Se tenir devant l’Éternel avec une volonté d’avancer

« Moché alla et adressa ces paroles à tout Israël. Il leur dit : “Je suis aujourd’hui âgé de cent vingt ans, je ne pourrai plus aller et venir.ˮ » (Dévarim 31, 1-2)

Comme le laissa entendre Moché à travers ces mots, il avait atteint le terme de sa vie (cf. Roch Hachana 11a). Après avoir réprimandé les enfants d’Israël depuis le début de la section de Dévarim, il s’apprêtait à les quitter. Mais, où donc alla-t-il, au milieu de son discours au peuple juif ?

Comme nous le savons, les sections Nitsavim et Vayélekh sont, la plupart du temps, lues le même Chabbat. Quel est donc le lien les unissant ?

Celle de Vayélekh nous rapporte que Moché écrivit un séfer Torah, qu’il remit ensuite aux Cohanim, appartenant à sa tribu, Lévi. Pour quelle raison agit-il ainsi ? Afin que, si les enfants d’Israël en venaient à prétendre que la Torah n’est pas d’origine divine et n’a pas été donnée par l’intermédiaire de Moché, les membres de sa tribu pourraient leur prouver leur erreur en leur montrant ce séfer Torah, écrit sous la plume de Moché.

De plus, ce dernier ne se contenta pas de transcrire la Torah, mais, une fois cette tâche accomplie, il prit à témoin le ciel et la terre, créations éternelles, que, en cas de non-respect de celle-ci, le peuple juif serait puni. D’ailleurs, ils étaient eux-mêmes conscients que tous leurs malheurs étaient à imputer à leur mauvaise conduite, comme il est dit : « Lorsqu’alors fondront sur lui des maux nombreux et des épreuves, ce cantique portera contre lui témoignage, car la bouche de sa postérité ne l’oubliera pas. » (Dévarim 31, 21)

Moché prit également à témoin la Torah elle-même, comme il est écrit : « Prenez ce livre de la Loi et déposez-le sur le côté de l’arche d’alliance du Seigneur votre D.ieu, et il restera là, comme témoin. » (Ibid. 31, 26) En d’autres termes, s’ils ne respectaient pas la Torah, elle l’attesterait à leur sujet, ce qui entraînerait sur eux des malheurs. Aussi, avaient-ils d’ores et déjà tout intérêt à savoir qu’il leur était interdit de se relâcher.

Dès lors, nous comprenons le sens des mots de notre verset « Moché alla » : il alla écrire un séfer Torah, afin de le prendre à témoin de la conduite des enfants d’Israël et de les prévenir de leur devoir d’être toujours fidèles à ses lois. Le lien entre les sections Nitsavim et Vayélekh s’éclaircit du même coup. La première s’ouvre par la phrase « Vous vous tenez tous, aujourd’hui » (ibid. 29, 9). Or, selon le Zohar (II 32b), le terme « aujourd’hui » fait invariablement référence à Roch Hachana. Cet incipit fait donc allusion à ce premier jour de l’année, où tous les êtres humains comparaissent en justice devant le Saint béni soit-Il, qui s’apprête à prononcer Son verdict à leur sujet – « qui vivra et qui mourra, qui au terme de sa vie et qui prématurément, etc. ».

Toutefois, bien que Roch Hachana soit le jour du jugement, nous ne devons pas, sous l’effet de la crainte, tomber dans le désespoir, mais, au contraire, nous réjouir et être confiants dans la Miséricorde de l’Éternel, qui nous jugera sans doute favorablement. Chacun d’entre nous se renforcera donc dans le droit chemin et utilisera à bon escient tout instant de sa journée pour servir le Créateur. De la sorte, arrivé le jour de Roch Hachana, il sortira blanchi et sera inscrit et scellé pour une bonne année, placée sous le signe de la bénédiction.

Tel est donc le sens profond de la juxtaposition de nos deux sections lues, presque chaque année, autour de Roch Hachana et de Kippour, lorsque nous nous présentons au jugement et en ignorons l’aboutissement. En cette heure décisive, l’essentiel est d’être résolu à aller (vayélekh) de l’avant, à se raffermir dans les voies divines, à étudier la Torah et à l’enseigner à nos enfants, comparables à la tribu de Lévi. De cette manière, elle reposera dans son arche, c’est-à-dire sera ancrée en eux pour toutes les générations.

C’est ce que fit Moché avant son décès. Avant de quitter ce monde, il enseigna aux enfants d’Israël la manière d’éduquer leurs enfants (la tribu de Lévi). Il les sensibilisa à l’importance de leur transmettre une éducation pure, de les mettre en garde contre le danger de s’égarer dans des champs étrangers, de leur enseigner leur devoir de se tenir toujours devant l’Éternel, animés d’une foi entière, et de leur indiquer comment suivre la voie de la Torah avec la plus grande fidélité.

C’est pourquoi, en dépit du bel âge auquel Moché parvint, « son aspect n’avait pas changé, sa vigueur ne l’avait pas fui » (Dévarim 34, 7). Avec le zèle d’un jeune homme, il alla chercher des parchemins et de l’encre pour y écrire, aux yeux de tout le peuple, un séfer Torah, avec toutes les intentions requises. Malgré sa vieillesse, il désirait enseigner aux enfants d’Israël l’essence de la Torah et la vertu de ceux qui l’étudient continuellement. Il leur communiqua ainsi le message selon lequel il n’existe pas de limite d’âge pour étudier.

La section de Vayélekh met donc en scène la vaillance de Moché qui, nonobstant son âge avancé, poursuivit sa tâche d’enseigner Torah et morale aux enfants d’Israël. À travers sa persévérance, il leur signifia qu’il existe des moments où il faut se tenir immobile (nitsavim), s’en tenir à ses principes, et d’autres où, au contraire, il s’agit d’avancer (vayélekh).

Hevrat Pinto • 32, rue du Plateau 75019 Paris - FRANCE • Tél. : +331 42 08 25 40 • Fax : +331 42 06 00 33 • © 2015 • Webmaster : Hanania Soussan