L’importance de la tsedakah en Nissan

Le verset « Quand une femme devient féconde [de la racine « semer »] et met au monde un fils » (Lévitique 12, 2) contient en allusion un enseignement qui se rapporte au mois de Nissan [Note du rédacteur : Cet article a été écrit par l’auteur en 5752, année où le premier jour de Nissan tombait le Chabath Tazri’a, d’où le lien qu’il établit entre les deux] ; et je vais l’expliquer de mon mieux.

En Nissan, qui est le mois du renouvellement, les benei Israël doivent « semer » beaucoup sous forme de tsedakah, comme le dit le prophète : « Semez en tsedakah et vous moissonnerez selon la générosité » (Osée 10, 12). La Guemara signale également ce point (Baba Kama 17a), car il représente un renouvellement par rapport aux autres jours de l’année. Nous avons déjà souligné en plusieurs endroits que la sainteté du Chabath influe sur toute la semaine, et « en lui se bénissent les six jours » (Zohar II 63b). Or si la sainteté de Roch ‘Hodech vient s’y ajouter, cette influence sera encore plus considérable, car Roch ‘Hodech est un jour d’expiation pour toute notre descendance, ainsi qu’une source d’abondance pour le mois entier. Si nous ajoutons à tout cela la sainteté de Roch ‘Hodech Nissan, qui est le premier jour du premier mois de l’année (Exode 12, 2), on conçoit aisément l’ampleur de l’influence que va exercer ce jour sur l’année entière, et l’on perçoit déjà le souffle de la guéoulah. Ce n’est pas par hasard qu’en ce Chabath on ouvre trois rouleaux pour lire la Torah (un pour Chabath, un pour Roch ‘Hodech et un pour la parachat ha’hodech), c’est parce que « un triple lien ne se rompra pas facilement » (Ecclésiaste 4, 12). En effet, la sainteté de ce Chabath est considérable, et contient toutes les bénédictions qui amènent l’abondance de sainteté dans le cœur de tout juif.

Or on sait que l’univers et la Création n’existent que pour manifester la bonté de Dieu, ainsi qu’il est écrit : « c’est la bonté qui construira le monde » (Psaumes 89, 3). Dieu n’a nul besoin du monde, c’est le monde qui a besoin de Lui. Tout le but de la création est de dévoiler aux créatures l’ampleur de l’amour de Dieu, et de leur prodiguer Ses bontés. Par conséquent tout juif a le devoir de venir en aide à son prochain, tout particulièrement au moment de Nissan, avant Pessa’h, qui est la fête de la liberté. En effet, comment pourrait-on s’accouder dans un esprit de liberté alors que l’autre manque de tout, n’a ni de quoi manger ni de quoi se vêtir, et ne se trouve pas en situation d’affirmer que Dieu l’a fait sortir de l’esclavage vers la liberté ? Alors que si on le soutient pendant le mois de Nissan, qu’on sème beaucoup de tsedakah et qu’on distribue généreusement son argent, à l’image du verset « il donne libéralement aux pauvres, sa générosité ne se dément jamais » (Psaumes 112, 9), même si le bénéficiaire reste un pauvre que cette tsedakah n’a pas enrichi, il aura au moins le sentiment d’avoir pu sortir un petit peu de l’esclavage de la pauvreté pendant la fête. Les Sages nous ont d’ailleurs enjoint (Yérouchalmi Baba Batra 1, 4, Choul’han Aroukh Ora’h ‘Haïm 429 1) de donner la « farine de Pessa’h » pour les pauvres pendant Nissan.

Il faut donc profiter de la sainteté du Chabath qui tombe Roch ‘Hodech Nissan, que Dieu a donné aux benei Israël pour les sanctifier, et Le remercier de ce beau cadeau (Chabath 10a, Zohar III 122b) en aidant le prochain, afin que lui aussi sente l’approche de la guéoulah du mois de Nissan, le mois de la délivrance (voir Baba Batra 10a).

On peut en trouver une allusion dans le verset « Quand une femme devient féconde [« sème »] et met au monde un fils ». En « semant » de la tsedakah, on « met au monde un fils », car c’est comme si l’on avait sauvé une vie juive, ce qui équivaut à maintenir à l’existence tout un monde (Sanhédrin 37a, Tana Debei Eliahou Rabah 10). « La tsedakah protège de la mort » (Proverbes 10, 2), car elle ressemble vraiment à l’acte de sauver des vies. [On peut ajouter que ce Chabath-ci particulier, de l’année 5752, cet enseignement se trouve en allusion dans le mot ICHaH (« femme »), car la première lettre de ce mot, aleph, évoque le premier jour du mois (la valeur numérique de aleph est un), le chin est une allusion au Chabath, et le hé est la première lettre du mot Ha’hodech (« ce mois-ci »), les trois choses qui se trouvent cette année regroupées. C’est cela « Quand une femme (ICHaH) devient féconde ». De plus, l’année 5752 a exactement la même valeur numérique que l’expression ezrah bilevav chalem la-dal (« l’aide au pauvre de tout son cœur »).]

Sans compter que le mois de Nissan est celui de la guéoulah. La Guemara dit que les benei Israël ont été sauvés en Nissan et seront sauvés en Nissan (Roch Hachana 11a), or la rédemption s’opère au moyen de la tsedakah, ainsi qu’il est écrit : « Sion sera rachetée par la justice et ses prisonniers par la tsedakah » (Isaïe 1, 27). C’est pourquoi Nissan est particulièrement propice à un sentiment de renouvellement, car l’homme perçoit les approches de la délivrance qui sonnent dans ses oreilles et dans son âme. Il doit donc alors aider le prochain de façon à ce qu’il ressente lui aussi ces mêmes impressions, ce qui les amplifiera chez lui en retour, comme dans le verset : « chacun aide son prochain et encourage son frère » (Isaïe 41, 6). Ainsi les deux ensemble pourront éveiller la véritable guéoulah cachée dans le mois de Nissan, qui est le premier des mois.

De plus, c’est une mitsvah qui en entraîne une autre (« la récompense d’un mitsvah est une mitsvah » (Avoth 4, 2)), car elle va ouvrir le cœur de l’homme si bien qu’il donnera de la tsedakah tous les mois de l’année, et cette conduite lui conférera alors une ressemblance avec l’Eternel, comme l’ont dit les Sages : « Attache-toi à Ses qualités, de même qu’il est accessible à la pitié et miséricordieux, toi aussi sois accessible à la pitié et miséricordieux » (Chabath 133b, Péah 281, Tana Debei Eliahou Rabah 27). C’est pourquoi « à chaque génération, l’homme doit se considérer lui-même comme s’il était sorti d’Egypte » (Pessa’him 116b, Hagadah de Pessa’h). En donnant de la tsedakah de bonne grâce, il s’identifiera au pauvre et ressentira intérieurement ses épreuves. Il doit donner même si pendant toute l’année il vit comme un homme libre, afin que le prochain puisse également vivre cette liberté et éprouver sa propre sortie d’Egypte.

On peut trouver encore une autre allusion à cette idée dans le verset « Quand une femme devient féconde et met au monde un fils ». En effet, dans le nom de la femme (ICHaH) il manque la lettre yod, qui figure dans celui de l’homme (ICH). Ce verset peut donc désigner un homme qui est comparable à une femme, qui se souvient (ZaKHaR) du pauvre et qui « sème » en sa faveur beaucoup de tsedakah. Alors il s’élève, et c’est comme s’il renaissait en se transformant en mâle (ZaKHaR), à savoir en homme (ICH). Le mâle (ZaKHaR) est ici évoqué pour nous dire qu’on doit se souvenir (ZaKHaR) du pauvre en lui prodiguant tout ce qui nous a été si généreusement accordé par Dieu. En outre, on peut dire que le mot ICH (« homme ») a une valeur numérique supérieure de cinq à ICHaH (« femme ») : il s’agit des cinq doigts de la main, qui donnent la tsedakah.

On peut encore ajouter le conseil suivant : « Que doit faire l’homme pour avoir des fils mâles ? Qu’il donne généreusement aux pauvres » (Baba Batra 10b). C’est le sens du verset « Quand une femme devient féconde (« sème ») et met au monde un fils » : quand on « sème » la tsedakah et qu’on donne aux autres, on mérite d’enfanter un fils. Dieu aide l’homme qui se comporte ainsi, Dieu l’aide et lui donne Sa bénédiction (BeRaKHaH, « bénédiction », a la même valeur numérique que ZaKHaR, « mâle » (Nidah 31b)), ainsi qu’une véritable rédemption en Nissan, qui est le mois de la guéoulah, Amen, qu’il en soit ainsi.

 

Il nous instruit par les animaux de la terre et nous éclaire par les oiseaux du ciel
Table de matière
L’unité vient réparer les plaies et abolir les peines

 

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