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Chémot

9 Janvier 2021

כה טבת התשפ"א

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Se distinguer des non-juifs, le secret de notre pérennité

Rabbi David Hanania Pinto

« Il se leva un nouveau roi sur l’Egypte, qui ne connaissait pas Yossef. » (Chémot 1, 8)

Comment est-il possible que le nouveau roi d’Egypte n’avait pas entendu parler de Yossef, de son génie grâce auquel son pays avait échappé aux affres de la famine ? Notre question garde toute son acuité si l’on considère l’avis selon lequel il s’agissait du même roi, Paro, qui l’avait nommé vice-roi et feignait simplement ne pas le connaître. Comment put-il oublier l’homme ayant sauvé son royaume et dirigé sa gestion économique pour pourvoir à la subsistance de tous ses habitants ? Comment celui qui estima sincèrement Yossef et l’honora changea-t-il soudain de dispositions à son égard et vis-à-vis de son peuple ?

Une autre question se fait jour à la lecture du verset « Yossef mourut, ainsi que tous ses frères, ainsi que toute cette génération » (ibid. 1, 6). A la fin du livre de Béréchit, la Torah nous avait déjà informés du décès de Yossef. En outre, pourquoi nous annonce-t-elle ici celui des autres chefs de tribus et de tous les membres de leur génération ? Le Or Ha’haïm propose une démarche explicative ; nous développerons la nôtre, avec l’aide de D.ieu.

Il est écrit : « Or, les enfants d’Israël avaient fructifié, pullulé (…) et la contrée en fut remplie. » (Ibid. 1, 7) Nos Maîtres commentent (Yalkout Chimoni, Chémot 162) : « Ils emplirent les théâtres et les cirques ; aussitôt, des lois de discrimination furent prononcées. » Autrement dit, avant leur asservissement, les enfants d’Israël avaient déjà commencé à déchoir. Ils avaient délaissé les lieux d’étude, implantés par Yéhouda sur l’ordre de Yaakov, pour se mêler aux Egyptiens et profiter de leurs attractions.

Les versets cités plus haut décrivent en fait le déroulement des événements, la chute spirituelle de nos ancêtres à l’origine de leur asservissement. La mort de Yossef et de sa génération, qui vivaient sous l’influence sainte de Yaakov, entraîna dans son sillage la disparition de la spécificité du peuple juif. Une nouvelle génération, ne se comportant pas à l’aune de la tradition ancestrale, se leva et se laissa influencer par la culture égyptienne. Le Midrach précité ajoute que, suite au décès de Yossef et de ses frères, les Juifs cessèrent de pratiquer la circoncision, à l’exception de la tribu de Lévi.

Cela étant, revenons à notre question : comment le nouveau roi put-il ignorer Yossef ? Connaître quelqu’un, c’est se lier à lui. Paro connaissait Yossef et l’estimait, mais, il ne voyait pas de lien entre lui et les membres du peuple juif, assimilés, de cette période. Il avait perçu en Yossef un homme saint, animé de l’esprit divin. De même, il considérait Yaakov comme un saint et avait reconnu l’efficacité de sa bénédiction – suite à laquelle les eaux du Nil montaient à ses pieds. Il avait connu les Hébreux lorsqu’ils se confinaient dans la région de Gochen, dans les synagogues et lieux d’étude.

Or, à présent, ils délaissaient cet héritage et se mettaient à imiter les autochtones. Paro en déduisit qu’il s’agissait d’une autre nation, sans aucun rapport avec celle de l’époque. S’étant écartés des valeurs prônées par leurs pères, Paro considéra qu’ils rompirent la chaîne les liant à eux et perdit toute estime pour eux. Tel est le sens profond de sa non-connaissance de Yossef mentionnée par le texte ; il ne fit pas le lien entre les membres actuels du peuple juif et ceux de la génération précédente, contemporains de Yossef. Ne se sentant plus redevable vis-à-vis des Hébreux de cette génération, il en vint à fomenter de mauvais desseins à leur encontre pour les exterminer.

Ce Paro, « qui ne connaissait pas Yossef », asservit sa descendance. Pourtant, il gracia la tribu de Lévi, totalement impliquée dans l’étude de la Torah, et la dispensa des travaux forcés, lui permettant de se vouer à cette tâche. Car, il vit en elle la continuation de Yaakov et de Yossef et l’honora en tant que telle.

Il en résulte que, lorsque les enfants d’Israël adhèrent à la Torah et l’étudient, même un mécréant comme Paro, représentant des forces impures, reconnaît leur sainteté et s’y soumet. Contre son gré, il permet le maintien de la sainteté et l’agrandissement de ses frontières dans son pays. De sa propre initiative, il réserva la région de Gochen à nos ancêtres, afin qu’ils puissent s’y installer sereinement et se consacrer à la Torah et au service divin. Car, lorsque la sainteté et la pureté règnent dans toute leur puissance, les forces impures se dissipent automatiquement. Par contre, quand le peuple juif tourne le dos à sa tradition et adopte une autre culture, il leur donne la force de prendre le dessus.

Il s’agit là d’un principe de base régissant la pérennité du peuple juif à travers l’histoire. Même lorsque nous sommes exilés dans un pays étranger, telle une brebis entourée de soixante-dix loups, si nous nous attachons fermement au respect des mitsvot, nos ennemis feront la paix avec nous et seront impuissants. Nos accusateurs ne pourront ouvrir leurs bouches et seront contraints de nous honorer et de nous protéger. Mais, si nous tentons de nous rapprocher d’eux, de nous mêler à eux et de les imiter, ils se lèveront contre nous et prononceront de nouveaux décrets à notre encontre pour nous éloigner d’eux.

Ce phénomène est un effet de la grâce divine. Par ce biais, l’Eternel nous permet de préserver notre spécificité de peuple élu à travers les exils successifs. « Car le Seigneur ne délaisse pas Son peuple, et Son héritage, Il ne l’abandonne pas » : même lorsque nous avons le statut de « peuple », Il ne nous délaisse pas et s’efforce de nous ramener vers Lui et de nous libérer au plus vite.

GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA 

Une promesse secrète ?

Le 10 Adar 5755 (1995), je fus sandak à la brit-mila du fils de David Cohen, un fidèle disciple. A cette occasion, le mohel, le docteur Attias, prit la parole pour raconter un incident qui s’était déroulé deux semaines plus tôt :

« Un de mes amis s’est présenté chez Rabbi David ‘Hanania Pinto pour lui demander une brakha dans un certain domaine. Il y avait une longue file d’attente et il a donc dû patienter de longues heures.

« Quand son tour arriva enfin, il entra. Là, ce fut la surprise : avant même qu’il n’ait ouvert la bouche, le Rav lui a dit : “Si vous voulez que vos problèmes s’arrangent, vous avez l’obligation d’accomplir la promesse que vous avez faite au Maître du monde d’étudier chaque semaine chnaïm mikra véé’had targoum.” Puis, il l’a béni en lui souhaitant la réussite.

« Mon ami était sous le choc : D.ieu seul et lui-même étaient au courant de cette promesse, formulée avant d’être introduit auprès du Rav. Il s’était alors effectivement engagé, si son problème s’arrangeait, à se soumettre à ce programme d’étude hebdomadaire. Dans ce cas, comment le Rav avait-il eu connaissance de sa promesse ? Comment avait-il lu dans ses pensées avant même qu’il ne les formule ? »

En entendant ce récit, je me suis souvenu de cette entrevue et de ce que j’avais dit à cette personne. Mais je sais cependant que je n’ai jamais été prophète. La seule motivation qui m’anime est d’aider autrui et c’est pourquoi, par le mérite de mes ancêtres, D.ieu place dans ma bouche les mots justes, capables de toucher mes interlocuteurs, afin que je puisse les conseiller et les aider à surmonter leurs difficultés.

DE LA HAFTARA

Haftara de la semaine : « Paroles de Yirmiyahou, fils de ‘Hilkiyahou (…). » (Yirmiyahou chap. 1 et 2)

Haftara chez les Achkénazes : « Aux temps futurs, Yaakov étendra ses racines (…). » (Yéchaya chap. 27)

Les Juifs originaires de Babylone et du Yémen lisent la haftara : « Fils de l’homme, fais connaître (…). » (Yé’hezkel chap. 16)

Lien avec la paracha : la haftara nous rapporte que Yirmiyahou refusa au départ la mission de l’Eternel du fait qu’il était jeune et estimait ne pas savoir bien parler, tandis que la paracha nous fait part du refus de Moché d’assumer la mission divine sous prétexte de ne pas être un bon orateur.

PAROLES DE TSADIKIM

Combien il faut travailler pour déraciner la jalousie

Lorsque Moché sortit du palais de Paro, il fut surpris par le spectacle de deux Juifs se confrontant, querelle à travers laquelle ils trahirent leurs traits de caractère. Secoué par cette scène peu élogieuse, il demanda au méchant : « Pourquoi frappes-tu ton prochain ? »

Comme nous l’enseignent nos Sages, la plupart des racines du mal se trouvent dans le vice de la jalousie, l’une des causes expulsant l’homme de ce monde.

Dans l’un de ses cours, le Tsadik Rabbi Eliahou Lopian zatsal raconta l’histoire suivante afin d’illustrer la tare de la jalousie : « J’ai pris le train pour arriver en Pologne. J’y ai loué les services d’un cochet pour qu’il me conduise chez moi. La route était longue et il voulut se reposer un peu. Il arrêta sa carriole sur le bas-côté de la route et défit les rênes de son cheval. Près de l’endroit où nous nous arrêtâmes, il y avait un étang. Le cheval se dirigea vers là pour boire, mais, avant de se désaltérer, il donna un coup de sabot dans l’eau, qui devint boueuse. Seulement ensuite, il but.

« Etonné, je demandai à mon cocher : “Pourquoi donc rend-il l’eau boueuse avant de boire ? Pourquoi ne boit-il pas tant qu’elle est propre ?”

« “Ecoute bien, m’expliqua-t-il patiemment, mon cheval a remarqué, à la surface de l’eau, le reflet d’un autre cheval voulant lui aussi boire de cet étang. Il en a été si jaloux qu’il s’est conduit sauvagement envers son concurrent, qu’il aurait presque été prêt à tuer pour s’être immiscé dans son territoire. Il en a même complètement oublié sa soif.”

« Il n’existe pas d’élément de ce monde duquel nous ne puissions apprendre les voies de l’Eternel ; notre mission est de les déceler à travers toutes les créations. »

Rav Lopian conclut son histoire aux élèves de la Yéhiva par le sens de cette parabole : « Telle est la nature des animaux. Lorsque nous sommes témoins d’une telle conduite, nous comprenons combien l’homme doit se travailler pour annihiler tout sentiment ou réaction provenant de la jalousie. »

CHEMIRAT HALACHONE 

Eviter de dire du mal inutilement

D’après la Torah, il est interdit de médire des vivants. Mais, nos Maîtres ont ajouté la prohibition de mépriser et d’injurier les défunts. Les décisionnaires ont écrit que les Sages des anciennes générations ont prononcé un anathème contre quiconque formule des propos moqueurs ou dénigrants sur un mort.

De même, on n’a pas le droit de dire du blâme de la Terre Sainte. La génération qui sortit d’Egypte, qui tomba dans ce travers, fut punie par quarante ans d’errance dans le désert, où tous ses membres décédèrent.

En vérité, il est préférable de s’abstenir de prononcer toute parole mauvaise. On raconte qu’un homme pieux passa une fois près de la charogne d’un chien, qui dégageait une odeur très désagréable. Ses élèves lui dirent : « Quelle odeur infecte ! » Il leur répondit : « Quelles dents blanches a-t-elle ! » Ils regrettèrent alors d’avoir dit du mal. Si on doit s’en abstenir pour un chien mort, a fortiori pour un homme vivant !

DANS LA SALLE DU TRÉSOR

Rabbi David Hanania Pinto

La lumière et l’eau au sauvetage de Moché

« Cette femme conçut et enfanta un fils. Elle considéra qu’il était beau et le tint caché pendant trois mois. » (Chémot 2, 2)

Les événements miraculeux ayant entouré la naissance de Moché et son sauvetage nous laissent deviner son brillant avenir. De même en est-il de ses exceptionnelles qualités d’âme, indispensables aux fonctions de dirigeant du peuple juif, de médiateur de la libération et de transmetteur de la Torah.

Dans la Guémara (Sota 12a), nous pouvons lire : « “Elle considéra qu’il était beau (tov)” : lorsque Moché naquit, la demeure s’emplit de lumière. Ici, il est écrit : “Elle considéra qu’il était beau (tov)” et dans Béréchit (1, 4), il est dit : “D.ieu considéra que la lumière était bonne (tov).” La lumière diffusée dans le foyer d’Amram suite à la naissance de Moché est désignée par le terme tov, tout comme la lumière originelle créée lors des six jours de la création. »

Cette lumière originelle, bien particulière, est celle de la Torah. Nos Sages soulignent (‘Haguiga 12a) que la lumière créée par le Saint béni soit-Il le premier jour permettait à l’homme de voir d’un bout du monde à l’autre. Mais, constatant que les générations du déluge et de la dispersion fauteraient, Il la mit de côté pour les Tsadikim, dans les temps futurs.

Où D.ieu a-t-Il dissimulé cette lumière ? D’après le Zohar, dans la Torah, à travers les secrets qu’elle recèle. Le Zohar affirme également que l’Eternel donna cette même lumière à Moché lorsqu’il naquit et qu’il l’utilisa durant trois mois. A ce moment, il fut emmené auprès de Paro et cette lumière lui fut retirée. On la lui restitua lors du don de la Torah au Sinaï et il en fit usage tout le reste de son existence. C’est pourquoi il dut porter un masque.

Un dernier détail concernant cet enfant exceptionnel au devenir prometteur : « Ne pouvant le cacher plus longtemps, elle lui prépara un berceau d’osier (…) ; elle y plaça l’enfant et le déposa dans les roseaux sur la rive du fleuve. » A première vue, le fait d’abandonner un bébé sur le fleuve semble ahuri. Le garder à la maison l’exposait au décret de Paro et au risque d’être trouvé par ses officiers, mais, en l’abandonnant aux eaux du Nil, Yo’heved ajoutait un danger à ce premier.

Cependant, Moché, appelé à transmettre au peuple juif la Torah, comparée à l’eau, retirait de celle-ci vitalité et protection. De même que l’eau assure le maintien du monde et de l’humanité, ainsi en est-il des paroles de Torah, comme il est dit : (Michlé 4, 22) « Car [elles] sont un gage de vie pour qui les accueille. » (Sifri debé Rav 48, 22) Telle fut, en substance, la réponse de Rabbi Akiva à Papous ben Yéhouda, par l’exemple du renard suggérant aux poissons de sortir de l’eau pour échapper aux pécheurs.

Finalement, il s’avéra que Moché fut justement sauvé par les eaux, puisque c’est là que Batia le remarqua et, prise de pitié, le prit chez elle pour l’élever.

PERLES SUR LA PARACHA

L’œuf cuit, un symbole

« Mais, plus ils l’accableront, plus il se multipliera et plus il augmentera. » (Chémot 1, 12)

Ce verset, décrivant ce qui se passa en Egypte, aurait dû être écrit au passé. Pourquoi avoir employé le futur ?

Un non-juif polonais demanda à Rav Meïr Shapira, fondateur de la Yéchiva ‘Hakhmé Loublin, pourquoi les Juifs ont la coutume de manger un œuf dur à Pessa’h, le soir du Séder. Il lui répondit que, contrairement aux autres aliments, qui deviennent plus tendres avec la cuisson, l’œuf durcit quand on le cuit.

Notre verset nous communique un message : à l’avenir également, lorsque d’autres ennemis se lèveront contre les Juifs pour les persécuter, ils ne feront que stimuler leur développement. Tel est le symbole véhiculé par l’œuf dur, consommé la nuit du Séder.

S’élever avec les moyens du bord

« L’endroit où tu te trouves est un sol sacré. » (Chémot 3, 5)

Nos Sages nous enseignent : « Ne dis pas : “J’étudierai quand je serai libre.” » L’homme a tendance à penser que, face aux difficultés, il ne peut étudier la Torah et observer les mitsvot ; il se dit qu’il s’y consacrera quand l’Eternel améliorera sa situation.

D’après le ‘Hafets ‘Haïm, notre verset laisse entendre que la situation dans laquelle l’homme se trouve est sainte et l’Eternel désire qu’il se plie à Sa volonté dans ces conditions, fussent-elles précaires. D’ailleurs, nos Maîtres affirment dans le Midrach que celui qui étudie la Torah dans la détresse est mille fois plus récompensé, la récompense étant fonction de l’effort.

Un argument et non une plainte

« Depuis que je suis allé chez Paro pour parler en Ton Nom, il a fait du mal à ce peuple. » (Chémot 5, 27)

Le célèbre défenseur du peuple juif, Rabbi Lévi Its’hak de Berditchov – que son mérite nous protège – explique que Moché ne voulait pas dire du mal de D.ieu, mais plutôt fournir un argument à la défense du peuple juif, que ses défenseurs pourraient utiliser dans leur plaidoyer.

Quel est cet argument ? La haine de Paro, dont les enfants d’Israël sont l’objet, provient du fait qu’ils sanctifient le Nom divin et représentent la Torah. A cause de cela, ils sont haïs et persécutés, dans l’esprit du verset « Mais pour Toi, nous subissons chaque jour la mort » (Téhlim 44, 23). Aussi, il T’appartient de nous sauver des mains de nos ennemis.

Les difficultés, un bon signe

« Depuis que je suis allé chez Paro pour parler en Ton Nom, il a fait du mal à ce peuple. » (Chémot 5, 27)

Nos Maîtres nous enseignent que celui qui accomplit une mitsva de manière désintéressée et se heurte à des difficultés doit savoir qu’il est sur la bonne voie. Car, ces embûches sont l’œuvre du mauvais penchant. Par contre, celui qui agit poussé par des mobiles personnels sera assisté par le mauvais penchant.

Dans son ouvrage Min’hat Cohen, Rabbi Ra’hamim ‘Haï ‘Havita Hacohen explique les propos de Moché à l’Eternel. « Depuis que je suis allé chez Paro pour parler en Ton Nom », c’est-à-dire de manière désintéressée, « il a fait du mal à ce peuple », le mauvais penchant s’oppose à cette mitsva ; par conséquent, il n’est pas sûr que je parviendrai à libérer le peuple juif d’Egypte. « Pourquoi m’avais-Tu donc envoyé ? » poursuit-il. Tu aurais plutôt dû charger un ange de cette mission, le mauvais penchant étant impuissant contre lui. En réalité, les justes parfaits sont d’un niveau encore plus élevé que les créatures célestes, mais, dans son extrême humilité, Moché ne se considérait pas comme tel.

Aussi, le mauvais penchant n’était-il pas en mesure de faire obstacle à Moché, en particulier dans sa démarche pour libérer les enfants d’Israël. Le fait que Paro alourdit le travail imposé à ces derniers n’était pas l’expression de l’opposition du mauvais penchant, mais celle de la volonté de l’Eternel d’endurcir le cœur du despote pour qu’il refuse de libérer Ses enfants et soit puni en conséquence.

Ainsi, si l’on doit faire face à des difficultés dans l’accomplissement d’une mitsva, on en déduira que c’est parce qu’on l’accomplit avec désintéressement ; on devra alors lutter contre le mauvais penchant pour le subjuguer.

LA PARACHA SOUS UN NOUVEL ANGLE

Au cours d’une conversation avec un ba’hour auquel il prononçait des paroles d’encouragement, Rav Aharon Leib Steinmann zatsal raconta : « Exilé de mon pays, je suis arrivé en Suisse. Mais, finalement, il s’est avéré que c’était pour le bien : cela m’a sauvé la vie. » Tous les événements vécus par un Juif sont pour son bien. La paracha de Chémot illustre aussi ce principe. Paro décréta que tout nouveau-né hébreu garçon soit jeté dans le Nil et qu’on ne laisse vivre que les filles. Qu’advint-il finalement ? Moché rabénou naquit et échappa à ce décret.

Il en en est ainsi de tous les actes humains. Les hommes pensent agir de leur propre chef, mais ignorent qu’en vérité, on les fait agir. Ils ne comprennent pas que leurs actes sont inscrits dans le plan divin devant inéluctablement se réaliser.

La brochure « A gechmakte wort » raconte l’effrayant accident d’un avion de la compagnie Fon American au départ de Londres et à destination des Etats-Unis, qui s’écrasa sur la ville Lo Corby. Quelques jours après cette tragédie, le journal Hamodia publia une lettre lui étant parvenue de Londres :

« Chauffeur de taxi, j’habitais autrefois en Israël et, aujourd’hui, je vis à Londres. J’aimerais raconter l’histoire d’une famille qui échappa miraculeusement à l’accident d’avion de la semaine dernière. J’en ai été témoin et ai même eu le mérite de contribuer à ce sauvetage. Le jour du vol, une famille de Stanford-Hill me demanda de la conduire à l’aéroport. En route, j’eus un incident inhabituel : l’une des roues de mon véhicule éclata. Malgré l’impatience de mes passagers, je m’arrêtai pour la remplacer par la roue de secours se trouvant dans le coffre.

« Soudain, un nouveau bruit se fit entendre en provenance des roues. C’en était trop pour mes voyageurs pressés. Je sortis de ma voiture et constatai qu’une autre roue venait de rendre l’âme. N’ayant pas une deuxième roue de secours, je compris que je n’avais pas d’autre solution que de laisser sur place mon véhicule, me rendre à la station essence la plus proche, située à dix minutes de là, et acheter une nouvelle roue.

« Ils se mirent à me faire toutes sortes de remarques : “Soyez en bonne santé !” lança ironiquement la mère de famille, très inquiète de ce retard. “Pourquoi n’avez-vous pas remarqué dès le début de notre voyage qu’il n’y avait pas d’air dans vos roues ?” Ils eurent encore d’autres arguments semblables, me récriminant à juste titre pour ce qui était arrivé, mais je n’avais d’autre choix que de rejoindre la station essence. J’y achetai une roue et retournai sur mes pas pour la fixer. Mes passagers, qui n’avaient pas réussi à arrêter un autre taxi, m’accueillirent avec joie et fureur mêlées.

« La crevaison réparée, je me précipitai pour reprendre la route vers l’aéroport. De tous les côtés, des voix impatientes me poussaient à me dépêcher, l’heure du vol approchant à grands pas. Je priai de tout mon cœur que nous puissions rattraper le retard. Mais, soudain, un son très strident retentit, bientôt suivi par des éclats de verre. Cela semblait être un rêve, nous n’y croyions pas. Pourtant, c’était bien la réalité : le camion qui nous précédait et transportait des pierres à l’arrière s’était brutalement arrêté. Un mètre de petites pierres atterrit sur mon pare-brise, qui s’éclata en mille morceaux.

« Suite à une courte discussion, nous décidâmes de poursuivre la route avec le pare-brise cassé. Cependant, je devais m’arrêter un instant pour prendre les coordonnées du chauffeur de camion, afin de pouvoir me faire dédommager. La colère de la mère de famille et de ses enfants augmentait, tandis que, stressée, elle murmurait : “Qu’il n’ose pas demander à être rémunéré pour ce voyage !” En mon for intérieur, je me réjouis de cette modeste requête ; je craignais devoir encore les rembourser pour ce fâcheux contretemps …

« Après cet arrêt de vingt minutes, nous nous remîmes en route. Le volant en main, j’appuyai à fond sur la pédale. En voyant l’heure, j’avais encore un espoir d’arriver à destination à une heure raisonnable.

« Toutefois, le temps pressant, je décidai d’emprunter la bande d’arrêt d’urgence, enfreignant le code de la route, afin de soulager un peu mes passagers. Mais, vous l’avez sans doute deviné : des lumières indésirables ne tardèrent pas à apparaître devant nous. Un policier me fit signe de m’arrêter sur le bas-côté et de sortir de mon véhicule. Il me demanda des explications sur ma conduite. Le pare-brise cassé, l’agitation à l’intérieur de la voiture et mes tentatives de justification, rien n’y fit pour attendrir l’agent. Je le suppliai de me libérer l’espace d’une heure, pendant laquelle je conduirais enfin mes passagers à destination, lui proposant de lui laisser en gage mes papiers et mon argent. Mais, mes paroles tombèrent dans l’oreille d’un sourd.

« Une fois libéré, je rallumai le moteur pour la cinquième fois. Les réclamations s’étaient presque arrêtées et pour cause : ils n’avaient plus trop d’espoir d’arriver à temps. Nous parvînmes à destination exactement à l’heure prévue du décollage. Sans trop de motivation, ils sortirent leurs bagages de ma voiture. Je me hâtai de leur arranger des places dans le prochain avion pour l’Amérique, qui devait décoller une heure plus tard. Grâce à l’intervention d’un ami travaillant pour cette compagnie, j’y parvins.

« Je les en informai puis, tant que je tenais encore debout, m’empressai de prendre congé d’eux, sans recevoir le moindre sou. Je respirai profondément et me mis à réfléchir à ces étranges aventures : deux crevaisons successives, brisure du pare-brise et amende, tant d’ennuis inattendus réunis en un seul voyage. Il me fallait à présent m’occuper de toutes les réparations et j’espérais que ma journée se termine pour le mieux.

« De retour à Stamford-Hill, je fus choqué d’entendre le journaliste annoncer, d’une voix tremblante, que ce fameux avion s’était écrasé. J’eus des vertiges et mes mains tremblèrent. “Maître du monde ! m’écriai-je. Combien Tes œuvres sont grandes, Tes pensées profondes !” Les larmes aux yeux et la gorge serrée, je fus saisi d’émotion. Je venais de constater de mes propres yeux l’incroyable manière avec laquelle D.ieu agence les événements. »

Un Juif doit être conscient du fait que, même lorsque les choses ne se passent pas exactement comme il l’avait prévu et qu’il aurait souhaité qu’elles prennent une autre tournure, le Très-Haut veille à les programmer de la meilleure façon possible.

 

 

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