générations, en vertu du principe : « Celui qui accomplit une mitsva par obligation est plus grand que celui qui en accomplit une sans y être contraint. »
GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA
Le chapeau arrivé à la vitesse d’un TGV
Le fait suivant constitue en soi une grande leçon de foi et de confiance en D.ieu, dans l’esprit du verset « Ainsi se confient en Toi ceux qui connaissent Ton Nom, car Tu ne délaisses pas, Eternel, ceux qui Te recherchent » (Téhilim 9, 11).
Un soir, à la clôture de Chabbat, je devais prendre le train en direction de Paris, puis un deuxième train pour l’aéroport, où j’avais réservé une place à bord d’un avion à destination du Brésil. J’y étais attendu pour célébrer une cérémonie de mariage. Le seul train qui reliait ce soir-là Lyon à la capitale partait environ vingt minutes après la sortie de Chabbat. Aussitôt après Havdala, je m’empressai de sortir pour être sur le quai à l’heure, accompagné de Rav Elbaz et de son frère.
Une fois arrivé, je me rendis compte, à ma grande déconvenue, que j’avais pris par mégarde le chapeau de mon fils, alors âgé de treize ans, à la place du mien. Évidemment, il ne m’allait pas et si je le portais, mon allure ridicule risquait de provoquer une profanation du Nom divin. Apparemment, le Ciel voulait m’empêcher d’atteindre ma destination, fis-je remarquer, contrarié, à Rav Elbaz (des années plus tard, nous allions marier ensemble nos enfants).
J’avais d’autant plus de peine que les Juifs qui célébraient ce mariage s’étaient engagés à le faire conformément à nos traditions à la condition que j’y préside, sans quoi ils risquaient de prendre un rabbin non pratiquant. Si je ratais si stupidement ce train, la célébration risquait au contraire de ne pas se dérouler selon les normes de la Halakha.
Le frère de Rav Elbaz me dit alors : « Mais, Rabbi David, ne nous enseignez-vous pas nuit et jour l’importance de raffermir sa foi en Dieu ? Plaçons donc maintenant notre confiance en Lui et votre chapeau vous parviendra à temps ! » J’objectai : « Mais le temps presse, et d’ici une minute, le TGV, toujours à l’heure, va arriver ! »
Rav Elbaz insista malgré tout pour que je téléphone chez moi et demande qu’on m’apporte vite mon chapeau. Pas très convaincu de l’efficacité de ce conseil, je le suivis néanmoins. Si j’attendais qu’on me le fasse parvenir, je raterais, en toute logique, le train, et ce serait peine perdue.
Comme pour confirmer cette pensée, celui-ci entra en gare. Rav Elbaz, calme et confiant, ne semblait pas le moins du monde perturbé par cette vision. Incroyable mais vrai : le TGV s’attarda un quart d’heure sur le quai, exactement le temps que mon chapeau me parvienne ! Je m’en emparai à la hâte, sautai dans le train, et les portes se fermèrent derrière moi…
Jusqu’à ce jour, j’ignore pour quelle raison le train le plus précis de France est parti avec un retard d’un quart d’heure. Mais, ce qui m’impressionna avant tout, c’est la pureté de la foi d’un Juif, qui était convaincu que le Maître du monde Se soucierait de me faire parvenir mon chapeau à temps et me permettrait d’atteindre ma destination sans embûche.
PAROLES DE TSADDIKIM
« Que la Divinité dont mes pères ont suivi les voies (…) » (Béréchit 48, 15)
Dans son ouvrage Na’hal Eliahou, le Rav Diskin chelita cite l’explication du Gaon de Vilna sur le Choul’han Aroukh (Ora’h ‘Haïm, 1). Le Rama y apporte les paroles du Rambam dans son Moré Névoukhim : « “Je fixe constamment mes regards sur le Seigneur” – c’est un grand principe dans la Torah et dans les niveaux atteints par les justes, qui marchent devant D.ieu. »
« Les niveaux atteints par les justes » – comme il est dit : « Noa’h fut un homme juste, irréprochable, entre ses contemporains ; il se conduisit selon D.ieu » ; de même au sujet de ‘Hanokh, il est écrit : « ‘Hanokh se conduisit selon D.ieu », et à propos des patriarches : « la Divinité dont mes pères ont suivi les voies ». Et le Gaon de conclure : c’est en cela que consiste toute la grandeur des justes.
Quoi de plus clair ? Désirez-vous savoir qui est un juste ? Celui qui se conduit toujours selon l’Eternel et qui a continuellement conscience de Son omniprésence.
La grandeur des patriarches était qu’ils composèrent le char divin, c’est-à-dire ne détournèrent jamais leur esprit, ne serait-ce qu’un instant, du Créateur. A tout moment et en toute circonstance, ils percevaient l’Eternel face à eux.
Comment donc parvenir à un tel niveau ?
Le ‘Hazon Ich zatsal indiqua une fois à un ba’hour Yéchiva, qui était un habitué de sa maison, la manière dont nous pouvons créer un lien perpétuel avec le Saint béni soit-Il. « Habitue-toi, lui dit-il, à Lui adresser toute demande, petite comme grande. Pour toute chose, tourne-toi vers Lui et sollicite Son aide, sans oublier de Le remercier. Par ce biais, s’ancrera en toi la conscience que tu te tiens constamment devant l’Eternel et que tu dépends tout le temps de Lui. En particulier, il est important de Le solliciter pour des petites choses, pour lesquelles on a malheureusement tendance à penser pouvoir s’arranger tout seul. »
On raconte que ses ‘hassidim ont une fois entendu Rabbi Pin’has de Koritz zatsal demander, à la fin de la Chemoné Esré [où on peut insérer des requêtes personnelles], que leur aide ménagère ne les quitte pas. Ils pensèrent qu’il voulait faire allusion à de profondes idées ésotériques, aussi lui posèrent-ils la question. Sa réponse ne manqua de les surprendre : leur aide ménagère avait l’intention de cesser son travail, juste au moment où sa femme ne se sentait pas bien, aussi demandait-il à l’Eternel de faire en sorte que cette affaire s’arrange pour le mieux.
Les ‘hassidim, médusés, insistèrent : présente-t-on une requête si anodine dans la Amida ? Et leur Rav de répondre : « C’est justement pour cela que cette prière a été instituée, afin que nous puissions tout y demander, même les plus petites choses ! »
Imaginons un grand Rav, qui a un jeune enfant dont toutes les demandes ne sont que d’ordre spirituel. Quand il a besoin d’un ‘houmach ou d’un sidour, il lui demande de lui en acheter. De même, quand il en ressent le besoin, il demande à son père de l’orienter dans la Torah et la crainte du Ciel. Mais il n’ose pas lui demander de sucreries. Il va sans dire que cet enfant n’a pas une relation saine avec son père ! Celle-ci s’exprime par la possibilité qu’a l’enfant de réclamer même ce type de choses. Or, il en est de même concernant notre lien avec notre Père céleste : il s’agit de cheminer continuellement avec Lui, de se tourner à tout instant vers Lui, et pas uniquement au moment de la prière.
CHEMIRAT HALACHONE
Une simple remarque
Il existe une simple remarque sur laquelle plusieurs personnes trébuchent malheureusement. Par exemple, lorsque des gens sont considérés dans une ville comme des pauvres, auxquels on a l’obligation de donner de la tsédaka, si quelqu’un affirme qu’ils ne sont pas réellement pauvres mais font mine de l’être pour tromper les gens, en conséquence, un grand nombre d’entre eux arrêteront de les soutenir comme ils en avaient l’habitude.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « Les jours de David approchant de leur fin (…) » (Mélakhim I 2).
Lien avec la paracha : dans la haftara, est relaté le décès du roi David, qui dicta ses dernières volontés à son fils Chlomo, et dans la paracha, est rapportée la mort de Yaakov et ses dernières volontés à son fils Yossef.
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
Rabbi David Hanania Pinto
Menaché et Ephraïm : deux tribus à part entière
« Et maintenant, tes deux fils, qui te sont nés au pays d’Egypte avant que je vienne auprès de toi en Egypte, sont miens ; Ephraïm et Menaché seront pour moi comme Ruben et Siméon. » (Béréchit 48, 5)
Yossef mérita que ses enfants, Menaché et Ephraïm, soient considérés comme deux tribus à part entière. Tentons de comprendre ce qui a valu à Yossef ce mérite, que n’ont pas eu ses frères.
C’est que Menaché et Ephraïm détenaient un remarquable mérite : celui de leur ferme résistance à l’assimilation. En effet, ces enfants, qui ont grandi en Egypte, siège de l’idolâtrie et de la débauche, sont malgré tout parvenus à préserver leur identité juive et à rester attachés à la sainte Torah. Les autres tribus, quant à elles, n’étaient pas confrontées à cette épreuve : elles ont grandi avec leurs familles en terre de Canaan, sous l’influence de Yaakov, qui leur enseignait la Torah et leur transmettait les valeurs spirituelles. D’où le mérite exceptionnel de Menaché et d’Ephraïm, qui étudiaient la Torah et maîtrisaient la langue sacrée, en dépit des extrêmes difficultés que cela représentait.
En outre, notre patriarche Yaakov savait que la terre d’Israël devait être partagée en douze parts, et que la tribu de Lévi n’hériterait pas d’une part propre à elle, du fait que « l’Eternel constitue sa part d’héritage » ; par conséquent, il restait une part vacante. Or, lorsque Yaakov étudia la Torah avec les enfants de Yossef, en employant la langue sacrée, il constata qu’ils avaient préservé leur identité juive et étaient restés fidèles à la voie qu’il avait tracée à ses enfants. Il décida alors de les inclure dans le compte des tribus, témoignant ainsi son estime pour leur grande vaillance. C’est ainsi que Menaché et Ephraïm reçurent en héritage une part en Israël, à la place de leur père Yossef et de la tribu de Lévi.
Aussi Yossef le juste n’est-il pas mentionné dans le compte des tribus, alors que ses enfants le sont. Or, la nature humaine étant telle qu’un père n’est pas jaloux de la réussite de son enfant, il n’en a pas été contrarié et en a même éprouvé une très grande joie. J’ai pensé que le fait que Yossef lui-même n’ait pas été mentionné dans le compte des tribus lui a valu, en contrepartie, le mérite de faire partie des sept hôtes saints qui, à Soukkot, viennent nous visiter.
À MÉDITER
Un ‘hassid se rendit une fois auprès du juste Rabbi Avraham de Pachalik afin de lui demander une ségoula pour la crainte du Ciel.
« Je n’ai pas de ségoula de ce type, lui répondit le Rav, mais si tu veux, je peux t’en donner une merveilleuse pour l’amour de D.ieu ! » L’autre s’en réjouit beaucoup…
« En quoi consiste-t-elle ? s’enquit-il, certain qu’il lui donnerait une liste de chapitres de Téhilim à lire chaque jour, ou une consigne similaire. Toutefois, le juste répondit avec simplicité :
« Si tu cherches à acquérir l’amour du Créateur, tu dois d’abord t’efforcer d’acquérir celui d’autrui ! Si tu aimes chaque Juif tel qu’il est et accomplis de toutes tes forces la mitsva de l’aimer comme toi-même, tu parviendras facilement à aimer le Créateur ! » conclut le juste.
Tentons, nous aussi, d’adhérer à cette règle d’or, qui peut nous servir de tremplin dans l’ensemble de notre service divin. Aimons-nous les uns les autres, et à partir de là, nous nous élèverons progressivement vers l’amour de l’Eternel et atteindrons de sublimes niveaux !
La célèbre Yéchiva de Kelm s’avéra être une véritable usine de géants en Torah et en crainte du Ciel. Elle représente jusqu’à aujourd’hui l’une des principales écoles de moussar. L’aspiration à la perfection, poussée à l’extrême, dans le respect des mitsvot et la conduite de l’homme, constituait sa devise.
Peut-on s’imaginer quelle atmosphère régnait dans ce Beit Hamidrach lors du mois d’Eloul ? Quelle crainte du jugement y respirait-on ? Quelle proximité à D.ieu et quelle élévation ? Ces niveaux dépassaient certainement notre conception… Et à quoi ressemblait la veille de Roch Hachana dans cette Yéchiva ? Peut-on se représenter la sainteté ambiante, sans doute alors palpable ?
Or, soulignons que la veille de Roch Hachana, les étudiants de Kelm avaient l’habitude de prendre sur eux un engagement.
De quel ordre était-il ? Prier avec plus de ferveur, en ressentant un extraordinaire attachement avec le Créateur ? Ou bien étudier la Torah avec une abnégation totale, sans jamais en détourner son esprit ? Ou encore renforcer sa crainte du Ciel en respectant scrupuleusement les mitsvot et en s’éloignant de la faute ?
Non, aucun de ces engagements n’était pris à Kelm.
L’engagement qu’on prenait à Kelm, en ces moments d’extrême élévation, qui allaient être déterminants pour tout le service divin de l’année à venir, concernait l’amour du prochain : accueillir tout homme avec un visage avenant !
C’est justement à cet instant, expliquait le Saba de Kelm, Rav Sim’ha Zissel Ziv, tandis que tous étaient tendus en raison du jugement qui allait bientôt être prononcé pour chacun, qu’on risquait de trébucher dans ses relations avec autrui, en manquant de patience et en affichant un visage coléreux. C’est pourquoi il était alors plus que jamais nécessaire, pour les étudiants, de s’engager à accueillir tout homme avec un visage avenant, afin de se préserver du danger qui planait sur eux : blesser autrui.
EN PERSPECTIVE
Sacrifier son repos pour D.ieu
« Il a goûté le charme du repos et les délices du pâturage ; et il a livré son épaule au joug, et il est devenu tributaire. » (Béréchit 49, 15)
Si Issakhar a constaté le bien-être qu’apporte le repos, pourquoi a-t-il choisi de s’atteler à un dur labeur [celui de l’étude de la Torah] ?
Le Baal Hassoulam explique que lorsqu’un Juif désire apporter un sacrifice à l’Eternel, il doit offrir ce qu’il a de meilleur, à l’instar d’Hével, dont l’offrande fut agréée par D.ieu, contrairement à celle de Caïn, qui avait apporté une offrande de qualité moindre.
Telle fut justement la ligne de conduite d’Issakhar : aspirant à vouer sa vie au Créateur, il réfléchit à ce qu’il avait de meilleur à offrir, ce que les hommes chérissaient le plus. Il trouva que c’était le repos, aussi décida-t-il de le sacrifier à l’Eternel, comme il est dit : « il a livré son épaule au joug ».
DES HOMMES DE FOI
Rabbi ‘Haïm Pinto rencontra un jour dans la rue un Juif nommé ‘Haïm Cohen.
Il s’approcha de lui et lui dit : « Je sais que tu projettes aujourd’hui de voyager en autobus. Sache qu’il va se produire un accident et que tous les passagers vont mourir. Je te conseille de donner de l’argent à la tsédaka, car la tsédaka sauve de la mort. Ainsi, tu seras épargné. »
« Si c’est vrai, que le Rav le dise à tous les voyageurs afin que tous en réchappent », fit remarquer ‘Haïm au Tsaddik.
Celui-ci lui répondit :
« Les autres voyageurs ne vont pas croire mes paroles. C’est pourquoi je ne le dévoile qu’à toi et te donne un conseil pour en réchapper. »
Effectivement, tout se déroula comme le Tsaddik l’avait prévu. L’autobus tomba d’une haute falaise et tous les voyageurs périrent sur le coup, tous sauf ‘Haïm Cohen qui fut sauvé par le mérite de la tsédaka.
Un Juif du Maroc acheta un autobus pour assumer sa subsistance et celle de sa famille, en espérant parvenir à gagner sa vie correctement. Mais, à son grand désespoir, les autorités refusèrent de lui délivrer le permis de le conduire.
Un jour, cet homme marchait dans la rue quand il rencontra Rabbi ‘Haïm Hakatan.
Il lui embrassa la main et, en pleurant, se mit à lui conter son infortune :
« J’ai acheté un autobus afin de l’utiliser pour nourrir ma famille. J’y ai investi presque tout mon argent mais, pour l’instant, les autorités me refusent l’autorisation de l’utiliser. Si je ne peux rien en faire, je vais devenir pauvre, car j’ai investi presque tous mes biens dans cette affaire. Que vais-je faire à présent ? »
Rabbi ‘Haïm le regarda et lui dit :
« Il est dit : “La tsédaka sauve de la mort”. Et nous savons aussi qu’“un pauvre est considéré comme un mort”. Donne-moi de l’argent pour les pauvres et avec l’aide de D.ieu, tu recevras ton permis. »
L’homme obéit et remit au Tsaddik le peu d’argent qui lui restait. Puis, il poursuivit sa route.
Le lendemain, il reçut effectivement une convocation pour se rendre au Ministère des Transports. Quand il s’y présenta, les employés le reçurent aimablement et l’informèrent qu’il avait reçu l’autorisation d’utiliser son autobus librement, tout en lui remettant le document tant désiré.
À ce sujet, il est dit : « Il accomplit la volonté de ceux qui Le craignent ; Il entend leur plainte et les sauve. » (Téhillim 145:19)