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Parachat Vayichla'h

14 Décembre 2024

יג כסלו התשפ"ה

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L’étude de la Torah dissipe l'inquiétude et la peur

Rabbi David Hanania Pinto

« Yaakov envoya des messagers en avant, vers Essav son frère, au pays de Séir, dans la campagne d’Edom. » (Béréchit 32, 4)

Yaakov quitte Beerchéva sur l’ordre de sa mère qui lui avait dit : « Ecoute, Essav ton frère veut se venger de toi, en te faisant mourir. Et maintenant, mon fils, obéis à ma voix : pars, va te réfugier auprès de Lavan, mon frère, à ‘Haran. »

Si l’on observe bien la formulation des versets, on notera que Rivka craignait qu’Essav n’attente à la vie de Yaakov, ce pour quoi elle lui ordonna de fuir Beerchéva, alors que Yaakov quitta cette ville sereinement. Car, il savait que, tant qu’il étudiait la Torah et en faisait résonner la voix, les mains d’Essav demeuraient impuissantes contre lui, le mérite de son étude le protégeant.

Cela étant, pourquoi tarda-t-il quatorze ans dans la Yéchiva de Chem et Ever, au lieu de se rendre directement chez son oncle Lavan ? Car il désirait prouver à Essav qu’il n’avait pas peur de lui. C’est la raison pour laquelle il resta encore quatorze années en Israël, période mise à profit pour l’étude de la Torah, qui lui assura protection et tranquillité.

Le patriarche désirait également, par ce biais, enseigner une leçon à ses enfants : ne jamais avoir peur des ennemis les entourant, tant qu’ils étudieraient la Torah, arme la plus efficace contre nos adversaires. En étudiant quatorze ans dans la Yéchiva de Chem et Ever, Yaakov transmettait ce message édifiant à ses descendants : ce nombre, s’écrivant en hébreu comme le terme yad, la main, laisse entendre que, aussi longtemps que la voix de Yaakov résonne dans les synagogues et lieux d’étude, les mains d’Essav sont inoffensives.

Le début de notre paracha nous rapporte le message que Yaakov fit transmettre à Essav : « J’ai séjourné chez Lavan. » (Ibid. 32, 5) D’après nos Maîtres, il voulut ainsi lui souligner le fait que, en dépit de l’influence néfaste de son oncle, il était parvenu à respecter les 613 mitsvot. Mais en quoi cette information intéressait-elle donc son frère impie ?

C’est que Yaakov s’est un peu contredit dans son discours. D’un côté, il a affirmé à Essav qu’il n’était pas important et qu’il n’avait donc pas lieu d’être jaloux de lui, mais de l’autre, il lui a dit qu’il était riche et possédait un grand troupeau et de nombreux serviteurs.

En réalité, le patriarche voulait signifier à son frère qu’il détenait le mérite de la Torah et des mitsvot et ne craignait donc nullement ses éventuelles offensives. De même qu’il avait quitté son foyer paternel en toute sérénité, en s’attardant quatorze ans en route avant de rejoindre la maison de Lavan, de même, à son retour, il ne redoutait pas la confrontation avec lui. Au contraire, il avançait joyeusement, la tête haute, et lui envoyait même des messagers pour lui faire part de son arrivée.

Yaakov était conscient que, si Essav, qui le savait chez Lavan, n’était pas parvenu à lui faire de mal durant tout son séjour chez lui, c’était grâce au mérite des mitsvot et de la Torah auxquelles il était resté fidèle. C’est pourquoi il s’apprêtait à le retrouver en toute confiance, comptant pleinement sur le mérite de la Torah.

Par son discours, il le détrompait également de la pensée que celui qui se tue à la tâche dans la tente de la Torah, y déployant toute son énergie, n’aurait pas un gagne-pain suffisant. En effet, malgré son implication totale dans l’étude, Yaakov jouissait d’une grande richesse, principe valable pour tout ben Torah.

Malheureusement, aujourd’hui, nombre d’entre nous sont confrontés au souci de la subsistance. Certains pensent, à tort, que s’ils se libèrent quelque peu de l’étude au profit d’une affaire quelconque, leur situation pécuniaire s’améliorera et ils s’enrichiront. Yaakov nous enseigne ici que, au contraire, plus l’homme s’investit avec assiduité dans l’étude de la Torah, plus l’abondance matérielle se déversera sur lui. Voilà, en substance, le message qu’il transmettait à Essav, symbole du mauvais penchant.

Un homme s’étant enrichi est exposé au risque d’oublier l’Eternel et de se révolter contre tout ce qui a trait à la sainteté, comme il est dit : « Yéchouroun, engraissé, regimbe. » Yaakov soulignait donc à son frère que, contrairement à ce qu’il aurait pu penser, la richesse ne l’avait pas détourné du droit chemin. A l’inverse, elle lui avait permis de trouver davantage grâce aux yeux de « son maître », allusion au Créateur, par le biais des nombreuses mitsvot et bonnes actions supplémentaires qu’elle lui avait donné les moyens d’accomplir.

PAROLES DE TSADIKIM

Comment gérer son budget ?

« Il distribua son monde, le menu, le gros bétail et les chameaux, en deux bandes. » (Béréchit 32, 7)

Yaakov s’est préparé de trois manières à la rencontre avec Essav : par des cadeaux, par la prière et par la guerre.

En prévision de cette guerre, il divisa ses femmes, ses enfants et ses biens en deux camps, dans l’espoir que, si son frère s’attaquait à l’un d’eux, l’autre resterait sauf.

L’ouvrage Eved Hamélekh en retire un principe fondamental : la Torah nous enseigne une ligne de conduite, à savoir que nous ne devons pas placer tout notre argent à un seul endroit.

Nous retrouvons un enseignement similaire dans les propos de nos Sages (Baba Métsia 42a) selon lesquels « l’homme doit toujours partager ses biens en trois : un tiers dans les terrains, un tiers dans le commerce et un tiers sous sa main ».

Yaakov nous donne lui aussi un conseil pour protéger nos biens : les partager en deux, plaçant chacun à un autre endroit, afin que si l’un d’eux se perdait ou disparaissait, l’autre subsisterait.

Dans son ouvrage Darké Noam, le Rav Munk chelita rapporte une merveilleuse anecdote de nos Sages.

Un marchand juif voyagea à un endroit très éloigné, une coquette somme d’argent entre les mains. Il ne savait quoi en faire. D’un côté, il craignait de la garder sur lui, mais, de l’autre, il redoutait de la confier à un inconnu.

Finalement, il décida de creuser un trou dans le sol et d’y cacher son argent. Cependant, il ignorait que, alors qu’il était à l’œuvre, une paire d’yeux l’observait depuis la maison proche. A peine eut-il tourné les talons que le voisin arriva sur place pour s’emparer du trésor.

Peu de temps après, le commerçant voulut reprendre son argent. Désemparé, il constata qu’il n’était plus à l’endroit où il l’avait dissimulé.

Examinant les lieux de toutes parts, il remarqua la présence d’un petit trou dans un mur, à partir duquel on pouvait voir l’ensemble de la région, y compris le terrain où il avait caché ses biens. Le Juif s’empressa de rejoindre le propriétaire de la maison proche et lui dit :

« Depuis quelque temps, je suis venu habiter ici, mais je ne connais encore personne. J’ai deux portefeuilles en ma possession. L’un d’eux contient cinq cents pièces d’or, l’autre mille. J’ai caché le premier il y a quelques jours, mais j’hésite quoi faire pour le deuxième : devrais-je le mettre au même endroit que le premier ou est-il préférable de le confier à l’un des habitants de la ville ? »

« Le mieux, conseilla son interlocuteur, qui s’imaginait déjà possesseur de mille nouvelles pièces d’or, est de cacher votre deuxième portefeuille au même endroit que le premier. »

Mais, lorsque le commerçant le quitta, son conseiller se mit à trembler. Dans quelques instants, il creuserait dans le sol et s’apercevrait que ses biens avaient disparu ; il est alors certain qu’il ne déposerait pas son second portefeuille au même endroit.

Il eut alors une idée ingénieuse… Prenant avec lui le portefeuille volé, encore intègre, il le précéda sur les lieux pour le redéposer à sa place. Le commerçant, qui s’attendait à une telle réaction, attendit patiemment qu’il eut terminé. Puis, il se dirigea lui-même vers la cachette, remit la main sur son portefeuille et s’empressa de retourner chez lui.

GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA

La Torah : bouclier contre les mauvaises pensées

Au cours de l’un de mes innombrables voyages en avion, de mauvaises pensées m’assaillirent soudainement, sans que je parvienne à les chasser. Ce phénomène était étonnant. Qu’y avait-il de particulier ce jour-là ? En quoi ce voyage était-il différent des autres ?

Je me souvins soudain du conseil de nos Sages, rapporté dans l’ouvrage Eliahou Zouta (Ich Chalom 16) :

« Rabbi Chimon bar Yo’haï disait : tout celui qui met les paroles de Torah dans son cœur se voit débarrassé des pensées de péché, du souci de la guerre, des pensées de gloire, des pensées folles, des pensées du mauvais penchant, des pensées de débauche, des pensées d’une femme mauvaise, des pensées d’idolâtrie, du souci du joug des hommes, des pensées vaines, etc., comme il est dit : “Et parce que tu n’auras pas servi l’Éternel, ton D.ieu, avec joie et contentement de cœur, au sein de l’abondance, tu serviras tes ennemis, suscités contre toi par l’Éternel, en proie à la faim, à la soif, au dénuement, à une pénurie absolue (…).” (Dévarim 28, 47-48) »

En d’autres termes, celui qui se voit assailli par des pensées malvenues devra se consacrer à l’étude, et celles-ci disparaîtront.

Je suivis ce conseil et, effectivement, ces pensées me quittèrent. À un moment, en me levant, je remarquai qu’était assis derrière moi un homme au comportement indécent. Voilà donc ce qui m’avait causé ces mauvaises pensées.

Je décidai aussitôt de me chercher une autre place, en vertu du principe « Eloigne-toi d’un mauvais voisin » (Avot 1, 7), afin que le comportement inconvenant de cette personne ne puisse plus m’influencer.

DE LA HAFTARA

Haftara de la semaine : « Vision d’Ovadia (…) » (Ovadia chap. 1)

Certains Achkénazes lisent pour la haftara : «Oui, Mon peuple se complaît dans sa rébellion contre Moi (…).» (Hochéa chap. 11)

Lien avec la paracha : la haftara dépeint la haine viscérale d’Essav pour Yaakov, sujet longuement développé dans la paracha où Essav sortit à la rencontre de Yaakov, accompagné de quatre cents hommes, dans l’intention de le combattre.

CHEMIRAT HALACHONE

Se préserver d’un préjudice

Bien que la Torah nous interdise de donner crédit à de la médisance, nos Maîtres ont enseigné qu’il est recommandé de se méfier de tels propos.

Autrement dit, on doit rester sceptique à ce sujet, afin de se préserver d’un préjudice. Mais, il nous est interdit d’avoir des doutes sur la personne dont on a entendu le blâme, car nous avons le devoir de considérer tout homme comme innocent.

PERLES SUR LA PARACHA

Le fils d’Essav, nommé « mon frère »

« Sauve-moi, de grâce, de la main de mon frère, de la main d’Essav. » (Béréchit 32, 12)

De nombreuses interprétations ont été avancées pour expliquer l’insistance de ce verset « de la main de mon frère, de la main d’Essav ».

Le Rokéa’h rapporte un Midrach selon lequel, lorsque Yaakov, fuyant Essav, partit à ‘Haran, Essav eut un fils qu’il appela « mon frère », afin de ne pas oublier ce que Yaakov lui avait fait.

Quand cet enfant grandit, il lui ordonna de tuer son oncle Yaakov, en tout lieu où il le trouverait. D’où la double prière du patriarche : « Sauve-moi, de grâce, de la main de “mon frère”, de la main d’Essav. »

Notre constant devoir de remercier le Créateur

« Pourtant, Tu as dit : “Je te comblerai de faveurs.” » (Béréchit 32, 13)

Rabbi Yé’hezkel de Kojmir commentait ainsi ce verset : lorsque l’homme est empli de reconnaissance à l’égard du Saint béni soit-Il, ressentant qu’Il le comble de bienfaits et s’assure toujours que sa situation soit la meilleure possible, en retour, l’Eternel lui démontre combien il a raison, en déversant sur lui encore plus de bénédictions.

Cette idée peut se lire en filigrane à travers les mots de notre verset : « Pourtant, Tu as dit : “Je te comblerai de faveurs (hétev étiv).” » En d’autres termes, si l’homme affirme que D.ieu ne lui fait que du bien (hétev), Il le lui confirmera en le comblant d’autant plus (étiv). Par contre, si, à D.ieu ne plaise, l’homme se plaint de la médiocrité de sa situation, le Très-Haut réagira en l’aggravant davantage, afin de lui signifier qu’auparavant, elle n’était pas si mauvaise qu’il le prétendait.

Comparaison au sable de la mer, jamais manquant

« Pourtant, Tu as dit : “Je te comblerai de faveurs et J’égalerai ta descendance au sable de la mer, dont la quantité est incalculable.” » (Béréchit 32, 13)

Dans le même esprit, nous trouvons que, suite à l’épisode de la akéda, l’ange bénit Avraham en disant : « Je te comblerai de mes faveurs ; je multiplierai ta race comme les étoiles du ciel et comme le sable du rivage de la mer. »

Mais pourquoi les enfants d’Israël sont-ils comparés au sable ?

Le Or Ha’haïm explique que cette comparaison recèle une bénédiction : si leur fortune en venait à diminuer, ce manque serait bien vite comblé, par le pouvoir de la sainteté particulière résidant sur leurs biens.

Tel est bien le sens de l’image du sable. En effet, lorsqu’on creuse dans une étendue de sable et qu’on en enlève, très rapidement le trou se remplit de nouveau. Ainsi, quand des membres du peuple juif perdent des biens, ils jouissent rapidement d’une nouvelle abondance céleste, sans que le moindre manque ne soit plus ressenti.

DANS LA SALLE DU TRÉSOR

Rabbi David Hanania PInto

L’autoprotection du juste

« Yaakov étant resté seul, un homme lutta avec lui, jusqu’au lever de l’aube. » (Béréchit 32, 25)

Nous pouvons nous demander pourquoi l’ange d’Essav combattit précisément Yaakov, plutôt qu’Avraham ou Its’hak.

Avraham symbolisait le pilier de la bienfaisance, Its’hak, celui de la prière. Le mauvais penchant était prêt, bon gré mal gré, à accepter ces deux vertus. Cependant, lorsqu’il constata l’assiduité de Yaakov dans l’étude de la Torah, il réalisa que, dans les temps futurs, ce mérite lui vaudrait de diriger, à lui seul, les sphères inférieures, de même que la domination des sphères supérieures est l’apanage du Saint béni soit-Il. Désirant éviter à tout prix une telle situation, il s’attaqua de toutes ses forces à Yaakov.

Afin d’avoir le mérite d’atteindre le niveau en Torah de notre patriarche Yaakov, il incombe à l’homme de délaisser les affaires de ce monde et de s’éloigner de ses jouissances. Car, comme le soulignent nos Sages (Sanhédrin 111a), la Torah ne peut se trouver chez celui qui l’étudie paisiblement, mais uniquement chez l’homme peinant à la tâche de son étude. Telle était justement l’approche de Yaakov avec la Torah.

Cette idée peut se retrouver allusivement dans notre verset, « Yaakov étant resté (vayivatèr) seul », à travers le terme vayivater qui peut être rapproché du verbe viter, signifiant il renonça. Le patriarche renonça à tous les plaisirs de ce monde, répugnant ce bonheur fictif et s’en éloignant au maximum, en s’isolant dans la tente de la Torah. Car, la principale vertu du peuple juif consiste à se tenir à l’écart des autres nations et à ne pas imiter leurs mauvaises voies ni adhérer à leur culture corrompue, en vertu du verset : « Ce peuple, il vit solitaire, il ne se confondra point avec les nations. » (Bamidbar 23, 9) Toute sa vie durant, Yaakov vécut conformément à ce mode de vie, de manière retirée. Durant son enfance, il s’efforça au mieux de ne pas se lier avec son frère Essav, bien qu’ils grandissent dans le même foyer. Il s’isolait dans la tente pour étudier la Torah. De même, quand il séjourna à ‘Haran, il se réfugia dans la Yéchiva de Chem et Ever, à l’écart de tous les habitants, se vouant corps et âme à l’étude de la Torah.

Arrivé chez Lavan, il continua à rester sur ses gardes, maintenant ses distances de lui afin de ne pas être influencé par sa mauvaise conduite.

Or, mesure pour mesure, il en sera récompensé : lui qui veilla toute sa vie à rester « seul », à l’écart des autres gens, dans les temps futurs, se verra attribuer à l’exclusivité l’empire des sphères inférieures, de même que les sphères supérieures sont sous la tutelle exclusive du Saint béni soit-Il.

LA PARACHA SOUS UN NOUVEL ANGLE

« Yaakov arriva ensuite à Chalem. » (Béréchit 33, 18)

Rachi commente : « Entier (chalem) dans son corps, entier dans son argent et entier dans sa Torah, dont il n’avait pas oublié les enseignements dans le foyer de Lavan. »

D’après la Guémara (Baba Métsia 30b), les mots « qu’ils doivent tenir » du verset « Instruis-les de la voie qu’ils ont à suivre et de la conduite qu’ils doivent tenir » se réfèrent à notre devoir d’agir au-delà de la stricte justice.

Rabbi Réouven Elbaz chelita écrit à ce sujet que notre devoir d’agir au-delà de la stricte justice est un concept d’une grande profondeur. Il ne s’agit pas d’une finesse, mais d’une véritable mitsva. Aussi est-il erroné de dire : « Si cela ne relève pas de la stricte justice, j’en suis exempt. »

Il existe divers domaines dans lesquels on demande à l’homme de se comporter au-delà de la stricte justice. Il doit souvent renoncer à ce qu’il désire en faveur de son prochain, même s’il n’est pas obligé de se conduire ainsi. Telle est la volonté divine, à savoir que nous renoncions à ce qui nous est cher, que nous jugions notre prochain selon le bénéfice du doute.

Un Juif n’est pas supposé vivre pour lui-même. Il doit toujours calculer ses pas en fonction des personnes de son entourage, à commencer par les membres de sa famille, puis envers son cercle d’amis et celui d’autres connaissances plus lointaines. Il doit constamment prendre les autres en considération et chercher à les aider.

Telle est la recette avec laquelle l’Eternel a créé le monde. Comme le souligne Rav Dessler dans son Mikhtav Mé-Eliahou, le but ultime de la création est que l’homme soit perpétuellement confronté à des occasions de pratiquer de la charité ; dans son foyer, avec sa femme et ses enfants et, plus largement, envers toute autre personne. Telle fut la requête pressante du roi David : « Oui, le bonheur et la grâce m’accompagneront ma vie durant. » (Téhilim 23, 6)

Le monde ne pourrait se maintenir si chacun se contentait de faire ce que la justice l’y oblige. Car, le devoir de pratiquer le bien comprend aussi celui de se conduire au-delà de la stricte justice.

Le Saint béni soit-Il a conçu l’homme avec une âme particulière, afin que, toute sa vie, il soit poussé à faire du bien autour de lui. Au départ, à sa naissance, il reçoit, mais apprend ensuite à donner lui aussi, ce qu’il s’exerce à faire tout au long de son existence. Quand il se marie, il parvient à l’étape pour laquelle il a été créé, construisant son propre foyer.

Rav Dessler explique que D.ieu veut rendre l’homme méritant par ses actes de bonté envers son prochain. Aussi, lui offre-t-Il d’incessantes opportunités de donner à autrui. Mais qu’en est-il d’un ba’hour étudiant à la Yéchiva ? A-t-il de telles occasions de faire preuve d’altruisme ? Très peu.

Une telle situation n’étant pas conforme au projet divin, D.ieu donne à l’homme une épouse, de laquelle lui naissent ensuite des enfants, si bien qu’il n’a d’autre choix que de donner. Le cadre familial constituant un véritable réseau d’inter-échanges, il deviendra un donneur et gagnera ainsi d’incalculables mérites.

Tel est le rôle que l’Eternel a donné à l’homme : être un donneur, prodiguer constamment du bien à sa femme et à ses enfants. S’il parvient à le remplir, il aura accompli le but de la création, mérite le plus grand qu’il peut acquérir.

Les actes de la femme, dépassant de loin son devoir

Autrefois, j’avais l’habitude de suivre les cours de Rabbi Bentsion Abba Chaoul zatsal. Lorsque nous arrivâmes à la Michna du traité Kétouvot où il est écrit : « Voilà les travaux que la femme accomplit pour son mari : moudre, faire de la pâtisserie, laver et cuisiner », il commentait :

« A priori, qu’est-ce que la femme a l’obligation de faire ? Prendre une pomme de terre, la mettre dans une casserole avec de l’eau et du sel et y allumer le feu. Désire-t-il qu’elle ajoute des épices ? Elle peut lui dire de le faire lui-même, cela dépassant son devoir. Et si elle coupe des oignons et ajoute de la cannelle, elle agit bien au-delà de la stricte justice ! »

Evidemment, une femme cachère ne présente pas à son mari des plats fades, mais se donne la peine de les mijoter afin de satisfaire son plaisir gustatif.

S’il en est ainsi, il est logique que le mari accomplisse lui aussi des actes dépassant son strict devoir, plutôt que de se dire : « Je ne fais que ce que je dois faire d’après la stricte justice. » Car, s’il réfléchit, il réalisera que son épouse fait en sa faveur bien plus que ce qu’elle ne doit.

Elle épice et assaisonne la nourriture préparée. Parfois, elle fait revenir un oignon pour que la soupe ait un meilleur goût. Loin de se contenter de le jeter entier dans la casserole, elle investit des efforts pour agrémenter au plus le repas de son mari. Il se doit donc de lui rendre la pareille, en agissant lui aussi au-delà de ses obligations.

Il incombe au mari de constamment garder à l’esprit cette vision des choses. Plutôt que de toujours chercher ce que sa femme n’est pas parvenue à réaliser, il lui appartient de relever toute la peine qu’elle se donne pour accomplir les tâches domestiques.

Préparer le poisson pour réjouir sa femme

C’est ainsi que se comportaient de nombreux Grands Rabbanim de notre peuple.

Plusieurs personnes de confiance m’ont raconté que, le vendredi, ils ont vu de leurs propres yeux Rabbi Bentsion Abba Chaoul zatsal entrer dans sa cuisine et mettre un tablier pour nettoyer les poissons, les couper et les cuire.

Il n’agissait pas ainsi afin de s’assurer qu’il aurait du bon poisson à manger. Son unique intention était de faire plaisir à sa femme, de la réjouir, pour qu’elle accueille le Chabbat dans la joie et la sérénité et que le jour saint se déroule dans une bonne atmosphère. Si l’on désire créer une atmosphère pacifique dans son foyer, on doit donner à autrui.

Celui dont l’existence tourne autour du don à l’autre vit dans un autre monde, un monde ayant la dimension de celui à venir.

(Machkhéni A’harékha)

 

 

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