Lekh Lékha 9 Novembre 2024 ח חשון התשפ"ה |
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Résister à l’épreuve grâce à la foi
Rabbi David Hanania Pinto
« Il lui dit : “Je suis le D.ieu tout-puissant ; conduis-toi à Mon gré, sois irréprochable.” » (Béréchit 17, 1)
Il est rapporté (Béréchit Rabba 38, 13) que, quand Avraham brisa toutes les idoles de son père, on l’emmena chez Nimrod qui lui demanda : « Tu es bien Avraham, fils de Téra’h ? » Il répondit par l’affirmative. L’autre poursuivit : « Ne sais-tu pas que je suis le maître de toutes les créations, du soleil, de la lune, des étoiles, des astres et des hommes ? Tous sortent en mon honneur. Pourquoi donc as-tu brisé mes idoles ? »
D.ieu introduisit dans l’esprit d’Avraham une réponse brillante : « Votre majesté le roi, permettez-moi de vous suggérer une idée pour prouver votre grandeur. » Il accepta. Avraham reprit : « Depuis sa création, le monde a l’habitude de fonctionner ainsi : le soleil se lève à l’Est et se couche à l’Ouest. Si vous voulez, demain, ordonnez-lui de se lever à l’Ouest et de se coucher à l’Est. Je témoignerai alors devant tous que vous êtes le maître suprême de toutes les créations. »
La discussion se poursuivit et, Avraham prenant le dessus, Nimrod ordonna qu’on s’empare de lui, qu’on le ligote et le jette dans une fournaise de feu. On le posa sur une pierre qu’on entoura de bois à ses quatre directions sur une longueur et une hauteur de cinq amot. On y alluma le feu. L’ange Gavriel se présenta aussitôt à l’Eternel, lui demandant la permission de descendre sauver le Tsadik. Mais Il répondit : « Je suis unique dans Mon monde, et lui est unique dans son monde ; il sied donc que Je le sauve. Quant à toi, tu auras le mérite de sauver trois de ses descendants : ‘Hanania, Michaël et Azaria. »
Le Midrach poursuit en racontant que Haran, le frère d’Avraham, assistait à la scène et était sceptique. Il se dit : « Si Avraham sort gagnant, je suis avec lui, et si c’est Nimrod, je suis de son côté. » Lorsque le patriarche sortit vivant de la fournaise, on demanda à Haran : « Pour qui es-tu ? » Il répondit : « Pour Avraham ! » Il fut alors lui aussi jeté à la fournaise. Cependant, avant même qu’il n’y soit entièrement pénétré, son corps fut brûlé et il mourut sur-le-champ. Nimrod le fit retirer et le jeta devant son père, comme le laisse entendre le verset : « Haran mourut du vivant de [lit. : devant] Téra’h son père. » (Béréchit 11, 28)
Comment expliquer qu’après avoir assisté à un miracle et constaté clairement la domination de l’Eternel sur le ciel et la terre, et donc le bien-fondé de la position d’Avraham, Nimrod ait jeté Haran dans la fournaise ?
Il semble que justement cette heure de vérité l’ait poussé à agir ainsi. Car, il reprocha alors à Haran d’avoir encore des doutes, alors qu’il avait grandi aux côtés d’Avraham et avait pu observer, depuis son enfance, la juste voie qu’il empruntait.
Ceci est comparable à un homme auquel on aurait dévoilé tous les numéros devant sortir gagnants au loto et auquel il ne resterait plus qu’à les écrire et déposer son bulletin. Mais, au lieu de s’empresser de le faire, notre homme néglige cette aubaine et perd le gros lot qu’il aurait pu gagner.
De même, Nimrod constata qu’en dépit de l’exemple d’Avraham qui s’éleva, lutta pour reconnaître l’Eternel et diffusa Son Nom dans le monde entier, Haran ne sut pas l’imiter et reconnaître cette vérité flagrante. Alors qu’il lui suffisait de suivre les sillons de son frère, il continua à avoir des doutes, ce pour quoi Nimrod le jeta dans la fournaise.
Quant à Nimrod, profondément touché par la foi dont Avraham fit preuve et par l’amour que D.ieu lui témoigna en retour en le sauvant du feu, il se rapprocha de Lui et se repentit. Impressionné par ce spectacle, il abandonna l’idolâtrie à laquelle il adhérait. La reconnaissance de l’Eternel lui apparut alors si évidente qu’il s’irrita contre ‘Haran et lui reprocha d’avoir encore des doutes à ce sujet, alors qu’il avait grandi aux côtés d’Avraham.
Cependant, Nimrod retourna ensuite en arrière. Tant qu’il côtoyait Avraham, il jouissait de sa bonne influence, tout comme le reste des êtres humains, et était fidèle à la voie divine. Mais, dès que D.ieu ordonna au patriarche de quitter sa ville natale, Nimrod reprit ses mauvaises habitudes. Car, à chaque fois qu’il était confronté à une épreuve, il n’avait plus où retirer les forces pour y résister, en l’absence de la figure exemplaire d’Avraham, et cédait donc à son mauvais penchant.
Dès lors, nous comprenons pourquoi le Saint béni soit-Il n’accorda pas à Haran le miracle de le sauver de la fournaise. En effet, l’accusation de Nimrod à son encontre était bien fondée. Face à l’exemple d’Avraham, il aurait dû reconnaître la vérité et en être fermement convaincu. Sa foi encore chancelante constitua donc un chef d’accusation à son encontre.
DE LA HAFTARA
Haftara de la semaine : « Pourquoi dis-tu, ô Yaakov (…) » (Yéchaya chap. 40 et 41)
Lien avec la paracha : dans la haftara, il est question de la guerre menée par Avraham contre les quatre rois, comme il est dit : « Qui l’a suscité de l’Orient, celui qui appelle le droit à suivre ses pas ? Qui lui livre les nations ? », sujet que l’on retrouve dans la paracha.
CHEMIRAT HALACHONE
Considérer autrui comme droit
Si on entend que quelqu’un a médit de nous, nous a causé du tort ou en a l’intention, il faut veiller à ne pas y croire, mais uniquement à l’en soupçonner afin de se préserver de tout préjudice. Car, il nous incombe de considérer tout homme comme droit, et donc de supposer qu’il ne nous a rien fait de mal ni n’a médit de nous.
Aussi, est-il interdit d’agir de quelle que façon que ce soit à son encontre ni de l’humilier à cause de ces rumeurs. La Torah nous interdit même de le porter en haine dans notre cœur.
PAROLES DE TSADIKIM
Le pouvoir de la prière
« Certes, Sarah, ton épouse, te donnera un fils. » (Béréchit 17, 19)
L’Admour de Mévakché Emouna chelita ne cesse de remercier le Créateur pour l’immense bonté qu’Il lui a accordée en lui donnant des enfants après trente-deux ans d’attente. Une fois après l’autre, il décrit à ses auditeurs le désespoir qui avait failli s’emparer de lui et ses nombreuses prières qui le sauvèrent. Dans une interview avec le journal Hamachbir (numéro de Yom Kippour 5778), il raconte :
« Trente-deux ans se sont écoulés depuis le jour de mon mariage, le dix Chvat 5739, jusqu’au jour où j’ai enfin pu serrer dans mes bras le fruit de mes entrailles, deux jumelles, le 12 Adar II 5771. Ces interminables années d’attente furent parsemées de prières et de supplications au Créateur du monde. Pendant ces trente-deux années et deux mois, nous n’avons pas baissé les bras, mais avons prié, attendu et espéré le salut.
« Il est impossible de décrire combien nous avions le cœur brisé et éprouvions de la peine. Notre chagrin avait l’ampleur d’un océan, tandis que le danger du désespoir nous guettait à tout instant. Il ne manquait pas de personnes qui tentèrent de nous y plonger, des médecins jusqu’aux plus grands kabbalistes. Cependant, nous continuâmes à prier, à espérer, à solliciter des bénédictions à des Tsadikim et à essayer toutes sortes de ségoulot. Je me souviens encore d’un célèbre kabbaliste auquel j’avais demandé une bénédiction, mais qui m’avait découragé en m’affirmant qu’il ne voyait aucune chance pour moi d’avoir des enfants. Il avait même ajouté : “Je te promets que tu n’auras jamais d’enfant !” Un autre kabbaliste célèbre m’avait dit, compatissant à ma tristesse : “Je ne vois pas que tu auras des enfants, mais les élèves que tu formeras t’assureront une postérité.”
« Ces paroles décourageantes, entendues après près de trois décennies d’espoir presqu’épuisé, faillirent me faire tomber dans le désespoir. En effet, de tels propos, prononcés suite à de si longues années où nous étions privés du moindre rayon de soleil, détenaient le potentiel de briser notre cœur et notre équilibre. Toutefois, il était clair, pour moi, que je ne permettrai à rien ni à personne au monde de me faire désespérer.
« Je renforçais de toutes mes forces ma foi en l’Eternel et gardais constamment à l’esprit la célèbre phrase de Rabbi Na’hman de Breslev – que son mérite nous protège – « Le désespoir n’existe pas dans ce monde ! » Je pris également sur moi un engagement dans le domaine de la prière : je me rendis tous les jours sur la tombe de Ra’hel Iménou et y récitai l’ensemble du livre des Téhilim. Elle aussi avait été stérile de nombreuses années, avant de donner naissance à Yossef et Binyamin.
« Durant une année entière, je me rendis tous les matins sur la tombe de “Mamé Ra’hel”, récitant les Psaumes et implorant à chaudes larmes le Créateur de me donner une descendance.
« A la fin de la deuxième année, le douze Adar II 5771, survint le miraculeux salut : l’Eternel nous donna des jumelles.
« J’en retirai une édifiante leçon de morale, que je souhaite partager avec quiconque attend encore le salut :
« Premièrement, il est interdit de tomber dans le désespoir. Quelle que soit l’épreuve traversée par l’homme, il ne doit pas baisser les bras, à D.ieu ne plaise, mais renforcer sa foi pure dans Celui qui, par Sa parole, créa le monde entier. Tout-Puissant, le Créateur est en mesure de modifier, à Son gré, les lois de la nature.
« Deuxièmement, nous pouvons en déduire l’immense pouvoir de la prière. Il nous incombe de prier sans cesse, encore et toujours. Si l’homme ne prie pas, il ne reçoit rien, tandis que s’il prie, il peut avoir droit à de véritables miracles. Le problème est que les gens ne sont pas suffisamment conscients du pouvoir de la prière. Ils ne se rendent pas compte qu’elle fait partie des choses les plus précieuses et la négligent. Si seulement l’homme réalisait sa force et sa valeur, il serait en mesure d’entraîner des saluts totalement miraculeux. »
GUIDÉS PAR LA ÉMOUNA
Puni par ses paroles
En 2008, la maison de mon saint ancêtre Rabbi ‘Haïm Pinto fut rénovée à fond, sous la responsabilité du Rav Avraham Knafo chelita, qui s’acquitta de cette tâche avec brio. Cependant, comme il le révéla par la suite, les travaux furent ponctués d’un incident non négligeable. En effet, il s’aperçut un beau matin qu’une grande partie des matériaux qui avaient été entreposés sur les lieux avaient disparu !
Sans coup férir, il s’adressa à l’entrepreneur qui supervisait les travaux pour lui demander des explications. Ce dernier prétendit n’être au courant de rien, niant avec véhémence toute implication dans le vol. Il alla jusqu’à affirmer candidement que, s’il en était le coupable, il en serait puni.
A la stupeur générale, on apprit le lendemain que cet escroc avait été assassiné la veille au soir, au cours d’une orgie à laquelle il avait pris part. Tous surent alors qu’il était responsable du vol et avait été puni comme il le méritait, conformément à ses propres paroles.
Les ouvriers de cet entrepreneur qui travaillaient sur le site et étaient au courant de ses machinations se mirent à craindre pour leurs propres vies. Ils élevèrent aussitôt de ferventes prières pour être eux-mêmes épargnés.
Cependant, l’un des ouvriers se mit soudain à tourner en dérision les réactions paniquées de ses collègues. « Vous avez peur du vent », leur dit-il, mais avant qu’il ait terminé de parler, sa bouche se déforma soudain en un rictus bizarre, qu’il garda jusqu’à ce qu’il se rendît en personne dans la demeure du Tsadik et le suppliât de lui pardonner son manque de respect et de le guérir.
Cela nous démontre la gravité de l’atteinte portée à un érudit. Un homme qui méprise l’honneur des Tsadikim et saints doit savoir qu’il sera amené à leur rendre raison avec la plus grande rigueur.
DANS LA SALLE DU TRÉSOR
Rabbi David Hanania Pinto
Agir à l’aune de la Torah
Après avoir reçu l’ordre divin de quitter son pays et sa ville natale pour se diriger vers un lieu inconnu, Avraham obtempère, emmenant avec lui sa femme et toutes ses possessions. Arrivé à destination, en terre d’Israël, ils sont accueillis par une famine. Homme de charité, le patriarche distribue tous ses biens pour calmer la faim des habitants et va jusqu’à s’endetter afin de les soutenir.
Puis, alors qu’il se dirige vers l’Egypte, les hommes de Paro capturent sa femme. Loin d’exprimer ses griefs contre l’Eternel, Avraham accepte cette nouvelle épreuve avec amour, animé d’une foi entière que c’est pour son bien. Et effectivement, il en fut ainsi. Avraham et Sarah quittèrent le palais de Paro avec une grande richesse, comme il est dit : « Or, Avram était puissamment riche en bétail, en argent et en or. » (Béréchit 13, 2)
L’ensemble de la conduite d’Avraham était empreint d’intégrité et d’une méticulosité dans l’observance des mitsvot, de la plus petite jusqu’à la plus grave. Il veillait à s’éloigner de tout soupçon de péché. C’est la raison pour laquelle il accepta de recevoir des biens de Paro, alors qu’il le refusa de la part du roi de Sédom, auquel il répondit : « Fût-ce un fil, fût-ce la courroie d’une sandale, je ne prendrai rien de ce qui est à toi. » Car la Torah atteste que les habitants de ce pays étaient « pervers et fauteurs devant l’Eternel » et la Guémara d’expliquer : pervers avec leur corps et fauteurs avec leur argent. Par conséquent, leurs biens étaient de provenance douteuse, souvent le fruit des transgressions du vol et de la violence. D’où la réticence d’Avraham à accepter des cadeaux du roi de Sédom. Par contre, les biens de Paro n’étaient pas ternis par cette tare, aussi les accepta-t-il.
Il en ressort que tous les actes du patriarche étaient soigneusement mesurés à l’aune de la Torah et des mitsvot, niveau qu’il eut le mérite d’atteindre grâce à sa reconnaissance claire du Saint béni soit-Il et de la foi pure qui l’animait. Convaincu que « tout ce que le Miséricordieux fait est pour le bien », il ne remettait jamais en cause les voies divines.
PERLES SUR LA PARACHA
Le raisonnement outré de Loth
« Il s’éleva des différends entre les pasteurs des troupeaux d’Avram et les pasteurs des troupeaux de Loth. » (Béréchit 13, 7)
Avraham, le premier à rapprocher les êtres humains de leur Créateur, suggéra à Loth de se séparer de lui, lorsqu’il constata qu’il permettait à ses bergers de faire paître son bétail dans des champs étrangers. Pourquoi ne tenta-t-il pas plutôt de lui faire emprunter, à lui aussi, la route du repentir ?
Dans son ouvrage Yé’hi Réouven, Rabbi Réouven Karlinstein zatsal explique que, quand le patriarche entendit que Loth se permettait une telle conduite, il lui en demanda l’explication. S’il lui avait répondu qu’il manquait de moyens, Avraham se serait contenté de lui tenir un discours moralisateur et serait resté en sa compagnie.
Cependant, Loth argua que l’Eternel ayant promis de donner en héritage la terre à Avraham alors qu’il n’avait pas d’enfant, il était son seul héritier potentiel et, subséquemment, tous les pâturages lui appartenaient. Face à ce raisonnement outré visant à légitimer l’interdit, il décida de prendre ses distances de son neveu. Car, prêt à rapprocher les non-juifs désirant réellement se convertir, il jugea inutile d’investir de tels efforts pour des individus feignant la piété.
La promesse, une partie de l’épreuve
« Avram partit comme le lui avait dit l’Eternel. » (Béréchit 12, 4)
Si l’Eternel formula à Avraham tant de promesses en lui ordonnant de quitter son pays natal, en quoi ceci constituait-il en une épreuve ?
En outre, pourquoi l’ordre divin est-il exprimé par le verbe vayomer, alors qu’au sujet de son exécution par le patriarche, figure le verbe diber ?
Le Or Ha’haïm explique que le Saint béni soit-Il promit de nombreux bienfaits à Avraham afin de tester les intentions qui l’animeraient quand il obtempérerait : quitterait-il sa patrie afin d’y avoir droit ou dans le seul but de se plier à Sa volonté ?
En d’autres termes, les promesses divines constituaient une partie intégrante de l’épreuve. Celle-ci était conséquente : il s’agissait de partir uniquement pour accomplir la volonté divine, en faisant totalement abstraction, dans son esprit, des promesses divines.
Dès lors, le glissement lexical s’éclaircit : le Créateur s’adressa au patriarche de manière douce (amira), en lui formulant de nombreuses promesses, alors que ce dernier exécuta Son ordre dans un esprit de rigueur (dibour), en omettant de considérer tous les avantages promis par le Créateur.
Par la pensée, la parole et l’acte
« Pour toi, sois fidèle à Mon alliance, toi et ta postérité après toi. » (Béréchit 17, 9)
Rabbi Chalom de Belz s’interroge sur la redondance du pronom « toi ».
Il explique que nous avons le devoir d’accomplir toute mitsva de manière parfaite, c’est-à-dire par la pensée, la parole et l’acte. Or, celle de la circoncision ne peut être accomplie simultanément à ces trois niveaux, puisque c’est le père qui la fait pratiquer sur le corps du nourrisson. Lorsque cet enfant grandira et circoncira, à son tour, son propre fils, il complètera l’aspect manquant de cette mitsva, celui de la pensée. Quant au nouveau-né, il devra lui aussi attendre l’âge adulte pour se rendre pleinement quitte de cette mitsva, à travers la circoncision de son fils, et ainsi de suite.
Tel est le sens implicite de notre verset « Pour toi (…) toi et ta postérité » : seulement lorsque l’homme circoncit son fils, il parvient à un accomplissement parfait de la mitsva de circoncision.
SOUVENIR DU JUSTE
Rabbi ‘Haïm Pinto "Hakatane" • 1855-1937
Cette semaine (Le 15 Hechvane - 16.11.2024), tombe la Hilloula d’un des géants de notre peuple, appartenant à la prestigieuse lignée de la famille Pinto, le Tsadik, célèbre pour ses miracles, Rabbi ‘Haïm Pinto Hakatan – que son mérite nous protège. Vivant au Maroc, il œuvra en faveur de la communauté tant sur le plan matériel que spirituel, tout en rapprochant le cœur de ses frères de leur Père céleste. Or, il poursuivit cette mission même après sa mort, conformément à l’enseignement de nos Sages selon lequel « les justes sont encore plus grands de manière posthume ». En effet, de nombreuses histoires nous parviennent, par le biais de notre Maître chelita, au sujet de Juifs ayant joui d’un salut miraculeux après avoir imploré l’Eternel en invoquant le mérite du Tsadik.
Rabbi ‘Haïm parvenait à ancrer la foi en D.ieu, si vitale, dans le cœur de tout homme, Juif comme non-juif. L’ouvrage « Des hommes de foi » rapporte (chap. 19) qu’une fois, Rabbi ‘Haïm fut atteint du typhus, maladie redoutable, et qu’il était sur le point de mourir. Les membres de la ‘hévra kadicha se rendirent à son chevet et commencèrent, comme c’est l’usage près du lit d’un mourant, à lire des chapitres des Téhilim.
Soudain, le Tsadik ouvrit les yeux et se leva de son lit. Il dit aux employés des pompes funèbres :
« Vous pouvez partir, je suis guéri. J’ai reçu du Ciel un sursis de vingt-six années. »
Quand les personnes qui entouraient son lit se remirent de leur surprise, le Tsadik se mit à leur raconter qu’au moment où il agonisait et où ils avaient commencé à réciter les Téhilim, son grand-père, Rabbi ‘Haïm Pinto Hagadol, avait bondi de sa place au jardin d’Eden et s’était présenté devant le Tribunal céleste en s’écriant :
« Vous devez lui ajouter des années de vie, car il n’a pas encore terminé son travail sur terre. Il doit vivre afin de pouvoir convaincre d’autre Juifs de croire en notre Créateur. »
Rabbi ‘Haïm Hagadol défendit ainsi la cause de son petit-fils pendant un long moment. Finalement, le Tribunal céleste accéda à sa demande et prolongea la vie de Rabbi ‘Haïm Hakatan de vingt-six années, durant lesquelles il s’efforça d’enseigner à de nombreux Juifs la foi en D.ieu.
Nombreux étaient les Juifs qui frappaient à la porte de Rabbi ‘Haïm pour qu’il prie en leur faveur et les bénisse. Ceux qui, par la suite, avaient été exaucés suite à ses bénédictions revenaient le voir afin de le remercier. Le Tsadik s’empressait alors de rectifier en leur disant avec simplicité : « C’est uniquement le Créateur qu’il faut remercier. »Rabbi Its’hak Abisror raconte que Rabbi ‘Haïm l’avait invité à plusieurs reprises à se joindre à lui lors de sa collecte de dons et leur distribution. Tout le monde n’avait pas ce mérite d’accompagner le Tsadik, et Rabbi Its’hak bénéficiait donc ainsi d’un immense privilège.
Chaque vendredi, Rabbi ‘Haïm partait ramasser de la nourriture. Ce jour-là, contrairement au reste de la semaine, il ne demandait pas d’argent, car il savait que les pauvres risquaient de ne pas avoir le temps d’acheter eux-mêmes le nécessaire pour Chabbat. C’est pourquoi, il ne ramassait que des denrées alimentaires qu’il leur redistribuait.
Quand il arrivait chez un donateur potentiel, il dévoilait, par prophétie, la quantité de nourriture cuisinée ce jour-là par la maîtresse de maison, celle dont elle avait besoin pour nourrir sa famille cette semaine, et en déduisait le surplus dont elle disposait pour donner à la tsédaka.
Rabbi Its’hak en était impressionné :
« Il est bouleversant de voir comment un homme, dont toutes les pensées sont tournées vers la Torah et les mitsvot, dans la sainteté et la pureté, abandonne tout et se dévoue pour les autres. Au lieu d’étudier, Rabbi ‘Haïm allait humblement, de maison en maison, collecter de la nourriture pour les pauvres. »
Un témoignage intéressant fut donné par Rabbi Yéchoua, le serviteur de Rabbi ‘Haïm Pinto, sur l’emploi du temps du Tsadik. Voici ses paroles :
« Tôt le matin, je me rendais chez lui et le trouvais déjà à l’étage supérieur de sa maison, dans la synagogue, en train de prier. Après la prière, il descendait voir son épouse et lui demandait ce qu’elle devait cuisiner ce jour-là. Après qu’elle lui eut répondu, il lui remettait l’argent nécessaire pour ses achats. Puis, il sortait et allait de maison en maison collecter des fonds pour les pauvres de la ville.
« Ses pieds le conduisaient vers les foyers où se trouvaient des malades ou des pauvres. Il faisait lui-même des achats et leur distribuait des denrées. Partout, on lui servait à manger, mais il goûtait juste un peu et me disait à chaque fois de manger.
« “Rabbi, lui demandais-je, combien puis-je manger ?” Il me répondait inlassablement : “Tu es encore jeune, tu peux manger. Et s’ils nous invitent à leur table, il est interdit de les mettre dans l’embarras en refusant.”
« Ainsi marchait-il pendant de nombreuses heures, d’un bout à l’autre de la ville, afin de pratiquer bonté et charité, avec ses propres forces et deniers. Il en était de la sorte du temps de sa jeunesse et il continua jusqu’à un âge avancé.
« La nuit, il lisait des tikounim et étudiait la Torah. “Qui s’élèvera sur la montagne de D.ieu ? Qui se tiendra dans Sa sainte résidence ? Celui dont les mains sont sans tache, le cœur pur.”
« Ses extraordinaires efforts envers les pauvres et les nécessiteux le rendirent populaire parmi ses frères Juifs, qui avaient le sentiment que toutes ses actions étaient accomplies pour la gloire de D.ieu. Celui qui cherchait le Tsadik savait qu’il pouvait le trouver parmi les pauvres. Il passait beaucoup de temps à parler avec eux et à les encourager afin qu’ils ne se démoralisent pas et continuent à servir D.ieu avec joie. »