Une femme qui a le doute si elle a oui ou non récité le Birkatt Ha-Mazone
Dans les précédentes Halah’ot, nous avons expliqué le principe du Din de « Safek Bérah’ot Léhakel » (« Lors d’un doute sur la récitation d’une bénédiction, on ne la récite pas »), selon lequel chaque fois où l’on a un doute si l’on a oui ou non récité la bénédiction d’un aliment, on ne la récite pas dans le doute, puisque nous avons un principe selon lequel « Safek Dérabbanann Léhakel » (« Lors d’un doute sur une loi instaurée par nos maîtres, nous allons à la souplesse »), or puisque le principe des bénédictions n’est que Midérabanann (instauré par nos maîtres), on ne récite pas de nouveau la bénédiction dans le doute. On n’est pas autorisé dans ce cas à s’imposer la rigueur de réciter malgré tout la bénédiction, car en agissant ainsi on s’introduit dans un risque de récitation de bénédiction inutile dont l’interdiction est très grave, en raison de la prononciation du Nom d’Hachem en vain.
Nous avons écrit que tout ceci est valable uniquement pour les bénédictions dont l’obligation n’est pas Mine-Ha-Torah (ordonnée par la Torah), mais lorsqu’il s’agit du Birkatt Ha-Mazone dont l’obligation est Mine-Ha-Torah, en cas de doute si l’on a oui ou non récité le Birkatt Ha-Mazone, on est tenu de le réciter de nouveau, comme nous l’avons expliqué en citant des détails sur ce point.
Nous devons maintenant débattre au sujet d’une femme qui a consommé du pain et s’est rassasiée de ce qu’elle a mangé, mais qui a le doute si elle a oui ou non récité le Birkatt Ha-Mazone. Doit-elle réciter de nouveau le Birkatt Ha-Mazone dans le doute – exactement comme un homme – ou non ?
Cette question dépend d’une autre question :
Les femmes sont-elles tenues Mine-Ha-Torah (selon la Torah) de réciter le Birkatt Ha-Mazone ou pas ?
Si nous considérons que les femmes sont tenues Mine-Ha-Torah de réciter le Birkatt Ha-Mazone, il est certain que la femme doit elle aussi en cas de doute réciter de nouveau le Birkatt Ha-Mazone, mais si nous considérons que la femme n’est tenue que Midérabanann (seulement par institution de nos maîtres) de réciter le Birkatt Ha-Mazone, de ce fait le Birkatt Ha-Mazone est pour la femme exactement comme toutes les autres bénédictions instaurées par nos maîtres, et en cas de doute, elle ne doit pas de nouveau le réciter.
Il est enseigné dans une Michna du traité Bérah’ot (20b) que les femmes sont soumises à l’obligation de réciter le Birkatt Ha-Mazone.
La Guémara s’interroge si cette obligation pour les femmes est Mine-Ha-Torah ou Midérabanann. Ce doute prend sa source dans le verset de la Torah à travers lequel nous apprenons l’obligation de réciter le Birkatt Ha-Mazone.
En effet, ce verset dit : « Tu mangeras, tu te rassasieras et tu béniras Hachem ton D. sur la terre qu’Il te donne. »
Or, la terre d’Israël n’a pas été donnée aux femmes par Hachem lors du partage de la terre, puisqu’à ce moment-là les femmes n’ont pas reçu d’héritage de la terre de façon indépendante, car le partage de la terre ne se faisait que par tribu.
Selon cela, on peut apparemment dire que les femmes sont exemptes Mine-Ha-Torah de réciter le Birkatt Ha-Mazone.
Mais on peut faire remarquer que les filles de Tsélofh’add ont reçu une part de la terre d’Israël, et de ce fait les femmes sont donc concernées par le partage de la terre. Mais il n’en est rien puisque la part reçue par les filles de Tsélofh’add revenait à l’origine à leur père qui avait fait partie de ceux qui étaient sortis d’Égypte, mais de par elle-même, elles n’auraient rien reçu, car l’héritage de la terre ne se faisait que selon les tribus qui étaient affiliées au père.
De ce fait, nous pouvons encore dire que les femmes sont exemptes Mine-Ha-Torah de réciter le Birkatt Ha-Mazone. (Rachi)
Nos maîtres les Richonim (décisionnaires de l’époque médiévale) débattent afin d’expliquer le sens de cette Guémara pour savoir si en conclusion les femmes sont réellement soumises à l’obligation de réciter le Birkatt Ha-Mazone, ou bien si cette question reste un doute si elles sont soumises à cette obligation Mine-Ha-Torah ou seulement Midérabanann.
Du point de vue de la Halah’a, MARANN tranche dans le Choulh’an ‘Arouh’ (chap.186) que la question reste un doute et l’on ne sait pas si les femmes sont soumises Mine-Ha-Torah à l’obligation de réciter le Birkatt Ha-Mazone, ou seulement Midérabanann.
C’est pourquoi, sur le plan pratique, en raison d’un doute sur des bénédictions, notre grand maître le Rav Ovadia YOSSEF Zatsal a rédigé une formidable Tchouva sur cette question dans son livre Chou’t Yéh’avé Da’at (tome 6), et conclut que puisqu’il y a un doute si la femme est soumise à l’obligation de réciter le Birkatt Ha-Mazone Mine-Ha-Tora ou seulement Midérabanann, par conséquent une femme qui a le doute si elle a récité oui ou non le Birkatt Ha-Mazone, ne doit pas le réciter de nouveau dans le doute.
Malgré tout, puisque cette question reste un doute, si la femme en a la possibilité, il est bon dans ce cas là qu’elle écoute le Birkatt Ha-Mazone de la bouche d’un homme ou d’une autre femme qui n’ont pas encore récité le Birkatt Ha-Mazone, qui penseront à l’acquitter de son obligation, et la femme elle aussi pensera à s’acquitter de son obligation en écoutant ce Birkatt Ha-Mazone. En agissant ainsi, elle est quitte sans le moindre doute, et elle mérite que repose sur elle la Bénédiction.