«Aujourd’hui, si vous écoutez Sa voix»

Le Talmud (Bava Kama 38a; Avodah Zarah 2b) enseigne qu’avant de donner la Torah aux enfants d’Israël, le Saint, béni soit-Il, la proposa aux fils d’Ismaël qui lui demandèrent: «Qu’y-a-t-il écrit?» «Ne vole pas!» leur répondit le Saint, béni soit Il. Ils la rejetèrent. Dieu la proposa ensuite aux fils d’Esaü qui la rejetèrent à leur tour, etc...

Commentant d’autre part le verset: «Ils se tinrent au pied (lit.: en dessous) de la montagne» (Exode 14:17), le Talmud (Chabath 88a) explique que le Saint, béni soit-Il, menaça les enfants d’Israël de les engloutir. «Si vous recevez Ma Torah leur dit-Il, c’est bien, sinon ici même vous serez enterrés (par la montagne qui était au-dessus de leur tête).» Les enfants d’Israël reçurent la Torah, et dirent: «Nous ferons, puis nous comprendrons.»

Il est de notre devoir de bien examiner ces propos de nos Sages qui forment un seul bloc, et de nous poser les questions diverses qu’ils soulèvent:

1) Comment peut-on concevoir que toutes les nations, qui avaient assisté aux miracles que Dieu avait accomplis en faveur des enfants d’Israël, «de Sa main puissante et Son bras étendu», aient refusé de recevoir la Torah. On sait que les nations du monde avaient les prophètes comme Bil’am. Commentant le verset: «Il n’a plus paru en Israël un prophète tel que Moïse» (Deutéronome 34:10), le Midrach (Bamidbar Rabah 14:34), explique que chez les nations, il en est paru un, au nom de Bil’am, qui leur expliqua que Dieu accomplit des miracles pour les enfants d’Israël, précisément parce qu’ils ont reçu la Torah (Zéva’him 116a)... Comment ont-elles donc refusé de la recevoir! Pourquoi d’autre part n’ont-elles pas suivi l’exemple de Yithro, beau-père de Moïse, qui après avoir entendu tous les miracles que l’Eternel avait faits pour les enfants d’Israël, rejeta toutes ses idoles (il les avait toutes servies) (Mekhilta Yithro 18, 66a; Tan’houma id. 6) et vint partager son sort avec eux?

2) Comment ont-elles pu refuser de recevoir la Torah après avoir vu qu’il n’est pas d’autre Dieu vengeur que le nôtre, comme il est écrit: «Je ferai justice de toutes les divinités de l’Egypte, moi l’Eternel!» (Exode 12:12). Après avoir assisté aux miracles de Dieu, tous les peuples furent épouvantés, comme il est écrit «un frisson s’empara des habitants de la Philistée. A leur tour, ils tremblent, les chefs d’Edom; les vaillants de Moab sont saisis de terreur, consternés tous les habitants de Canaan» (id. 15:14-15).

3) Chacune des nations a refusé d’accepter la Torah pour une mitsvah particulière: «Tu ne voleras point; tu ne tueras point; etc.» Est-ce à dire qu’elles l’auraient acceptée si cette mitsvah n’existait pas? Et comment ont-ils pu comprendre toute la Torah à partir d’une seule mitsvah?

4) Pourquoi l’Eternel doit-Il demander aux nations de recevoir Sa Torah? Ne sait-on pas que le monde et la Torah n’ont été créés que pour Israël qui a vu la révélation de la Providence Divine sur la mer et entonné un hymne à la gloire de l’Eternel (Bérakhoth 50a), L’a fait régner sur toute la terre (Vayikra Rabah 36:4), qui a anéanti l’impureté qui souillait le royaume de la sainteté, observé le Chabath qui équivaut à toutes les autres mitsvoth, ainsi que la circoncision grâce à laquelle ils se sont intimement liés à notre ancêtre Avraham, ensuite au Saint, béni soit-Il (Tan’houma, Béchala’h 12), et surtout accompli la mitsvah des téfiline, comme il est écrit: «et il sera écrit comme symbole sur ton bras et comme fronteau entre tes yeux» (Exode 13:17)?

 C’est cette mitsvah qui a permis aux enfants d’Israël d’anéantir l’impureté, et de se protéger des nations. Comme nous l’avons expliqué, la valeur numérique du cantique (de la Mer Rouge) ChIRaH qu’ils entonnèrent à la gloire de l’Eternel, est similaire à celle de YaD ROCh (main et tête, allusion aux téfiline que l’on place sur la main et la tête) (515). Ils L’ont glorifié avec les téfiline pour leur faire franchir le cinquantième degré de la pureté; c’est grâce à cette mitsvah que «les chars de Pharaon et son armée ont été précipités dans la mer, et l’élite de ses combattants se sont noyés dans la mer des joncs» (id. 15:4) (Chémoth Rabah 21:8; Zohar II, 52b).

La mitsvah des téfiline vise essentiellement à nous faire prendre conscience du fait que «d’une main puissante, l’Eternel nous a fait sortir de l’Egypte» (id. 13:16). Pharaon a poursuivi les enfants d’Israël, mais n’a pas pu les faire retourner en Egypte, parce qu’ils avaient anéanti sa force par la mitsvah des téfiline. S’il les a poursuivis, c’est parce que «l’Eternel a affermi son cœur, et accablé de Sa puissance toute son armée» (id. 14:4). «Son armée» fait allusion aux forces de l’impureté et à l’ange gardien des Egyptiens: eux aussi ont été noyés. Comme on le sait, l’impureté n’a aucune emprise sur l’eau (Zohar II, 82b). «Les enfants d’Israël entrèrent au milieu de la mer, dans son lit desséché» (id. 14:22). Les Egyptiens voulurent les poursuivre; ils s’introduisirent dans l’eau, mais leurs pieds étaient encore sur la terre ferme où sévit la force de l’impureté, et l’Eternel les anéantit... Les Egyptiens les poursuivirent, et tous les chevaux de Pharaon... entrèrent à leur suite au milieu de la mer (id. 23) où, débarrassés de leur force d’impureté, ils se noyèrent.

Le Talmud (Pessa’him 118b) relate que, sortis de l’eau, les enfants d’Israël furent pris de frayeur, car ils croyaient que les Egyptiens les attendaient de l’autre côté. Dieu dit alors à l’ange de la mer de les rejeter, morts sur le rivage... L’impureté a été éliminée, et c’est désormais la sainteté qui règne... La dernière lettre de YaM, et la première lettre de Souf (la Mer Rouge), forment SM (ou Samekh Mème, les premières lettres du Satan SaMaKeL). Ceci montre que les forces du mal ont été anéanties, et n’ont plus aucune emprise sur les enfants d’Israël. Le Cantique de la mer a été entonné avec l’esprit de sainteté: celui de la prophétie, qui fait allusion aux téfiline, grâce auxquels ils ont été sauvés. Il a été chanté au féminin (Chémoth Rabah 23:11), allusion à Lilith [reine des démons, femme du Satan], qui s’est noyée en même temps que les armées et les ministres de Pharaon, lorsque les enfants d’Israël proclamèrent: «L’Eternel règne à tout jamais» (Exode 15:18).

«Israël reconnut alors la main puissante (yad) que le Seigneur avait déployée sur l’Egypte» (id. 14:31): en d’autres termes, c’est grâce aux téfiline de la main, que Dieu a montré sa main puissante aux Egyptiens; c’est d’autre part grâce aux téfiline de la tête (roch) (ACheR qui a les mêmes lettres que ROCh la tête), qu’Il s’est vengé d’eux. Ils craignirent alors Dieu et eurent foi en Lui seul, aspect de «tu seras ma fiancée par la foi» (Osée 2:22), qu’on récite après avoir placé les téfiline de la main... C’est donc grâce à la mitsvah des téfiline que les Egyptiens ont été anéantis et les enfants d’Israël sauvés de l’asservissement.

Si les nations protestent et demandent à Dieu: «Pourquoi ne nous as-Tu pas donné la Torah» (cf. Avodah Zarah 2b), Il peut leur répondre: Après tous les miracles auxquels vous avez assisté, après l’anéantissement de l’impureté et le règne de la sainteté, vous auriez dû l’accepter de vous-mêmes et vous convertir comme Yithro et toute sa famille (Mekhilta id. 18:27). Ainsi la question précitée reste: Pourquoi Dieu devait-Il leur proposer la Torah?

5) Pourquoi Dieu menaça-t-Il de couvrir comme d’un tonneau les enfants d’Israël, alors que, nous l’avons vu à plusieurs reprises, ils ont anéanti l’impureté et proclamé: «Nous ferons, puis nous comprendrons» et ont commencé à observer de nombreuses mitsvoth qui équivalent à la Torah dans son intégralité... Ils étaient par conséquent fin prêts à recevoir la Torah. Pourquoi d’autre part ce genre de châtiment précisément qui implique le déracinement de la montagne?

6) Pourquoi enfin les enfants d’Israël durent-ils se purifier pendant quarante neuf jours avant de recevoir la Torah. Comme nous l’avons vu, ils ont eu le mérite de voir la Chékhinah, dans la pureté et la sainteté, d’anéantir les forces du mal, de corriger les deux cent quatre-vingt huit étincelles de sainteté qui s’étaient dispersées en Egypte (Zohar ‘Hadach, Yithro 39a), etc. L’Eternel n’aurait-Il pas pu les purifier immédiatement, en un jour? Nous savons qu’Il n’a pas oublié leur abnégation et le fait de l’avoir suivi dans le désert dans une région inculte (Jérémie 2:2), qu’ils ont cru sans restriction en Lui... Nous savons aussi qu’«on peut acquérir son monde (futur) en un instant.».. alors qu’il fallut quarante-neuf jours aux enfants d’Israël pour se purifier de leur souillure!

Considérons auparavant ce passage de la Guémara (Sanhédrine 98a): Rabbi Yéhochoua’ ben Lévi rencontre le prophète Elie à l’entrée de la caverne de Rabbi Chimon bar Yo’haï. «Où se trouve le Machia’h?» lui demanda-t-il. «A l’entrée de la ville» [Rome, d’après Rachi]. Rabbi Yéhochoua’ ben Lévi se rendit chez lui, et lui demanda: «Quand mon maître vient-il?» «AUJOURD’HUI!» répondit le Machia’h. La journée touchait à sa fin quand Rabbi Yéhochoua’ ben Lévi se présenta devant le prophète Elie et se plaignit que le Machia’h profère des mensonges. «Il ne ment pas, répondit le prophète Elie. Il faisait allusion au verset: «Aujourd’hui si vous écoutiez Sa voix!» (Psaumes 95:7)... Le Machia’h est donc prêt à se révéler chaque jour si les Juifs écoutent Sa voix et se conforment à la volonté divine d’emprunter le chemin de la droiture.

Chaque jour, quand nous prêtons attention à la voix que nous avons entendue sur le Mont Sinaï, de la bouche du Saint, béni soit-Il, la Rédemption peut venir sur le champ. Rien ne l’en empêche, car c’est cette voix divine qui a imprégné les enfants d’Israël de l’amour et de la crainte de Dieu. Aussi longtemps qu’ils ne l’avaient pas entendu, ils pouvaient changer et même tendre du côté du mal, bien qu’ils aient assisté à de nombreux prodiges et vu la Providence Divine. Ce n’est pas en vain que Moïse leur a dit: «Du haut du ciel Il t’a fait entendre Sa voix pour te discipliner» (Deutéronome 4:36), qu’il les a avertis: «C’est pour que Sa crainte vous soit toujours présente, afin que vous ne péchiez point» (Exode 20:17). Pourquoi? Parce que sans la voix de Dieu, qui éclate avec force et majesté (Psaumes 29:4), les enfants d’Israël étaient susceptibles de régresser du niveau spirituel auquel ils avaient accédé après le don de la Torah... Ce qui compte donc essentiellement, c’est la voix de Dieu.

Commentant à cet effet le verset de la Michnah (Avoth 6:2; Chémoth Rabah 41:9): Tous les jours une voix céleste proclame cette parole du Mont ‘Horev: «Malheur à ceux qui délaissent la Torah (lit.: à la honte de la Torah)», le Baal Chem Tov demande: «Qui entend cette voix? Et si on ne l’entend pas, pourquoi sort-elle?» Il répond que cette voix céleste, ce sont les pensées de téchouvah qu’on entretient parfois.

Rapportant l’enseignement du Talmud selon lequel le penchant au mal a quitté les enfants d’Israël, lors du don de la Torah, mais leur est revenu lors du péché du veau d’or, l’auteur de Lev Elyahou se demande pourquoi, et répond que c’est parce qu’ils avaient dit à Moïse: «Que ce soit toi qui nous parle, et nous pourrons entendre; mais que Dieu ne nous parle point, nous pourrions mourir» (Exode 20:16). En d’autres termes, ils avaient refusé d’entendre la voix de Dieu, dont une seule parole: «Je» pouvait les imprégner de Son amour et de Sa crainte. Et s’ils avaient continué à L’entendre, Il aurait à jamais siégé dans leur cœur... et le monde serait revenu à l’état qui prévalait avant le péché d’Adam. Mais n’ayant pas réussi à ressentir l’unicité de l’Eternel, ils ont retrouvé le mauvais penchant et ont commis le péché du veau d’or.

Ce concept de voix est souvent mentionné dans la Torah. Citons notamment: «Si tu écoutes la voix de l’Eternel, ton Dieu» (Exode 15:26); «Tu reviendras à l’Eternel, ton Dieu, et tu écouteras Sa voix» (Deutéronome 4:30); «Car est-il une seule créature de chair qui ait entendu comme nous, la voix du Dieu vivant, et soit demeurée vivante?» (id. 5:23). Le Talmud parle également de la voix céleste (Bérakhoth 52a; ’Irouvine 7a) [on retrouve ce concept soixante-sept fois environ dans le Talmud Babli et vingt-quatre fois dans le Yérouchalmi]... C’est cette voix qui marquera la Rédemption et notre accession à la Torah.

A ce point, nous pouvons répondre aux questions posées au début de notre exposé:

1) Si toutes les nations ont refusé d’accepter la Torah, c’est parce qu’elles n’ont pas eu le mérite d’entendre la voix de Dieu et Ses paroles, comme les enfants d’Israël, imprégnées de Son amour et de Sa crainte. Et même si elles ont assité aux nombreux miracles, elles avaient le choix de recevoir la Torah ou non. Yithro, à qui ce même choix était offert, a choisi la vie, s’est converti, et «se tint au seuil de la Maison de Dieu.» Mais, bien qu’elles eussent frémi d’épouvante et pris conscience du fait que les forces du mal avaient été vaincues par la sainteté, elles ont refusé de recevoir la Torah dont elles n’avaient d’ailleurs entendu parler que par leur prophète Bil’am.

2) Lorsque la Torah a été donnée aux enfants d’Israël, les paroles de l’Eternel étaient traduites en soixante-dix langues (Chémoth Rabah 28:4; Midrach Cho’her Tov 92); une grande frayeur s’empara de tout l’univers; «la terre effrayée s’est tue» (Psaumes 76:9); aucun oiseau ne gazouilla, aucun volatile ne bougea; la peur et le silence emplissaient le monde (Chémoth Rabah 29:9). Pensant que le monde avait été détruit, les nations allèrent chez Bil’am pour savoir ce qu’il en était exactement. «L’Eternel donne la force, c’est-à-dire la Torah, à Son peuple» leur expliqua-t-il... Toutes les nations entendirent donc la voix de Dieu, mais elles n’ont pas été influencées [et c’est comme si elles n’avaient rien entendu]. La voix de Dieu visait essentiellement à leur montrer combien Il aime les Juifs, comme il est écrit: «Qui nous a choisis entre tous les peuples et nous a donné Sa Torah» (Bérakhoth 11b). Elle ne visait pas à les inciter à recevoir la Torah, mais leur faire prendre conscience de la valeur d’Israël. Il leur restait cependant à suivre la voie que Yithro avait choisie. Et si la voix de Dieu ne les influençait pas, c’était dû au fait qu’une seule mitsvah (celle qui ne pouvait pas correspondre à leur caractère intrinsèque) leur a fait prendre conscience que l’identité réelle de la Torah ne correspondait pas à la leur.

Le peuple élu, quant à lui, prêta attention à la voix de Dieu. C’est elle qui leur permit d’anéantir les forces du mal, d’accomplir les mitsvoth, dont celles des téfiline plus particulièrement. En les obligeant à recevoir la Torah, l’Eternel voulait faire comprendre aux enfants d’Israël comment livrer bataille aux forces du mal, à l’impureté et au mauvais penchant considéré comme une montagne, et comment les vaincre.

Ils eurent besoin de quarante-neuf jours pour se renforcer contre les quarante-neuf degrés d’impureté, se préparer à entendre la voix de Dieu qui disait: «Je suis l’Eternel, ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Egypte.» Ils reçurent ainsi la sainte Torah.

 

La Maison de Jacob, ce sont les femmes avec la garantie des enfants
TABLE DE MATIERE
La Torah, âme d’Israël

 

Hevrat Pinto • 32, rue du Plateau 75019 Paris - FRANCE • Tél. : +331 42 08 25 40 • Fax : +331 42 06 00 33 • © 2015 • Webmaster : Hanania Soussan