Parachat Pin'has 3 Juillet 2021 כג תמוז התשפ"א |
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Observer les mitsvot avec désintéressement
Rabbi David Hanania Pinto
« Pin’has, fils d’Elazar, fils d’Aharon le prêtre, a détourné Ma colère de dessus les enfants d’Israël, en assouvissant Ma vengeance au milieu d’eux, en sorte que Je n’ai pas anéanti les enfants d’Israël, dans Mon indignation. » (Bamidbar 25, 11)
Nos Maîtres (Bamidbar Rabba 21, 1) commentent : « Le Saint béni soit-Il a dit : il doit prendre la récompense qui lui revient. » Or, ils affirment par ailleurs (Kidouchin 39b) : « La récompense d’une mitsva ne se trouve pas dans ce monde. » Comment donc Pin’has put-il être rétribué pour son acte ?
Une autre difficulté apparaît. En tuant Zimri, chef de la tribu de Chimon, Pin’has mit fin à l’épidémie sévissant au sein du peuple juif. Sans son intervention, elle aurait continué à faire tomber de nombreuses victimes. La tribu de Chimon aurait pu être entièrement détruite, tandis que d’autres auraient sans doute également été touchées. Car, lorsque l’Accusateur domine, même les justes n’ayant pas fauté peuvent être punis pour le péché de la communauté. En évitant de telles catastrophes, Pin’has devait recevoir un considérable salaire. Notre question prend donc toute son acuité : comment un acte de cette envergure pouvait-il être récompensé dans ce monde ?
Dans la suite du texte, nous pouvons lire : « Attaquez les Madianites et taillez-les en pièces ! » (Bamidbar 25, 17-18) Nombreuses sont les nations corrompues et, pourtant, nous n’avons pas l’ordre de les exterminer. Nous n’avons aucun contact avec elles et leur mode de vie ne nous concerne donc pas. Pourquoi devons-nous nous conduire différemment envers les Madianites ? En réalité, ces derniers ne sont pas responsables de la faute des enfants d’Israël, qui se laissèrent entraîner par leur mauvais comportement.
Enfin, un dernier point doit être éclairci : comment un prince de tribu, qui se distinguait dans la Torah, put-il tant déchoir en commettant une telle faute en public ?
Répondons en nous appuyant sur l’interprétation de nos Sages (Sanhédrin 106a) du verset « Israël s’établit à Chitim. Là, le peuple se livra à la débauche avec les filles de Moav. » (Bamidbar 25, 1) – « Que signifie à Chitim ? Rabbi Yéhochoua explique qu’ils s’occupèrent de vanités (chtout), suite à quoi ils fautèrent avec les filles de Moav. » Il en ressort qu’ils commencèrent à s’investir dans de vaines occupations, lesquelles les menèrent ensuite à la débauche, ce qui corrobore un autre enseignement de nos Maîtres : « L’homme ne faute que si un vent de folie (chtout) s’est introduit en lui. » (Sota 3a) Il nous reste à définir en quoi consistaient ces vanités.
Quelqu’un peut étudier la Torah et observer de nombreuses mitsvot, mais le faire poussé par des mobiles personnels, et non pas avec désintéressement. Par exemple, il étudie pour obtenir un poste dans la Torah, accomplit des actes charitables afin qu’on le remercie et le loue, etc. Le cas échéant, l’aspect spirituel de sa vie n’est pas authentique, puisqu’il ne vise que sa propre gloire. Il s’agit d’un individu intérieurement vide, qui risque de tomber dans le désœuvrement, dès l’instant où ces motivations extérieures disparaissent. Or, conformément à la mise en garde de nos Sages (Kétouvot 59a), « le chômage et l’ennui mènent l’homme à l’immoralité ».
À Chitim, nos ancêtres tombèrent justement dans cet écueil. Ils étudiaient la Torah et étaient fidèles aux mitsvot, mais sans opiniâtreté ni abnégation. À cause de cela, ils furent la proie d’un vent de folie, qui les conduisit à la dépravation. Même Zimri, prince de tribu et érudit, était motivé par des intérêts personnels, ce pour quoi, en dépit de sa grandeur, il tomba lui aussi dans la faute, qu’il eut l’audace de commettre en public.
Ne sachant comment réagir, le peuple se mit à pleurer, comme il est dit : « Cependant, quelqu’un des Israélites s’avança, amenant parmi ses frères la Madianite, à la vue de Moché, à la vue de toute la communauté des enfants d’Israël, et ils pleuraient au seuil de la tente d’assignation. » (Bamidbar 25, 6) Car, eux aussi agissaient poussés par des intérêts personnels, aussi se gênèrent-ils d’exprimer leur position provenant de tels mobiles. Seul l’un d’entre eux agit comme il fallait, sans aucun calcul ni la moindre crainte – Pin’has. Son acte apporta l’expiation au péché de tout le peuple.
Quant à la récompense qu’il reçut, elle n’était pas matérielle et pouvait donc lui être remise dans ce monde. En effet, l’Éternel lui donna la prêtrise, le service au Temple et, subséquemment, une existence miraculeuse dépendant totalement de Lui.
Tout au long d’un voyage de collecte, de Londres à Genève, en faveur de mes institutions, je réfléchissais comment présenter ma sollicitation au nanti que je devais rencontrer. Arrivé à destination, il se mit à me parler de ses multiples affaires et, chaque fois que je m’apprêtais à lui présenter ma demande, il reprenait de plus belle, si bien que je ne pus placer un mot.
Lorsque je pris congé de lui, je ressentis m’être déplacé pour rien. Mais je me dis ensuite que mon but, la diffusion de la Torah, était désintéressé et qu’il importait peu si j’avais ou non parlé. J’avais fait ce que je devais et l’Éternel ferait Sa part. Car, « maudit soit l’homme qui met sa confiance en un mortel, prend pour appui un être de chair et dont le cœur s’éloigne de D.ieu ! » (Yirmiya 17, 5)
PAROLES DE TSADIKIM
Mes élèves, chers comme mes enfants
La qualité essentielle requise d’un dirigeant du peuple juif est énoncée dans notre section : un « homme animé d’esprit » (Bamidbar 27, 18) De nombreuses interprétations ont été données pour la définir, toutes indispensables à une telle fonction. Nous nous pencherons sur l’une d’elles, à travers la personnalité du Tsadik Rabbi ‘Haïm Pin’has Sheinberg zatsal, Roch Yéchiva de Torat Or, à Jérusalem.
Son gendre, Rabbi ‘Haïm Dov Altousky zatsal raconte qu’une fois, il l’accompagna chez un homme fortuné. Ce dernier lui fit part de sa volonté sincère de soutenir sa Yéchiva et lui demanda quelles étaient ses principales dépenses. Après une courte réflexion, le juste lui répondit qu’il s’agissait du logement – un nouvel internat venait alors d’être construit – et de l’alimentation. Le nanti lui suggéra : « J’ai une merveilleuse solution à vous proposer. Nos Sages ont enseigné : “Telle est la voie de la Torah : tu mangeras du pain avec du sel, boiras de l’eau au compte-gouttes, coucheras sur le sol.ˮ (Avot 6, 4) Pourquoi n’adopteriez-vous pas ce conseil pour vos élèves ? »
Le Roch Yéchiva répondit : « Vous seriez-vous conduit ainsi envers votre fils ? Non ! Or, mes élèves sont comme mes enfants. La Yéchiva devient leur propre maison et c’est pourquoi je cherche à leur donner les meilleures conditions. »
Une de ses célèbres habitudes était de se rendre quotidiennement au chtiblekh bondé de la synagogue « Chomré Chabbat Anché Sfard » de la rue Avenue, 31, au coin de la rue 25, à Boro-Park, où son élève, Rav Singer, assume les fonctions de Rav. Il se tenait à la porte durant plusieurs heures pour collecter des fonds en faveur de sa Yéchiva. De temps à autre, il passait entre les fidèles pour les solliciter. Parfois, il utilisait son chapeau, qu’il tenait à l’envers, en guise de boîte de tsédaka.
Le spectacle de cet illustre érudit, comptant parmi les Grands de sa génération, en train de récolter pour ses élèves de l’argent auprès de ses coreligionnaires était plutôt rare. Il était visible qu’il mettait un point d’honneur à le faire lui-même. Certains expliquaient qu’il désirait s’humilier ainsi en faveur de la Torah et de ses étudiants. Il avait en effet l’habitude de citer les paroles du Zohar (II 166) selon lesquelles le prophète Yé’hezkel mérita d’être surnommé ben Bouzi, parce qu’il parvint à la perfection en étant prêt à se couvrir de honte pour la Torah et les mitsvot. D’autres affirment l’avoir entendu expliquer qu’il sollicitait précisément les membres du peuple juif, et pas uniquement les gens aisés, pour leur faire acquérir des mérites. Il tenait tant à cette habitude que même durant ‘hol hamoèd Pessa’h, où il séjournait à Monsey chez sa fille, la Rabbanite Rosengarten, il voyageait spécialement pour rejoindre le chtiblekh, où il restait quelques heures dans ce but.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « Paroles de Yirmiyahou (…). » (Yirmiya chap. 1)
Lien avec le Chabbat : la haftara décrit la prophétie de Yirmiyahou relative à la ruine de Jérusalem et à l’exil du peuple juif. C’est la première des trois haftarot lues avant le 9 Av.
CHEMIRAT HALACHONE
Exprimer son estime et son souci
Il est interdit de formuler une critique derrière le dos de quelqu’un et, parallèlement, d’exprimer en sa présence son approbation à sa conduite.
Même lorsqu’il est permis de blâmer autrui pour des visées constructives, on doit veiller à ne pas être hypocrite envers lui. La solution est de lui témoigner son estime et son souci, tout en manifestant clairement son désaccord sur sa conduite.
Si l’on est certain qu’il n’acceptera pas de remontrances, on devra malgré tout lui en formuler et tenter de le convaincre de s’améliorer, avant que son comportement réprimandable ne soit divulgué. De cette manière, on ne sera pas considéré comme un hypocrite ou un menteur.
GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA
Du jamais vu
Au mois d’Adar 5760 (2000), Monsieur Tsvi eut soudain une attaque cardiaque, alors qu’il travaillait dans son magasin. On appela aussitôt les secours, qui arrivèrent rapidement sur place. Toutefois, en dépit de leurs tentatives de réanimation, son cœur semblait refuser de continuer à battre. On était sur le point de le déclarer mort.
Les secouristes utilisèrent un défibrillateur, mais, après neuf décharges électriques, son cœur ne rebattait pas normalement. Le médecin joignit alors la femme de M. Tsvi pour lui annoncer qu’à son avis, elle pouvait déjà contacter les responsables de la ‘hévra kadicha, car c’était vraisemblablement une histoire de quelques minutes.
Le malade fut, malgré tout, transporté d’urgence à l’hôpital. Dans l’ambulance, en plus de la situation déjà critique de son cœur, il eut une attaque cérébrale, qui aggrava encore son état. Arrivé à l’hôpital, on le fit entrer dans la salle des urgences. Pensant qu’il était déjà mourant, on ne tenta même pas de le traiter dans l’unité de soins intensifs.
Mais, sa famille fit pression et les médecins acceptèrent finalement de l’y admettre. Cependant, même là, il ne reçut aucun soin médical, du fait qu’il était considéré comme pratiquement mort.
Entre-temps, ses proches parents me téléphonèrent afin que je bénisse Tsvi ben ‘Hanna. Outre ma brakha, je leur envoyai un message, où je leur indiquai dans quels domaines se renforcer pour donner du mérite au malade et augmenter ses chances de guérison. Ils comprirent alors qu’avec l’aide de D.ieu, il y avait un espoir.
Deux heures plus tard, son cœur se mit soudain à montrer des signes de vie. Les médecins, qui avaient déjà baissé les bras, décelèrent ce revirement, mais restèrent sceptiques, pensant : « Certes, son cœur rebat, mais qui sait quelles séquelles cette attaque a laissées au niveau de son cerveau ? »
Or, incroyable, mais vrai : le cerveau n’avait nullement été touché et M. Tsvi se mit progressivement à remuer son corps, jusqu’au moment où il ouvrît les yeux et parvînt même à identifier les personnes qui l’entouraient. Il se mit à parler et devint de plus en plus attentif à ce qui se passait.
Face à cette scène prodigieuse, les médecins avouèrent : « Nous avons déjà vu beaucoup de miracles dans le domaine médical, mais celui d’un homme déclaré mort qui se réveille, ça, nous n’avons encore jamais vu ! C’est une véritable résurrection ! »
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
Rabbi David Hanania Pinto
Une élévation constante
« L’Éternel dit à Moché : “Prends pour toi Yéhochoua, fils de Noun, homme animé d’esprit, et impose ta main sur lui.ˮ » (Bamidbar 27, 18)
Moché demanda au Saint béni soit-Il de nommer un successeur, apte à le remplacer à la tête du peuple après son décès. Ce dernier devait être capable de faire face aux plaintes du peuple et à ses éventuels péchés. Il fallait qu’il soit un « homme animé d’esprit », c’est-à-dire patient et modeste, en mesure de supporter tous les membres du peuple en toute circonstance. Le Créateur répondit à sa requête en lui ordonnant de nommer Yéhochoua à cette fonction. Qu’avait-il donc de si particulier pour avoir été choisi en tant que successeur de Moché, à la préférence de Pin’has ou d’autres justes ?
Yéhochoua se distinguait par son humilité et son abnégation. Bien qu’il fût le disciple de Moché de longue date, il ne considérait jamais qu’il n’avait plus rien à apprendre de lui et connaissait déjà tout. Même lorsque Moché monta dans les cieux pour recevoir les deuxièmes tables de la Loi, Yéhochoua planta sa tente en bas de la montagne, afin de pouvoir immédiatement poursuivre son apprentissage, dès le retour de son Maître. Toute sa vie durant, il se considérait comme un élève et estimait pouvoir encore progresser dans son service divin et l’étude de la Torah. C’est pourquoi il fut surnommé le « serviteur de Moché » (Bamidbar 11, 28), car c’est ainsi qu’il se voyait.
Seul l’homme humble est à même de diriger le peuple, car il comprend chacun de ses membres et peut leur tendre une oreille attentive. En outre, celui qui s’efface devant son Maître ne cesse de s’élever spirituellement, car il ne pense jamais être arrivé au sommet et s’efforce continuellement de poursuivre son élévation.
Aussitôt après l’épisode de la nomination de Yéhochoua, la Torah s’étend longuement sur le détail de tous les sacrifices apportés au quotidien et de ceux, supplémentaires, offerts à l’occasion des fêtes. Ceci ne manque de nous étonner : le livre de Vayikra traite essentiellement des sacrifices, aussi pourquoi était-il nécessaire de revenir ici sur le détail des sacrifices tamid et moussaf ?
Si certains sacrifices étaient apportés chaque jour au Temple, d’autres, additionnels, étaient offerts lors des fêtes. Ce type de sacrifice, moussaf, exprime donc l’idée d’ajout. C’est la raison pour laquelle le sujet de la nomination de Yéhochoua est suivi par celui des sacrifices, afin de souligner que ce dirigeant du peuple juif incarnait cette vertu de toujours aspirer à s’élever davantage dans l’étude comme dans la pratique des mitsvot.
PERLES SUR LA PARACHA
La récompense de la mitsva de Pin’has
« C’est pourquoi, tu annonceras que Je lui accorde Mon alliance de paix. » (Bamidbar 25, 12)
Au sujet de l’affirmation du Midrach « il doit prendre la récompense qui lui revient », le ‘Hatam Sofer objecte que cela contredit le principe énoncé par nos Sages : « La récompense d’une mitsva ne se trouve pas dans ce monde.»
Il explique tout d’abord cet adage en rappelant que la récompense d’une mitsva est une mitsva. Autrement dit, le juste qui sert l’Éternel ne cherche pas du tout à être récompensé pour une mitsva, mais espère uniquement avoir bientôt l’opportunité d’en exécuter une autre.
Cependant, dans notre contexte, Pin’has avait accompli la mitsva de tuer l’homme ayant eu des relations avec une Aramite ; il va sans dire qu’il n’espérait pas que se présente de nouveau une occasion semblable. C’est pourquoi nos Sages disent qu’il « doit prendre la récompense qui lui revient », puisqu’une mitsva similaire ne pouvait lui être donnée en tant que telle.
Comment accomplir la mitsva de tsédaka
« Fils de Gad, selon leurs familles : de Tséfon, la famille des Tséfonites ; de ‘Hagui, la famille des ‘Haguites ; de Chouni, la famille des Chounites. » (Bamidbar 26, 15)
L’auteur de l’ouvrage Maor Vachémech propose de lire ce verset en écho à la mitsva de tsédaka.
L’expression « fils de Gad » se réfère à cette mitsva, comme l’explique la Guémara, les lettres Guimel et Dalet correspondant aux initiales de Guemoul dalim, charité envers les pauvres. Quant à la suite du verset, elle souligne la manière optimale de l’observer, en veillant à trois points.
Premièrement, il s’agit de donner l’aumône discrètement, afin de ne pas gêner l’indigent. Deuxièmement, on lui adressera son don avec joie et le sourire, comme il est dit : « Il faut lui donner, et lui donner sans que ton cœur le regrette. » (Dévarim 15, 10) Troisièmement, on le renouvellera régulièrement, comme nous l’enjoignent nos Sages.
Ces trois précautions se retrouvent allusivement dans notre verset. Tout d’abord, le nom de Gad se réfère à la mitsva de tsédaka de manière générale, à travers ses deux lettres Guimel et Dalet. Le nom Tséfon rappelle notre devoir de l’accomplir dans la discrétion, tsafoun signifiant caché. ‘Hagui renvoie au terme ‘hag, fête, nous invitant à le faire avec un air de fête. Enfin, Chouni nous incite à répéter (yichné) sans cesse notre don.
La sainteté unique de la Torah
« Pouva, d’où la famille des Pounites. » (Bamidbar 26, 23)
Le Or Ha’haïm propose une belle interprétation de ce verset et des suivants : « J’ai trouvé des écrits de pieux de notre peuple selon lesquels la bouche des personnes étudiant la Torah a le même statut qu’un ustensile utilisé pour la sainteté, car il n’existe pas de sainteté égalant celle de la Torah. C’est pourquoi il est interdit de l’employer pour dire des paroles profanes, même si elles ne sont pas interdites.
« Le nom Pouva fait allusion à cette idée : comprenant deux lettres du Nom divin, il renvoie à une bouche étudiant la Torah. En outre, il nous exhorte à libérer (lifnot) de notre bouche toute chose extérieure à l’étude. Il s’agit d’une partie des quarante-huit prérequis de la Torah : la restriction des conversations, des amusements, des plaisirs et de toute activité similaire dans l’éventail de celles permises.
« Il est dit “de Yachouvˮ en allusion à notre devoir de nous asseoir (yéchiva) de longues heures, et non pas d’étudier de manière occasionnelle. En outre, nous devons nous asseoir pour analyser chaque détail de la Torah jusqu’à appréhender son sens profond, comme cela est nécessaire dans l’éclaircissement de la loi. Car, c’est là l’essentiel de la Torah. Cela inclut une autre partie des quarante-huit prérequis de celle-ci : l’assiduité, le fait de n’avancer que ce dont on est intimement persuadé [après vérification], de questionner et de répondre (…), de rapporter chaque parole avec précision, etc. Cela inclut également ceux énumérés plus haut dans la Michna, relatifs à la compréhension intellectuelle : une écoute attentive, une élocution facile, le discernement du cœur, etc.
« “De Chimron, la famille des Chimronitˮ : cela renvoie au redoublement de vigilance (chémira) exigé du ben Torah, plus que du reste du peuple. On en déduit combien ce dernier doit veiller à être fidèle à tous les détails des mitsvot. D’après nos Maîtres, les justes des anciennes générations plaçaient autour d'eux cinquante barrières dans le domaine du permis, afin d’éviter de trébucher dans l’interdit. »
LA PARACHA SOUS UN NOUVEL ANGLE
Quand le président d’Amérique déplace l’heure de son allocution
Chacun d’entre nous aspire à modifier quelque chose dans son existence, que ce soit dans sa vie privée, dans son lien avec les membres de sa famille et ses amis, ou même au niveau public. La plupart des gens savent quel changement précis ils aimeraient effectuer dans leur vie personnelle, de nature spirituelle ou matérielle, comme ajouter des heures d’étude ou augmenter leur revenu. Ils estiment que cette transformation leur sera positive et bénéfique et, pourtant, ils ne l’opèrent pas.
S’appuyant sur le Midrach, Rav Acher Kobalsky chelita souligne que Pin’has, qui agit avec zèle, bénéficia de nombreux miracles, sans lesquels il n’aurait pas réussi à défendre l’honneur divin. S’il en est ainsi, quel est donc son mérite ? Pourquoi mérita-t-il une si grande récompense ?
Le Alchikh nous révèle la réponse, incroyable : il fut récompensé pour son premier pas. Il est vrai que tout ce qu’un Juif fait, l’Éternel l’accomplit pour lui, tandis que tout ce qu’il reçoit en récompense est un cadeau. Il ne nous est demandé que d’entamer l’acte, de nous « jeter à l’eau ». C’est justement ce que fit Pin’has ; il se lança avec ardeur, démontra sa volonté d’agir. Ce premier pas, qui mena finalement à une révolution, lui valut une récompense considérable.
Dans tout domaine, la réussite commence par le premier pas, parfois petit et presque imperceptible, mais pourtant décisif et à même d’ébranler le monde entier. Il suffit donc de l’entreprendre avec toute son énergie, sans se laisser intimider ou craindre quoi que ce soit. L’Éternel nous accordera ensuite Son assistance, nous permettant de parvenir au but escompté.
Le souvenir du trente-troisième président des États-Unis, Harry Truman, restera à jamais éternisé dans les annales de l’histoire comme celui qui, dans une période de grands bouleversements, entraîna de nombreux changements dans la politique de sécurité, intérieure comme extérieure, qui eurent un effet sur le monde entier. Il prit la décision de faire un usage exceptionnel, et unique dans l’histoire de l’humanité, de la bombe atomique, lancée contre le Japon, mettant ainsi fin à la Seconde Guerre mondiale.
Il va sans dire qu’en ces temps mouvementés, les projets et actions du président éveillaient un grand intérêt auprès de ses citoyens. Tous désiraient connaître ses intentions, ses réflexions et ses plans d’action. Aussi, il fut décidé qu’il prononcerait à la nation un discours hebdomadaire, diffusé par les médias, et dans lequel il ferait part en détail de son intervention politique de la semaine écoulée et de ses projets concernant celle à venir.
On fit appel à des spécialistes pour déterminer le moment et l’heure les plus propices à ce discours. La conclusion fut que c’était le vendredi soir, à vingt heures, moment où les gens se trouvent sereinement dans leur foyer et qui rassemblerait donc sans doute le plus d’auditeurs.
Presque tous les citoyens se réjouirent de la nouvelle, hormis une petite minorité, les Juifs pratiquants, qui s’en attristèrent. Tant de leurs coreligionnaires éprouvaient déjà beaucoup de difficultés à observer minutieusement le Chabbat ! À présent, parviendraient-ils à surmonter vaillamment cette nouvelle épreuve ? En outre, nombre d’entre eux travaillaient dans les médias et dans les états-majors du président. Seraient-ils donc contraints de transgresser le jour saint ?
Tous les Juifs soupirèrent à l’entente de cette nouvelle, mais une seule, Madame Berl, n’en trouva pas le repos. « Maître du monde ! s’écria-t-elle. Cela entraînerait une immense profanation du Chabbat. Combien de Juifs désirant l’observer trébucheront-ils ! Combien d’employés, heureux de pouvoir rester chez eux et réciter le Kidouch en famille, devront-ils travailler autour de ce discours du président ! C’est à fendre le cœur… »
Sans hésiter, elle prit une feuille et un stylo et se mit à rédiger une lettre à l’attention du président :
« À l’attention de notre vénéré président, Harry Truman, Maison-Blanche, Washington,
« Tout d’abord, je tiens à vous remercier pour votre merveilleux leadership de notre pays, auquel je suis fidèle, et vous souhaite beaucoup de succès. Je me suis réjouie d’apprendre votre projet de prononcer un discours hebdomadaire, que j’aimerais beaucoup écouter afin de bien ressentir que je fais partie intégrante de la nation américaine.
« Cependant, étant Juive, comme des milliers d’autres citoyens, le moment fixé pour ce speech ne me permettra pas de l’auditionner. Lors du jour saint, il nous est en effet interdit de faire fonctionner tout appareil électrique. Aussi, il nous sera impossible d’écouter votre message, si important. C’est pourquoi je vous saurais gré de bien vouloir le déplacer. Merci de votre compréhension. »
Elle signa cette lettre, puis l’envoya par la poste à la Maison-Blanche. Chaque jour, des milliers de lettres y arrivent, dont 95 % terminent à la poubelle sans avoir été traitées. Des hommes ennuyés du monde entier envoient des lettres au président des États-Unis et on peut donc supposer qu’il ne lit pas la plupart d’entre elles.
Les chances que celle de Madame Berl ait un sort différent étaient presque nulles. Toutefois, elle l’envoya malgré tout. Elle fit ce petit pas, ce qui était en son pouvoir pour défendre l’honneur du Chabbat et éviter qu’il soit publiquement profané.
Une semaine plus tard, une surprise l’attendait dans sa boîte aux lettres. Un courrier, concis, lui assurait que le président avait bien pris connaissance de sa demande et y avait accordé toute son attention. À peine trois semaines plus tard, il annonça dans son discours hebdomadaire que, dorénavant, il le prononcerait un autre jour.
Incroyable, mais vrai ! Les faits sont pourtant clairs : par le biais d’une petite lettre simple, une femme ordinaire était parvenue à faire déplacer le moment de l’allocution du président américain, évitant ainsi à des milliers de Juifs de profaner le Chabbat.
En conclusion, qu’importe la révolution que vous désirez opérer dans votre vie privée, publique ou communautaire ; tout dépend du premier pas. Même s’il semble dérisoire ou inefficace, il est en mesure d’entraîner des changements conséquents, des révolutions mondiales menant au but tant recherché. Aussi, ne soyons pas craintifs. Faisons ce que nous devons, soyons entreprenants et l’Éternel nous viendra ensuite en aide.
Ne tenons pas compte de notre probabilité de réussir, faisons fi des estimations logiques et lançons-nous simplement dans l’action. Faisons un petit pas, un pas qui sera générateur de revirements. Voilà ce qui nous est demandé. Le Créateur fera le reste. Il complétera notre projet et le mènera à merveille.