La recherche du ‘hamets – techouva et élévation
La période qui précède Pessa’h est une période de méditation et de remise en question, lors de laquelle il est fondamental de réfléchir à ses obligations du moment, d’en saisir la profondeur, le message sous-jacent et d’en tirer des conclusions pratiques. Car ces jours-là peuvent tant être marqués par l’élévation que par la déchéance, à D. ne plaise.
La Torah nous enjoint d’éliminer le ‘hamets avant la fête de Pessa’h et, d’après celle-ci, une simple annulation suffit (Pessa’him 4b), mais nos Maîtres y ont ajouté l’obligation de rechercher le ‘hamets pour l’éliminer (ibid. 2a dans la michna), de peur que l’on ne trouve, pendant la fête, un morceau de ‘hamets alléchant qu’on soit tenté de manger. C’est pourquoi ils nous ont ordonné de nous en débarrasser et de le brûler (ibid. 6b).
Or, cette recherche du ‘hamets matériel doit faire pendant à une recherche suivie d’une élimination du « levain » spirituel. Comment y procéder ? L’essentiel n’est pas de vérifier et de brûler le ‘hamets qui se trouve chez nous, dans notre cave, dans le garage, dans notre bureau ou notre voiture, mais de parvenir à déceler et éliminer celui qui se dissimule dans les replis de notre cerveau et de notre cœur – le mauvais penchant et les vices qui y sont implantés.
Or, s’il ne suffit pas d’annuler le ‘hamets matériel mais qu’il faut le brûler, il en va de même pour les fautes : il faut vraiment les rechercher et les réparer en profondeur afin de ne pas récidiver et d’être purs de toute faute. C’est là, à mon sens, le véritable message de la fête de Pessa’h.
A Pessa’h, l’homme doit ressentir qu’il passe au feu ses vices et péchés, comme à Yom Kippour. Car Pessa’h symbolise de ce point de vue aussi la liberté – et c’est d’ailleurs l’un des noms de cette fête. Suivons, à cet égard, l’enseignement de nos Sages (Avot 6:2 ; Bamidbar Rabba 10:21) : « N’est d’homme libre que celui qui se consacre à la Torah. » En effet, il est alors libéré des entraves du Satan et de toute trace de ‘hamets spirituel dans le cœur.
Ce qui est vrai à notre époque l’était d’ailleurs également alors, dans le creuset de l’Egypte. A l’heure de la sortie d’Egypte, les enfants d’Israël se trouvaient dans un état de déchéance dramatique, plongés dans les quarante-neuf paliers d’impureté (Zohar ‘Hadach Yitro 39a). Pourtant, à Pessa’h, ils atteignirent un niveau d’élévation exceptionnel, au point qu’on a pu dire (Mekhilta Bechala’h 15) qu’au moment de l’ouverture de la mer, une simple servante a pu voir ce qu’aucun prophète n’avait perçu. Ils procédèrent alors à la circoncision (ibid. Bo), et le sang du korban Pessa’h vint s’ajouter à ce sang, cumulant en leur faveur un grand mérite, dépeint par la métaphore du prophète (Ye’hezkel 16:6) : « Mais Je passai sur toi et Je te vis t’agiter dans ton sang, et je te dis : “Vis dans ton sang !”, et je te dis : “Vis dans ton sang !” » En retirant la orla <*40>40@G, qui évoque le mauvais penchant et l’impureté, ils atteignirent l’élévation du Chabbat Hagadol, où ils attachèrent au pied de leurs lits l’idole égyptienne (Tour Ora’h ‘Haïm §470).
Ils montrèrent ainsi à la face du monde leur attachement à D., et non au mauvais penchant. De plus, en sortant d’Egypte sans provisions (Chemot 12:39), ils faisaient la preuve de leur émouna sans faille, de leur conviction que D. leur fournirait une subsistance dans le désert.
A notre époque, nous avons reçu la mitsva de nous souvenir du jour de notre sortie d’Egypte quotidiennement (cf. Devarim 16:3), évènement que nous mentionnons à plusieurs reprises à travers nos prières. Car il n’est pas suffisant d’évoquer ce souvenir une seule fois par an, ou même par jour, pour réaliser ce que nos ancêtres vécurent en Egypte à cette époque et s’associer à leur souffrance, s’élever et se rapprocher de D. à leur instar. C’est pourquoi nous évoquons ce souvenir aussi fréquemment, et même la nuit, selon le commentaire de nos Sages sur le verset : « tous les jours de ta vie – y compris les nuits » (Berakhot 12b). Cela nous permet de prendre conscience que D. nous garde et nous protège à chaque instant, et qu’Il tient les rênes de notre existence.
Notre époque est particulièrement difficile, et nous assistons chaque jour à d’innombrables prodiges qu’Il accomplit en notre faveur. Comment pourrait-on vivre sans cette conscience intense qu’« Il ne dort ni ne sommeille, le Gardien d’Israël » (Tehilim 121:4) ? De ce fait, il nous incombe, chaque jour, de rappeler la sortie d’Egypte, en vertu de cette injonction de nos Sages (Pessa’him 116b) : « A chaque génération, l’homme doit se considérer comme étant lui-même sorti d’Egypte. » Nous devons nous inspirer de l’exemple de nos pères qui, depuis le fond de l’abîme, s’élevèrent jusqu’à atteindre, au moment de la sortie d’Egypte, le niveau d’anges.
Résumé
•Avant la fête de Pessa’h, l’homme doit prendre des résolutions contraignantes pour réparer ses actes. S’il est vrai que la Torah se contente d’exiger une annulation du ‘hamets, nos Sages y ont ajouté l’obligation de le rechercher et de l’éliminer. Or, cela ne concerne pas uniquement le ‘hamets matériel mais aussi – et surtout – son pendant spirituel, autrement dit, le fait de réparer ses péchés, d’éliminer ses vices et de s’éloigner du mauvais penchant pour s’élever et se rapprocher du Créateur.
•De la même manière qu’à l’époque, avant Pessa’h, les enfants d’Israël se détachèrent de l’impureté et s’attachèrent au Créateur en procédant à la mila et en sacrifiant l’agneau pascal aux yeux des Egyptiens, qui vénéraient cet animal, nous devons nous souvenir et évoquer chaque jour la sortie d’Egypte, car c’est le seul moyen de parvenir à ressembler à nos ancêtres – de surmonter le mauvais penchant et l’impureté et de se rapprocher du Créateur.