L’attrait des richesses, un des empêchements à servir D.

« Dès son très jeune âge, Avraham, ce géant, a commencé à réfléchir... il n’avait ni maître ni personne pour lui enseigner le savoir, car il vivait à Our Kassdim parmi les idolâtres... Lorsqu’il parvint à la connaissance véritable... il exposa au peuple son erreur, il brisa ses idoles, et il commença à proclamer publiquement qu’il ne convenait pas de servir des idoles mais de servir D., Créateur du monde, et ne se prosterner que devant Lui... Il parcourait le pays et rassemblait les gens de ville en ville, et de contrée en contrée, jusqu’à son arrivée en terre de Canaan où il proclama le Nom de D. comme il est écrit (Béréshit 21:33): « Avraham y proclama le Nom de D. Maître du monde », et des milliers de gens se rassemblaient autour de lui. Il ancra dans leur cœur le fondement des fondements qui est la vraie connaissance de D. », écrit le Rambam (Halach’ot Akoum I:3).

Le Raavad discute cette loi du Rambam (ad. loc.): « Je m’étonne des propos du Rav, car à cette époque-là vivaient Shem et Evèr. Comment est-il possible de penser qu’ils ne protestaient pas, eux aussi, contre l’idolâtrie? » Et il poursuit: « Ils protestaient contre l’idolâtrie, mais ils n’ont pas brisé les idoles, comme le fit Avraham ». C’est effectivement une grande difficulté, car Shem, le fils de Noah’ était aussi un grand sage et Ya’akov lui-même étudia dans sa Yéshiva, comme il est écrit (Béréshit 25:27): « Et Ya’akov est un homme droit, assis dans les tentes », « dans les tentes de Shem et Evèr » (Béréshit Rabba 63:15). Ce lieu d’étude était ouvert à tous, comment peut-on donc dire que seul Avraham enseignait la connaissance de D. à ses contemporains?

Le Migdal Oz (ad. loc.), ainsi que Rabbeinou Shem Tov, fils de Rabbi Avraham Bar Gaon le Sépharade, expliquent la différence entre Shem et Evèr, et Avraham. Shem et Evèr, effectivement, protestaient contre l’idolâtrie de leurs proches et leur enseignaient la vraie foi dans leurs maisons d’étude mais ils n’ont pas risqué leur vie pour sanctifier le Nom de D. comme Avraham qui prenait des risques et se mettait en danger en brisant publiquement les idoles, en convertissant les masses et en les amenant à la connaissance de D., comme il est dit (Béréshit Rabba 39:21, Shir HaShirim Rabba 1:22): « Avraham convertissait les hommes et Sarah les femmes ». C’était une entreprise très courageuse, et ce n’est pas sans raison qu’il s’appelle « Avraham HaYvri », l’Hébreu, car « il se trouvait d’un côté du monde, et tous les autres se trouvaient de l’autre côté » (Béréshit Rabba 42:13, Pessikta Rabba 33). Il allait vers les gens et amenait ceux qui étaient dans l’erreur à la connaissance du Créateur, et leur apprenait à L’aimer.

Jusqu’ici nous n’avons mentionné que très peu de choses concernant la quête d’Avraham. Nombre de questions se posent, que nous tenterons d’élucider:

1. Les commentateurs demandent: comment il se fait qu’Avraham soit justement celui qui a dit à Loth: « Sépare-toi de moi, si tu vas à gauche j’irai à droite, et si tu vas à droite, j’irai à gauche » (Béréshit 13:9)? Autrement dit: « je ne veux pas de ta compagnie », alors que par ailleurs il a risqué sa vie pour sauver Loth son neveu dans la guerre contre les cinq rois, comme il est écrit (ibid. 14:14): « Et Avraham apprit que son neveu était captif, et il a armé ses gens... » (voir Rashi, ibid. 13:9). Comment donc a-t-il pu repousser Loth alors qu’il réunissait les masses autour de lui pour servir D.?

2. Eliézer, le serviteur d’Avraham alla à H’aran chercher une femme pour Yits’hak. Il s’arrêta près d’un puits, et là tous les signes qu’il s’était donnés pour reconnaître la femme digne de son maître se révélèrent. Il vit aussi que « les eaux du puits montent d’elles-mêmes vers Rivka » (Béréshit Rabba 60:5). Rivka remplit les cruches, elle lui donna à boire, et abreuva aussi les chameaux (Béréshit 24:18-20). Eliézer comprit alors que D. avait dirigé ses pas et il remit à Rivka un anneau d’or et deux bracelets (ibid. 24:22). La jeune fille courut raconter à sa mère et à sa famille tout ce qui était arrivé (ibid. 24:28), elle leur fit savoir que le serviteur d’Avraham était arrivé et lui avait donné des bijoux en or. Après cela, la Torah nous raconte que Rivka a un frère du nom de Laban. Laban sort en courant vers le serviteur qui se trouve auprès du puits (ibid. 24:29). « Pourquoi court-il si vite? » demandent nos Sages. Et ils répondent: « Lorsqu’il vit l’anneau en or » (ibid. 30) il se dit que cet homme était riche, et il convoita sa fortune » (Yalkout Béréshit 109, Rashi ad. loc.). Il voulait le déposséder, ou le tuer pour prendre tous ses biens. Et alors, il est écrit (ibid. 30): « Il s’approcha de l’homme qui se tenait à côté des chameaux, auprès du puits ». Pourquoi la Torah a-t-elle besoin d’ajouter « à côté des chameaux »? Les Sages expliquent (Yalkout ibid. 109) qu’Eliézer a prononcé le Nom de D. et s’est élevé dans l’air avec les chameaux. Voyant qu’Eliézer était un homme exceptionnel, Laban s’est résigné et lui a dit (ibid. 24:31): « Sois le bienvenu, béni de D., j’ai préparé la maison et un endroit pour les chameaux ». Quel est le sens de « j’ai préparé la maison » (littéralement dans le texte: J’ai vidé la maison)? Les Sages expliquent (Béréshit Rabba 60:7, Iguereth Béréshit 16): « J’en ai retiré toutes les idoles ».

De deux choses l’une: ou bien Laban vide sa maison des idoles afin d’accueillir Eliézer, ou bien il sort en courant dans l’intention de voler sa fortune? Comment rendre compatibles ces deux intentions contradictoires? Car s’il vide sa maison pour recevoir Eliézer, pourquoi court-il afin de voler ses biens?

3. Il faut comprendre la conduite de Laban. Nous constatons qu’il avait une certaine foi en D. puisque lorsque Rivka part avec Eliézer, il lui dit (Béréshit 24:60): « Notre sœur! Puisses-tu devenir des milliers de myriades! » ce que Rashi explique ainsi: « Nous souhaitons que ta descendance vienne de cet homme et pas d’un autre » (Voir Béréshit Rabba 60:13, Yalkout Béréshit 109). S’il croit aux bénédictions du Ciel, pourquoi est-il idolâtre? D’autre part, il a aussi des traits de caractère méprisables, au point que la Torah témoigne de lui (Dvarim 26:5): « L’Araméen qui voulait anéantir mon père... » et il est dit aussi qu’il voulait tuer Eliézer en l’empoisonnant (Béréshit Rabba 60:12, Yalkout 109). Est-ce à dire que Laban était plus haïssable que Essav qui voulait tuer Ya’akov?

Pour répondre à ces questions, il faut comprendre que le sentiment qui détourne le plus du service de D. et empêche de surmonter les épreuves, est la cupidité. Nous voyons, à propos des Enfants d’Israël, que la faute du veau d’or fut causée par l’argent et l’or que D. leur donna en abondance dans le butin reçu en Egypte et à la Mer des Joncs (Brach’ot 32a), comme il est écrit (Oshéa 2:10): « Je lui ai donné de l’argent et de l’or en abondance, et il en a fait des idoles ». Ce n’est pas sans raison que l’homme prie D.: « Ne me donne ni la pauvreté ni la richesse... » (Mishley 30:8). Mais l’épreuve de la richesse est plus pénible que l’épreuve de la pauvreté. J’ai déjà souligné que lorsque D. a dit à Avraham de quitter H’aran, c’était pour lui une dure épreuve, l’épreuve de la richesse, puisque D. lui avait promis de l’enrichir, comme le disent les Sages (Bamidbar Rabba 11:4). Avraham aurait pu ne pas triompher de cette épreuve et risquait d’être détourné du service de D. C’est le cas lorsque quelqu’un se juge vertueux et croit craindre D. alors qu’en fait, il aime accumuler les richesses pour les jouissances qu’elles lui procurent. Il faut apprendre à avoir « plus de considération pour ses biens que pour son propre corps » (Sotah 12a, H’oulin 71a), non pas pour jouir de ses richesses, D. nous en préserve, mais pour les utiliser pour pratiquer les commandements et faire de bonnes actions.

Rabbeinou HaKadosh nous sert d’exemple. Il était incomparablement riche, mais il n’utilisa pas sa fortune pour lui-même. Avant de mourir il leva les deux mains au ciel et attesta que « même mon petit doigt n’a pas joui des biens de ce monde » (Kétoubot 104a). Les Sages ajoutent (Brach’ot 57b, Avoda Zara 11a) à propos du verset: « Tu portes deux peuples dans ton ventre » (Béréshit 25:23), « il s’agit de Rabbi [Rabbeinou HaKadosh] et de Antoninus qui avaient sur leur table, été comme hiver, des radis et du raifort ». Rabbi se contentait de peu: « Il n’a pas joui des biens de ce monde, mais nombreux étaient les gens qui mangeaient à sa table » (voir Tossafot, Avoda Zara 11a). « Pour lui-même, Rabbi se suffisait de peu, mais pas pour les autres ». De même (Yoma 35b) les Sages disent de Rabbi Elazar ben H’arsoum qu’il était très riche. Il avait reçu de son père en héritage mille villes sur les continents, et mille bateaux sur les mers. Et malgré sa grande richesse, « il n’emportait pour chaque jour de voyage qu’une outre de farine qu’il portait sur le dos, et il allait de ville en ville, et de contrée en contrée, afin d’étudier la Torah ». Et les Sages disent aussi à propos d’Eliézer, le serviteur de Avraham, qu’il était riche, puisqu’il est dit de lui (Béréshit 24:2): « celui qui gouvernait tous les biens [d’Avraham] »; sa richesse, malgré tout, ne l’a pas empêché d’étudier la Torah.

Il ressort de ce que nous avons dit que si l’on ne résiste pas à l’épreuve de la richesse, on risque d’en venir à se croire vertueux. Il faut résister à l’épreuve de la richesse et de l’argent, comme il est dit (Dvarim 6:5): « Tu aimeras l’Eternel ton D. de tout ton cœur, de toute ton âme et de toutes tes forces ». « Quel est le sens du mot méodech’a, de toutes tes forces? Avec tout le pouvoir que te confère ton argent » (Brach’ot 54a, voir aussi Sanhédrin 74a). Il est impossible d’aimer à la fois D. et l’argent. C’est une grande épreuve pour chaque homme riche qui craint D. Celui qui ne s’attache pas à la Torah, qui ne soutient pas ceux qui l’étudient, et qui ne distribue pas ses biens aux nécessiteux, n’a pas surmonté l’épreuve de l’argent, et même s’il distribue ses biens, mais à contre-cœur, il perd tout mérite, car il ne s’est pas détaché de l’amour des biens.

D’après les livres d’éthique, l’orsque nous donnons aux pauvres, nous ne devons pas le faire comme pour nous débarasser d’une obligation, mais en ressentant dans le cœur que c’est un devoir d’amour, dans le sens où il est dit: « tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Vayikra 19:18). Nous devons ressentir ce qui manque aux autres avec la même acuité que nous ressentons ce qui nous manque. C’est là une grande qualité.

L’argent détourne de la vie spirituelle

Ceci dit, revenons à notre premier sujet, le désaccord entre Avraham et Loth son neveu. Nous savons que Loth a appris d’Avraham à accueillir des hôtes (Béréshit Rabba 50:8, Pirkey D’Rabbi Eliézer 25), au point que nous le voyons se mettre en danger pour ses invités lorsqu’il s’oppose aux gens de Sodome qui désirent tuer Loth et capturer ses hôtes, (Béréshit 19:4-9). Il a transmis cette noble qualité à sa famille, car il est dit d’une de ses filles, qu’elle donna du pain aux pauvres, et que les gens de Sodome l’ont brûlée pour ce « crime » (Sefer HaYashar 14, Yad Yossef, page 21). Ce Midrash se réfère au verset (Béréshit 18:20): « Le cri de Sodome et Gomorrhe est grand, la perversité est excessive ». Mais par ailleurs, Loth était tellement attaché à ses biens qu’il tardait à sortir de la ville pour pouvoir sauver ses richesses (Béréshit Rabba 50:17, Rashi Béréshit 19:16), tandis que les anges le pressaient de sauver sa vie (ibid. 19:17): Qu’il te suffise de sauver ta vie et la vie des tiens, ne t’arrête pas à de l’argent!

L’amour de l’argent dominait Loth. Il est écrit (ibid. 13:7): « Il y eut une dispute entre les bergers du troupeau d’Avram et les bergers du troupeau de Loth ». Quel était le sujet de cette dispute? « Les chameaux d’Avraham ne broutaient pas dans les champs des autres, tandis que les troupeaux de Loth se nourrissaient par vol » (Béréshit Rabba 41:5, Rashi ad. loc.). Bien que Loth ait aidé les nécessiteux et fait de bonnes actions, la cupidité et même la tendance au vol le dominaient. Les Sages l’incluent dans la malédiction: « que le nom des méchants pourrisse » (Mishley 10:7) pour s’être séparé d’Avraham et avoir planté ses tentes jusqu’à Sodome (Béréshit 13:12), un lieu dont il est dit: « Les gens de Sodome étaient méchants et pervers », ce qui ne l’a pas empêché d’habiter parmi eux (Yoma 38b), car comme eux, il avait une tendance au vol, et de plus, il est dit (Souca 56b): « Malheur au méchant et malheur à son voisin ». La cupidité le dominait. Comme nous le savons, D. hait les voleurs, comme il est écrit (Téhilim 11:5): « Le méchant et celui qui aime la violence, Il les hait de toute son âme » et l’arrêt de mort de la génération du déluge ne fut scellé que lorsqu’elle commit des vols (Sanhédrin 108a).

Et donc Avraham dit à Loth: « Sépare-toi de moi, je te prie... » (Béréshit 13:9), car il n’y a pas lieu de donner aux pauvres de l’argent volé, ce serait « obéir à un commandement par la transgression d’un autre » (Souca 30a) et c’est le Satan qui pousse à voler, piller, et ensuite à donner cet argent aux pauvres. Avraham dit à Loth: s’il t’est difficile de surmonter ton amour de l’argent au point de voler les autres, nous ne pouvons pas servir D. ensemble. Mon argent n’est pas comme le tien, le mien est la propriété de tous et prêt à subvenir aux besoins du nécessiteux, sans priver personne. Par conséquent, « sépare-toi de moi, je te prie ». Il m’est difficile de te le demander, mais je te prie de te séparer de moi, car j’ai enseigné à tout le monde l’honnêteté. Il est impossible de craindre D. et être en même temps un voleur rempli de l’amour du gain afin de jouir des plaisirs qu’il offre. Cela mène à voler afin d’accumuler davantage de richesses, sans connaître de limites. Il sera difficile de convaincre une personne avide de jouissances de se conduire correctement parce que pour elle, renoncer à ses plaisirs personnels exige trop d’efforts. Loth ne fut sauvé de Sodome que parce qu’il bénéficia du mérite d’Avraham, et parce que le Messie (David) est l’un de ses descendants (Zohar I 79a). Il est évident que du moment où il choisit la voie qui mène à la ruine, il était parfaitement interdit de rester en sa compagnie.

Cela nous permet aussi de comprendre Laban l’Araméen. D’un côté il avait foi en D., et sans aucun doute il avait connaissance des miracles réalisés pour Avraham. Térah’ lui-même, le père d’Avraham « s’est repenti à la fin de sa vie » (Béréshit Rabba 30:4, Tanh’ouma Shemot 18, Zohar III 111b), Laban savait donc qu’il ne faut servir que D. Mais l’amour de l’argent et des plaisirs qu’il peut procurer battait si fort dans son cœur que cela lui fit perdre la tête et l’a privé de sa place dans le monde à venir, comme il est dit (Avot IV:21, Pirkey D’Rabbi Eliézer 13): « La jalousie, les désirs, et la recherche des honneurs excluent l’homme de son monde ». D’une part, Laban vida la maison des idoles et proclama devant le monde entier qu’il reconnaissait la souveraineté de D., et par ailleurs, il sortit en courant dans l’intention de tuer Eliézer et de lui voler son argent. Par la suite aussi, lorsque Ya’akov arriva chez Laban, il est écrit (Béréshit 29:13): « Et Laban court l’accueillir et il le tient dans ses bras et l’embrasse », et les Sages (qui n’attribuent pas de bonnes intentions aux hommes dont on connaît la méchanceté) disent: « Laban pensait que Ya’akov aussi apportait beaucoup d’argent, comme Eliézer ». De plus, Laban n’a jamais cessé de pratiquer l’idolâtrie et c’est la raison pour laquelle Rah’el lui vola ses idoles, comme il est écrit (Béréshit 31:34): « Rah’el prit les idoles de son père ». L’argent l’a rendu fou, il lui a fait perdre la tête et trahir D. Cela peut arriver à n’importe qui, car tout le monde risque de se laisser séduire par l’amour de l’argent. Pour être préservé de ce danger, l’aide du Ciel est essentielle.

Ce fut la faute de Korah’. Les Sages disent de lui (Pessah’im 119a, Sanhédrin 110a) qu’il trouva en Egypte un centième de la fortune de Yossef, mais « la richesse n’est amassée que pour le malheur de celui qui la possède » (Kohélet 5:12). Korah’ n’a pas surmonté l’épreuve de la richesse et il en est mort (Pessah’im 119a, Rashbam ad. loc.). Bien qu’il fût érudit, qu’il ait eu la tâche sacrée de porter l’Arche d’Alliance (Bamidbar 18:3) et qu’il possédât aussi le don de prophétie, il utilisa le pouvoir que lui donnait sa richesse pour s’opposer à Moshé Rabbeinou. « La fortune donne à l’homme son statut » (Pessah’im 119a, Bamidbar Rabba 18:1), comme il est écrit: « Tous les biens qui l’accompagnent » (Dvarim 11:6), et Korah’ utilisa la sienne pour contester l’autorité de Moshé.

Ce fut aussi la faute de la génération du désert, la génération qui avait reçu la connaissance (Vayikra 9:1, Pessikta Rabba 14:9), car elle érigea le veau d’or avec l’argent et l’or du butin d’Egypte et de la mer des Joncs, comme nous l’avons expliqué plus haut. Cet argent et cet or lui ont fait perdre la tête et trahir D., le Ciel nous en préserve.

L’argent met l’homme à l’épreuve, afin de vérifier s’il est prêt à se sacrifier pour sanctifier le Nom de D. Il est possible de déclarer du bout des lèvres qu’on aime D. et qu’on est prêt à donner sa vie, comme il est dit dans notre profession de foi, le « Kriat Shema ». Mais comment savoir si on est effectivement prêt à le faire « de tout son cœur et de toute son âme » si l’on ne s’est jamais trouvé dans la situation de sacrifier sa vie? Peut-être disons-nous « des choses séduisantes du bout des lèvres, des paroles mensongères... » (Téhilim 78:36-37), et qu’en fait, nous n’avons pas l’intention de sacrifier notre vie? Il est vrai que D. connaît le fond des cœurs et les pensées de chacun et Il sait qui est prêt à se sacrifier, sincèrement, sans hésiter. Mais comment cet homme lui-même peut-il le savoir?

Il nous semble humblement que c’est la raison pour laquelle il est écrit dans le Kriat Shema (Dvarim 6:5): « Tu aimeras l’Eternel ton D. de tout ton cœur, de toute ton âme et de toutes tes forces ». Pour « de toute ton âme » les Sages ont dit (Brach’ot 54a, Sifri Dvarim 6:5): « Même s’Il te prend ton âme », et pour « de toutes tes forces » ils ont dit (ibid.) « avec toute ta fortune ». Comment peut-on savoir si l’homme est prêt à donner effectivement sa vie par amour de D. « même s’Il prend son âme »? C’est pourquoi il est dit à la fois « de toute ton âme » et « de toutes tes forces », avec toute ta fortune. La mise à l’épreuve de la fortune permet de savoir si l’homme est prêt à donner aussi son âme, car nous savons combien l’homme est attaché à son argent. S’il est prêt à donner son âme, c’est-à-dire toute sa fortune pour l’amour de D., il s’ensuit que lorsqu’il lui sera demandé de sacrifier effectivement sa vie, il n’hésitera pas un seul instant, et donnera sa vie pour D. avec joie.

Il est écrit (Seder HaDorot) que Rabbi Y. ben Yilem a demandé au prophète Eliyahou: « qui se trouvera à mes côtés au Jardin d’Eden? Il lui répondit: « Nanass le boucher ». « Est-ce possible, demande le Tzadik avec étonnement, que je sois en compagnie de Nanass le boucher? » Il alla demander à ce boucher à quoi il attribuait un tel mérite. Le boucher lui répondit: « J’ai des parents qui sont vieux et je dépense tout mon argent pour qu’ils puissent vivre honorablement ». Selon une autre version, il aurait répondu: « Une fois, je suis allé acheter une bête pour ma famille et moi, mais en route j’ai rencontré une femme qui pleurait, elle avait besoin d’argent pour marier sa fille et je lui ai donné tout l’argent que j’avais ». C’est donc qu’il avait triomphé d’une épreuve importante, car le boucher et toute sa famille vivaient de cet argent, et en le donnant, il risquait sa vie et la vie des siens. Mais en donnant tout son argent, il a montré son amour pour D., « de toutes ses forces ». Il est capable de donner entièrement à D., tant son argent que sa vie, et mérite de se trouver au Jardin d’Eden avec les plus éminents Justes. Cet homme, qui agit avec une telle grandeur d’âme et une telle noblesse est sans aucun doute capable de sacrifier sa vie pour sanctifier le Nom de D.

Chez Loth, chez Laban, chez Korah’, l’amour de l’argent prit le dessus. A leur sujet, il est dit (Mishley 11:4): « La fortune ne sera d’aucun secours au jour de la colère ». Laban a vidé sa maison des idoles qui s’y trouvaient, et Korah’ avait pour tâche de porter l’Arche Sainte, mais bien que conscients de l’existence de D. ils n’étaient pas prêts à sacrifier leur vie pour sanctifier le Nom de D. De même Loth avait appris d’Avraham la connaissance de D. mais il n’avait pas acquis les qualités requises pour s’attacher à Lui de tout son cœur et de toute son âme.

Avraham demanda conseil à Anèr, Eshkol et Mamré à propos de la circoncision (Béréshit Rabba 42:14). Il est difficile de comprendre pourquoi, alors que D. lui ordonne la circoncision, il va demander conseil. Mais il voulait entendre ce qu’ils allaient lui répondre, afin de savoir s’ils étaient dignes d’être de ses amis ou pas. Il ne voulait pas s’associer à qui n’est pas sincèrement attaché à D. Ainsi, chacun doit savoir avec qui s’associer, et se séparer d’un partenaire susceptible de le détourner du service de D., et être prêt lui-même à donner sa vie pour sanctifier le Nom de D.

 

 

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