Parachat Chemini 10 Avril 2021 כח ניסן התשפ"א |
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Sanctifier le Nom divin au cours de son existence
Rabbi David Hanania Pinto
« Moché dit à Aharon : “C’est là ce que m’avait déclaré l’Eternel en disant : Je veux être sanctifié par Mes proches et glorifié à la face de tout le peuple.” Et Aharon garda le silence. » (Vayikra 10, 3)
Nadav et Avihou moururent après avoir apporté un feu étranger à l’Eternel, comme il est dit : « Les fils d’Aharon, Nadav et Avihou, prenant chacun leur encensoir, y mirent du feu, sur lequel ils jetèrent de l’encens, et apportèrent devant le Seigneur un feu profane sans qu’Il le leur eût commandé. » (Ibid. 10, 1) Ce verset, soulignant qu’ils moururent suite à un péché, semble contredire le précédent où ils sont surnommés de proches de l’Eternel.
Le Or Ha’haïm explique qu’ils fautèrent en faisant brûler un feu sans en avoir reçu l’ordre, sous-entendant qu’ils ne commirent pas d’autre péché. Il explique que, généralement, un pécheur trébuche sur deux plans : l’acte et la pensée. Son péché constitue une infraction à la volonté divine, mais également sa pensée, puisqu’au lieu d’exécuter l’ordre divin, il s’est laissé entraîner par sa paresse ou sa passion.
Par contre, Nadav et Avihou ne fautèrent qu’au niveau de l’acte, puisque leur intention était totalement désintéressée. Ils savaient que ce feu profane entraînerait leur mort, mais voulurent néanmoins l’apporter pour se rapprocher davantage de D.ieu. C’est pourquoi, bien que le Saint béni soit-Il les punît de mort suite à leur péché, Il les qualifia de Ses proches, en vertu de leur pureté d’intentions.
Tout Juif a le devoir de sanctifier le Nom divin, mais il ne doit pas se sacrifier à proprement parler pour cela, comme Nadav et Avihou. Il peut remplir cette obligation tout en vivant. Par exemple, celui qui se maîtrise ou résiste à de rudes épreuves atteste la puissance de son amour pour le Créateur et sa proximité avec Lui. Le cas échéant, l’Eternel le considère comme Son proche qui Le sanctifie. Car, plus l’homme annule ses désirs personnels au profit de la volonté de l’Eternel, plus il démontre combien il se sent proche de Lui, ce qu’il devient effectivement.
Un homme qui venait de connaître un élan de sainteté me fit part de sa volonté de sanctifier le Nom divin. Mais, il ne savait comment. Je lui expliquai qu’il n’était pas obligatoire de le faire en public, mais que cela pouvait aussi être accompli dans la discrétion, s’il maîtrisait ses désirs pour se plier à la volonté de son Créateur.
Il me demanda de l’aider à trouver un acte qui aurait cette dimension. Je le questionnai alors sur le type de téléphone qu’il possédait et il m’avoua qu’il n’avait pas de filtre. Aussi, je lui suggérai de le briser en mille morceaux, malgré son prix élevé, et d’en acheter un nouveau, cachère. De cette manière, il ferait fi de ce qui lui était cher pour être fidèle à la volonté divine et en serait dûment récompensé. Tous ses amis, étonnés de son changement de numéro, l’interrogeraient à ce sujet et cela créerait une grande sanctification du Nom divin.
Ayant des difficultés à accepter cette idée, il me dit qu’il avait besoin de cet appareil pour ses affaires, mais était prêt à s’engager à l’utiliser exclusivement pour cette cause, ce qui ne constituait pas un interdit.
Je lui rapportai l’interprétation de Rachi du verset « Il retira les dieux étrangers, l’idole du Temple de l’Eternel et tous les autels qu’il avait bâtis sur la montagne du Temple de l’Eternel et à Jérusalem et les jeta hors de la ville » (Divré Hayamim II 33, 15). Après que Ménaché se repentit, il jeta toutes ses idoles derrière la muraille de la ville sainte. Cependant, il ne les brisa pas, peut-être parce qu’elles étaient précieuses. Or, à cause de cela, son fils, qui lui succéda au trône, les reprit et leur voua un culte. Il est probable que, si son père les avait détruites, il n’en aurait lui-même pas cherché d’autres.
Sanctifier le Nom divin, c’est briser complètement sa volonté personnelle pour se plier à celle de l’Eternel, en dépit de la difficulté et de la perte financière que cela représente. De même que nous sommes prêts à débourser une grosse somme d’argent pour l’achat d’un bel étrog ou celui de mitsvot à la synagogue, nous devons aussi nous résigner à annihiler le mal logé dans notre poche ou notre foyer, même si ces appareils nous ont coûté très cher. Car, nous témoignons ainsi notre amour intense pour l’Eternel, qui surpasse toute richesse matérielle.
Un avrekh se vouant à l’étude de la Torah sanctifie le Nom divin en public. En effet, chacun rêve d’être riche, d’avoir de beaux meubles, une voiture, un joli appartement et nombre de biens encore lui facilitant la vie. Si, au contraire, il maîtrise tous ces désirs et se contente de peu pour se consacrer à l’étude jour et nuit, il glorifie l’Eternel de manière optimale. Même si personne ne le voit, l’Eternel constate son dévouement et le considère comme Son proche. Une femme encourageant son mari à étudier est également considérée comme telle et digne d’une grande récompense.
Arrivé au monde de la Vérité, tout homme aspire à se rapprocher au maximum du Très-Haut et jouir de l’éclat de Sa Présence. Toutefois, Il ne donne cet insigne mérite qu’à celui qui, de son vivant, s’est efforcé de renoncer à sa volonté au profit de la Sienne, seul réellement considéré comme Son proche.
GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA
Les vivants doivent le prendre à cœur
Des Juifs du monde entier participèrent au mariage de mon fils, Rabbi Moché Aharon chelita, qui eut lieu en Israël. Parmi eux, un important donateur nous honora de sa présence. Il soutient avec beaucoup de zèle nos institutions et, entre autres, a offert un magnifique séfer Torah à notre centre d’Ashdod, écrit par le Rav de la communauté de l’époque, Rav Yaakovi zatsal.
Le lendemain du mariage, ce mécène me fit part de son désir de rencontrer le Rav Yaakovi. Je dus hélas lui annoncer sa mort soudaine, survenue le 26 Eloul.
En entendant la triste nouvelle, il s’écria, stupéfait : « Mais il était jeune et n’avait pas du tout l’air malade. Comment a-t-il pu mourir si soudainement ?
– Comme vous le dites si bien, lui répondis-je, c’était un choc pour tous, et “les vivants doivent le prendre à cœur”. Justement, un homme d’affaires comme vous, plongé tout au long de la journée dans des occupations matérielles est en danger. Il pourrait oublier le Créateur et rejeter Torah et mitsvot, s’il en venait à penser que ce monde est l’essentiel et que la vie ici-bas est éternelle. Et c’est pourquoi D.ieu vous a fait apprendre la mort brutale et totalement imprévue du Rav Yaakovi zatsal, afin que vous réalisiez que ce monde est éphémère et que nul n’est éternel. »
Mes paroles eurent beaucoup d’effet sur mon interlocuteur, qui me demanda aussitôt un conseil pour ne jamais oublier ce message percutant qu’il venait de recevoir. Je lui suggérai de s’engager à un acte de son choix allant dans le sens d’une progression spirituelle.
« Je vais donner une somme importante à la tsédaka », s’engagea-t-il aussitôt.
Sa générosité me fit très plaisir, mais je lui rappelai qu’il était déjà très généreux et que sa main était toujours ouverte pour ceux qui en avaient besoin. Il devait donc plutôt se soucier de sa propre personne, de son âme, et se renforcer dans une mitsva vis-à-vis de son Créateur, mitsva par l’accomplissement de laquelle il mériterait de se rapprocher davantage encore de Lui. C’est ce qu’il fit, en s’engageant, à compter de ce moment, à observer scrupuleusement le Chabbat.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « David rassembla de nouveau (…). » (Chmouel II chap. 6)
Lien avec la paracha : la haftara évoque la mort d’Ouza, qui s’était trop approché de l’arche de l’Alliance, événement à rapprocher de la mort de Nadav et Avihou, fils d’Aharon, qui avaient voulu s’approcher outre mesure de l’Eternel.
PAROLES DE TSADIKIM
L’allergie à certains médicaments
La création entière, nous enseignent nos Sages, a été conçue pour être compatible avec la Torah et le respect des mitsvot. Dans le Zohar (Térouma), il est écrit que « D.ieu regarda la Torah et créa le monde ». Notre mode de vie, notre conception de celle-ci et son but ultime doivent être déduits d’elle. C’est pourquoi seuls nos Sages, érudits en Torah, sont à même de discerner le bon du mal, la droite de la gauche.
Eux seuls, qui puisent leur conception du monde de la Torah, sont capables d’identifier la couleur bleu azur requise pour teindre les fils des tsistit, de faire la distinction entre un acte bon et un autre réprimandable. Car, grâce à la sagesse de la Torah, tout le complexe de la création brille sous leurs yeux de manière claire. Elle leur permet d’appréhender la profondeur de chaque élément.
Rav Israël Zikherman chelita raconte le récit suivant, entendu de l’un des médecins qui s’occupa à l’hôpital du juste Rabbi Dov Yaffé zatsal, Machguia’h de la Yéchiva Kfar ‘Hassidim, vers la fin de sa vie. Un jour, lorsqu’il voulut lui donner un médicament, il lui demanda tout d’abord, conformément aux consignes, s’il était allergique à certains médicaments et lesquels il prenait en ce moment.
Le Sage le questionna en souriant : « Quelle différence ? Vous voulez de toute façon me donner ce médicament, alors qu’est-ce que cela change si je suis allergique à un autre ou en prends d’autres actuellement ? »
Le praticien se donna la peine de lui donner une réponse détaillée : « Ecoutez, avant de donner un médicament à un patient, on est obligé de connaître son état général. Parfois, la combinaison de deux médicaments peut annuler l’effet de l’un d’eux. Il arrive aussi qu’un médicament soit utile pour le cœur, mais, dans certains cas, préjudiciable pour les reins. Un autre peut contribuer au bon fonctionnement du foie, mais entraîner des problèmes digestifs. Chaque médicament doit être soigneusement calculé et il est absolument interdit d’en donner à un malade avant d’avoir vérifié de près son état. »
Lorsque le professeur sortit de la pièce, le Machguia’h se tourna vers son proche parent, qui était à ses côtés, et lui dit : « As-tu entendu les précautions à prendre avant de donner un médicament à quelqu’un ? Il faut d’abord connaître tout son passé médical. On peut en déduire de nombreux enseignements pour le service divin. »
« Par exemple, reprit-il, dans le cas où la halakha exige qu’on réprimande son prochain. Certains le font de manière brutale, avec colère, sans réfléchir à tous les problèmes que leurs propos risquent d’entraîner. Ils ne tiennent pas compte du niveau spirituel de leur interlocuteur, ne pèsent pas les dommages potentiels, susceptibles d’être plus considérables que les gains.
« Le discours du docteur m’a appris aujourd’hui que la première chose à faire avant de formuler un reproche à autrui est de s’enquérir de sa sensibilité, de son état général. Il n’est pas du tout certain qu’on puisse le reprendre. Parfois, cela peut faire plus de mal que de bien. Il faut soigneusement peser le pour et le contre. »
Le Rav Zikherman poursuit : « Cet exemple s’applique également dans le domaine de la foi dans les Sages. Malheur au malade qui ignore les bases de la médecine. S’il compte sur sa propre compréhension et ne suit pas les instructions du docteur, il prendra n’importe quel médicament de son armoire semblant adaptée à son mal. Or, il n’est pas exclu qu’il aggrave, au contraire, son état, voire même cause sa mort, à D.ieu ne plaise. »
Tout homme sensé comprend que seul un spécialiste, qui a de longues années d’expérience dans la médecine et maîtrise la nature de différentes maladies, les divers médicaments les traitant et leurs effets secondaires, peut décider lequel prescrire à un patient et dans quelle dose, s’il a été informé de son état général. De la même manière, nous devons être conscients que seuls les Sages de la Torah sont en mesure de prendre des décisions critiques à notre sujet.
CHEMIRAT HALACHONE
La poussière de médisance
Lorsqu’on veille à ne pas médire, on peut justement être entraîné à prononcer des propos considérés comme de la « poussière de médisance ». Par exemple, celui qui affirme ne pas vouloir médire d’autrui laisse entendre qu’il aurait de quoi le blâmer.
Pour la même raison, il est interdit de dire « Je préfère ne pas parler d’untel ».
Celui qui se trouve dans ce type de situation embarrassante doit s’efforcer d’orienter la conversation vers un autre sujet ou de faire comprendre aux autres qu’il ne détient aucune information sur l’individu en question.
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
Rabbi David Hanania Pinto
Les pleurs et le repentir, des moyens de réparer
« Toute la maison d’Israël pleura ceux qu’a brûlés le Seigneur. » (Vayikra 10, 6)
Nadav et Avihou savaient que le jour de l’inauguration du tabernacle, une immense joie régnerait dans les sphères supérieures et inférieures. Dans les cieux, on partagerait la joie de D.ieu, suite à la concrétisation de Son vœu de résider parmi Ses enfants, comme il est dit : « Ils Me construiront un sanctuaire et Je résiderai parmi eux.» (Chémot 25, 8) Et, sur terre, la joie prédominerait également, car le déploiement de la Présence divine serait synonyme du pardon divin du péché du veau d’or. Or, Nadav et Avihou craignirent que ce débordement de joie empêche les enfants d’Israël de réparer l’atteinte portée par leur péché à l’ensemble des mondes.
En effet, s’ils étaient uniquement plongés dans la joie, leur esprit ne serait pas libre pour terminer de réparer le péché du veau d’or, qui avait entraîné le départ de la Présence divine. Et, s’ils ne mettaient pas à profit le jour de l’inauguration du tabernacle pour le réparer à la racine, l’Eternel risquait de nouveau de prendre congé d’eux.
Aussi, appliquèrent-ils la vérité énoncée par le verset « Mieux vaut aller dans une maison de deuil que dans une maison où l’on festoie » (Kohélèt 7, 2). Ils furent prêts à mourir le jour où la Présence divine reviendrait résider parmi le peuple juif, afin que ses membres déplorent leur disparition et, par ce biais, se repentent et se purifient complètement de toute trace de péché, permettant ainsi à l’Eternel de continuer à résider parmi eux.
Ces deux Tsadikim, fils d’Aharon, comprirent que la joie accompagnant le déploiement de la Présence divine ne pouvait pas, à elle seule, conduire les enfants d’Israël à une réparation absolue de leur péché. Pour cela, il était nécessaire qu’ils s’endeuillent, car ceci les conduirait à se remettre en question, à réfléchir pourquoi D.ieu fut contraint de les quitter momentanément et à définir leur raison d’être sur terre.
Le Saint béni soit-Il, conscient de leur pureté d’intentions, accepta leur démarche, comme le souligne notre verset « Toute la maison d’Israël pleura ceux qu’a brûlés le Seigneur » (Vayikra 10, 6).
PERLES SUR LA PARACHA
Le décès de justes, un signe concernant l’avenir
« Et Il s’irritera contre la communauté entière. » (Vayikra 10, 6)
Le futur du verbe yiktsof réclame des éclaircissements. Nadav et Avihou étant déjà morts, le passé aurait semblé plus approprié.
L’auteur de l’ouvrage Edout Biyossef (256) répond en s’appuyant sur l’enseignement de Rabbi Héchil de Cracovie selon lequel les justes meurent pour deux raisons : afin de ne pas être témoins de la détresse de leurs contemporains et pour leur apporter l’expiation. Pour la première, il faudrait que tous les Tsadikim décèdent et, pour la seconde, le décès d’un seul d’entre eux est suffisant.
Or, ici, deux justes trouvèrent la mort, donc, a priori, c’était pour leur éviter de voir les souffrances de leur génération, puisque, si la raison avait été autre, le décès de l’un d’eux aurait suffi. Nos ancêtres déduisirent de leur départ simultané qu’un malheur allait leur arriver, d’où le futur du verbe yiktsof.
L’interdit strict et la ‘houmra
« Afin qu’on distingue l’impur d’avec le pur, et l’animal qui peut être mangé de celui qu’on ne mangera pas. » (Vayikra 11, 47)
Logiquement, le verset aurait dû dire « de celui qui ne peut être mangé ». Pourquoi est-il écrit « de celui qu’on ne mangera pas » ?
Dans son ouvrage Yaguel Yaakov, Rabbi ‘Haïm Yaakov Warchano zatsal de Salonique répond d’après une controverse des Richonim au sujet d’un certain poisson, le broubota. Certains affirment que, bien qu’il perde ses écailles quand on le sort de l’eau, du fait qu’il en a à l’intérieur de celle-ci, il est cachère.
Cependant, selon Rabbi Yéhouda Ha’hassid, celui qui en mange n’aura pas le mérite de manger du léviatan. Il rapporte l’avis de Rabbénou Ephraïm, qui permit au départ sa consommation, puis l’interdit, suite à un rêve où on lui dit qu’il avait permis la consommation de vermines. Il ajouta que quiconque cesse d’en manger sera comblé de bénédictions.
Par conséquent, même ceux qui interdisent sa consommation ne la prohibent pas formellement, mais en tant que ‘houmra.
Dès lors, nous comprenons le glissement de notre verset. « L’animal qui peut être mangé » se réfère à celui permis d’après la loi, tandis que « celui qu’on ne mangera pas » renvoie à l’animal qui, d’après la stricte loi, est permis à la consommation de par sa nature, mais qu’il est préférable de s’abstenir de manger.
Une ségoula pour avoir des garçons
« Afin qu’on distingue l’impur d’avec le pur. » (Vayikra 11, 47)
Ce dernier verset de la section de Chémini est juxtaposé au sujet ouvrant celle de Tazria, « Lorsqu’une femme, ayant conçu, enfantera un mâle ». Quel est le lien entre les deux ?
La Guémara (Chvouot 18b) nous le révèle : « Rabbi ‘Hiya affirme, au nom de Rabbi Yo’hanan : quiconque fait havdala sur du vin à la clôture de Chabbat donnera naissance à des garçons, comme il est dit : “Afin qu’on distingue l’impur d’avec le pur”, puis, immédiatement après : “Lorsqu’une femme, ayant conçu, enfantera un mâle.” »
Nos Sages nous donnent ici une ségoula pour avoir des garçons : réciter la havdala sur une coupe de vin.
LA PARACHA SOUS UN NOUVEL ANGLE
La glace qui avait fondu
D’après la Torah, une alimentation cachère est la clé, la recette magique assurant à l’homme la réussite dans son existence spirituelle. Elle renforce l’homme et développe ses capacités mentales. A l’inverse, une nourriture non cachère cause des désastres au sein de l’âme humaine, obstrue son cerveau et entrave sa compréhension.
Cette recette magique ancienne nous a été révélée et certifiée par le plus grand Scientifique du monde, qui connaît les composants de tous les aliments, puisqu’Il les a créés. Seul au Créateur, à l’origine de leur conception, sont révélés les résultats de recherches qui ne parviendront au monde de la science que des centaines d’années plus tard. Nous avons donc la chance de profiter d’une formule céleste, apte à améliorer notablement notre existence et nous permettre de réaliser nos aspirations dans tous les domaines de notre existence.
L’histoire juive est parsemée de milliers d’histoire d’héros, prêts à se sacrifier pour manger cachère, quitte à souffrir de la faim et à être réduits à des conditions très précaires. Cette semaine, nous nous pencherons sur la figure exemplaire de Rabbi Avraham Gan’hovsky zatsal.
On raconte à son sujet (Vayomer Hinéni) qu’il ne mangeait de poulet et de viande que lorsqu’il était absolument certain que l’ensemble des lois complexes de cacheroute avaient été respectées et, même dans ce cas, il s’en abstint durant de longues années. Ses repas se composaient alors uniquement de légumes, de produits lactés, d’œuf et de pain.
Après avoir procédé à l’ablution des mains, il consommait son pain en se concentrant sur la mitsva de terminer une certaine quantité en un laps de temps défini. Puis, il passait aux autres aliments et, là, il était difficile de savoir s’il avait perdu tout goût pour ceux-ci ou s’il était trop plongé dans son étude pour savoir ce qu’il mettait en bouche. Extérieurement, il semblait s’atteler à une tâche secrète et élevée. Par exemple, si on lui préparait un plateau avec une tranche de pain, un petit cube de beurre, de la salade, de la confiture, du fromage, du lait, de l’eau et du sucre, il mangeait ces aliments l’un après l’autre, tout seul, sucré ou salé. Il mettait en bouche le pain, puis, quand il terminait, le cube de beurre, etc. Lentement, patiemment et avec simplicité, peu importe quelles vitamines entraient ainsi dans son corps.
Il procédait discrètement à ce rituel, sans faire de grandes démonstrations extérieures d’ascétisme. Même le Chabbat, il ne choisissait pas les aliments à son goût, mais mangeait en l’honneur du jour saint, sans prêter attention à ce qu’on lui servait. Malgré cela, il ne manquait pas de remercier la Rabbanite une fois après l’autre en disant : « Que c’est bon, combien cela renforce-t-il mes os ! » ou d’autres formules encourageantes prononcées du fond du cœur.
Un de ses élèves proches témoigne : « Pendant près de quatre ans, j’étudiais avec lui en ‘harouta. Souvent, on lui apportait un déjeuner chaud, mais il le mangeait toujours froid. A première vue, on pouvait croire que cette conduite n’était pas intentionnelle, mais que, tout simplement, il était toujours au milieu d’un passage du Maharcha ou du Rachba et ne voulait pas s’interrompre. Toutefois, il est très probable qu’il se comportât ainsi pour se conformer à un certain détail de la loi ou afin de briser tout attrait pour la nourriture, motifs qu’il dissimulait par humilité. »
Un autre disciple raconte : « Un jour, j’ai remarqué qu’au bord de la table, il restait une partie de son repas de la veille. En mettant de l’ordre, j’ai bien sûr jeté ces restes à la poubelle. Lorsque le Rav entra, il demanda : “Où est la nourriture que j’avais laissée ici hier ?” Etonné qu’il s’intéressait à cela, je répondis : “Pourquoi le Rav en a-t-il besoin ?” Le Tsadik m’expliqua : “Aujourd’hui, c’est Roch ‘Hodech, c’est pourquoi j’ai gardé une partie du repas d’hier.” Je m’excusai auprès de lui et l’aidai à trouver un autre aliment supplémentaire en l’honneur de ce jour. »
Lorsqu’il désirait ajouter une denrée en l’honneur de Roch ‘Hodech, il se rendait à l’épicerie et achetait ce qu’il y trouvait en premier ou ce que le vendeur lui suggérait. Vers la fin de sa vie, il buvait aussi du vin à cette occasion. Un jour où il était pressé, le commerçant lui proposa d’acheter une glace, il accepta et paya. Il la déposa sur la table de sa pièce, monta étudier au beit hamidrach et l’oublia complètement. Peu avant le coucher du soleil, il se souvint soudain qu’il n’avait pas encore mangé un aliment spécial en l’honneur de Roch ‘Hodech. Il redescendit rapidement pour rejoindre son bureau, où il trouva évidemment la glace fondue.
On raconte qu’une fois où un avrekh espiègle lui proposa une glace pour Roch ‘Hodech, il la fit fondre intentionnellement. Dans sa grande modestie, il n’en fit pas une grande histoire et accepta cette offre avec son naturel caractéristique. Face à l’assiette de glace et en présence de celui qui la lui avait offerte, il se plongea dans une réflexion passionnante sur la bénédiction à prononcer, qui dépendait de la combinaison de ses divers ingrédients. L’avrekh se mit lui aussi à réfléchir à ces lois complexes et, jusqu’à ce qu’ils eussent terminé de débattre du sujet, la glace avait fondu. Le juste la mangea donc dans cet état, sans oublier de remercier chaleureusement son acheteur.
Soulignons, pour conclure, que les membres de sa famille ont attesté ne l’avoir jamais entendu prononcer le mot « savoureux » au sujet d’un aliment. Au lieu de cela, il le qualifiait, par exemple, de « bon », de « particulier », de « sain » ou de « revigorant ». Sa manière de parler et sa conduite, empreintes de sainteté, correspondaient à merveille avec son mode de vie spirituel. Il ne se contentait pas seulement d’être très scrupuleux dans le respect de la cacheroute, mais s’efforçait de repousser toute attirance à la nourriture, se sanctifiant ainsi et vouant tous ses désirs au service divin, combinant simplicité et intelligence.