La Torah nous sauve de nos ennemis
Nos Sages enseignent: «Les enfants d’Israël ont été libérés d’Egypte parce qu’ils ont conservé leur nom, leur langue, et leur costume (Vayikra Rabah 32:5; Yalkout Chimoni, Emor 65:7). Le Talmud enseigne d’autre part, qu’ils sont sortis d’Egypte par le mérite des femmes intègres de cette génération-là (Sotah 11b; Bamidbar Rabah 3:4).
On peut apparemment se demander comment les enfants d’Israël ont conservé leur spécificité en Egypte, comment les Egyptiens malgré leur asservissement sans merci n’ont pas cherché à les couper de leur religion, à les tuer systématiquement et ne les ont pas empêchés d’observer les trois préceptes de base. L’histoire montre en revanche qu’Haman voulut détruire tous les Juifs qui se trouvaient dans tout le royaume d’A’hachvéroch (Assuérus) (Esther 3:6), et que les Grecs voulaient extirper toute religion chez les Juifs... (cf. Talmud Yérouchalmi, ‘Haguigah 212; Vayikra Rabah 15:9).
Au cours des générations, trois catégories d’ennemis ont surgi contre le Peuple d’Israël: ceux qui veulent les tuer, ceux qui ne cherchent qu’à les couper de leur religion, et enfin ceux qui tournent en dérision la religion juive, qui se rient de tous les Juifs qui observent la Torah et les mitsvoth. Ce sont ces derniers qui sont les plus dangereux. Les autres commettent leurs méfaits et s’arrêtent là. Par contre, ceux qui tournent en dérision les Juifs qui observent la Torah et les mitsvoth, les font souffrir quotidiennement et les font vivre «à l’ombre de la mort.»
C’est ce que firent les Egyptiens. Mais les Israélites qui se distinguaient des autres (Hagadah de Pessa’h) par leur religion (Tana débé Elyahou Rabah 17; Sifri, Ki Tavo 26:5) observaient avec un dévouement exemplaire leurs rites, alors qu’ils n’avaient pas encore reçu la Torah et malgré leur dure servitude (Exode 6:9). Et c’est ainsi qu’ils méritèrent d’être sauvés.
[Il en est de même de nos jours, en France par exemple, pour ne pas dire en Israël. Ceux qui portent une kipah, se font pousser la barbe et les péoth, observent la Torah et les mitsvoth, sont constamment la risée des autres. C’est notre sort également, aussi triste que ce soit, mais dans notre for intérieur, nous sommes bien contents d’être juifs. Nous nous consolons avec l’espoir d’attraper un jour ce «scélérat» — je veux parler du mauvais penchant — et de l’exterminer une fois pour toutes].
«Apprends à répondre et à réfuter les arguments des mécréants», préconisent nos Sages (Pirké Avoth 2:14; Pessikta Zouta, Michpatim 21:22). Ce n’est qu’en étudiant assidûment la Torah (cf. début de la Michnah ad. loc.) qu’on peut trouver réponses à leurs arguments et leur démontrer qu’ils ont tort. On peut aussi se demander comment les enfants d’Israël, qui ignoraient tout de la Torah, et étaient soumis aux travaux les plus pénibles, continuaient à supporter les moqueries incessantes des Egyptiens, qui leur posaient certainement des questions complexes, auxquelles ils ne savaient répondre. Comment même pouvaient-ils observer la Torah sans la connaître?
La réponse est claire: si on ne peut étudier, on doit s’adresser à des autorités rabbiniques compétentes, s’attacher à de vrais maîtres, tâcher de s’exiler pour habiter un endroit où l’on enseigne la loi divine (Pirké Avoth 4:14; id. 6:9; Chabath 147b). La Providence Divine n’interviendra qu’à cette condition. C’est ce qu’ont fait les enfants d’Israël qui décidèrent de se rapprocher de la tribu de Lévi, qui, comme on l’a vu, n’était pas esclave en Egypte, ne servait pas les idoles et s’adonnait entièrement à l’étude de la Torah (Bamidbar Rabah 3:4, ’Haguigah 6b). C’est pourquoi elle eut droit aux plus grands ménagements (Tan’houmah, Bamidbar 15:17; Chémoth Rabah 15:1), engendra le sauveur d’Israël, et ses membres surent réfuter les arguments des mécréants... Le Talmud (’Haguigah 5b) relate à cet effet le récit de Rabbi Yéhochoua’ ben ‘Hanania qui rencontra au palais royal un athée qui voulut montrer par un signe de la main que le Saint, béni soit Il, avait détourné définitivement les yeux des enfants d’Israël. Rabbi Yéhochoua’ lui montra à son tour, par un signe de la main, que l’Eternel continue à nous tendre Sa main puissante. Le mécréant, ne saisissant pas l’allusion de Rabbi Yéhochoua’, et montrant ainsi son ignorance devant la cour royale, fut condamné à mort. La Torah nous apprend par conséquent à contrer les athées, et à surmonter tous les obstacles qui se dressent devant nous...
Nous devons par conséquent nous rappeler tous les jours la sortie d’Egypte (cf. Dévarim 16:3), car nous nous trouvons, de nos jours, dans la même situation que nos ancêtres. Nous sommes sans cesse la risée de tous. En fait nous ne sommes pas sortis de Mitsraïm: nous sommes encore prisonniers du mauvais penchant... Si, à l’instar des enfants d’Israël, nous nous rapprochons de la tribu de Lévi — c’est-à-dire de la Torah, d’un endroit d’où émerge l’influence de la Torah, des Tsadikim qui l’étudient nous pourrons franchir aisément tous les obstacles qui se dressent sur notre chemin, et nous défendre contre ceux qui nous tournent en dérision. La Torah, remède idéal contre le mauvais penchant (cf. Kidouchine 30b), cette Torah, qui n’avait pas encore été donnée, nous y aidera.
Etant dépourvus de Torah, les enfants d’Israël ne purent rester en Egypte plus longtemps, ils ne purent ainsi préparer des provisions (cf. Exode 12:39) de peur de tomber dans le cinquantième degré d’impureté — d’où l’homme ne peut revenir (cf. Zohar ‘Hadach Yithro 39a). «L’esprit oppressé par une dure servitude empêcha les enfants d’Israël d’écouter Moïse» (Exode 6:9). «Comme ils n’avaient pas étudié la Torah, explique Rabbi ‘Haïm Ben Attar, auteur du Or Ha’haïm, leur esprit était rétréci, limité, ils ne pouvaient pas entendre Moïse. Car l’étude de la Torah élargit le cœur de l’homme.»
Le Midrach (Bamidbar Rabah 13:19; Tan’houmah, Bo 8) souligne que le butin pris après la traversée de la Mer Rouge était plus important que celui de la sortie d’Egypte. Les enfants d’Israël devaient quitter le pays dans les plus brefs délais, pour ne pas succomber aux richesses. S’ils s’emparèrent du butin, c’était exclusivement pour se conformer à la promesse que Dieu avait faite à Avraham: «de quitter le pays avec de grandes richesses» (Genèse 15:14). On peut aussi concevoir que Dieu cacha les richesses aux yeux des enfants d’Israël, pour les obliger à sortir d’Egypte sans délai. On peut enfin concevoir que, de leur propre gré, ils se hâtèrent de quitter l’Egypte, pays de l’immoralité et de l’impureté par excellence...
Moïse les fit voyager contre leur gré (Rachi, Béchala’h 15:22) pour qu’ils puissent s’engager au plus tôt dans l’étude de la Torah, mais rien n’y fit. S’étant sérieusement relachés dans leur étude (Békhoroth 5b; Tana débé Elyahou Rabah 23), ils furent attaqués par Amalek (Exode 17:8).
Tout cela nous montre que, sans la Torah, l’homme a besoin d’un grand secours de la part de Dieu pour livrer combat à son mauvais penchant. Il doit éviter les épreuves, qui risquent de le faire trébucher. En dépit de nombreux miracles auxquels ils avaient assisté en Egypte, les enfants d’Israël arrêtèrent le pillage pour quitter cette terre au plus tôt, car ils manquaient de «provisions», c’est-à-dire de Torah... Pour s’adonner à l’étude de la Torah, on doit avant tout se sentir réellement libre et ce n’est que par l’étude intensive de la Torah qu’on se sent vraiment libre (cf. Pirké Avoth 6:2; Bamidbar Rabah 10:21). Celui qui est sous la coupe du mauvais penchant ne peut s’appeler libre. Ce n’est que lorsqu’il prête l’oreille aux paroles de Dieu qu’il est libre dans ce monde-ci comme dans le monde futur. «Pas un chien n’aboiera contre les enfants d’Israël» (Exode 11:7). Il s’agit, explique le Zohar (III, 197a) de ces «chiens insolents, de ces forces du mal qui se dressent contre ceux qui n’étudient pas la Torah», car celui qui étudie la Torah n’a rien à craindre.
Nous devons suivre l’exemple des enfants d’Israël, qui exploitèrent immédiatement ce sentiment de liberté, pour quitter l’Egypte dans les plus brefs délais. De la même façon, il faut savoir exploiter un élan d’amour ou de dévotion pour servir Hachem. Cet élan, c’est l’éveil de l’âme, la partie de Dieu qui est en chacun de nous. Cet éveil est causé par le Tsadik qu’on voit ou entend, et naturellement par l’étude assidue de la Torah — même si cette étude est intéressée, elle finira par déboucher sur une étude désintéressée (Pessa’him 50b, Yérouchalmi ‘Haguigah, 1:7) qui préserve l’homme de tous les maux et le rapproche de son Créateur et de la Rédemption totale.
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