La Paracha de la semaine en format PDF

la Paracha en PDF

Noa'h

24 Octobre 2020

ו חשון התשפ"א

Horaires de Chabbat
Localité Allumage Fin de Chabbat Rabbenou tam
Paris 18h27 19h32 20h18
Lyon 18h22 19h25 20h08
Marseille 18h24 19h24 20h06

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La prépondérance d’une foi ancrée dans le cœur

Rabbi David Hanania Pinto

« Et voici comment tu la feras. » (Béréchit 6, 15)

Dans la Mékhilta (Chémot 12, 2), nous pouvons lire : « “Ce mois-ci (hazé) est pour vous” : nous en déduisons que Moché avait du mal à définir l’aspect que devait avoir la lune au molad, si bien que D.ieu dut le lui montrer. » De même, concernant la construction du candélabre, il est écrit : « Telle (zé) est la confection du candélabre. » Enfin, au sujet du tribut d’un demi chékel, il est dit : « Ceci (zé) ils donneront. » Chaque fois que le démonstratif zé est employé, cela signifie qu’en regard de la difficulté de la chose, le Saint béni soit-Il dut la désigner du doigt à Moché.

S’il en est ainsi, le terme zé de notre verset introductif (voici) nous indique que Noa’h ne comprit pas d’emblée comment construire l’arche. Cet édifice était-il réellement si ardu à réaliser que l’Eternel fut contraint de lui en présenter une image concrète ? Il s’agissait pourtant d’une arche simple et non sophistiquée.

On pourrait avancer que Noa’h n’était pas très bricoleur. Mais, cette hypothèse se trouve réfutée par l’affirmation faite par son père le jour où il le nomma, « Celui-ci nous consolera (yéna’haménou) de notre tâche » (Béréchit 5, 29), ainsi interprétée par Rachi : « Jusqu’à l’époque de Noa’h, l’homme ne possédait pas d’instrument de labour. C’est Noa’h qui les a faits (…) et il marque donc la fin de ces peines. » Il en ressort que Noa’h était au contraire expert dans les travaux de construction. Dès lors, pourquoi D.ieu dut-Il lui montrer une représentation de l’arche ? N’était-il pas capable de la concevoir de lui-même ? Où résidait la difficulté de construire ce bateau dont le seul but était d’épargner les gens et les animaux du déluge ?

Avec l’aide de D.ieu, je propose l’explication suivante. Noa’h ne parvenait pas à comprendre comment une téva de petites dimensions – trois cents amot de long et cinquante de large – pouvait abriter tant de personnes et d’animaux. De plus, il fallait y entreposer la nourriture suffisante pour tous ceux-là durant une année entière. Enfin, il se demandait comment il arriverait à nourrir tant de bêtes, alors que certaines devaient manger le matin, d’autres l’après-midi et les troisièmes la nuit. Quand trouverait-il donc le temps pour se reposer ?

Un autre souci le préoccupait : comment l’arche résisterait-elle aux eaux bouillantes du déluge, s’élevant à des milliers de degrés ? Comment la poix l’enduisant ne fondrait-elle pas ? En outre, l’Eternel lui ordonna d’y agencer une fenêtre : « Tu donneras du jour à l’arche » (Béréchit 6, 16) ; pourquoi la porte n’était-elle pas suffisante ? Noa’h se demandait également comment il pourrait faire entrer dans l’arche le réem (type d’oryx) et le géant Og, roi de Bachan. Finalement, nos Maîtres affirment (Zéva’him 113b) que ces deux créatures bénéficièrent d’un miracle : sur les côtés de la téva, les eaux devinrent plus froides et ils purent donc s’y tenir sans être brûlés [leur haute taille leur permit par ailleurs de ne pas se noyer].

D’après le Pirké de Rabbi Eliezer (chap. 23), Og s’assit sur un arbre situé en-dessous de l’échelle de l’arche, afin d’échapper au déluge. Il jura à Noa’h et ses enfants qu’en retour, il serait leur serviteur éternel. Ce dernier fit alors un trou sur un côté de la téva, par lequel il lui faisait parvenir quotidiennement de la nourriture afin qu’il survive. Le texte confirme qu’il eut effectivement la vie sauve : « De fait, Og seul, roi de Bachan, était resté des derniers Réfaïm. » (Dévarim 3, 11) Noa’h, conscient de toutes ces difficultés qui l’attendaient, ignorait comment il parviendrait à les résoudre.

Aussi, l’Eternel lui indiqua-t-Il la manière de construire l’arche tout en plaçant son entière foi en Lui. Ce que Noa’h fit : à chaque planche qu’il plaçait, il renforçait sa confiance en D.ieu qui, sans nul doute, garantirait le maintien de cet édifice. Parallèlement, il cessa de compter sur sa propre réflexion pour trouver le moyen d’être épargné et de sauver ceux qui devaient l’être. Sa puissante foi dans le Créateur lui valut tous les miracles nécessaires à cela. S’il avait construit l’arche le cœur empli de doutes en D.ieu, elle n’aurait pas pu résister aux eaux bouillantes, ce qui aurait compromis la survie de l’humanité. C’est pourquoi il était nécessaire que le Saint béni soit-Il le guide dans sa construction.

Si nos Sages ont affirmé que la foi de Noa’h était chancelante, c’est comparativement à son haut niveau spirituel. Justement du fait qu’il était animé d’une grande foi, le moindre doute dans ce domaine fut sévèrement jugé par D.ieu.

Le Saint béni soit-Il accorde à l’homme des miracles et lui envoie le salut en fonction de son niveau de foi. Tel est le sens du verset « L’Eternel qui est à ta droite comme ton ombre tutélaire » (Téhilim 121, 5). La foi est comparable à notre ombre. Si on pointe un doigt en direction de son ombre, on n’y verra qu’un doigt ; si on présente sa main entière, on la retrouvera entière dans son ombre. De même, quiconque croit en D.ieu dans une faible mesure n’aura qu’une perception réduite de la Providence, alors que celui qui place toute sa confiance en Lui méritera une révélation éclatante.

Ainsi donc, le monde se maintient sur la base de la foi et de la confiance en D.ieu, comme il est dit : « Le juste vivra par sa ferme loyauté. » (‘Habacouc 2, 4) Puissions-nous nous renforcer au maximum dans cette sainte voie ! Amen.

CHEMIRAT HALACHONE

L’étendue de l’interdit de médisance

Il est interdit de raconter qu’untel a enfreint un commandement de la Torah, un commandement institué par les Rabbanim ou même une barrière fixée par ces derniers ou encore une coutume répandue. La transgression de l’un de ceux-ci étant vue péjorativement, le fait d’en parler revient à faire le blâme de leurs auteurs.

C’est pourquoi il est prohibé de raconter un événement lors duquel untel a enfreint une loi, même s’il s’agit d’une loi pour laquelle de nombreux Juifs ne sont pas pointilleux.

GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA

Une prière pour la réussite de l’opération    

Celui qui s’efforce de remplir ses jours et ses années d’existence de Torah, de crainte du Ciel et de foi pure en D.ieu mérite, en retour, de se voir accorder une vie longue et sereine, en bonne santé, lui permettant ainsi de continuer à Le servir fidèlement.

A cet égard, on m’a raconté l’histoire d’un vieillard qui devait subir une opération très complexe, mettant sa vie en danger – que D.ieu nous en préserve. Le chirurgien, d’origine chinoise, lui expliqua que les chances de succès étaient très faibles. Cependant, le malade, animé d’une foi entière dans le Tout-Puissant, lui demanda de bien vouloir, avant l’intervention, prononcer la phrase « Avec l’aide de D.ieu, l’opération réussira ».

Au départ, le médecin se moqua de sa requête et répondit : « Je ne crois en rien, à l’exclusion de la médecine. Or, d’après les analyses de celle-ci, il y a un très petit pourcentage de chances que vous puissiez survivre à une opération si délicate. » Toutefois, le patient insista, réitérant sa demande. Le praticien, qui comprit qu’il avait affaire à un homme naïf croyant aveuglément en D.ieu, finit par accepter, bien qu’il fût totalement hérétique.

Quand le vieillard se réveilla de l’opération, le chirurgien lui avoua : « Sachez que la vie vous a été donnée en cadeau. L’intervention a réussi au-delà de toute espérance, alors qu’elle était encore bien plus compliquée que je ne me l’imaginais au départ. De plus, tout au long de celle-ci, j’ai eu l’impression que mes mains se muaient d’elles-mêmes, comme si une main supérieure, dissimulée, les guidait pour vous soigner et vous sauver la vie. »

Puis, il ajouta : « Je suis convaincu que les mots que vous m’avez demandé de prononcer avant l’opération sont à la source de ce succès. Je vous promets que, dorénavant, avant chaque intervention, j’invoquerai l’assistance divine. »

Grâce à D.ieu, ce vieillard, qui semblait avoir approché le terme de sa vie, eut le mérite de vivre encore de longues années.

Il en résulte que, même si le nombre d’années imparties à l’homme s’est écoulé et que l’Eternel a prévu qu’il quitte ce monde, il peut bénéficier d’un sursis s’il place toute sa confiance en Lui. Ainsi, ce vieillard, habité par une foi solide en D.ieu, parvint même à influencer un non-juif hérétique et mérita de se voir ajouter de longues et belles années de vie.

Puissions-nous tous avoir le mérite de nous vouer au service du Créateur et puisse-t-Il nous accorder une existence longue et sereine pour continuer à satisfaire Sa volonté !

PAROLES DE TSADIKIM

Manger des poissons le Chabbat Noa’h, une ségoula pour la longévité

« Le Chabbat Noa’h est le moment le plus propice pour consommer des poissons. C’est une ségoula pour une longue vie. Lors du déluge, tous les animaux de la terre trouvèrent la mort, à l’exclusion des poissons de la mer, comme l’explique le Midrach (Béréchit Rabba 32, 11) sur les mots “tout ce qui peuplait le sol expira”. »

Cette merveilleuse ségoula a été énoncée par Rabbi Avraham Iguer de Lublin zatsal (Chéva’h Miyéhouda). Nous la retrouvons dans cette affirmation de l’auteur du Atérèt Tsvi de Ziditchov zatsal : « Rabbi Chlomélé de Karlin avait l’habitude de dire que celui n’ayant pas de poisson en l’honneur de Chabbat s’en souciera davantage que de tout autre sujet pour lequel nos Sages (Yoma 88a) nous ont enjoint de nous préoccuper. J’ajoute que celui ayant des poissons en l’honneur de Chabbat n’aura pas besoin de se soucier de quoi que ce soit durant toute la semaine à venir. »

Rabbi Tsvi Elimélekh de Dinov zatsal assure une triple bénédiction à celui consommant du poisson le Chabbat, comme il l’explique dans son ouvrage Bné Issakhar (Maamré Chabbatot 1, 11) : « La raison pour laquelle c’est une très grande mitsva de manger du poisson le Chabbat est que trois créations, conçues lors de trois jours consécutifs, ont été bénies : les poissons, créés le cinquième jour, l’homme, créé le sixième et le Chabbat, le septième. Aussi, l’homme qui mange des poissons en l’honneur de Chabbat jouira d’une triple bénédiction, qui ne se rompra pas facilement. »

Les Kabbalistes retrouvent cette idée à travers les mots du roi David « Dans de vertes prairies (déché), Il me fait camper », où le mot déché correspond aux initiales des mots daguim (poissons), Chabbat et adam (homme), allusion à cette combinaison magique garantissant une triple bénédiction, à laquelle renvoie la fin du verset « Il me conduit au bord d’eaux paisibles » (Téhilim 23, 2).

Cela étant, pourquoi les poissons conviennent-ils si bien aux repas du Chabbat ? Dans son ouvrage Ben Yéhoyada, Rabbénou Yossef ‘Haïm de Bavel – que son mérite nous protège – nous éclaircit à ce sujet : « “Tout ce qui peuplait le sol expira”, et non les poissons de la mer. Ceci peut expliquer pourquoi précisément les poissons ont été choisis pour orner la table du Chabbat : pour nous enseigner que le feu de la géhenne n’a pas d’emprise sur le jour saint, de même que les poissons échappèrent au feu du déluge, qui anéantit le monde par des eaux bouillantes. »

DE LA HAFTARA

Haftara de la semaine : « Réjouis-toi, femme stérile qui n’as point enfanté ! (…) » (Yéchaya chap. 54)

Lien avec la paracha : dans sa prophétie, Yéchaya évoque la promesse de l’Eternel de ne plus jamais frapper le monde par un déluge : « Certes, Je ferai en cela comme pour les eaux de Noa’h », ce qui correspond au sujet central de notre paracha.

Les achkénazimes ajoutent le passage « Ô infortunée, battue par la tempête (…) ».

DANS LA SALLE DU TRÉSOR

Rabbi David Hanania Pinto

Un péché prémédité et permanent

Selon les kabbalistes, les hommes de la génération du déluge avaient des âmes très saintes et auraient pu atteindre de hauts sommets spirituels.

Cependant, « plus l’homme est grand, plus son mauvais penchant l’est également », nous enseignent nos Sages. Aussi, suite à ses virulents assauts, ils déchurent pour finalement tomber dans les plus bas précipices d’où ils ne purent ressortir. En outre, celui qui connaît le Créateur et faute volontairement, prêt à se rebeller contre Lui, est haï du Saint béni soit-Il qui désire mettre fin à sa vie. Ainsi, il est affirmé : « J’ai aimé Yaakov, mais Essav, Je l’ai haï. » (Malakhie 1, 2) A priori, ceci semble surprenant : où trouve-t-on que D.ieu déteste Ses créatures ? On affirme, au contraire, qu’Il attend impatiemment leur repentir, comme des fils revenant au foyer parental.

Au départ, Yaakov et Essav, frères jumeaux élevés dans le même foyer, étudiaient tous deux la Torah. Lors du Chabbat, ils avaient le mérite d’observer la conduite de leur père, empreinte de sainteté et de piété. Yaakov en profita effectivement pour absorber sainteté, Torah et crainte du Ciel. Or, Essav détenait lui aussi le potentiel lui permettant de devenir Tsadik comme son frère, mais il refusa délibérément de choisir cette voie, préférant emprunter un mauvais chemin. Aspirant à mener une vie selon la licence des mœurs, il s’écarta sciemment d’une existence à l’aune de la Torah.

Quand un homme faute de son plein gré, sans y avoir été contraint, avec l’intention claire d’irriter le Créateur, il est haï de Lui.

Il en fut de même concernant les contemporains de Noa’h, qui fautèrent en toute connaissance de cause et s’engagèrent définitivement dans la voie du péché, alors qu’ils étaient conscients de leur haut niveau spirituel et savaient qu’ils descendaient d’Adam, forgé par D.ieu Lui-même. En outre, ils avaient constaté que Caïn s’était repenti et que, suite à cela, l’Eternel avait mis une lettre sur son front pour le protéger. Or, ils se laissèrent malgré tout séduire par leur mauvais penchant et s’éloignèrent de l’Eternel avec effronterie. Ceci éveilla la haine du Très-Haut à leur égard et Sa volonté de les détruire, car quel intérêt avait-Il à les maintenir en vie pour qu’ils continuent à mépriser Sa Torah ? D’où le terrible arrêt divin : « J’effacerai l’homme que J’ai créé de dessus la face de la terre. »

PERLES SUR LA PARACHA

La piété de Noa’h

« Ceci est l’histoire de Noa’h. Noa’h fut un homme juste, entier entre ses contemporains. » (Béréchit 6, 9)

L’incipit de notre section décrit Noa’h comme un « homme juste, entier (tamim) », alors que plus loin, nous lisons : « L’Eternel dit à Noa’h : “Entre, toi et toute ta famille, dans l’arche ; car c’est toi que J’ai reconnu juste parmi cette génération.” » (Béréchit 7, 1) Rachi, s’appuyant sur la Guémara, en déduit qu’en présence d’un individu, on ne fait que son éloge partiel.

Le Beit Yossef explique différemment ce glissement. Noa’h vécut dans plusieurs générations, celle du déluge et celle de la dispersion. La principale épreuve de la première fut l’immoralité et, celle de la seconde, l’athéisme.

L’homme refusant de céder à l’immoralité est appelé un juste, tandis que celui résistant aux vents hérétiques est tamim – comme il est dit : « Tu seras entièrement (tamim) au Seigneur, ton D.ieu. »

Au début de la paracha, la Torah qualifie Noa’h à la fois d’homme juste et entier, en précisant « entre ses contemporains », sous-entendu ceux de la génération du déluge et de celle de la discorde. Plus loin, lorsque l’Eternel lui adresse la parole avant qu’il entre dans l’arche, il est uniquement dit « juste », car c’est en comparaison avec « cette génération », celle du déluge.

Quand on ne peut punir par l’argent

« La terre s’était remplie d’iniquité. » (Béréchit 6, 11)

L’auteur de l’ouvrage Yalkout Haguirchoni souligne que l’Eternel, miséricordieux, ne punit pas l’homme directement, mais tout d’abord ses biens – comme par les affections lépreuses qui touchaient en premier lieu les murs de sa maison, puis ses vêtements. S’il en est ainsi, pourquoi n’appliqua-t-Il pas ce principe pour les contemporains de Noa’h, dont Il décréta directement la mort ?

Leur argent ne leur appartenait pas, puisqu’ils l’avaient volé ; il était donc impossible de les punir par ce biais. C’est la raison pour laquelle D.ieu dut les sanctionner en les anéantissant. D’où le sens de cet enseignement de nos Sages : « Leur décret ne fut scellé qu’à cause du vol » – le Créateur dut les détruire par le déluge, car, en tant que voleurs, ils ne pouvaient pas être châtiés autrement.

Un procureur effronté

« La terre s’était remplie d’iniquité. » (Béréchit 6, 11)

L’auteur de l’ouvrage Pir’hé Chochana, l’un des élèves du ‘Hafets ‘Haïm, rapporte cette réflexion de son Maître : pourquoi les hommes de la génération du déluge, qui transgressaient de graves péchés comme l’idolâtrie et l’immoralité, furent-ils anéantis précisément à cause du vol ?

Il répond en s’appuyant sur cet enseignement de nos Sages : « Quand la mesure est pleine de fautes, quel est le principal chef d’accusation ? Le vol. » Pourquoi ? Dans le traité Avot, il est dit : « Celui qui accomplit une mitsva acquiert un défenseur et celui qui commet un péché acquiert un accusateur. » Or, ces anges créés par la mitsva ou la avéra sont le reflet de l’acte étant à leur origine. Par exemple, si une mitsva a été exécutée avec zèle, l’ange qui en découle sera lui aussi zélé, alors qu’une autre faite avec paresse donnera naissance à un ange paresseux.

Or, la rapine est généralement entreprise avec effronterie, si bien qu’elle engendre un ange effronté. Lorsque les péchés de l’homme outrepassent la mesure, il a de nombreux accusateurs, mais seul l’un d’entre eux, insolent, prend les devants pour s’empresser de l’accuser – celui créé par le vol. Les autres cherchent également à l’accuser, mais n’ont pas la même audace. C’est pourquoi, parmi les nombreux péchés perpétrés par l’homme, le vol est son principal chef d’accusation, principe confirmé au sujet de la génération du déluge.

LA PARACHA SOUS UN NOUVEL ANGLE

La Torah relate que le déluge s’étendit sur quarante jours, durant lesquels toute créature vivant sur terre fut détruite : « Alors périt toute créature se mouvant sur la terre (…). Tout ce qui était animé du souffle de la vie, tout ce qui peuplait le sol expira. D.ieu effaça toutes les créatures qui étaient sur la face de la terre, depuis l’homme jusqu’à la brute, jusqu’au reptile, jusqu’à l’oiseau du ciel ; et ils furent effacés de la terre. » (Béréchit 7, 21-23)

Rabbénou ‘Haïm ben Attar – que son mérite nous protège – explique que non seulement toute créature vivante fut détruite, mais leurs corps le furent également par les eaux bouillantes et froides. Tous les cadavres furent liquéfiés et disparurent totalement, comme s’ils n’avaient jamais existé.

A priori, le but du déluge avait ainsi été atteint. Pourtant, la Torah écrit ensuite : « Les eaux furent abondantes sur la terre pendant cent cinquante jours. » (21, 24) En d’autres termes, durant encore cette longue période, les eaux continuèrent à se renforcer. Puis, seulement ensuite, « D.ieu se souvint de Noa’h et de tous les animaux sauvages et domestiques qui étaient avec lui dans l’arche. D.ieu fit passer un souffle sur la terre et les eaux se calmèrent. Les sources de l’abîme et les cataractes célestes se refermèrent et la pluie ne s’échappa plus du ciel » (8, 1-2).

Dans la suite de son commentaire, le Or Ha’haïm explique pourquoi le déluge devait se conclure ainsi : « Le texte désire nous informer que l’Eternel ordonna aux eaux de se renforcer. De même qu’Il leur avait enjoint, lors des six jours de la création, “Que les eaux fourmillent”, ici, Il leur demande de se conduire avec vigueur. C’est pourquoi, après que toute créature vivante fut effacée, il est dit “les eaux furent abondantes”, ce qui, a priori, n’était plus nécessaire, puisque même les cadavres avaient disparu. Mais, la raison est la suivante : les eaux, occupées à se plier à l’ordre divin, ne devaient pas chercher de justificatifs les dispensant de leur devoir de se renforcer une fois que toute vie avait été effacée. »

A l’instar des eaux du déluge, il nous incombe de nous plier inconditionnellement à la volonté divine, sans faire de calculs et sans réfléchir à l’intérêt de telle ou telle mitsva.

La détermination du Rav de Brisk

L’ouvrage Chéal avikha véyaguèdkha relate une histoire prouvant que l’homme résolu à obtempérer fidèlement à l’ordre divin, sans rien n’y modifier ni l’adapter à sa perception personnelle de la vie, bénéficiera d’une assistance divine particulière.

Lors de la première année où le Rav de Brisk exerçait ses fonctions, un Juif fut condamné à mort pour infraction de la loi. Le gouvernement local autorisait tout condamné à se confesser avant l’application de cette peine. Les Juifs le faisaient auprès d’un Rav et les non-juifs face à un curé.

A la clôture du Chabbat, le Juif devait être tué. Un messager du gouvernement rejoignit la demeure du Rav de Brisk pour lui remettre une missive lui demandant de l’accompagner à la prison afin que le condamné puisse lui faire sa confession avant de mourir.

Sans hésiter, le Rav répondit : « Je ne viens pas. » Pourquoi refusa-t-il ? Car, en s’y rendant, il aurait précipité la mort de ce Juif, étant donné que, tant qu’il ne s’était pas confessé, on ne lui administrerait pas sa sanction.

Son refus était catégorique. Bien qu’on lui signifiât que, s’il refusait, on demanderait à un autre Rav de se charger de cette tâche, il campa sur ses positions : « Si vous voulez vous adresser à quelqu’un d’autre, faites-le. Mais, moi je ne contreviendrai en aucun cas à un interdit de la Torah. »

L’émissaire prit congé de lui et, penaud, retourna chez le souverain pour lui faire part de la tournure des faits. Ce dernier, furieux, s’empressa d’envoyer chez le Rav un officier plus important.

L’officier le pressa de se rendre immédiatement à la prison, le menaçant de lourdes peines en cas de refus et soulignant qu’en tant que Rav, il devait d’autant plus se conformer aux lois du pays. Cependant, lui aussi rebroussa chemin seul. Il expliqua au gouverneur que le Sage s’obstinait à ne pas venir.

Rouge de rage, celui-ci décida de se déplacer lui-même. Lorsque son carrosse s’arrêta à la porte de la demeure du Rav, tous ses voisins prirent peur et s’écrièrent : « Le Rav détruit la ville ! Le Rav nous met tous en danger ! »

Quant au Tsadik, il resta impassible et expliqua calmement à son noble visiteur qu’il ne pouvait concevoir d’enfreindre les lois de la Torah pour remplir cette tâche. Les nouvelles menaces qu’on lui formula selon lesquelles il serait sanctionné avec une grande sévérité ne l’intimidèrent pas plus qu’auparavant.

Exaspéré, le souverain revint sur ses pas sans ajouter un mot. Les hommes de la communauté se trouvant dans la pièce du Rav y restèrent figés de peur, s’attendant au pire…

La nouvelle inattendue

L’espace de quelques instants, la ville de Brisk fut plongée dans la plus grande confusion, partagée entre les défenseurs du Rav et ses opposants. Les premiers pensaient qu’il avait eu raison de rester fidèle aux lois de la Torah, alors que les seconds avançaient qu’il aurait dû se plier à l’ordre du gouvernant, afin de ne pas mettre toute la communauté juive en danger.

Mais, ni les uns ni les autres ne s’attendaient au miraculeux dénouement de cet épisode : le soir même, il fut annoncé que le condamné juif avait été gracié !

Tous réalisèrent alors que sans l’obstination de leur Rav, leur pauvre frère n’aurait sans doute pas pu échapper au sort tragique qui l’attendait. L’attachement indéfectible du juste à l’ordre divin lui avait sauvé la vie.

(Oumatok Haor) 

 

 

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