Des obstacles à la techouva

A Yom Kippour, nous nous repentons et déclarons verbalement que nous ne pécherons plus. Pourtant, en même temps, nous savons qu’aussitôt après Yom Kippour, nous réitérerons nos péchés. Cela signifie que cette techouva n’était pas en bonne et due forme, puisque « dans la voie qu’un homme veut suivre, on le conduit » (Maccot 10b). Si l’homme prend les choses à la légère, on le laisse aller dans cette voie, de même que, du Ciel, on l’aide s’il désire devenir tsaddik.

Un des grands secrets de la techouva est que lorsque l’homme réfléchit et procède à une introspection approfondie pour déterminer quels sont les obstacles à son repentir, il finira toujours par découvrir que ce sont l’orgueil, la jalousie ou la recherche des honneurs, qui « expulsent l’homme du monde ». S’il ne pousse pas cette réflexion jusqu’au bout, il peut croire à tort qu’il s’est réellement repenti.

Dans ce cas, du Ciel, on le pousse justement à poursuivre dans la mauvaise voie qui était la sienne avant sa prétendue techouva, à l’instar de Paro, roi d’Egypte qui ne fléchissait chaque fois que du bout des lèvres. Du fait que le cœur n’y était pas, du Ciel, on a encore endurci davantage son cœur. De même, celui qui se repent superficiellement à Yom Kippour, pour, dès le lendemain, reprendre la voie du mal, sera poussé cette fois-ci à aller encore plus loin dans ce chemin.

En illustration, je citerai le cas de ce président de synagogue, destitué de ses fonctions pour ne pas les avoir assumées comme il le devait et qui, aussitôt après un jour de Yom Kippour, s’est lancé dans une lutte acharnée et publique contre les membres de sa communauté, provoquant ainsi une grave profanation du Nom divin, puisque cette controverse fit du bruit parmi les non-juifs.

Or, comment est-il possible qu’aussitôt après Yom Kippour – jour de techouva vis-à-vis de D. et vis-à-vis des hommes –, il retourne au mal ? Cela ne se comprend que si l’on conçoit que déjà le jour de Yom Kippour, il avait en tête ces projets contestataires. Sa techouva était donc totalement superficielle, et c’est pourquoi Yom Kippour ne le marqua nullement, et il resta à son état antérieur.

De fait, qu’est-ce qui l’empêchait de se repentir réellement ? Comme nous l’avons dit, orgueil, recherche des honneurs et jalousie sont à pointer. Et s’il avait vraiment fait l’effort d’effacer de son cœur ces trois travers, le jour de Yom Kippour aurait achevé de les anéantir.

Ainsi, l’homme qui sait qu’après Yom Kippour, la communauté a prévu de donner un honneur à un autre à sa place, doit nécessairement, déjà avant Yom Kippour, se travailler pour effacer de son cœur toute trace d’orgueil, et se dire que si le Saint béni soit-Il a choisi à sa place un autre pour lui octroyer cet honneur, c’est la preuve que lui-même ne le mérite pas.

Or, s’il cultive pendant tout Yom Kippour des pensées vengeresses, réfléchissant au meilleur moyen de se venger après la faute de cet homme qui lui a, croit-il à tort, « dérobé » cet honneur, sa techouva est nulle et non avenue. Pire, il est peut-être encore plus mauvais après Yom Kippour. C’est exactement là ce qu’on reproche à Paro. Bien qu’il prétendit plusieurs fois se repentir, il ne se défit pas du principal obstacle à la techouva, ce qui lui aurait permis de définitivement cesser d’être mauvais et stupide. Il ne renonça pas à la course aux honneurs, à l’orgueil et à la convoitise et c’est pourquoi il fut si incohérent.

A l’heure où il resta le seul survivant de son armée, il réalisa à quel point il avait été stupide en Egypte. Pourtant, s’il s’était défait de ce sentiment d’orgueil qui l’avait poussé à dire : « Qui est l’Eternel pour que j’écoute Sa voix ? » (Chemot 5:2), il aurait pu se repentir déjà dans son royaume. Mais il lui était difficile d’effacer son honneur devant l’honneur divin, et c’est pourquoi il fut frappé des dix plaies.

Le Midrach (Pirké deRabbi Eliezer 42) nous informa que Paro finit par dire, ballotté dans la Mer Rouge : « Qui est comme toi parmi les forts, Eternel ? » (Chemot 15:11). Pourtant, l’ignorait-il auparavant ? N’avait-il pas déjà avoué (ibid. 9:27) : « L’Eternel est juste, et c’est moi et mon peuple qui sommes coupables. »

Force est donc d’affirmer qu’il n’avait fait ce premier aveu que du bout des lèvres, hypocritement, tandis qu’au sein des flots déchaînés, cela venait du fond du cœur. En effet, toute trace d’orgueil et d’honneurs avait bien disparu, alors que, seul survivant de son armée, il était au bord de la noyade. En cet instant, il parvint à annuler son ego et à la vérité de l’aphorisme : « D’aucuns acquièrent le Monde futur en seulement une heure. » (Avoda Zara 10b) Quel dommage, pourtant, qu’il ait laissé passer toutes les occasions que le Saint béni soit-Il lui avait données et par lesquelles il aurait pu mériter le Monde futur depuis tant d’années !

De fait, nombreux sont ceux qui attendent ainsi l’instant ultime pour se repentir. D., certes, agrée leur techouva, puisque, comme Il le dit (Ye’hezkel 18:32) : « Car Je ne désire pas la mort de qui meurt, dit le Seigneur D., revenez et vivez ! » Pourtant, quel dommage pour le temps perdu ! En outre, il est très périlleux d’attendre le dernier moment de sa vie pour se repentir, de crainte de le rater et de perdre son Monde futur. La techouva doit donc être faite à chaque instant.

Résumé

 •Au plus fort de Yom Kippour, on fait techouva et pourtant, aussitôt après, on reprend la mauvaise voie. Pourquoi ? Parce que la techouva n’a pas été convenablement opérée. En effet, tant qu’on ne se soumet pas réellement au Maître du monde, en annulant son ego et en procédant à une introspection en profondeur, il est impossible de se repentir vraiment. L’inverse est tout aussi vrai.

 

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