Le septième jour de Pessa’h : la base de notre foi en D.

Le septième jour de Pessa’h est l’apogée de tous les jours de la fête qui le précèdent, et les écrits saints vont jusqu’à dire qu’il a plus de valeur et d’importance que tous ceux-ci. Tentons de comprendre la raison de sa supériorité par rapport aux autres jours de Pessa’h. D’autres questions se posent à nous concernant ce jour particulier : en quoi le fait que nos ancêtres ont commencé à pénétrer dans la mer puis ont été miraculeusement sauvés (Mekhilta Bechala’h) le rend-il si spécifique ? En outre, pourquoi D. a-t-Il décidé d’anéantir les Egyptiens en les noyant dans la mer des Joncs qu’Il referma sur eux ? Enfin, comment expliquer que l’Eternel ait dit à Moché : « Pourquoi M’implores-tu ? » (Chemot 14:15), alors qu’on ne trouve pas qu’il L’ait supplié auparavant ?

De fait, le septième jour de Pessa’h est plus particulier que les autres jours en cela qu’il célèbre le couronnement du Saint béni soit-Il sur le monde entier et est donc caractérisé par une joie sans borne. C’est pourquoi l’Eternel ne désirait pas mêler à ce jour la tristesse que Lui aurait procurée la mise à mort des Egyptiens, en ce jour si particulier où Il libéra un peuple de la tutelle d’un autre peuple (Devarim 4:34) pour en faire Ses esclaves.

Précisons que lorsque le Tout-Puissant décida de faire sortir Ses enfants du pays d’Egypte dans lequel ils étaient asservis depuis des centaines d’années, il n’y resta pas un seul d’entre eux. Tous furent délivrés, y compris ceux qui se trouvaient dans les coins les plus excentrés du pays, ceux qui ne rêvaient même pas de retrouver un jour la liberté et ceux qui étaient devenus semblables à des non-juifs ou à des serviteurs sans Torah. Toutes ces catégories de Juifs furent miraculeusement rassemblées vers le lieu duquel nos ancêtres quittèrent l’Egypte.

Cette idée peut être lue en filigrane à travers le nom Ramsès, qui peut être décomposé en ra (mal), samekh-mèm (puissances impures) et samekh (de valeur numérique soixante) ; autrement dit, c’est justement de l’endroit le plus impur du monde, en l’occurrence l’Egypte, que soixante myriades d’Hébreux sortirent pour recevoir la Torah – à laquelle fait aussi allusion la lettre mèm, qui équivaut numériquement à quarante en écho aux quarante jours durant lesquels la Torah nous fut donnée (Mena’hot 99b). Par le mérite du don de la Torah, la sainteté prit le dessus sur les puissances impures.

Tel fut l’événement caractéristique, accompagné de toute sa symbolique, du premier jour de Pessa’h. Quant à son septième jour, il fut de nature tout à fait différente. Le Saint béni soit-Il se vengea alors de Ses ennemis et fut couronné sur le monde entier, comme il est dit : « L’Eternel régnera à tout jamais ! » (Chemot 15:18) Tel est donc le sens des propos adressés par Moché aux enfants d’Israël : il désirait leur signifier qu’ils n’avaient pas de raison de craindre Paro, du fait que c’était D. qui avait endurci son cœur et l’avait incité à les poursuivre afin qu’il court à sa propre perte (Tan’houma Bechala’h 7). Le Tout-Puissant voulait par ce biais venger Son honneur que Paro avait bafoué en disant : « Quel est l’Eternel dont je dois écouter la parole (…) ? » (Chemot 5:2), et ce, en l’obligeant à reconnaître : « Qui T’égale parmi les forts, Eternel ? » (ibid. 15:11) – verset que nos Maîtres interprètent en expliquant (Yalkout Chimoni Bechala’h 250) que l’Eternel sera reconnu Roi sur le monde entier.

Néanmoins, l’humanité ne pourra arriver à cette reconnaissance qu’à la condition que les enfants d’Israël continuent à être stables : « Tenez-vous et vous serez témoins » (Chemot 14:13). En effet, du moment que ces derniers cheminent dans le droit chemin, sans s’en détourner à droite ou à gauche, ils octroient « force et vigueur au peuple » (Tehilim 68:36), c’est-à-dire ici à D. pour Se venger des nations du monde ; dans ce cas, le salut divin peut survenir, puisque, pour ainsi dire, l’Eternel est libéré de l’emprise des non-juifs qui profanaient Son Nom. A l’inverse, quand Son Nom est profané par ceux-ci, nous en sommes responsables, car c’est notre infidélité dans le Service divin qui en est à l’origine. Tout dépend donc de nous, de la stabilité de notre engagement.

Le septième jour de Pessa’h, le Saint béni soit-Il est devenu Roi sur le peuple juif comme sur le monde entier. D’ailleurs, la phrase prononcée par Moché en contient une allusion : « vous serez témoins de l’assistance que l’Eternel vous (lakhem) procurera en ce jour », le terme lakhem étant composé des mêmes lettres que le terme mélekh, signifiant roi. En ce jour, les enfants d’Israël consolidèrent leur lien avec le Maître du monde, puisqu’il ne peut y avoir de roi sans peuple (Kad Hakéma’h ; Roch Hachana 70a). La persistance de ce lien ne sera assurée que par notre stabilité dans le Service divin et notre crainte de D.

C’est lorsque nos ancêtres virent les Egyptiens morts sur le rivage de la mer (cf. Chemot 14:30) que le Saint béni soit-Il apparut clairement comme le Roi du monde entier, ce qui leur octroya simultanément une grandeur inestimable. En effet, par leur volonté ferme d’accepter la Torah au bout de quarante-neuf jours, ils raffermirent considérablement leur lien avec le Créateur et avec Son Nom à la fois redoutable et miséricordieux – de valeur numérique soixante-douze, il équivaut au terme ‘hessed, bonté (cf. Zohar II 51b).

En outre, ceci leur permit d’établir un lien avec les dix commandements qu’ils allaient recevoir directement de D. Lui-même. D’où la grandeur remarquable à laquelle ils parvinrent. Cette idée peut se retrouver à travers l’équivalence numérique des expressions hébraïques : acher yéassé lakhem hayom (qu’Il vous procurera en ce jour) et : youd dibrot chem ayin-beth (dix commandements Nom soixante-douze).

L’idée de ce lien avec l’Eternel peut aussi être lue en filigrane dans les deux premiers mots de l’expression chevii chel Pessa’h (septième jour de Pessa’h), dont les deux chin des initiales équivalent à six cents, valeur numérique de kécher, signifiant lien. La force de ce lien, kécher, s’opposa vaillamment à celle du mensonge, chéker, de même valeur numérique, symbolisée par l’armée égyptienne, comme il est dit : « Il prit six cents chars d’élite et tous les chariots d’Egypte » (Chemot 14:7). Grâce au lien puissant des enfants d’Israël avec l’Eternel et de la force qu’ils Lui procurèrent, si l’on peut dire, par leur fidélité, les représentants du mal connurent un échec cuisant et furent anéantis. Quant aux lettres restantes de notre expression, elles font allusion au Nom divin de valeur numérique soixante-douze, aux quarante jours durant lesquels Moché monta aux cieux pour recevoir la Torah et aux dix commandements qu’il y reçut, parallèles aux dix sphères (cf. Tikouné Zohar 17:31a) qui n’ont été créées que par le mérite de la Torah. Tels furent, en substance, les événements majeurs de Pessa’h et leur signification profonde, à l’heure où les enfants d’Israël se soumirent au joug du Créateur, après qu’Il les eut épargnés en sautant au-dessus de leurs maisons en Egypte (cf. Chemot 12:23).

Le pouvoir de la Torah et de la prière sur le rivage de la mer Rouge

Nous nous étions interrogés sur les mots du Saint béni soit-Il adressés à Moché : « Pourquoi M’implores-tu ? » (Chemot 14:15), alors qu’on ne trouve pas qu’il L’ait supplié. A présent, ceci devient clair, puisque l’instruction donnée par Moché aux enfants d’Israël, « Attendez et vous serez témoins de l’assistance que l’Eternel vous procurera en ce jour » (ibid. 14:13), peut être considérée comme une prière qu’il Lui adressa, invoquant Son salut en leur faveur.

Mais D. mit immédiatement court aux prières de Moché, désirant ainsi lui signifier que ce n’était pas le moment de se perdre dans de longues requêtes, étant donné qu’il fallait s’empresser d’établir la Royauté divine sur le monde entier. Il s’agissait en effet du moment le plus opportun pour accomplir ce but ultime, et chaque instant perdu était regrettable. Néanmoins, comme nous l’avons expliqué, la condition préalable était que les enfants d’Israël aillent de l’avant, « se met[tent] en marche », pour reprendre l’ordonnance divine, c’est-à-dire se renforcent en Torah en la parcourant de long en large.

La Torah procure à l’homme plus de force que la prière, comme le confirme l’ordre de ces deux éléments dans la maxime : « Le monde tient sur trois piliers : sur la Torah, sur le Service divin et sur la bienfaisance. » (Avot 1:2 ; Pirké deRabbi Eliezer 16) La Torah constitue la nécessité première et vitale ; puis, vient le Service divin, aujourd’hui réalisé à travers la prière (Taanit 2a). Ce n’est donc que par le biais de la Torah que l’on peut accéder au pouvoir de la prière.

Ainsi l’Eternel dit à Moché de cesser de L’implorer, c’est-à-dire de transmettre aux enfants d’Israël leur devoir de continuer à se préparer au don de la Torah et d’accomplir les mitsvot qui leur avaient déjà été données. En effet, ce serait par ce mérite qu’ils allaient bientôt être définitivement soustraits au joug égyptien, s’ils attestaient leur fidélité et leur stabilité dans l’observance des mitsvot, en se gardant bien d’ajouter ou de retrancher à leurs limites (cf. Devarim 4 :2).

C’est la raison pour laquelle D. tua les Egyptiens sur le rivage de la mer Rouge plutôt que dans leurs propres foyers, car c’est en ce lieu que, par la force de leur foi et le pouvoir de la Torah et de la prière, les enfants d’Israël prirent le dessus sur eux.

Les festins de foi à la clôture du septième jour de Pessa’h

A la clôture du dernier jour de Pessa’h, certains ‘Hassidim ont l’habitude d’organiser le « festin du Machia’h », coutume que l’on retrouve chez les Sefaradim originaires du Maroc et des pays orientaux, qui célèbrent la « Mimouna ». Aba Mari, puisse son mérite nous protéger, explique à ce sujet que la fête de la foi consiste non seulement à croire en la délivrance, mais à continuer à y croire même si nos espoirs ont en quelque sorte été déçus, du fait que nous n’avons pas encore été libérés en ce début de mois de Nissan. Même si nous n’avons pas été tous réunis à Jérusalem pour y apporter le sacrifice pascal, nous continuons à croire en la délivrance, ce que nous attestons à travers la célébration de la « Mimouna ».

Cette coutume sainte se base sur notre foi en D. et en Sa délivrance prochaine, qui restaurera dans le monde la Royauté divine. Si elle a été instituée dès la clôture de la fête plutôt que quelques jours après l’achèvement de celle-ci, c’est justement en raison de sa similarité symbolique avec le septième jour de Pessa’h qui, comme nous l’avons vu, se caractérise essentiellement par le couronnement de l’Eternel sur le monde entier, comme le firent nos ancêtres sur le rivage de la mer. Ce jour est également propice aux engagements personnels dans le Service divin, dans l’esprit d’un serviteur qui s’incline devant son maître ou d’un sujet devant le roi.

Si, lors de ce septième jour de Pessa’h, nous avons, à l’instar de nos ancêtres, couronné D. sans pour autant qu’Il nous délivre aussitôt, nous en sommes les fautifs, car c’est le symptôme d’un manque de stabilité de notre part. C’est pourquoi, dès la clôture de la fête, nous nous empressons d’exprimer à l’Eternel notre joie de L’avoir couronné et notre volonté de continuer à Le servir, confiants que la délivrance ne saura tarder.

De même que nous avons commencé à tisser un lien indissoluble avec le Saint béni soit-Il avant Pessa’h, lien que nous avons raffermi durant la fête, notamment par le biais de la supputation de l’Omer qui nous conduit jusqu’au don de la Torah et la réception des dix commandements – parallèles aux dix sphères (Zohar III 69a ; Séfer Yetsira 14) et aptes à réparer et rallier tous les mondes –, de même, nous continuons à entretenir ce lien après la fête.

Comme nous l’avons vu précédemment, l’expression chevii chel Pessa’h contient une allusion aux dix sphères. Quant au terme Pessa’h, il équivaut numériquement au terme kéma’h, signifiant farine, dans l’esprit de l’enseignement de nos Sages : « S’il n’y a pas de farine, il n’y a pas de Torah. » (Avot 3:21) C’est ainsi qu’après Pessa’h, nous poursuivons cette réparation et le travail de raffermissement de notre foi, c’est-à-dire prolongeons, dès la clôture de la fête, le lien indissoluble que nous avons tissé, à travers la « Mimouna » – qui exprime notre foi ardente – ou « le festin du Machia’h » – expression de la majesté de notre libérateur. De cette manière, nous attestons notre volonté de restaurer la Royauté divine dans le monde et y contribuons, emplis d’espoir que, très prochainement, « la gloire du Seigneur va se révéler, et toutes les créatures, ensemble, en seront témoins : c’est la bouche de l’Eternel qui le déclare » (Yechaya 40:5).

Résumé

 •Le septième jour de Pessa’h est prépondérant par rapport aux autres jours de la fête, car seulement alors l’Eternel fut couronné sur le monde entier, tandis que le premier jour, lors de la sortie d’Egypte, cette reconnaissance n’était pas encore parfaite. Uniquement lorsque les enfants d’Israël sont fermes dans leur engagement, D. peut être reconnu Roi. Cette idée peut se lire dans l’expression chevii chel Pessa’h, où les deux chin, de valeur numérique six cents, représentent notre lien (kécher) avec le Créateur – qui contrebalance les forces du mensonge (chéker), incarnées par ce même nombre de chars égyptiens –, où le mèm fait allusion aux quarante jours du don de la Torah et le youd aux dix sphères.

 •L’Eternel dit à Moché de ne pas s’attarder dans les prières, seule la Torah étant à même de soustraire définitivement le peuple juif de l’emprise égyptienne, s’il plaçait son entière confiance en D. Telle est la signification profonde du « festin du Machia’h » et de la « Mimouna », célébrés à la clôture du septième jour de Pessa’h en guise d’attestation de notre foi en la délivrance prochaine et en la restauration de la Royauté divine dans le monde.

 

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