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Rabbeinou Matslia’h Mazouz

Rabbi Masliah Mazouz width=

Le grand kabbaliste Rabbi Ovadia Hadaya Zatsal était à sa table, plongé dans ses pensées. On venait de lui apporter une lettre de l’étranger, et à son habitude, il en étudiait le contenu attentivement. Personne n’osait rompre le silence ambiant, et seule la brise de Jérusalem soufflait dans la pièce avec un bruit très léger, comme un vent frais des montagnes qui couronnent la ville éternelle.

Manifestement, cette longue lettre était différente des autres. Rabbi Ovadia avait l’habitude de recevoir du courrier, y compris de l’étranger, qui lui demandait son avis sur des cas douteux. Mais le langage particulier de cette lettre attira l’attention du gaon. D’une très belle écriture, l’auteur y étalait un grand développement sur un sujet très complexe, où il analysait avec un art perçant et profond le problème traité, largement et exhaustivement, en citant des Sages du Talmud et des décisionnaires, et où il trouvait la solution dans « la force de la permission ».

Cette lecture ne laissa aucun doute au gaon qu’il avait en main la lettre d’un homme considérable, un sage parmi les sages, et peut-être le Rav de la communauté. Il se dépêcha d’envoyer à l’auteur, qui vivait en Tunisie, une réponse longue et détaillée, à la fin de laquelle il lui demandait de bien vouloir prêter son concours à la yéchivah de kabbalistes « Beith E-l », où il enseignait. « Je vous serais très reconnaissant de faire une collecte pour notre yéchivah à Jérusalem », dit-il à la fin de sa lettre.

L’auteur, qui était au-delà des mers, ne tarda pas à donner une réponse étonnante : « Cela m’est impossible, parce que je suis trop jeune. J’étudie dans une yéchivah, je n’ai pas assez d’expérience pour aller de l’un à l’autre, et je ne connais pas les usages ! »

Ce n’était pas le seul article halakhique du jeune homme, qui avait fêté trois ans seulement auparavant sa bar-mitsva. Il avait rédigé des réponses halakhiques qui émerveillaient leur lecteur à l’âge de 14 ans ! Tout le monde voyait en lui une personnalité destinée à la grandeur. Son nom, notre saint Rav Rabbi Matslia’h Mazouz, se fit plus tard connaître dans les régions les plus lointaines.

Une vingtaine d’années se sont écoulées depuis qu’un arabe maudit, possédé d’un esprit de violence, protégé par le feu de l’ennemi, s’est attaqué à notre saint Rav et l’a envoyé au Ciel, mais aux yeux de tous, elles ont passé comme quelques jours, et personne n’accepte de se consoler. On veut se rappeler de lui éternellement, et sa mémoire reste gravée dans les cœurs à jamais. Mais ses richesses, des trésors spirituels, sont là pour nous encourager et nous réconforter. Les précieux livres qu’a laissés après lui le saint gaon versent comme une rosée de lumière sur cette ombre inoubliable, et font souffler un vent de résurrection sur le désert d’un profond chagrin. Tout le monde sait que sa lampe ne s’est pas éteinte et que sa lumière ne s’est pas assombrie.

Quelque trois ans après la disparition de notre maître fut terminé le premier volume de son gigantesque ouvrage halakhique « Ich Matslia’h », première partie, responsa sur les Arbaah Tourim. Ce fut un jour marquant. Les juifs tunisiens ont l’habitude, le soir de Pessa’h, d’étudier l’ouvrage de ce grand décisionnaire, Rav de tous les juifs de l’exil, Rabbi Matslia’h Mazouz Zatsal, le dernier des guéonim de Tunisie. A la fin de cette même année parut le deuxième volume de la première partie, qui à cause de son ampleur avait été divisée en deux volumes : le premier sur Ora’h ‘Haïm et Yoré Déa, et le deuxième sur Even Haézer et ‘Hochen Michpat. Les deux volumes ensemble comportent 178 paragraphes, ce qui est la valeur numérique de son nom, Matslia’h. Quelques années plus tard l’ouvrage fut réédité.

En 5750 (1990), les amateurs de Torah et de sagesse fêtèrent pour la troisième fois l’anniversaire de la parution de Ich Matslia’h, deuxième partie (lui aussi, comme le précédent, avait été divisé en deux volumes, et les deux ensemble comportaient 311 paragraphes, ce qui est la valeur numérique de Ich, car notre maître voulait également immortaliser le nom de son père, Rabbi Raphaël, qui a également cette même valeur numérique.)

On ne se lasse pas de consulter ce livre, on le feuillette avec stupéfaction : quelle richesse se cache dans ses réponses ! De la halakhah, des articles de réflexion, une sagesse cachée et aussi une langue d’une grande précision. Ses longues responsa, où se mêlent recherches halakhiques, grande connaissance, perspicacité de la jeunesse et sagacité de l’âge, séduisent le lecteur par leur style. On reste émerveillé devant ce pouvoir qu’a l’auteur de descendre jusqu’au fond de la mer du Talmud, d’en pénétrer les abîmes, et d’en faire remonter une abondance de perles et de trésors cachés provenant des décisionnaires anciens et plus récents, qui s’insèrent dans ses développements pour donner un enseignement clair et passé plusieurs fois au peigne fin. Aucun secret ne lui est caché. La mélodie de ses paroles chante dans les oreilles.

Dans une réponse qui s’étend sur de nombreuses pages (au début de la partie sur Yoré Déa), l’auteur, à 14 ans, traite d’une question lourde de conséquences qui s’est effectivement posée.

Quand un cho’het dont les mains tremblent veut continuer à pratiquer son métier en disant que sa main lui obéit et fait son travail correctement, doit-on le lui permettre, ou au contraire lui dire de s’arrêter, parce que ses paroles ne sont pas fiables ? Et dans ce dernier cas, faut-il permettre a posteriori la viande qu’il a abattue, s’il soutient qu’il n’a pas tremblé ? En analysant la question sous tous ses angles, le jeune auteur arrive à la conclusion que les bêtes qu’il a abattues sont interdites même a posteriori !

La réponse a été examinée par les plus grands d’Israël, et il a reçu l’approbation totale et inconditionnelle du Av Beith Din de Tunisie à cette époque, le gaon Rabbi Moché Chetroug Zatsal. A Pourim, au moment où ses amis et les jeunes de son âge étaient plongés dans les réjouissances, il s’enferma chez lui pour réécrire dans son carnet toutes les paroles de sa réponse, ce qui était un signe annonciateur...

Parfois, l’auteur accompagne ses réponses de remarques dont l’importance dépasse la portée halakhique, et où il se révèle comme un maître et un grand éducateur.

Une immense activité où se sont mêlés le travail artisanal et celui de la pensée a été déployée par les fils du gaon pour faire sortir ses livres, qui ont été édités par l’« Institut du Rav Matslia’h » au nom de notre saint Rav Rabbi Matslia’h Mazouz, et par la yéchivah « Kissé Ra’hamim » à Benei Brak, qui avait d’abord été établie par l’auteur à Tunis, et qu’en conformité avec son désir, ses fils ont transportée après sa mort en Erets-Israël. Son rôle de Roch yéchivah a été assumé par le gaon Rabbeinou Méïr Mazouz Chelita, et ses frères Rabbi Tsema’h Chelita et Rabbi Ra’hamim Chelita, qui enseignent à la yéchivah et participent à sa direction. Tous travaillent pour la yéchivah, la Torah en jaillit sous forme d’une étude directe et pure, et les réponses du célèbre gaon se font entendre d’un bout de la terre à l’autre.

 

 
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