Parachat Pin'has 7 Juillet 2018 כ"ד תמוז תשע"ח |
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La destruction du Temple
Rabbi David Hanania Pinto
Il existe une célèbre histoire qui eut lieu à Jérusalem, peu avant la destruction du Temple, et au sujet de laquelle nos Sages affirment : « Kamtsa et Bar-Kamtsa ont détruit Jérusalem » (Guitin 55b). Bar-Kamtsa, qui fut honteusement congédié d’un festin donné par un maître de céans, se vengea en racontant à l’empereur que les Juifs se révoltaient contre lui, lui donnant pour preuve qu’ils refuseraient d’apporter en sacrifice l’animal qu’il leur enverrait (auquel il allait secrètement apposer un défaut).
Il nous faut comprendre comment, lorsque Bar-Kamtsa fut publiquement humilié et qu’on le renvoya bien qu’il proposât d’assumer tous les frais du repas, les érudits qui étaient présents se sont tus, au lieu de réagir. Possédaient-ils, eux aussi, le vice de haine gratuite au point de ne pas tirer d’embarras une personne plongée dans la honte ? Comment est-ce possible qu’ils se soient tus face au spectacle d’un homme souffrant le martyre de déshonneur ?
Si l’on soutient qu’ils firent semblant de ne pas voir ce qui se passait, c’est encore bien plus grave. Car, le cas échéant, cela signifie qu’ils se sont retenus de réprimander qui le méritait, alors qu’ils avaient remarqué qu’il avait mal agi, ce qui prouve une méchanceté de leur part et représente une infraction de l’interdit de la Torah : « Ne sois pas indifférent au danger de ton prochain. » (Vayikra 19, 16)
C’est qu’il existe deux sortes de justes. Ceux dont la seule aspiration est de remplir la volonté de leur Créateur, ignorant totalement leurs intérêts personnels. Nos Maîtres (‘Houlin 7a) donnent ainsi l’exemple de Rabbi Pin’has ben Yaïr qui alla accomplir la mitsva de rachat de prisonniers. Arrivé au fleuve Guinaï, il lui demanda de se fendre en deux. Mais il se heurta au refus de celui-ci qui argua : « Toi, tu vas pour accomplir la volonté de ton Créateur, mais moi également. Cependant, alors que tu ne peux être certain de parvenir à l’accomplir, moi je peux l’être ! » Mais, loin de se laisser intimider, Rabbi Pin’has ben Yaïr répondit : « Je décrète que tu te fendes et si tu le refuses, je décrète que plus jamais l’eau ne s’écoulera dans ton lit ! »
Cela illustre le fait que les véritables justes cherchent toujours à se plier à la volonté de leur Père céleste, négligeant leur propre point de vue et ne tenant pas compte de leur intérêt personnel. C’est pourquoi ils sont prêts à se sacrifier pour sanctifier le Nom divin et ne craignent nullement les autres hommes.
Mais il existe également des « justes » qui ne cherchent qu’à satisfaire la volonté des autres. Ce type de « justes » n’en a que l’apparence, puisqu’il n’agit qu’en fonction de son propre avis et ne cherche qu’à trouver grâce aux yeux d’autrui, même si celui-ci a tort.
Dès lors, nous comprenons mieux ce qui se passa lors de ce festin. A l’époque du Temple, il y avait des justes et des Sages qui n’aspiraient qu’à se conformer à la volonté de leur prochain et qui étaient aveuglés par leurs intérêts personnels. S’ils étudiaient certes la Torah, lorsqu’il s’agissait de réprimander les autres, ils se dérobaient à leurs devoirs parce qu’ils voulaient garder la faveur de ces derniers. Aussi, les érudits qui participèrent au festin ne reprirent-ils pas son organisateur qui fit honte à Bar-Kamtsa, car ils désiraient avant tout trouver grâce à ses yeux.
S’il en est ainsi, une autre question apparaît : pourquoi le silence des Sages fut-il interprété par Bar-Kamtsa comme si ces derniers avaient consenti à son injure – ce qui l’incita à médire des Juifs devant l’empereur, propos qui menèrent ultimement à la destruction du Temple ? Il se peut qu’ils ne se soient tus qu’afin de garder la faveur du maître de maison.
De fait, la mission des Sages est d’influencer leurs contemporains par leur brillante personnalité et de leur imposer leur autorité, de sorte que tous soient influencés positivement, influence se reflétant dans leur conduite. Si les érudits qui assistaient à ce repas avaient eu une telle influence sur leurs concitoyens, la conduite de ces derniers aurait également été meilleure, en particulier lors d’un rassemblement. Or, l’incident qui eut lieu démontra l’inverse : en présence des Sages de cette époque, un homme a pu se permettre d’humilier son prochain en public, sans que nul n’ose ouvrir la bouche ! Plus encore, après avoir assisté au déshonneur de Bar-Kamtsa, les Sages restèrent passivement assis et ne tentèrent pas de réprimander l’auteur de cet affront. Mais, si ce dernier ne fut pas influencé positivement par ces justes, c’est sans nul doute que le comportement de ceux-ci n’était pas non plus des meilleurs, ce que vient prouver leur silence, synonyme d’approbation. C’est ce qui explique que Bar-Kamtsa alla ensuite colporter contre les Juifs auprès de l’empereur, étincelle à l’origine de la destruction du Temple.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « Paroles de Yirmiya (…) » (Yirmiya chap. 1)
Lien avec ce Chabbat : dans la haftara, on raconte les prophéties de Yirmiya relatives aux punitions consécutives à la destruction de Jérusalem. C’est la première des trois haftarot lues lors des trois Chabbats précédant le neuf Av.
GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA
Le délice des préparatifs du Chabbat
Au sujet des préparatifs de Chabbat, il est important de souligner que tous les membres de la famille, y compris le maître de maison, doivent s’y impliquer. S’il est vrai que c’est sur la femme que repose essentiellement cette tâche, même des érudits qui se vouent totalement à la Torah ont l’obligation de se donner de la peine en l’honneur du Chabbat.
Nous trouvons à cet égard (Chabbat 119a) que les saints Amoraïm prenaient part à ces préparatifs. Ainsi, Rav ‘Hasda avait l’habitude de couper très finement les légumes, Rabba et Rav Yossef coupaient les arbres, Rabbi Zira allumait le feu et Rabbi Na’hman « réparait » la maison – il y déposait les ustensiles nécessaires au Chabbat et la débarrassait de ceux des jours séculiers. Tout homme prendra exemple de ces Sages, au lieu de se leurrer en pensant qu’il serait déshonorant de s’impliquer dans les préparatifs du jour saint.
Je me souviens que mon père et maître, Rabbi Moché Aharon – puisse son mérite nous protéger –, continuait jusqu’à ses vieux jours à se donner de la peine en l’honneur du Chabbat. Il avait l’habitude de laver les vêtements pour qu’ils soient tout propres pour Chabbat, puis de les ranger chacun à sa place. Il se chargeait également de faire bouillir de l’eau afin que nous ayons de l’eau chaude Chabbat. Il s’impliquait également dans d’autres tâches et ce, avec la joie d’accomplir cette mitsva.
Grâce à D.ieu, j’ai moi aussi pris cette bonne habitude et, chaque vendredi, je m’efforce d’aider aux préparatifs du Chabbat en nettoyant la cuisine de manière radicale. J’éprouve un immense plaisir à le faire. L’auteur du Ma’hsik Brakha (au nom de l’ouvrage Kavanat Hayachan) écrit que la transpiration d’un homme pour les besoins du Chabbat lui vaut l’effacement par D.ieu de toutes ses fautes, de même que les larmes ont le pouvoir d’effacer nos péchés.
Il est d’autant plus important de participer aux préparatifs du Chabbat le vendredi que le Satan profite alors de la tension ambiante pour provoquer des disputes entre les membres de la famille. Comme l’écrit le ‘Hida zatsal (Moré Béetsba, 100), « l’heure de min’ha, la veille de Chabbat, est un moment propice aux querelles entre l’homme et sa femme. Aussi les forces impures s’efforcent-elles de susciter une dispute. L’homme craignant D.ieu maîtrisera son mauvais penchant afin de ne pas entraîner de conflit en étant intransigeant ; au contraire, il recherchera la paix. »
Celui qui aide son épouse dans les préparatifs du Chabbat accomplit non seulement un acte de bienfaisance, mais amplifie également, par ce biais, la paix conjugale, invitant ainsi la Présence divine à venir se déployer au sein de son foyer. Son mérite est donc inestimable. Heureux l’homme qui se comporte ainsi !
Puisse le mérite du Chabbat nous permettre de bientôt jouir de la Délivrance finale, en vertu de l’enseignement de nos Sages : « Le peuple juif ne sera délivré que par le mérite du Chabbat » ! (Vayikra Rabba 3, 1)
PAROLES DE TSADDIKIM
L’imagination dirigée, un moyen d’acquérir une perception véridique
« Afin que la communauté de l’Eternel ne soit pas comme un troupeau sans pasteur » (Bamidbar 27, 17)
Lorsque Moché demanda au Saint béni soit-Il de désigner un homme qui prendrait sa suite dans la direction du peuple juif après son départ, il exprima sa requête à l’aide d’une image : « afin que la communauté de l’Eternel ne soit pas comme un troupeau sans pasteur ». Pourquoi a-t-il jugé nécessaire d’avoir recours à une image prise du monde où nous vivons ? D.ieu a-t-Il réellement besoin d’une telle illustration ?
Rav Eliahou Lopian zatsal nous donne une remarquable explication. Moché utilisa cette parabole afin que la prière qu’il était en train de prononcer jaillisse du fond de son cœur. En effet, ceci lui permettait de mieux ressentir la nécessité, pour le peuple juif, d’avoir un bon dirigeant – pour qu’il ne soit pas perdu, tel un troupeau sans pasteur.
Le Machguia’h Rav Don Ségal chelita raconte qu’une fois, durant la période d’hospitalisation du Rav de Ponievitz zatsal, le Machguia’h Rav Yé’hezkel Lévinstein zatsal dit, lors d’un vaad, que chaque ba’hour de la Yéchiva avait le devoir d’implorer l’Eternel pour sa guérison, devoir d’autant plus grand en regard de la reconnaissance qu’il lui doit. Il ajouta que s’il désirait prier du plus profond de lui-même, il devait s’imaginer qu’il se trouvait à l’hôpital, voyait son Rav souffrir et entendait les médecins dire combien sa situation était critique ; sa prière serait alors toute différente.
Lors de la guerre de 5727, en Israёl, le Machguia’h insistait souvent, dans ses cours et vaadim à Ponievitz, sur l’obligation de chacun de partager le joug de ses nombreux frères qui sont obligés de se vautrer dans les champs avec leur famille, transis de peur face à la menace de la mort. Il affirmait que ce devoir ne découle pas uniquement de l’obligation de « partager le joug de son prochain », mais aussi de celui de base d’« aimer son prochain comme soi-même » qui oblige tout Juif à se soucier d’autrui et à éprouver réellement de la peine pour lui.
Par le biais de la représentation, le Machguia’h parvint à de très hauts sommets de sensibilité à autrui. On raconte à ce sujet que lorsqu’on commença à utiliser la clé télécommandée pour les voitures, il eut cette réflexion un jour où il vit l’Avrekh qui le conduisait utiliser un tel appareil pour ouvrir son véhicule : « Quand on voit qu’une telle chose est possible, on comprend mieux le concept d’influence à distance – positive ou négative –, la possibilité d’être influencé sans même être en contact direct avec l’objet d’influence. »
De même, lorsqu’on inventa le téléphone avec haut-parleur et que les gens se mirent à l’utiliser dans la rue sans avoir honte qu’on pense qu’ils se parlent à eux-mêmes, le Machguia’h commenta : « A présent, il n’y a plus d’excuses. Autrefois, quand on disait aux hommes qu’il était une bonne chose, pour ne pas perdre de temps, de réviser les michnayot en marchant dans la rue, certains rétorquaient qu’ils avaient honte qu’on croit qu’ils se parlent tout seuls, mais maintenant qu’on voit de nombreuses personnes pressées, courant à leurs affaires, parler à l’aide de téléphones avec haut-parleur, sans pour autant avoir une telle crainte, il est certain que pour gagner cet immense acquis spirituel qu’est l’étude de la Torah, cela vaut la peine de prendre ce risque. »
DES HOMMES DE FOI
Rabbi David HaCohen a raconté que, suite à une défaillance dans la canalisation de sa maison, il avait appelé un réparateur, un certain Chlomo Avisror. Cet homme, de la cinquantaine, aperçut soudain une boîte de tsédaka sur laquelle figurait la photo du juste Rabbi Moché Aaron, puisse son mérite nous protéger. Il s’arrêta aussitôt de travailler pour rejoindre le maître de maison et lui raconter le miracle dont il avait joui grâce au Tsaddik auquel il devait la vie. Voici son histoire :
« Il y a environ cinquante ans, lorsque ma mère m’attendait, elle fit un faux pas et tomba sur son ventre, où elle reçut un coup violent. Après vérification, les médecins trouvèrent que cette chute avait eu des répercussions sur son fœtus qui, après sa naissance, aurait de sérieux problèmes dans la cavité abdominale.
« Et effectivement, dès ma naissance, je souffris de violents maux de ventre. Chaque jour, mes parents m’amenaient d’urgence à l’hôpital pour trouver un remède. On me fixa une ceinture noire sur le ventre, on tenta d’avoir recours à toutes les médecines possibles et une fois, je faillis être grièvement brûlé par les eaux chaudes qu’on posa sur mon ventre en manquant de prudence.
« Un jour, ma grand-mère dit à ma mère : “Sache que si tu désires que Chlomo guérisse, tu dois te rendre chez le juste Rabbi Moché Aharon Pinto qui habite près de chez nous et lui demander conseil.”
« Mes parents, pleins de confiance dans les Sages, suivirent ce conseil. Or, à leur grand étonnement, lorsqu’ils demandèrent au Tsaddik conseil et bénédiction, il répondit : “Je ne vois aucun enfant…”
« Interdits, ils répondirent : “Comment est-ce possible ? Notre fils est vivant et il est hospitalisé !”
« Le juste, plongé dans ses pensées, leur demanda : “L’avez-vous déjà circoncis ?”
« Quand mes parents répondirent par la négative, expliquant que, du fait de ma maladie, on n’avait pas encore pu me circoncire, le Tsaddik leur dit que c’était pour cette raison qu’il ne me voyait pas.
« Puis, il prit une petite fiole sur laquelle il écrivit sans doute des Noms saints. Il y versa ensuite un peu d’huile d’olives et effaça ses inscriptions. Il dit alors à ma mère : “Prends cette fiole d’huile et pose-la sur le ventre du nourrisson. S’il est encore en vie le lendemain matin, faites-lui immédiatement la circoncision, sans tenir compte de l’avis des médecins. Nommez-le Chlomo, au nom du juste Rabbénou Chlomo ben La’hnach de Marrakech.” (Ce Sage bénéficia vraisemblablement d’un grand miracle avec un serpent, d’où ce nom qui lui fut donné, à rapprocher du mot na’hach)
« Mes parents obtempérèrent : ils me déposèrent la fiole sur le ventre, me circoncirent dès le lendemain et me nommèrent d’après le Tsaddik Chlomo. Depuis ce jour, mes douleurs disparurent, comme si j’étais devenu une nouvelle créature. »
Le réparateur, s’adressant à Rav David HaCohen, conclut : « Cet enfant est celui qui se tient devant vous ! C’est à moi qu’est arrivé cet incroyable miracle grâce auquel je suis vivant et en bonne santé. Voilà le pouvoir des justes ! »
En marge de cette histoire, notre maître Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita commente : « J’ai appris de là, pour la première fois, que mon père utilisait les Noms saints. L’écho de cette anecdote retentit de longues années dans cet hôpital, ce qui sanctifia publiquement le Nom divin. »
CHEMIRAT HALACHONE
Ne pas divulguer le nom de son créancier
Il est interdit de louer son prochain à voix haute, par exemple, dans le cas où il nous a accordé un prêt. Car si on souligne sa bonté devant un large public, on risque d’entraîner chez lui un rassemblement de gens mauvais dont il ne parviendra pas à se défaire. Aussi veillera-t-on à bien garder sa langue.
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
Rabbi David Hanania Pinto
L’acte de Pin’has : totalement désintéressé
« Pin’has, fils d’Elazar, fils d’Aharon HaCohen, a détourné Ma colère de dessus les enfants d’Israёl. » (Bamidbar 25, 11)
Nos Sages (Yérouchalmi, Sanhédrin 10, 2) affirment que tout ce que fit Pin’has était pour le Nom de D.ieu ; il agit dans un esprit de sacrifice pour le Saint béni soit-Il et pour préserver la sainteté du camp d’Israёl.
Pourtant, une question se pose : lors de cet événement, Moché, Aharon et les 70 anciens étaient eux aussi présents, aussi comment Pin’has put-il se permettre de tuer un prince du peuple juif de sa propre initiative, alors qu’« on n’enseigne pas une loi devant son maître » (Yérouchalmi, Guitin 1, 2) ?
En outre, nos Sages soulignent (Sanhédrin 82a) que Pin’has « vit cet acte et se souvint de la loi » ; dans ce cas, pourquoi n’a-t-il pas évoqué cette loi devant Moché duquel il aurait pu recevoir la permission officielle de tuer le fauteur, ce qui lui aurait évité de prendre le risque d’enseigner une loi devant son maître, péché généralement puni par la peine de mort ?
Les mots de nos Sages peuvent être expliqués ainsi : Pin’has vit cet acte, en l’occurrence celui d’Adam, et se souvint de la loi. Autrement dit, il se rappela que le Saint béni soit-Il avait interdit au premier homme de consommer du fruit de l’arbre de la connaissance (Béréchit 2, 17). Or, ce dernier pensa qu’il était apte à en manger. Car son intelligence lui avait permis de comprendre que s’il en mangeait, il pourrait mieux servir le Créateur.
En d’autres termes, Adam fut gagné par un certain orgueil, déplacé car ne correspondant pas à l’ordre divin et c’est ce qui conduisit à son péché. En effet, au lieu de considérer la volonté de l’Eternel et Ses mitsvot, il ne tint compte que de son propre intérêt – comment agrandir sa gloire, serait-ce au prix de transgresser l’ordre divin.
Ce comportement est à imputer au fait qu’Adam ne détenait pas le mérite des pères. Façonné par le Très-Haut, il se croyait tout permis, ce pour quoi il en vint à fauter. Ceci met en exergue la vertu du mérite de nos ancêtres. Le premier homme ne pouvait pas jouir de la protection qu’apporte le mérite de ces derniers, contrairement à Pin’has, ce que souligne le verset en précisant son ascendance – Aharon HaCohen. C’est justement ce mérite qui lui permit de faire face à l’épreuve.
Au moment où Pin’has ressentit le grand danger qui menaçait le peuple juif, à cause de la faute du prince de la tribu de Chimon, il comprit qu’il n’avait pas une minute à perdre pour prendre conseil auprès de Moché et attendre qu’il lui dise la loi s’appliquant à ce cas. Car s’il s’était d’abord adressé à Moché pour éclaircir cela, entre-temps, les enfants d’Israёl seraient tombés morts par milliers. C’est pourquoi il prit l’initiative de faire cet acte de vengeance pour le Nom de D.ieu qui avait été profané, quitte à mettre sa vie en danger, voire même à la perdre.
Aussi, se leva-t-il du milieu de l’assemblée, une lance à la main, décidé à tuer les fauteurs afin de mettre fin au fléau. Pour cet acte zélé, il fut grandement récompensé : il eut non seulement une longue vie, mais mérita également la prêtrise pour lui et les générations à venir (cf. Zévakhim 101a), outre la bénédiction de D.ieu : « Je lui accorde Mon alliance de paix. » Une récompense phénoménale, car il agit de manière totalement désintéressée.
A MÉDITER
Autrefois, la peine éprouvée par les gens pour la destruction du Temple était si intense que tout Juif en portait pleinement le deuil durant la période de ben hamétsarim. Les rues de la ville plongeaient dans une atmosphère de deuil qui se renforçait encore lors des neuf jours. Tous, jeunes comme vieillards, femmes et enfants étaient profondément touchés par ce deuil.
Dans notre génération, proche de l’ère messianique, le deuil pour la destruction du Temple et la détresse de la Présence divine sont bien moins ressentis, tandis que le malheur du particulier et de la communauté ont pris le dessus, conformément à cette remarque de nos Sages : « Les malheurs récents ont dissipé les anciens. » Et pourtant, l’attente impatiente de la Délivrance finale devrait représenter notre plus grand bonheur et notre désir le plus cher.
Le Roch Yéchiva de Porat Yossef surprit une fois une conversation de ses élèves traitant de politique – quels ministres seraient élus. Il les gronda alors en disant : « Celui qui tient de tels propos semble ne pas attendre la venue du Messie, à D.ieu ne plaise. Car nous devons chaque minute attendre sa venue et, lorsqu’il viendra, tous les pouvoirs seront annulés. Alors, à quoi bon s’intéresser à la politique si, en l’espace d’un instant, tout cela peut être anéanti ? »
Et d’ajouter, en guise d’explication : « Ceci est comparable à un homme qui a commandé un taxi : il l’attend dans la rue et ne détourne pas son attention jusqu’à ce qu’il arrive, conscient qu’il peut apparaître d’une minute à l’autre. De même, nous devons savoir que le Machia’h peut venir à tout instant ! »
Au sujet du deuil que nous devons ressentir durant cette période, l’auteur du Pélé Yoets, Rabbi Eliezer Papo zatsal souligne ce point crucial : « Lorsque nous éprouvons de la peine pour la destruction du Temple que nous avons causée par nos fautes, nous ne devons pas déplorer notre situation dramatique, mais considérer la peine du Créateur qui est immense… Ceci peut être comparé à un fils qui a tant irrité son père qu’il se voit contraint de le quitter. Si le fils aime réellement son père et lui est fidèle, il ne s’apitoiera pas sur son propre sort, mais plutôt sur la peine qu’il a suscitée à son père. »
D’ailleurs, il y a seulement quelques générations, on pouvait voir les grands en Torah comme les simples Juifs s’endeuiller sur la destruction du Temple et la détresse de la Chékhina. « Je me souviens, raconte le Machguia’h Rav Eliahou Lopian zatsal, qu’alors que j’étais un jeune enfant, j’allais à la grande synagogue, à 2 heures de l’après-midi, durant les trois semaines séparant le 17 Tamouz et le 9 Av. Elle était pleine de fidèles qui, assis par terre, récitaient le tikoun ‘hatsot. Toutes les couches sociales s’y trouvaient rassemblées : cordonniers, tailleurs, menuisiers… Tous connaissaient le devoir de réciter ce tikoun durant ces trois semaines et d’y déplorer la destruction de notre Temple. »