La sainteté de Yossef protège Ya’akov et tous les Enfants d’Israël

« Tu agiras envers moi avec bonté et fidélité, tu ne m’enseveliras pas en Egypte » (Béréchith 47:29). Telle est la prière de Ya’akov à son fils Yossef.

1. Pourquoi est-ce à Yossef qu’il demande de ne pas l’enterrer en Egypte, plutôt qu’à un autre de ses enfants qui étaient tous aussi courageux et vertueux que Yossef (Chemoth Rabah 1:1)? Eux aussi auraient eu la possibilité de faire sortir son cercueil d’Egypte. Était-il interdit de sortir un mort d’Egypte pour l’enterrer ailleurs, pour qu’il faille demander pareille permission à Yossef, gouverneur du pays?

2. Il faut aussi comprendre pourquoi, avant de mourir, Yossef « adjura les Enfants d’Israël en disant: Le Seigneur vous visitera et alors, vous emporterez mes ossements d’ici » (Béréchith 50:25). Ce serment les empêchait de sortir d’Egypte s’ils n’emportaient pas avec eux le corps de Yossef. En fait, les Sages remarquent qu’ils prirent les ossements des autres chefs de tribus (Béréchith Rabah 100:12) qui, eux aussi en firent la demande. Pourquoi seule la demande de Yossef est-elle transcrite dans la Torah, et non la demande des autres frères?

Le Darkey Moussar rapporte la question du Rabbi de Rodzin concernant le verset (Béréchith 45:9): « Hâtez-vous, retournez chez mon père et dites-lui... D. m’a fait le maître de toute l’Egypte »: « Quel message y a-t-il dans l’annonce que Yossef est le maître de l’Egypte? Cet honneur apparent a-t-il une quelconque importance aux yeux de Ya’akov? ». Et il répond: « Son intention est de signifier: Je suis le maître divin en Egypte ». Autrement dit, Yossef fit savoir à son père qu’il avait imprégné l’Egypte de la crainte et de la connaissance de D. et proclamé la souveraineté de D. sur tout l’empire. Une telle nouvelle fut certainement réconfortante pour Ya’akov, heureux de savoir que les Egyptiens avaient, grâce à Yossef, connaissance de D.

La grandeur et la sainteté de Yossef proviennent de ce qu’il a réussi à influencer les Egyptiens au point d’être accepté par eux comme leur souverain de droit divin. Sa vertu était en opposition avec toutes les impuretés de la société égyptienne, qu’il chassait partout où il allait, au point que les Egyptiens finirent par adopter facilement la foi en D.

C’est ce que Yossef dit à son père: « D. m’a rendu maître de toute l’Egypte, viens auprès de moi, ne tarde pas! » C’est-à-dire: Tu ne dois pas craindre de descendre en Egypte, car j’ai déjà préparé le terrain pour les Enfants d’Israël, nous avons déjà bâti des Yéchivoth et les Enfants d’Israël pourront continuer ici à étudier. Yossef n’est pas allé lui-même en terre de Canaan chercher son père, car Ya’akov n’aurait pas permis à son fils de retourner en Egypte et « il aurait fallu l’enchaîner dans des fers pour le faire descendre en Egypte » (Chabath 89b; Béréchith Rabah 86:1). Mais au moins, Yossef console-t-il son père en lui disant avoir proclamé le Nom de D. dans toute l’Egypte, de sorte qu’il n’a rien à craindre des débauches et des impuretés du pays.

Bien que Ya’akov ait été convaincu par ce message, il envoya Yéhouda au devant pour lui préparer une maison d’étude (Béréchith Rabah 95:3; Tan’houma Vayigach 11). C’est étonnant! Yossef avait déjà institué des lieux d’étude puisque Menaché et Ephraïm ont étudié la Torah, et il faut se demander pourquoi Ya’akov voulait fonder un autre lieu de Torah et ne se contentait pas de ceux de Yossef.

Nous tirons de cela un principe fondamental. L’homme ne doit pas se contenter des forces qu’il possède mais aspirer à les augmenter et à améliorer son service de D. En ce qui concerne la Torah, il ne faut pas se satisfaire de ce que l’on a déjà acquis, il faut chercher à l’approfondir. C’est pourquoi, bien que Ya’akov ait connu l’existence des Yéchivoth de Yossef, il voulait s’assurer personnellement qu’il lui serait possible de s’occuper de Torah en Egypte. Yossef s’y trouvait déjà depuis de nombreuses années mais ses autres enfants n’y descendaient que maintenant munis de la Torah et de la crainte de D. acquises en Terre d’Israël. Il leur fallait un centre qui réponde à leurs besoins.

Nous sommes à présent en mesure de répondre à toutes les questions posées. Il est dit (Zohar II, 8b): « Lorsque les Enfants d’Israël descendirent en Egypte, l’exil avait déjà commencé et il n’y avait aucun moyen d’en sortir ». Ya’akov savait qu’ils ne pourraient pas sortir son corps d’Egypte et que seul Yossef, celui qui avait réussi à écraser l’impureté sous ses pieds et proclamé le Nom de D., aurait le pouvoir de faire sortir son corps afin que les Egyptiens ne puissent pas en tirer un profit quelconque. Les autres enfants n’avaient pas le pouvoir que Yossef avait acquis grâce à sa conduite vertueuse dans ce lieu impur. C’est pourquoi Ya’akov demande à Yossef de l’enterrer en terre de Canaan « afin que les Egyptiens ne fassent pas, après ma mort, une idole de mon corps (Béréchith Rabah 95:6), ce qui te ferait perdre le résultat des efforts que tu as investis pendant tant de temps ».

Il faut ajouter à cela que si Ya’akov avait été enterré en Egypte, la sortie des Enfants d’Israël en aurait été retardée car, après avoir fait du corps de Ya’akov une idole, les Egyptiens auraient aussi maltraité ses enfants et aggravé leur situation. Dans ce cas, ils n’auraient pas pu purifier les étincelles de sainteté (voir Or Ha’hayim, Béréchith 49:9). Il n’est pas nécessaire de développer ce sujet pour celui qui le comprend.

D. dit à Ya’akov (Béréchith 46:4): « Moi-même Je descendrai avec toi en Egypte, Moi-même aussi Je t’en ferai remonter et Yossef te fermera les yeux ».  D. promet à Ya’akov qu’il sera enterré en Israël (Yérouchalmi Sotah I:10; Kohéleth Rabah 7:2) et Ya’akov comprend que « seul Yossef te fermera les yeux » signifie « seul Yossef t’enterrera en Israël ».

Yossef lui aussi demande à ses frères de sortir son corps d’Egypte. Il est dit (‘Houlin 7b): « Les Justes sont plus grands après leur mort que de leur vivant ». De même que de son vivant, Yossef (et personne d’autre) avait eu le pouvoir de soumettre les forces du Mal, de même après sa mort, lorsque les Enfants d’Israël sortiront d’Egypte après avoir purifié les étincelles de sainteté, il aura une bonne influence sur eux. Lorsque les Enfants d’Israël étaient au bord de la Mer des Joncs, les anges accusateurs ont protesté: « Ceux-là (les Egyptiens) sont idolâtres, et ceux-là (les Juifs) sont idolâtres. Pourquoi seraient-ils jugés différemment? » (Cho’har Tov 15:5; Zohar II, 170b). A cause de l’argument de l’ange tutélaire des Egyptiens, l’attribut de Justice planait au-dessus de leur tête. Yossef savait, déjà de son vivant, que la mer ne s’ouvrirait pas devant les Enfants d’Israël et que lui seul pourrait faire taire cet accusateur et faire se fendre la mer, comme il est effectivement écrit (Téhilim 114:3): « La mer a vu et s’est enfuie ». « Qu’a-t-elle vu? Elle a vu le cercueil de Yossef, qui avait fui devant la femme de Poutiphar » (Cho’har Tov ad. loc.). Yossef demande donc à ses frères de le faire sortir d’Egypte afin que, grâce à son mérite, la mer puisse se fendre et que les Enfants d’Israël puissent recevoir la Torah et entrer en Terre d’Israël. Ce n’est pas sans raison que les Sages disent (Sotah 13 a/b): « Le corps de Yossef et le Tabernacle où sont enfermées les Tables de la Loi, allaient dans le désert côte à côte, parce que celui-ci avait pratiqué ce qui est écrit dans celui-là ». C’est-à-dire que Yossef, grâce à sa sainteté, avait le pouvoir de protéger les Enfants d’Israël et de veiller sur eux.

Seul Yossef avait le pouvoir de faire taire les accusateurs qui s’élèveraient à la Mer des Joncs, pour avoir abandonné son vêtement entre les mains de la femme de Poutiphar (Béréchith 39:12) bien que ce vêtement pût servir de preuve contre lui. Au bord de la Mer des Joncs, il devint évident que ses enfants étaient capables de la même sainteté que lui. L’accusation de l’ange tutélaire de l’Egypte, « eux aussi sont idolâtres », ne s’appliquait qu’à ceux qui furent amenés à pratiquer l’idolâtrie sous la contrainte (Chemoth Rabah 16:2).

Yossef n’avait commis aucune transgression et malgré tout il fut jeté en prison, ce qui représentait une grande souffrance. Sa conduite a pourtant donné aux Enfants d’Israël le mérite d’être témoins de grands miracles lors de la traversée de la Mer des Joncs, où « la moindre servante a vu ce que le prophète Yé’hezkiel ben Bouzi n’a pas vu » (Mekhilta ad. loc.). Là, ils parvinrent à une foi totale en D. et en Moché (ibid. 14:31), au point de recevoir la manne et la Torah, de conquérir la Terre d’Israël et de construire plus tard le Temple. Cela montre combien la pratique de chaque commandement est une arme puissante puisque l’accomplissement d’un commandement précis à un moment précis, protége l’homme et toute sa descendance, même quatre cents ans après. C’est que D. sait tout ce qui fut et tout ce qui sera, et chaque chose est prise en compte. Il connaît le résultat de chaque acte, bon ou mauvais.

Lorsque Moché demande à D. (Chemoth 5:22): « Pourquoi as-Tu rendu ce peuple misérable? », c’est-à-dire pourquoi doivent-ils tellement souffrir? D. lui répondit: « A présent, tu seras témoin de ce que Je vais faire à Pharaon », c’est-à-dire, justement à cause de ces souffrances, ils reviendront à Moi. Le mot ht[ à présent, est interprété comme exprimant le repentir (Béréchith Rabah 21:6; 38:14). Par leur repentir, Pharaon sera puni et l’ange tutélaire de l’Egypte ne pourra pas protester contre les plaies qui frappent les Egyptiens alors que les Enfants d’Israël, qui sont tombés dans les quarante-neuf degrés d’impureté (Zohar ‘Hadach, Yithro 39a), sont épargnés. Les souffrances quotidiennes des Juifs avaient pour but de leur permettre d’être sauvés. Justement à travers les souffrances, les Enfants d’Israël acquièrent la force de résister et ces souffrances les délivrent.  D., béni soit-Il, dirige les affaires du monde selon Sa volonté et pèse « ce que l’on perd à exécuter un commandement par rapport à ce que l’on y gagne, et ce que l’on gagne à commettre une transgression par rapport à ce que l’on perd » (Avoth 2:1). La sainteté de Yossef a effectivement protégé tous les Enfants d’Israël.

 

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