Unité, solidarité et Torah  pour toutes les générations

L’un des fondements de ‘Hanoucca est l’unité et la solidarité au sein de notre peuple, notion fondamentale, ainsi décrite (Sanhédrin 27b ; Chevouot 39a) : « Tous les enfants d’Israël sont garants l’un de l’autre ». D’autre part, la Torah et le Saint béni soit-Il sont étroitement liés, et de ce fait, lorsque les enfants d’Israël sont unis – par le biais de la Torah –, le lien avec D. s’intensifie. C’est là l’essence de ‘Hanoucca, ainsi que l’explique le Ran (cf. chapitre : La publication du miracle : une fête pour l’âme, où nous avons souligné, en son nom, que les enfants d’Israël campèrent – ‘hanou – le vingt-cinq – caf-hé – Kislev, d’où le nom de cette fête).

Nous nous étions pourtant interrogés sur les paroles du Ran : si nous prétendons que ‘Hanoucca célèbre ce « campement », ce répit dans la guerre, pourquoi nos Sages instituèrent-ils cette fête en souvenir du flacon d’huile pur ?

Cela signifie que les deux aspects sont étroitement liés : le miracle de l’huile était dû au fait que les enfants d’Israël campèrent dans une unité et une solidarité parfaites, unissant ainsi sur eux le Nom divin qui a la même valeur numérique que les mots « l’un de l’autre », de notre citation précédente, et que le Tétragramme. Ainsi, ils vainquirent les Grecs qui voulaient au contraire créer la dissension et empêcher le Nom divin de se déployer sur eux dans Son unicité.

A ‘Hanoucca, comme son nom l’indique, tous formèrent un camp uni (‘hanou) et le Tétragramme (caf-hé, plus un) se joignit à eux, scellant cette union. Le miracle du flacon d’huile, allusion à l’âme, devint alors possible, celle-ci ayant été purifiée.

A l’époque du don de la Torah, nous voyons que les enfants d’Israël ne purent recevoir celle-ci tant qu’ils n’étaient pas parfaitement unis, comme en témoigne le verset : « Israël y campa, face à la montagne » (Chemot 19:2). Rachi, Midrach à l’appui (Mekhilta Yitro), découvre en effet dans ce verset, au singulier, l’extraordinaire unité du peuple juif, « comme un seul homme, doté d’un seul cœur ». De même, à ‘Hanoucca, les enfants d’Israël ne purent jouir de l’éclat du miracle que losqu’ils atteignirent ce niveau d’union (‘hanou-caf-hé). Alors, ils purent se soumettre à la Torah (d’où la juxtaposition, dans la Guemara ayant trait à ‘Hanoucca, de la question sur le sens de la fête et de l’amorce : « detanou Rabbanan – car nos Maîtres ont enseigné »). Car il est impossible de se soumettre au joug de la Torah et des mitsvot tant que l’unité n’est pas instaurée.

Cela nous permet de comprendre l’essence de ‘Hanoucca et le fait que cette fête ait été instituée pour toutes les générations, à mettre en parallèle avec l’obligation quotidienne de se souvenir des méfaits d’Amalek et d’effacer son nom de sous les cieux. Car celui-ci est de la même engeance que les Grecs.

Pour preuve : au sortir d’Egypte, Amalek s’en prit aux enfants d’Israël dans le but de refroidir leur enthousiasme, à l’image d’une douche froide, comme il est écrit (Devarim 25:18) : « comme il t’a surpris, chemin faisant ». Le verbe employé pour désigner cette brusque offensive est dérivé du mot kar – froid. En d’autres termes, il voulait refroidir la « tête », l’esprit des enfants d’Israël pour qu’ils délaissent la Torah. Moché intima alors à Yehochoua de choisir quelques hommes pour le combattre. Cette poignée d’hommes eut raison d’Amalek, et D. ordonna alors de ne jamais oublier les machinations de cette incarnation du mal.

Pourtant, nombreux sont les peuples qui s’en sont pris au nôtre, sans que la Torah ordonne d’effacer leurs noms ou de garder éternellement en mémoire leur malfaisance. Pourquoi n’est-ce demandé que concernant Amalek ?

La réponse est, semble-t-il, que les membres de ce peuple savaient qu’ils n’auraient pas raison du nôtre ; même s’ils sortirent en guerre contre nous à grand renfort d’armes et de munitions, ils savaient au fond d’eux-mêmes que la petite poignée d’hommes qui leur faisait face triompherait, avec l’aide divine, triomphe peut-être même éternel. Dans ce cas, une autre question se pose : pourquoi se sont-ils risqués au combat ?! D. les y poussa, en guise de message à Son peuple, afin qu’il réalise que, dans toutes les générations, se dresseraient des individus ou des peuples de cet acabit, que ce soit sous une forme ou une autre.

Sous ces dehors légèrement différents, sous les variantes de culture et d’accoutrement, il nous appartient donc de rester sur nos gardes face à ces nations visant à refroidir notre cœur et notre esprit en influençant nos habitudes vestimentaires, linguistiques – en un mot, en cherchant à gommer notre spécificité. C’est pourquoi le Texte précise : « de génération en génération », afin de rappeler à toutes les générations qu’il ne faut pas se laisser entraîner par tous ces « Amalek », qui veulent perturber notre âme et lui porter atteinte de cette manière.

Mais qu’est-ce qui les pousse à agir ainsi ? Comme l’a déclaré Yits’hak à Yaakov, tout part du principe que « la voix est la voix de Yaakov, mais les mains sont celles d’Essav » (Beréchit 27:22), principe ainsi décodé par nos Sages (Beréchit Rabba 65:20) : « Lorsque la voix de Yaakov – de la Torah – retentit dans les maisons d’étude, les mains d’Essav ne peuvent avoir le dessus. » Voilà la raison pour laquelle nos ennemis, voulant s’assurer la victoire, cherchent à nous confronter à toutes sortes d’influences délétères visant à nous détourner de la Torah.

Les Grecs : un nouvel Amalek

Le verset qui décrit l’attaque fulgurante et imprévue d’Amalek contre les enfants d’Israël est à cet égard riche en enseignements : « comme il t’a surpris, chemin faisant, et s’est jeté sur tous tes traînards par derrière. Tu étais alors fatigué et las, et lui ne craignait pas D. » (Devarim 25:18), peut-on lire. Autrement dit, après que vous êtes sortis d’Egypte pleins de foi – « et ils eurent foi en l’Eternel et en Moché, Son serviteur » (Chemot 14:31) –, Amalek voulut vous « tiédir », alors que vous étiez en chemin vers le don de la Torah, en plein travail de réparation des quarante-neuf mesures d’impureté (Zohar ‘Hadach Yitro 39a).

Il voulut alors vous affaiblir dans le Service divin – le terme né’héchalim (traînards) pouvant être rapproché, par une simple interversion de lettres, de né’hlachim (affaiblis) –, profitant que vous étiez « fatigués et las » de ce travail préparatoire de réparation... « et lui ne craignait pas D. » – tandis que vous-mêmes n’aviez pas suffisamment de crainte de D. du fait que vous n’aviez pas encore reçu la Torah. Or, Amalek voulait en tirer profit pour affaiblir votre émouna naissante, par un effet « douche froide ».

Bien qu’il ne crut pas en sa victoire personnelle hic et nunc, il voulait, au-delà du combat anecdotique, enseigner à toutes les nations la manière dont on peut vous détourner de la Torah et de la foi, leur montrer votre point faible. Il leur démontra comment on peut vous « refroidir », annihiler la paix, la crainte du Ciel, lutter contre l’accomplissement de la Torah et des mitsvot. C’est là ce que nous enseigne la description de cette attaque.

On comprend dès lors pourquoi D. nous met en garde avec une telle véhémence contre Amalek et le danger qu’il représente, en nous commandant de nous rappeler éternellement de ses méfaits. Car, si ce peuple a disparu, ses sombres desseins sont accomplis par d’autres qui, même de nos jours, se font une joie d’endosser ce rôle et de prononcer à notre encontre de durs décrets visant à nous détourner de la Torah et des mitsvot.

Or, on remarquera immanquablement la similitude entre les machinations d’Amalek, telles que nous venons de les décrire, et celles des Grecs. En effet, à travers tous les décrets que ceux-ci prononcèrent à notre encontre, perçait le même dessein : nous détourner de la Torah et des mitsvot. C’est en ce sens que l’on comprend la prescription d’inscrire sur la corne du bélier : « Nous n’avons pas de part dans le D. d’Israël » (Beréchit Rabba 2:4).

A cet égard, comme je l’ai mentionné à plusieurs reprises, le terme kéren peut être décomposé en kar (froid) et noun, de valeur cinquante. Car, à l’instar d’Amalek, les Grecs voulaient refroidir l’enthousiasme des enfants d’Israël et les faire chuter dans les cinquante niveaux d’impureté. De même, le premier s’attaqua aux enfants d’Israël à leur sortie d’Egypte, en cherchant à porter atteinte à leur esprit (haroch, de même guematria que chor – le bœuf).

Cependant, les ‘Hachmonaïm se souvinrent de la victorieuse réplique de Yehochoua, accompagné seulement d’une poignée d’hommes, contre Amalek et suivirent son exemple. C’est ainsi qu’ils se dressèrent contre la puissante armée grecque, en dépit de leur faiblesse numérique et militaire et, contre toute attente, en triomphèrent, par le pouvoir de l’unité et de la Torah.

En parallèle, ils firent la trouvaille du petit flacon d’huile – chémen, à rapprocher de nechama –, sanctifiant ainsi l’âme juive et rendant au peuple juif la émouna. Dès lors, D. Se joignit à eux, dans l’esprit de l’affirmation : « La Torah, le Saint béni soit-Il et Israël ne forment qu’un. » (Zohar III 73a)

C’est pourquoi les Sages ont institué à chaque génération l’allumage des bougies de ‘Hanoucca, « en ces jours, à cette période », autrement dit, l’obligation de toujours garder le souvenir de ces évènements, à toutes les époques, à l’instar des méfaits du peuple d’Amalek, qu’il ne faut jamais oublier. Il est en effet fondamental de garder à jamais en mémoire les ténèbres spirituelles dans lesquelles les uns comme les autres voulurent nous plonger. Or, ces peuples ont des épigones de nos jours, mais si nous nous renforçons en Torah et en émouna, dans l’unité, nous pourrons leur tenir tête à tous.

Résumé

 •L’une des leçons essentielles de ‘Hanoucca est l’importance de l’unité et de la solidarité entre les enfants d’Israël, comme condition pour bénéficier de l’éclat de cette fête, car l’unité idéale entre D., la Torah et les enfants d’Israël est alors rétablie. C’est le même état d’union que celui qui prévalut au moment du don de la Torah, au pied du mont Sinaï. Car lorsque l’unité règne, le Nom divin réside dans sa plénitude sur les enfants d’Israël, et c’est là le sens du mot ‘hanou-ca.

 •Les Grecs sont comparables à Amalek, venu combattre les enfants d’Israël à leur sortie d’Egypte, bien qu’il sût la bataille perdue d’avance. Car son but était en fait de tiédir le cœur et l’esprit des enfants d’Israël et de les détourner de la Torah, par le biais d’influences néfastes et étrangères. De ce fait, D. nous intime d’effacer le nom d’Amalek et de nous souvenir éternellement de ses méfaits, car à chaque génération, il se trouve des tenants de ce peuple, qui nourrissent les mêmes desseins.

 •Les Grecs avaient exactement les mêmes mobiles, voulant faire oublier la Torah aux enfants d’Israël et déraciner leur foi. Mais les ‘Hachmonaïm avaient gardé en mémoire la contre-attaque de Yehochoua, entouré d’une simple poignée d’hommes, et triomphèrent des Grecs selon le même modèle. Aussi le souvenir du miracle de ‘Hanoucca est-il perpétué de génération en génération, afin de donner aux Juifs de tous temps les armes contre ces Amalek et autres Grecs – unité, solidarité et Torah.

 

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