Chabbat 1er Jour de Pessa'h 31 Mars 2018 ט"ו ניסן תשע"ח |
Le maror du korekh ou l’amertume de l’exil
Rabbi David Hanania Pinto
« Le premier mois, le quatorzième jour du mois, au soir, vous mangerez des matsot. » (Chémot 12, 18) Nos Sages précisent par ailleurs (Mékhilta deRabbi Chimon bar Yo’haï ad loc.), et cela est ainsi tranché dans la Halakha (cf. Rambam, hilkhot ‘hamets oumatsa, 6, 1), que c’est une mitsva positive de la Torah de manger de la matsa le 15 Nissan au soir, comme l’établit le verset précité.
Cependant, le Rambam tranche (‘hamets oumatsa, 7, 12) que la consommation du maror lors du Séder est d’ordre rabbinique et non toraïque. La raison de cette différence tiendrait au fait que le maror n’est normalement consommé qu’avec le korban Pessa’h, le sacrifice pascal. Or, étant donné que de nos jours, nous n’avons plus de Temple et ne pratiquons plus cette offrande, nous contentant d’en évoquer le souvenir, la consommation du maror est seulement d’ordre rabbinique.
Dans ce cas, demandent certains, pourquoi la matsa est-elle une obligation toraïque ? Elle devrait a priori avoir le même statut que le maror, d’ordre rabbinique en l’absence de korban Pessa’h, puisqu’il est écrit : « Et l’on en mangera la chair (…) rôtie au feu, et accompagnée de matsot et d’herbes amères » (Chémot 12, 8).
La réponse est que la consommation de matsa étant l’objet d’un verset spécifique de la Torah, elle n’est pas liée au korban Pessa’h et, comme l’indique le Rambam, représente une mitsva à part entière. Elle reste donc d’ordre toraïque, tandis que le maror, à notre époque, n’est qu’une obligation rabbinique.
La fête de Pessa’h est essentiellement centrée autour des matsot, d’où son nom, car nous les consommons pendant sept jours, comme il est dit (Chémot 12, 15) : « Sept jours vous mangerez des matsot ». Et même si l’essentiel de la mitsva est seulement d’en manger le premier soir, tout comme la mitsva de manger un kazayit de pain dans la soucca le premier soir de Souccot, le fait de manger dans la soucca n’en demeure pas moins une obligation, comme il est dit (Vayikra 23, 42) : « Sept jours vous résiderez dans la soucca. »
En d’autres termes, l’homme n’est pas obligé de manger pendant les sept jours de Souccot, mais s’il souhaite manger, il devra le faire spécifiquement dans la soucca. Il en va de même à Pessa’h : l’on n’est pas obligé de manger, mais si on le veut, on devra obligatoirement prendre de la matsa et non du pain. Si l’obligation porte précisément sur la matsa, c’est parce que les matsot nous rappellent le pain de misère consommé par nos ancêtres en Égypte.
De ce fait, la Torah a interdit la consommation de ‘hamets pendant les sept jours de Pessa’h, celui-ci étant exclusivement remplacé par la matsa. En outre, la mitsva de consommer de la matsa est explicitement évoquée par la Torah à de multiples reprises. Étant véritablement d’ordre toraïque, contrairement au maror, qui n’est désormais plus qu’une obligation d’ordre rabbinique, cette mitsva très spéciale a été appliquée à toutes les époques.
Le korban Pessa’h n’était offert que le quatorze, et non pendant les sept jours, et il était interdit de le manger en étant impur, outre le fait qu’il était mangé seulement la nuit du quinze, lorsqu’on était rassasié, et il était interdit d’en laisser pour le lendemain. Or, étant donné que nous sommes tous impurs de l’impureté transmise par les morts, en l’absence de Beth Hamikdach pour expier nos péchés et des cendres de la vache rousse pour nous purifier, nous ne pratiquons plus de nos jours le sacrifice de l’agneau pascal.
De ce fait, même la consommation du maror n’est que d’ordre rabbinique. Elle n’est en effet pas pratiquée tout au long des sept jours, mais, comme le korban Pessa’h, ne devait être appliquée que le premier soir. Étant comme le korban Pessa’h, le maror n’est consommé que par ordonnance rabbinique, en vertu du verset « Et l’on en mangera la chair (…) rôtie au feu, et accompagnée de matsot et d’herbes amères » (Chémot 12, 8). Or, étant donné que de nos jours, il n’y a plus de korban Pessa’h, le maror également n’est plus que d’ordre rabbinique.
À l’époque du Temple, Hillel l’Ancien faisait un sandwich de matsa et de maror, qu’il mangeait ensemble, afin d’accomplir ce verset. Seul Hillel procédait ainsi. Pourquoi ? Car il avait vu par inspiration divine que le Temple serait détruit et que les enfants d’Israël cesseraient de consommer le korban Pessa’h. Aussi prit-il cette coutume en souvenir du Temple, consistant à manger ensemble un sandwich de matsa et de maror. Le but était en fait de rappeler qu’on mangeait ensuite le korban Pessa’h lorsqu’on était rassasié. Et après la destruction du Temple, on ne mange plus que la matsa séparément et le maror séparément.
De ce fait, voulant que tout le monde se souvienne qu’à l’époque du Temple, on mangeait la matsa et la maror, puis le korban Pessa’h, Hillel avait pris l’habitude de les manger ensemble, en vue d’accomplir le verset « accompagnée de matsot et d’herbes amères » (Bamidbar 9, 11). Cela permettrait de mieux rappeler l’absence du korban Pessa’h et de nous pousser à implorer Hachem pour la reconstruction du Beth Hamikdach et la restauration des sacrifices spécifiques.
L’ESPRIT DE LA FÊTE
La fête de Pessa’h ou la libération du mauvais penchant
La fête de Pessa’h est l’ère de notre véritable liberté. Or, cette réalité découle du passé de nos ancêtres qui, d’une servitude oppressante, accédèrent à la liberté par le biais de miracles grandioses, sans lesquels nous aussi n’aurions pas pu jouir de la liberté. Car lorsque le Saint béni soit-Il accomplit en faveur de nos pères le miracle principal de la sortie d’Égypte, Il veilla à ce que celui-ci ait des répercussions sur les générations suivantes, auxquelles Il transmettrait un courant de sainteté et le sentiment de l’avoir réellement vécu. Ainsi, les Juifs de chaque génération seraient attirés par ce courant et recevraient l’influence propre à la sainteté de cette fête. De cette manière, nous avons la possibilité de nous réjouir et de ressentir l’immense joie éprouvée par nos ancêtres au moment où ils furent libérés d’Égypte.
Ceci est comparable à une locomotive tirant des dizaines de wagons. Il est évident que tous les wagons n’avancent que grâce à la locomotive, dans laquelle se trouve le conducteur qui active le moteur. Seul un imbécile croirait que le dernier wagon avance tout seul et n’a aucun lien avec la locomotive.
Le lendemain de Pessa’h, à l’heure du repas, je remarquai que l’un des convives était assis avec un air soucieux. « Pourquoi es-tu inquiet ? lui demandai-je. Aujourd’hui, c’est Isrou ‘Hag et il faut se réjouir. Est-ce que tu as déjà oublié ce que j’ai dit hier dans mon cours, à savoir qu’il faut prolonger la sainteté de Pessa’h, qui symbolise un saut, autrement dit le fait d’oublier ses soucis et de n’avoir confiance qu’en Hachem. Est-ce que tu as oublié que Pessa’h fait totalement allusion à l’attachement aux mitsvot, évoquant les matsot, qui sont dures. Car il n’est pas facile de les observer convenablement et elles exigent d’importants efforts pour les accomplir dans un esprit d’effacement total devant la volonté d’Hachem. Et pourquoi mange-t-on les matsot pendant sept jours ? En allusion aux soixante-dix années de la vie de l’homme, qu’il doit consacrer de toutes ses forces au service divin, sans recevoir la moindre récompense dans ce monde, ainsi que l’indique la Guémara (Kiddouchin 39b). »
Voici la réponse que cet homme me fit : « C’est exactement la raison pour laquelle je m’inquiète. Je ne ressens plus ce grand élan d’élévation qui m’a accompagné pendant tout Pessa’h, et cela me donne une certaine sensation de faiblesse. »
« C’est là l’œuvre du mauvais penchant, qui tente de te décourager, soi-disant pour des motifs purs, mais en fait dans le but de t’inspirer des doutes au niveau de la émouna. Il escompte ainsi développer son emprise sur toi, jusqu’au moment où il parviendra à te faire chuter et perdre l’essentiel de la émouna que tu as acquise pendant cette fête, si bien qu’au final, tu y seras perdant. Il faut au contraire être conscient qu’Hachem sait bien que la sainteté et l’inspiration qu’apportent la fête de Pessa’h sont si grandes qu’une fois celle-ci passée, l’homme risque d’avoir un sentiment de chute. Et c’est justement pour cette raison qu’Il nous a donné la mitsva de compter le Omer aussitôt après Pessa’h, afin de prolonger le lien avec Hachem de Pessa’h jusqu’à Chavouot – cette fête qui célèbre le don de la Torah, finalité de la sortie d’Égypte. C’est ce qu’indique Hachem à Moché Rabbénou (Chémot 3, 12) : “Quand tu feras sortir le peuple d’Égypte, vous servirez l’Éternel sur cette montagne.” »
J’ajouterais une parabole : un homme entre dans une somptueuse demeure, richement éclairée. En voyant la beauté de cet endroit qui n’est en fait qu’un passage avant d’entrer dans le palais encore plus beau qu’il est censé habiter, il ressent une joie intense. Mais voilà que soudain, les lumières s’éteignent, et il se retrouve dans une effrayante obscurité. Enfin, au bout d’un moment, il aperçoit la lueur d’une petite bougie, qui éclaire le chemin menant vers le palais. S’il s’applique à avancer à la lumière de cette bougie, il finira par atteindre son objectif.
La comparaison est claire : tout de suite après Pessa’h, l’homme perd l’éclairage apporté par la fête et a un sentiment de chute. C’est la raison pour laquelle Hachem nous donne la possibilité de continuer à ressentir la lumière de la fête par le biais du compte de l’Omer, qui nous mène à Chavouot, fête du don de la Torah. Grâce à celle-ci, il pourra atteindre par lui-même sa finalité, être en mesure d’accomplir la volonté d’Hachem.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « En cet instant (…) » (Yéhochoua 5, 6)
Dans la haftara est évoqué le déroulement du korban Pessa’h offert par les enfants d’Israël à Guilgal, ce qui nous renvoie à la paracha lue pendant Pessa’h, où il est question du sacrifice de l’agneau pascal, qui en est un thème central.
CHEMIRAT HALACHONE
Fête de la délivrance et réflexion sur l’exil
Le ‘Hafets ‘Haïm consacrait une partie non négligeable de son emploi du temps quotidien à sensibiliser ses contemporains à l’interdit du lachone hara, auquel il a même consacré un ouvrage spécifique.
Le Cohen Gadol de Radin pensait qu’une des raisons essentielles à la longueur interminable de cet exil est le mépris et la méconnaissance des lois liées au domaine du langage (comme il le dit lui-même, « ce thème est complètement tombé en décrépitude, car l’homme s’est habitué à dire tout ce qui lui vient à l’esprit, sans réfléchir auparavant si ce qu’il s’apprête à dire est inclus dans la définition de la médisance ou du colportage »), et que l’absence d’un ouvrage central de Halakha sur ce thème était l’une des principales raisons de ce laisser-aller.
PAROLES DE TSADDIKIM
Quand les portes du Ciel s’ouvrent-elles devant la richesse ?
L’auteur du Ahavat Chalom de Kossov zatsal avait l’habitude d’encourager les fidèles à prier pendant Pessa’h, et plus particulièrement encore pendant la nuit du Séder, pour avoir une bonne et large parnassa. Car selon lui, les difficultés financières proviennent parfois du fait que l’on se contente de prier pour sa subsistance à Roch Hachana, parmi les différentes prières pour la vie.
Or, on sait qu’à Pessa’h, nous sommes jugés sur la récolte (cf. Roch Hachana 15a), et c’est donc le moment approprié pour implorer le Créateur dans ce domaine. De même qu’à Chavouot, nous sommes jugés sur les fruits de l’arbre, et c’est donc le moment de multiplier ses prières pour que poussent de bons et beaux fruits dont les hommes pourront profiter.
D’après le Ahavat Chalom, il convient d’ajouter à nos demandes de nature spirituelle des prières pour connaître la sérénité dans le domaine de la subsistance et une profusion générale.
ZOOM SUR UNE FÊTE
Comment Abayé et Rava passaient-ils la soirée du Séder ?
Rabbi Eliezer, Rabbi Yéhochoua, Rabbi Elazar ben Azaria, Rabbi Akiva et Rabbi Tarfon étaient, comme on le sait, réunis à Bné Brak, lors d’une mémorable nuit du Séder, qu’ils passèrent à raconter la sortie d’Égypte.
Or, cette anecdote rapportée par la Haggada est la suite immédiate du passage « quiconque s’étale dans son récit de la sortie d’Égypte est digne de louanges », les Tannaïm cités représentant une remarquable illustration de ce principe.
Nombreux sont toutefois ceux qui demandent ce que ce fait nous apporte de nouveau. D’autres Tannaïm ne prenaient-ils pas le temps de raconter par le menu la sortie d’Égypte ? Et les Amoraïm, tels qu’Abayé et Rava, étaient-ils avares en détail ? Enfin, que dire des Guéonim, des Richonim et des A’haronim ? La réponse est évidente : tous ces hommes racontaient également la sortie d’Égypte toute la nuit, ce que tout Juif devrait faire. Dans ce cas, quelle est la spécificité du fait rapporté ?
Le Rav Elyashiv zatsal proposa une réponse remarquable, rapportée dans l’ouvrage Léavdo Bélévav Chalem : à Pessa’h se dévoile une force extraordinaire qui peut changer l’homme de fond en comble, et c’est ce que prouve l’anecdote rapportée sur les Tannaïm.
Le premier évoqué est Rabbi Eliezer, rejeton d’une famille de nantis. Or, on sait que jusqu’à l’âge de vingt-huit ans, il n’avait rien étudié et ne connaissait pas même le Chéma et le Birkat Hamazone. Mais, partant de zéro, il est devenu « le Grand Rabbi Eliézer ».
Ensuite est cité Rabbi Tarfon, qui, d’après le traité de Kalla, possédait d’innombrables biens. Or, en dépit de cette richesse, donnée qui cause logiquement de multiples tracas, il ne pensait à rien d’autre qu’à la Torah, et c’est ce qui lui a permis de parvenir à une telle grandeur.
Le troisième Tanna mentionné est Rabbi Yéhochoua ben ‘Hanania. À son propos, la Guémara rapporte (Brakhot 28a) que, lui rendant visite, Rabban Gamliel s’étonna de la noirceur de ses murs. « Serais-tu charbonnier ? » lui demanda-t-il.
Jusqu’aux murs de sa maison témoignaient de sa pauvreté. Des murs noirs ! De nos jours, même celui qui vit dans la misère la plus criante a des murs peints en blanc, au pire tachés par endroits. Mais la situation de Rabbi Yéhochoua était bien pire, et en dépit de cette épreuve, il est devenu celui que l’on connaît.
Passons à présent au quatrième Tanna cité : il s’agit de Rabbi Akiva qui, jusqu’à l’âge de quarante ans, était parfaitement ignare. Tout le monde se moquait de lui et, quand sa femme lui proposa d’aller apprendre l’alphabet au Talmud-Torah, il lui avoua qu’il avait honte d’étudier avec de jeunes enfants. Que fit son épouse ?
Ra’hel prit un âne qui avait un creux dans le dos, qu’elle combla avec de la terre, après quoi elle y planta différentes plantes. Puis elle sortit son âne sur la place publique. Le premier jour, tout le monde se précipita pour voir cette nouvelle curiosité : avait-on déjà vu un âne qui était aussi un jardin ambulant ? Le deuxième jour, seulement la moitié des habitants du coin prirent la peine de sortir. Le surlendemain, l’âne n’intéressait déjà plus personne. En femme avisée, Ra’hel visait à transmettre ainsi un message à Rabbi Akiva : « Ce sera la même chose pour toi, lorsque tu iras étudier au Talmud-Torah. Le premier jour, tout le monde rira de te voir parmi les jeunes enfants ; après quelques jours, cela n’amusera plus grand monde ; et au bout d’une semaine, tout le monde y sera habitué et plus personne ne trouvera cela drôle. »
Même celui qui a commencé à étudier dès le plus jeune âge a du mal à terminer l’étude du Shass, sans parler de celle du Talmud Yérouchalmi. Quelle chance aurait, dans ce cas, celui qui, à quarante, ne saurait ni lire, ni écrire ?
Et pourtant, contre toute attente, non seulement Rabbi Akiva y parvint, mais il arriva à un niveau que même Moché Rabbénou aurait pu lui envier !
Enfin, le dernier Tanna cité est Rabbi Elazar ben Azaria. À notre époque, pour être membre du Conseil des Sages de la Torah, il faut être âgé d’au moins soixante-quinze ans – on n’envisagerait nullement d’y inclure un candidat plus jeune.
Or, voilà que sont réunis autour d’une même table les Grands de la génération, des hommes d’une envergure incomparable, traditionnellement appelés « les saints Tannaïm » – Rabbi Yéhochoua, Rabbi Akiva, Rabban Gamliel… Tous seraient apparemment dignes d’être nommés au poste de Nassi, dirigeant central d’Israël. Et qui est finalement choisi ? Un jeune de dix-huit ans ! Contre toute attente, contre toute logique, c’est Rabbi Elazar ben Azaria qui est nommé à ce poste prestigieux.
Telle est en fait la leçon que vient nous transmettre l’auteur de la Haggada, en nous rapportant cette anecdote « anodine » : l’exemple de tous ces Tannaïm doit nous inciter à raconter la sortie d’Égypte en détail. Et si l’on demande comment il a été possible de passer, en l’espace de seulement cinquante jours, des quarante-neuf degrés d’impureté au niveau du don de la Torah, la réponse peut nous être fournie par ces Maîtres hors pair. En effet, chacun représente, individuellement, la capacité de dépasser les contingences les plus difficiles et défavorables pour s’épanouir et parvenir à un niveau exceptionnel dans la Torah.
LA PLUME DU CŒUR
Piyout pour Pessa’h, composé par Rabbi ‘Haïm Pinto, que son mérite nous protège
Ce poème liturgique est l’acrostiche de : Ani ‘Haïm bar Chélomo ‘hazak
Noam Hachem Elokaï ata
אשורר שירה חדשה, לה' עושה גדולות
הלוא הוא, הפליא ועשה, מופתים ואותות מעולות
ועדה ברה וקדושה, הוציא אותה מאפלות
ואור גדול האיר לנו, כאור חמה שבעתיים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
נתן לדם את מימיהם, ולשתות מהם לא יכלו
וכן עשו חרטומיהם, לשטח הנראה כולו
כי אין השליטה להם, במה שהו אמת חתלו
ולא סר ממעללו, האכזר מלך מצרים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
יחיד שליט בנבראים, גזר וצפרדע עלתה
וממנה היו יוצאים מחנות וזעקה רבתה
ובתוך מעיהם נחבאים, לא האמינו גם עתה
כי בלהטיהם נעשתה צפרדע במצרים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
חזק יסף להכותם, בכנים בכל גבולם
רחש ובם ובבהמתם, כי כן גזר מלך עולם
חרטומים קצרה יכולתם, בושו ונכלמו כולם
אמרו זאת אצבע חי נעלם, שלא-להי השמים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
יחד באו ונאספו, כל מיני חיות הטורפים
טרף גדול בהם טרפו, מאד והנם זועפים
דבר ושחין בם נגפו, ברד כבד בו רשפים
הכה בו רעים מקציפים, אל מתחת השמים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
יסף אדיר להכותם, מכה רבה ועצומה
ארבה עלה לאדמתם, ויכסה את אור החמה
אכל פרי תנובתם, וכל עשבי האדמה
נהלל לשוכן רומה, השם נפשינו בחיים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
מלך שלח חושך להם, ונעשו כולם כעורים
ולא ראו את אחיהם שלושת ימים אמורים
ולא קמו מתחתיהם, שלושת ימים אחרים
נגלו מצפונים אחרים, אל בני א-להים חיים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
בכל זאת חיזק את לבו, רשע עריץ ולא אבה
לשלח את עם קרובו, אל ארץ טובה ורחבה
ויך כל בכור באוייביו, הוא ולא מלאך שר צבא
ויציל לאום אהובה, ולא חלו בה ידים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
רצה לזכות עדתו, וברוב חסדיו גמלם
לפרוש מחמץ מצוותו, בזמן זה לדורות עולם
כי עם השטן חברתו, אחים, ולא יתפרדו כולם
מצה חלקם וגורלם, הנה טובים השניים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
שלושה שמורות סודם, שלוש ראשונות מאירות
מוחין דאבא יסודם, המה בראש ועטרות
זרוע קו ימין נגדם, ביצה לצד הגבורות
מרור ביניהם מתווך, לקח אליו פי שניים
ויהיו אלה בתווך, והוא בין המשפתיים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
חרוסת תחת זרוע, סודות נצח בה נתכנו
ההוד אל הכרפס ריע, ותחת הביצה תנו
וביניהם הן בוקע, יסוד חזרת אופנו
קערה מלכות אמנו, נשלמו עשר אורים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
שירו מאד לא-להודו, פינו יספר נוראותיו
טובו סלח גבר חסדו, עלינו על פי מידותיו
כל גויים כאין נגדו, ובישראל שם תורותיו
ויכתירם בעטרותיו, לאיש כתרים שניים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים:
חדש כקדם ימינו, למה נשכחנו
זה כמה, זכרנו ושמחנו עשה בגויים נקמה,
קנא לכבודך אבינו ושלח מנחם נחמה
אז יגדל שמך רב עוצמה הנוטה כדוק שמים
בחוזק יד הוציאנו ה' ממצרים: