Parachat Matot-Massei 3 Août 2019 כח תמוז התשפ"ד |
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L’itinéraire de la vie
Rabbi David Hanania Pinto
« Voici l’itinéraire des enfants d’Israël, depuis qu’ils furent sortis du pays d’Egypte, selon leurs légions, sous la conduite de Moché et d’Aharon. » (Bamidbar 33, 1)
Nombreuses et variées sont les étapes des voyages marquant la vie d’un homme, mais leur dénominateur commun doit être de se conformer à l’esprit de la Torah transmis par nos Sages, comme l’indique l’incipit de notre section « sous la conduite de Moché et d’Aharon ». Chaque pas qu’il s’apprête à faire doit être soigneusement pesé. Il lui incombe de réfléchir s’il correspond bien à la volonté divine ou si, au contraire, il la contredit. C’est en fonction de cela qu’il décidera de l’entreprendre ou d’y renoncer.
Avec l’aide de D.ieu, j’ai trouvé une allusion à cette idée à travers les mots de notre verset. Le terme béyad (lit. : dans la main, traduit « sous la conduite ») a la même valeur numérique, en lui ajoutant un, que le terme tov (bon), se référant à la Torah. Car, tous les voyages des enfants d’Israël étaient sous la conduite de Moché et d’Aharon, lesquels détenaient la Torah.
Dès leur plus jeune âge, les enfants débutent leur voyage ici-bas. Les parents ont la sainte mission de prêter une attention particulière à la route qu’ils empruntent et de surveiller, à tout moment, leurs actes. Ils doivent veiller où ils en sont, vers où ils évoluent, quels sont leurs amis, quelles sont leurs occupations. Ils les encourageront à progresser sur la route les menant vers l’accomplissement de leur mission et les éduqueront à l’aune de la Torah et de la crainte du Ciel. Ainsi, ils emprunteront le droit chemin et s’élèveront de plus en plus dans la droiture et la pureté, leur procurant de la satisfaction.
Cependant, le devoir des parents est, avant tout, de s’auto-éduquer dans le chemin de la Torah et des mitsvot, afin de donner un bon exemple à leur progéniture qui, à son tour, aspirera à emprunter cette voie. Si, au contraire, ils témoignent parfois de la négligence pour une mitsva ou semblent indécis, manquant de démontrer par leur conduite la supériorité de la Torah sur les vanités de ce monde, leurs enfants en seront sans nul doute influencés et ne seront pas fermes dans l’observance des mitsvot. Ils risquent même, à D.ieu ne plaise, d’abandonner le droit chemin et de tomber dans un profond abîme. Or, leur chute sera à imputer à leurs parents.
Cette paracha est lue au milieu de ben hamétsarim, période de deuil sur la destruction du Temple. Celle-ci trouve sa racine dans la destruction de Jérusalem, alors entachée par de graves fautes, raison pour laquelle nous la déplorons car, si la possibilité de faire une brèche dans ses murailles n’avait pas été donnée à nos ennemis, ils n’auraient pas non plus pu porter atteinte au Temple. Ceci corrobore ces mots des lamentations de Yirmiya : « Lorsque je suis sorti de Jérusalem. » Il n’a pas dit « Lorsque je suis sorti du Temple », car il pleura avant tout l’amorce de cet anéantissement, en l’occurrence celui qui frappa Jérusalem.
Sur le mode allusif, j’ai pensé que le Temple symbolise les jeunes enfants, tandis que Jérusalem symbolise les parents. De même que la ville sainte entourait l’emplacement du Temple, les parents se tiennent autour de leurs enfants comme une muraille préservant leur pureté. Par conséquent, si, à D.ieu ne plaise, les parents se relâchent spirituellement et remettent en question les valeurs du judaïsme, le destructeur en profitera pour faire une brèche dans le Temple, autrement dit le mauvais penchant saisira l’occasion pour s’attaquer à leurs enfants qui déchoiront rapidement. Il en résulte que la destruction des enfants – du Temple – trouve ses germes dans celle des parents – de Jérusalem. Aussi, plutôt que de se lamenter sur la dégradation de leur progéniture, ils devraient tout d’abord désapprouver la leur, prendre conscience qu’ils en sont à l’origine.
Celui qui percevait la beauté spirituelle de Jérusalem, sa sainteté caractéristique, pouvait avoir une petite idée de celles, encore bien supérieures, du Temple. De même, quand on constate la beauté spirituelle des enfants, leur pureté d’âme, on peut aussitôt en déduire celles des parents qu’ils ne font que refléter. C’est pourquoi les parents ont le devoir d’améliorer constamment leur conduite et de suivre, invariablement, la voie de la sainteté et de la pureté, tout en fortifiant les murailles de la pureté dans leur cœur. S’ils se conforment ainsi à « la conduite de Moché et d’Aharon », à l’esprit de la Torah, ils parviendront, avec l’assistance de D.ieu, à éduquer leurs enfants dans ce chemin.
GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA
Un billet de mitsva
Je reçus à l’occasion une femme qui n’avait pas d’enfants depuis des années. Elle me décrivit en pleurant ces années de stérilité, d’examens interminables et de traitements difficiles qui s’étaient à chaque fois soldés par des échecs.
La souffrance de cette femme était très intense et partagée, bien sûr, par son mari qui ne parvenait pas à surmonter l’épreuve et ressentait un certain dépit vis-à-vis de son épouse, surtout suite au dernier pronostic des médecins, selon lesquels elle était stérile et ne pourrait jamais avoir d’enfants.
Je revenais au même moment d’un voyage à l’étranger et j’avais dans ma poche un billet que l’on m’avait sûrement remis pour le donner à la tsédaka à mon arrivée, afin d’être l’émissaire d’une mitsva.
Je tirai ce billet de ma poche et le remis à la femme éplorée en lui disant : « Il s’agit d’un billet de mitsva. Gardez-le précieusement et renforcez-vous dans l’accomplissement de la Torah et des mitsvot, notamment dans le domaine de la pureté familiale. Donnez la tsédaka avec largesse et multipliez les bonnes actions. Avec l’aide de D.ieu, lorsque vous aurez renforcé votre foi en l’Eternel, qui est tout-puissant et peut réaliser des miracles dévoilés à l’encontre des lois de la nature, vous aurez une descendance viable. »
Très émue par mes paroles, elle prit le billet les mains tremblantes.
« Quand vous aurez eu un enfant, ajoutai-je, vous viendrez m’annoncer la bonne nouvelle et me restituer ce billet de mitsva. »
Quelques années s’écoulèrent, pendant lesquelles cette femme garda l’espoir d’avoir des enfants, animée d’une foi inébranlable dans les possibilités illimitées du Créateur.
C’est alors que l’incroyable se produisit : après huit années d’attente, elle mit au monde une fille !
Quand elle vint me rendre le billet que je lui avais confié, elle m’apprit avec émotion qu’elle avait eu une fille. Lorsque les médecins avaient constaté qu’elle était enceinte, ils n’en avaient pas cru leurs yeux et lui avaient enjoint de bien se faire suivre tout au long de cette grossesse miraculeuse.
Pour conclure, voici ce qu’elle me confia : « Chaque jour, j’implorais le Créateur de me donner le mérite de vous rendre ce billet de mitsva et, D.ieu soit loué, dans Sa bonté infinie, Il m’a permis de le faire aujourd’hui ! »
CHEMIRAT HALACHONE
L’interdiction d’écouter du colportage de sa femme
Si l’épouse de quelqu’un lui raconte ce qu’untel a dit de lui et qu’il y croit, outre le péché de donner crédit à du colportage, il entraîne sur lui de nombreux malheurs. Car, en constatant qu’il accepte de bon gré ses paroles, sa femme lui en rapportera toujours, ce qui éveillera sa colère et suscitera des querelles et du chagrin.
Aussi est-il hautement recommandé de demander à son épouse de ne pas lui dire de médisance ni de colportage.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « Ecoutez la parole d’Hachem (…) » (Yirmyahou chap. 2)
Lien avec la paracha : Cette haftara est la seconde des trois instaurées par nos Sages pendant les Chabbatot précédant Ticha Béav et qui traitent de la punition prédite par Yirmyahou, à savoir la chute de Jérusalem.
PAROLES DE TSADIKIM
Le verre de lait de Rav Messas
Le prophète Yirmiya, associé avant tout avec la destruction de Jérusalem, se lamente sur la situation spirituelle du peuple juif à l’époque qui précéda cette tragédie. Il décrit cette déchéance en notant : « Pour s’attacher à des choses vaines et se complaire au néant. » (Yirmiya 2, 5) Au lieu de s’investir dans la sainte Torah, précieux trésor que le Créateur leur avait donné, les enfants d’Israël poursuivaient les vanités de ce monde.
Généralement, fait remarquer le ‘Hida, lorsqu’un homme souffre d’un quelconque problème de santé, la première activité à laquelle il renonce est son cours de Torah. Quand on le questionne au sujet de son absence, il donne la réponse toute prête : « Je ne me sentais pas bien. » Pourtant, le fait de se plonger dans l’étude redonne au contraire la santé à l’homme et dissipe de son esprit tous ses maux et soucis.
Rabbi Bentsion Moutsafi chelita affirme que le verset souligne justement ce point : « Ecoutez la parole de l’Eternel, maison de Yaakov (…) Voici ce que dit l’Eternel : “Quelle injustice vos pères avaient-ils découverte chez Moi pour Me fuir, pour s’attacher à des choses vaines et se complaire au néant ?” » Pourquoi, à chaque fois que les enfants d’Israël se trouvent dans la détresse, ils s’investissent encore davantage dans les affaires de ce monde, au lieu de renforcer leur lien avec l’Eternel et Ses mitsvot ? Ne comprennent-ils pas que seuls la Torah, la prière et le service divin sont à même de leur apporter le salut ?
Le Rav Moutsafi illustre ceci par l’exemple de Rabbi Chalom Messas zatsal qui lui témoigna avoir lui-même expérimenté et vérifié cette réalité : à chaque fois qu’il se plongeait dans l’étude de la Torah, il ne ressentait plus aucune douleur !
Environ un mois avant son décès, alors qu’il était âgé de quatre-vingt-dix-huit ans, Rabbi Chalom s’assit pour approfondir les lois matrimoniales, afin de pouvoir libérer vingt-neuf femmes de leur statut de agouna (femme mariée dont le mari a disparu et ne pouvant se remarier). Conscient de la détresse de ces dernières, il s’attela durant de longues heures à la tâche de l’étude, se pencha assidûment sur ce sujet de nombreux jours, suite auxquels il écrivit des arrêts. Il se sacrifia ainsi dans un désintéressement total.
« Un jour, raconte Rav Moutsafi, je suis allé le voir à trois heures de l’après-midi. Il me tendit sa main pure et me dit : “Je peux vous attester que, depuis ce matin, je n’ai mis dans ma bouche qu’un seul verre de lait !” »
Essayons d’imaginer un vieillard, approchant la centaine, plongé pendant un jour entier dans le déliement d’agounot et animé par la seule force de la Torah et la volonté de mettre fin à la détresse de ces femmes. Et tout ceci, en n’ayant avalé, depuis le matin, qu’un seul verre de lait. Ceci illustre remarquablement le puissant pouvoir de la Torah, capable de raviver l’homme et de renforcer son corps.
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
Rabbi David Hanania Pinto
La prééminence du chef de famille comme celle du prince de tribu
Pin’has, fils d’Elazar, comptant parmi les dirigeants du peuple, enseigna à ses membres le zèle à témoigner dans le service divin. En effet, face à la faute de Zimri avec Kizbi, il réagit sur-le-champ et, sans craindre personne, les tua aux yeux de tous.
Nous pouvons nous demander comment Pin’has eut l’audace de se mettre en danger en les tuant. D’où tira-t-il donc les forces d’âmes nécessaires pour accomplir un tel acte ? En outre, ignorant que l’Eternel ferait un miracle en sa faveur, lui était-il permis d’agir ainsi au péril de sa vie ? N’était-il pas considéré comme un suicidaire ?
C’est que, au moment où Pin’has vit l’odieux spectacle face à lui, une colère puissante s’alluma en lui, si bien qu’il ne parvint plus du tout à réfléchir ni à prendre en compte le danger auquel il s’exposait. Constatant la considérable profanation du Nom divin, il ne perdit pas de temps à réfléchir et se montra prêt à se sacrifier avec amour pour venger l’honneur divin. Il se souvint de la règle à appliquer dans ce cas : celui qui a des relations avec une Araméenne est frappé par les zélateurs (Sanhédrin 81a). Telle est la halakha qu’on doit connaître, mais qui n’est pas énoncée par le Rav comme directive. Il focalisa son esprit sur cette loi et oublia tout le reste.
Or, il est important de savoir qu’au sein du foyer, le chef de famille a la dimension d’un chef de tribu, du fait qu’il porte sur ses épaules la responsabilité de l’éducation de ses enfants qui prennent exemple de sa conduite. Cette idée peut se lire en filigrane à travers le verset « C’est vis-à-vis de la face du candélabre que les sept lampes doivent projeter la lumière. » (Bamidbar 8, 2) Les lampes font allusion aux enfants et le candélabre au père, qui se tient face à eux. Son devoir est donc d’éclairer le chemin de ses enfants, de les guider dans la voie de la Torah, des mitsvot et de la crainte de D.ieu. Il lui incombe d’être pour eux un exemple de la manière dont il convient de servir l’Eternel et de la méticulosité à témoigner dans l’observance des mitsvot. Car, à l’instar des princes de tribus, responsables de guider ses membres dans le droit chemin, le chef de famille a le devoir de guider celle-ci dans la Torah, les mitsvot et les bonnes actions.
PERLES SUR LA PARACHA
La colère et la sagesse antithétiques
« Moché se mit en colère contre les officiers de l’armée. » (Bamidbar 31, 14)
Nos Sages affirment (Pessa’him 66b) que quiconque se met en colère, s’il est sage, perd sa sagesse. Ils le déduisent de Moché au sujet duquel il est écrit « Moché se mit en colère contre les officiers de l’armée », suite à quoi le verset souligne « Eléazar le pontife dit aux hommes de la milice qui avaient pris part au combat : “Ceci est un statut de la loi”, laissant entendre que cette loi avait échappé à Moché.
A priori, la colère de Moché était justifiée et il eut raison de leur reprocher d’avoir laissé en vie les femmes de Midian qui les avaient fait fauter. Aussi, pourquoi oublia-t-il les lois relatives à la cachérisation d’objets employés pour l’idolâtrie ?
Rav ‘Haïm Chmouleviz zatsal en déduit qu’il n’y a pas de différence si la colère était, ou non, justifiée ; dans tous les cas, elle mène à l’erreur. Car celle-ci n’est pas une punition à la colère, mais une conséquence naturelle, la sagesse et la colère étant antithétiques.
La hilloula d’Aharon, une invite à l’introspection
« Aharon (…) y mourut. C’était la quarantième année du départ des Israélites du pays d’Egypte, le premier jour du cinquième mois. » (Bamidbar 33, 38)
Pourquoi la Torah a-t-elle précisé la date du décès d’Aharon, ce qu’elle ne fait jamais ?
L’ouvrage Chémi Véchem Avotaï propose deux explications. Aharon, qui « aimait la paix et la poursuivait », incarnait cette vertu. Dans son commentaire sur le traité Sanhédrin (6b), Rachi souligne que « lorsqu’il entendait des disputes entre les gens, avant qu’ils ne viennent se présenter à lui pour qu’il les juge, il les poursuivait pour rétablir la paix entre eux ».
Or, avec sa disparition, le pilier de la paix disparut lui aussi. Le texte mentionne donc la date de son départ, en l’occurrence Roch ‘Hodech Av, afin qu’on le commémore en procédant à un examen de conscience. On réalisera alors que, si on avait maintenu la paix parmi nous, on aurait peut-être été en mesure d’annuler le décret de la destruction qui présida à ce mois-ci et trouva sa racine dans la haine gratuite.
En outre, en se souvenant du décès d’Aharon au début de ce mois, les générations successives en viendront à réfléchir aux causes de la destruction et chercheront à se corriger dans le domaine des relations interhumaines. En effet, il est écrit dans le Talmud de Jérusalem que « toute génération dans laquelle [le Temple] n’a pas été reconstruit est considérée comme l’auteur de sa destruction ». Car le fait qu’il n’a pas été reconstruit prouve que la cause de sa destruction existe encore et donc que, si son édifice avait été là, il aurait été détruit pour la même raison.
Quand aurons-nous des ailes ?
« Plus Bilam, fils de Beor, qu’ils firent périr par le glaive. » (Bamidbar 31, 8)
Rachi explique que Bilam, par ses sortilèges, faisait planer dans l’air les rois de Midian et lui-même planait avec eux. Pin’has leur montra alors la plaque d’or sur laquelle le Nom divin était gravé et ils tombèrent.
De fait, nous pouvons nous demander pourquoi l’homme n’a pas été créé avec des ailes, d’autant plus que nos Sages affirment que, dans les temps futurs, le Saint béni soit-Il en fera aux justes.
Cette question fut posée à Rabbi Yaakov ‘Haguiz zatsal qui répondit (Responsa Halakhot ktanot 1, 223) ainsi : « Afin qu’il ne soit pas trop facile de commettre un péché, car celui qui sera en route pour fauter se laissera dissuader par ses pieds et maîtrisera alors son mauvais penchant. (…) En outre, les pas effectués par l’homme pour accomplir une mitsva lui octroient une récompense supplémentaire. »
Les hommes de la génération de la dispersion parvinrent, même sans ailes, à s’unir pour construire une tour s’élevant dans les hauteurs du ciel. Combien plus auraient-ils donc fauté s’ils avaient eu des ailes !
Mais, dans les temps futurs où l’homme n’aura plus de mauvais penchant, il n’y aura plus de risque qu’il faute et l’Eternel fera alors une nouveauté : les Tsadikim auront des ailes qu’ils pourront utiliser dans l’intérêt public.
LA FEMME VERTUEUSE
A la mémoire de Mazal Tov bat Mo'ha Sim'ha Zal
« Son époux est considéré aux portes, quand il siège avec les anciens du pays. »
Dans son hesped prononcé sur sa mère, notre Maître Rabbi David ‘Hanania Pinto chelita a cité des propos qu’il a entendus de Maran Rabénou Ovadia Yossef zatsal.
« Il arrive parfois que, lorsqu’un simple Juif rejoint sa dernière demeure, il soit surpris de voir, dans les sphères supérieures, des milliers de pages de Guémara l’accueillir avec joie et des anges chanter devant lui “La lumière se répand sur les justes” et le louer en disant “Heureux sois-tu d’avoir eu le mérite de fonder un monde de Torah !” Surpris, il dit : “Je ne suis qu’un simple Juif, je n’ai rien étudié de tout cela, peut-être avez-vous fait erreur et m’avez-vous confondu avec quelqu’un d’autre…” On lui répond alors que le tribunal céleste ne se trompe jamais. “Durant ta vie, tu as soutenu financièrement les personnes étudiant la Torah et es ainsi devenu associé à ces milliers de pages de Guémara étudiées. On considère donc comme si tu les avais toi-même étudiées. C’est pourquoi elles sont sorties à ta rencontre et les anges ont entonné en ton honneur les chants attribués au justes”, lui explique-t-on.
« Aujourd’hui, dans les nombreuses institutions de Torah sous notre égide, plusieurs centaines d’avrékhim et de ba’hourim, penchés sur les enseignements de la Guémara et des décisionnaires, étudient jour et nuit. Imaginez-vous donc combien de milliers de pages de Guémara ont dû accueillir Maman, danser devant elle et l’inviter à entrer dans le jardin d’Eden. Car, toute cette étude est grâce à elle, tout comme le zikouï harabim que nous faisons et le considérable soutien financier que nous apportons aux autres institutions de Torah d’Israël et de Diaspora. La Torah étudiée dans celles-ci lui est également créditée car, sans son dévouement pour la Torah, nous-mêmes ne leur aurions sans doute pas apporté un tel soutien. Elle a véritablement fondé un monde de Torah. »
Tout au long de leur vie commune, la Rabbanite œuvra en association avec son mari, le Tsadik Rabbi Moché Aharon – que son mérite nous protège. Avec une abnégation hors du commun et une fidélité absolue, elle fut toujours attachée à lui et le resta même après son décès, refusant toutes les honorables propositions qu’elle recevait, quitte à demeurer veuve. Consciente de sa grandeur et de sa sainteté exceptionnelles, elle préféra lui rester attachée, à lui et à ses ancêtres dont elle invoquait souvent le mérite.
Tout le monde savait que la Rabbanite, épouse du Tsadik, intimement liée à sa tradition, poursuivait avec ardeur ses bons actes et œuvrait en faveur de la transmission de la Torah au peuple juif. Toute sa vie durant, elle se tint aux côtés de son mari, eut le mérite de servir des érudits et des justes et de former des générations droites et bénies. Combien de bonnes actions et de mérites a-t-elle à son actif dans le monde éternel !
L’interprétation du verset « Son époux est considéré aux portes, quand il siège avec les anciens du pays », donnée par le Rav Elgazi dans son commentaire sur « Echèt ‘haïl », peut être appliquée à la Rabbanite. Il s’interroge sur l’adéquation de cette phrase, louant le mari, avec l’éloge de la femme vertueuse.
Il répond qu’après son mariage, une jeune femme aime que son époux passe du temps avec elle, alors que, lorsqu’elle vieillit, cela ne la dérange plus tellement qu’il quitte le foyer pour aller étudier au beit hamidrach, comme le font les vieillards. C’est en cela que le verset précité loue la femme vertueuse. Comment la définir ? C’est celle dont le mari « est considéré aux portes », c’est-à-dire parvenu à une grande élévation, du fait qu’elle ne l’a pas empêché de prendre place avec « les anciens du pays ». Depuis le début de leur vie commune, elle a été prête, à l’instar des vieilles femmes, à le laisser partir du foyer pour étudier de longues heures dans la maison d’étude. Une telle dévotion définit véritablement la femme vertueuse.