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Rabbi Matitiahou Strashun De Vilna

Rabbi Matitiahou Strachon avait reçu en don toutes les qualités dont un homme peut rêver. Il avait une mémoire extraordinaire et ne savait pas ce qu’était l’oubli. Son intelligence était prodigieuse et très pénétrante. Il comprenait immédiatement et réfléchissait en profondeur. De son enfance jusqu’au jour de sa mort, il fut plongé dans l’étude avec une grande assiduité, de dix à quinze heures par jour. Sa bibliothèque était la plus grande bibliothèque juive de sa génération. En plus de tout cela, il était riche et d’une famille d’ascendance très respectable. Il n’y a rien d’étonnant à ce qu’il soit devenu une personnalité prodigieuse, possédant parfaitement toute la Torah. Sa maison était ouverte aux Sages, des penseurs et hommes de science venaient le trouver de près et de loin avec diverses questions, et ses réponses étaient acceptées par tous comme celles des ourim et toumim.

Rabbi Matitiahou est né de Rabbi Chemouël, le Rachach, qui était gaon et tsaddik, sage et riche, au village de Strachon, en 5578 (1818).

Quand l’enfant eut six ans, on commença à découvrir ses dons exceptionnels. Il pouvait répéter par cœur tout ce qu’il apprenait et lisait, littéralement lettre par lettre. On disait de lui qu’il était « un petit Cha’agat Arié », et il était difficile de lui trouver un maître. Son père Rabbi Chemouël, voyant qu’il lui fallait un grand Rav, le confia à Rabbi Menaché de Ilya, disciple du Gra, pour qu’il lui enseigne la Guemara et les décisionnaires. Rabbi Chemouël lui-même se consacra également à son éducation et étudiait avec lui la Torah et la sagesse. Pendant une courte période, il étudia aussi avec Rabbi Israël de Salant.

A l’âge de treize ans, il était connu comme un enfant prodige, et l’une des personnalités les plus riches de la ville de Vilna le prit pour gendre. Après le mariage, son beau-père lui acheta un commerce de soie. Sa femme était une femme de valeur, elle prit l’affaire en mains et Rabbi Matitiahou resta plongé dans la Torah avec une grande régularité.

Il publia sa première œuvre littéraire à l’âge de quatorze ans. Il avait un style remarquable, semblable à celui des géants intellectuels d’autrefois, et savait exprimer de nouvelles idées originales en quelques lignes et quelques mots. Ses publications lui valurent une grande renommée, et tout le monde le considérait comme le premier en toutes choses. A son époque, il y eut une grande dissension entre les Sages à propos de la division des époques et du moment des nouvelles lunes. La discussion se poursuivit pendant plusieurs années jusqu’à ce que Rabbi Matitiahou exprime son opinion. Sa décision fut acceptée par les deux côtés, et la discorde s’apaisa.

En 5617 (1857), il fit un long voyage hors de Russie pour acquérir des livres saints de grande valeur et des manuscrits pour sa bibliothèque. Il dépensa beaucoup d’argent et monta l’une des bibliothèques les plus importantes du monde juif. Il n’y a pratiquement pas de livre possible à se procurer qu’il n’ait pas acheté pour sa bibliothèque. Mais il ne laissait pas un livre dans la bibliothèque avant de l’avoir lu du début à la fin, de façon approfondie. La bibliothèque Strachon exista jusqu’en 1940, et fut détruite par les maudits Russes.

Au cours de ce voyage, il fit personnellement la connaissance des grands sages avec lesquels il avait correspondu pendant des années. Il rencontra Rabbi C.I. Rappopport, le Rav de Prague, Rabbi Tsvi Hirsch ‘Hayot, auteur de ‘Hidouchei Maharats ‘Hayot sur le Talmud, et Rabbi Ya’akov Tsvi Mecklembourg, auteur de HaKetav VéHaKabala. Partout où il allait on le recevait avec de grands honneurs, mais c’est à Berlin qu’il fut reçu avec une affection particulière. Les dirigeants de cette communauté voulurent le nommer Rav, mais Rabbi Matitiahou refusa.

En 5625 (1865), la communauté de Vilna le choisit pour dirigeant. Il refusa d’abord, craignant que cela ne l’empêche d’étudier, mais finit par se laisser fléchir par leur insistance. Il fit de l’ordre dans tout ce qui concernait la ville, édicta de nouveaux décrets et annula plusieurs coutumes désuètes. Grâce à lui, la communauté de Vilna devint un exemple par son organisation et ses institutions de tsedakah.

Mais son plus bel exploit est d’avoir délivré cinquante-huit personnes de la conscription. Vilna devait donner chaque année cinquante-huit soldats à l’armée ou huit cents roubles pour chaque exemption. Tous les hommes valides de quarante à soixante ans fuyaient la ville quelques mois avant la conscription et rentraient chez eux une fois que le quota était atteint. Beaucoup de familles souffraient de la faim parce qu’elles n’avaient plus de soutien. Des scènes à briser le cœur se produisaient dans beaucoup de foyers juifs, et la situation des hommes qu’on attrapait était également terrible, car les ravisseurs tourmentaient les recrues comme des bêtes féroces.

Rabbi Matitiahou prit sur lui la tâche de délivrer les benei Israël de cette honte. Il réunit une grande assemblée et proposa de ramasser cinquante mille roubles pour obtenir des certificats d’exemption pour les conscrits. Lui-même donna le premier une somme importante, il reçut de généreuses contributions des habitants de Vilna, et il libéra la totalité des cinquante-huit. La ville de Vilna était dans la liesse. La communauté organisa une fête en son honneur, et on inscrivit son geste dans le livre de la ville comme la plus grande action qui ait jamais été entreprise par un responsable.

Il assuma ce poste pendant quelques années, jusqu’à ce qu’il ait solidement établi les fondements de la communauté. Ensuite il démissionna, remit la direction à une autre personne et retourna dans la tente de la Torah.

Rabbi Matitiahou ne laissa aucun livre. Quand on lui demandait pourquoi il n’écrivait pas, il répondait qu’il faut avoir étudié beaucoup pour rédiger un livre, et que plus on étudiait plus on s’apercevait qu’on n’avait pas encore assez étudié. Ce n’est qu’après l’âge de soixante ans qu’il décida de donner aux imprimeurs de la famille Rom ses commentaires sur quelques traités du Talmud.

Au début de l’année 5646 (1886), il sentit que ses jours étaient comptés et commença à préparer un testament. Il laissa sa grande bibliothèque à la communauté de Vilna, en même temps qu’un grand bâtiment qui donnait des revenus pour entretenir la bibliothèque. Il ne laissa comme enfants qu’une orpheline, proche parente de sa femme, qu’il avait adoptée dans son enfance, et à qui il légua une grande partie de son héritage.

Rabbi Matitiahou mourut le six Tévet 5646 (1886). Vilna lui fit de grandes funérailles, comme on n’en avait jamais vu dans la ville. Des dizaines de rabbanim, entre autres Rabbi Yitz’hak El’hanan, le Rav de Kovno, firent son oraison funèbre.

 

 
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