Les miracles de Dieu et la foi dans les Tsadikim dissipent tous les doutes

Commentant le verset: «Yithro... entendit ce que Dieu avait fait pour Moïse et pour Israël son peuple...» (Exode 18:1), le Talmud (Zéva’him 116a; Mekhilta id.) explique que ce qu’il entendit, c’était le récit du passage de la mer Rouge et la bataille d’Amalek.

On peut se poser de nombreuses questions sur ce Midrach.

1) Pourquoi sont-ce précisément ces miracles qui ont convaincu Yithro de venir partager son sort avec Israël. De nombreux autres miracles, sans lesquels ils n’auraient pu accéder au passage de la Mer Rouge, et la bataille d’Amalek, s’étaient déjà accomplis en leur faveur en Egypte.

2) Cette parachah, unique en son genre, qui parle de la réception de la Torah, aurait normalement dû être la première de toute la Torah. Les commentateurs enseignent à cet effet que tout ce qui a été écrit depuis Béréchith, ne sert que d’introduction et de préparatifs à cette section biblique, qui constitue le but même de la Création. Car, enseigne le Talmud (Pessa’him 68b; Nédarim 32a), le monde n’a été créé que pour la Torah: le Saint, béni soit-Il, a regardé la Torah avant de créer le monde (Zohar, Téroumah 161b). La création du monde et celle de l’homme, la génération du Déluge et celle de la Tour de Babel, nos Patriarches, Joseph et ses frères, l’exil et la Rédemption d’Egypte, et tous les miracles, n’ont existé que pour la réception de la Torah... Cette section biblique aurait dû par conséquent porter le titre de «réception de la Torah» au lieu de «Yithro»!

3) Il est écrit plus bas: «Et le peuple, à cette vue, trembla et se tint à distance» (id. 20:15). Pourquoi le verset a-t-il besoin de mentionner cette crainte! Ne suffisait-il pas de dire seulement: «il se tint à distance»? Le peuple s’étant éloigné, pourquoi l’Eternel demande-t-Il à Moïse de l’avertir de ne pas s’approcher de la montagne (id. 19:21). D’eux-mêmes ils se sont éloignés par peur. Comment pouvaient-ils s’approcher une nouvelle fois?

4) Pourquoi est-il écrit que «Moïse fit sortir le peuple du camp au devant de la Divinité»? (id. 19:17). Ce sont ces moments solennels que les enfants d’Israël attendaient depuis si longtemps! Moïse n’avait certainement pas à les faire sortir du camp pour recevoir la Torah!

Avant de répondre à ces questions, considérons le verset: «Moïse étendit sa main sur la mer, et l’Eternel fit reculer la mer toute la nuit, par un vent d’est impétueux, et Il mit la mer à sec, et les eaux furent divisées» (id. 14:25). Ce vent impétueux était-il vraiment nécessaire pour mettre la mer à sec? Ne suffisait-il pas que Moïse étendît la main pour la mettre à sec? On peut répondre que ce miracle de la Mer Rouge ne constitue pas une nouvelle création ex-nihilo. Nos Sages enseignent à cet effet qu’avant de créer le monde, l’Eternel exigea comme condition (tenaï), qu’au moment où les enfants d’Israël devaient la traverser, la mer devait revenir à sa condition première (Béréchith Rabah 5:4; Chémoth Rabah 21:6). Le Talmud se base sur le verset: «... aux approches du matin la mer reprit son niveau (chav léétano)» relevant la similitude des termes: chav léétano et chav léténao (retourna à sa condition première). Le Créateur de l’Univers donna par conséquent à la nature (téva’) un certain rôle à jouer, mais ce rôle dut être diminué et le vent impétueux était donc nécessaire. De toute manière, téva’ et Elokim ont la même valeur numérique (81)...

Il n’en demeure pas moins que c’était là aussi un grand miracle, le vent impétueux devait souffler exactement au moment où les enfants d’Israël devaient traverser la Mer Rouge. En outre, comme l’enseignent nos Sages (Chémoth Rabah 21:6): toutes les eaux du monde furent divisées, et pas seulement celles de la Mer Rouge... On pouvait néanmoins prétendre que c’était le vent impétueux qui divisa la mer.

«Yithro entendit» donc et comprit que le passage de la Mer Rouge aussi bien que le vent impétueux constituent un miracle, et qu’il n’est ici en aucun cas question de coïncidence, de hasard.

Ce qui constitue donc le caractère unique du miracle de la Mer Rouge, (par rapport aux autres miracles d’Egypte où tout le monde était d’accord pour reconnaître que c’étaient de vrais miracles) c’est la controverse qu’il soulève: miracle ou hasard? Amalek ne fit malheureusement qu’accroître ces doutes au sein des enfants d’Israël. Il salit le Nom de Dieu en diminuant la confiance des nations en l’Eternel.

Yithro qui, comme on l’a vu, n’a négligé aucune idole au monde (Tan’houma, Yithro 6), comprit néanmoins que tout provient exclusivement de Dieu, que le hasard n’existe pas, que la magie des Egyptiens ne faisait que les éloigner de la réalité et de la vérité. Il reconnut que l’Eternel est plus grand que tous les dieux...

La question qui se pose est alors: Comment Amalek osa-t-il dénier la vérité et livrer combat à Israël, qui commença à effrayer toutes les nations? (cf. Yalkout Chimoni 250).

Parce que, nous l’avons vu à plusieurs reprises, les enfants d’Israël négligeaient l’étude de la Torah (Békhoroth 5b). Commentant le verset «La voix, c’est la voix de Jacob, et les mains, sont les mains d’Esaü» (Genèse 27:21), nos Sages expliquent que lorsque Jacob baisse la voix, ce sont les mains d’Esaü qui triomphent, comme il est écrit: «Toute la communauté des enfants d’Israël murmura contre Moïse» (Exode 16:2), suivi de: «Amalek vint.» C’est pourquoi le verset (id. 17:11) stipule aussi : «Or tant que Moïse tenait son bras levé, Israël avait le dessus.» Lorsque les enfants d’Israël s’élèvent et s’attachent à leur Créateur, Amalek ne peut rien contre eux (cf. Roch Hachanah 29a).

Quel (MaH) message parvint à Yithro? Que tout vient de Hachem, qui a la même valeur numérique que MaH (45) [avec milouï alfine: Youd (youd, vav, daleth), Hé (hé, alef), Vav (vav, alef, vav) et Hé (hé, alef)]. C’est pourquoi il rejeta toutes ses idoles et fuit tous ses honneurs pour entendre les paroles de Torah dans le désert. Ce qui constituait un doute pour les autres était une certitude pour lui. On peut dire que sa foi en Dieu dépassait celle des enfants d’Israël. Car, en dépit du fait qu’ils avaient assisté au miracle de la Mer Rouge et accédé à des niveaux supérieurs à ceux des prophètes, ils négligèrent quelque peu l’étude de la Torah, et se demandèrent si c’était vraiment un miracle ou si c’était un simple hasard. C’est ce doute extrêmement subtil, dont ils n’étaient même pas conscients, qui engendra la venue d’Amalek.

Yithro, quant à lui, n’avait pas personnellement assisté à ce miracle. Il n’avait pas crié à l’Eternel de le sauver des mains des Egyptiens. Il avait simplement entendu ce que l’Eternel avait fait pour Moïse et Son peuple. Cela lui suffit pour avoir une foi totale en Dieu et venir partager son sort avec eux.

Il méritait donc bien de donner son nom à une section biblique, celle de la réception de la Torah. Il nous montre qu’avant de s’engager dans l’étude de la Torah, on doit avoir une foi complète en Dieu, qui veille, sur chacune de Ses créatures, individuellement.

Il nous montre aussi qu’aussitôt qu’on se remet sur le droit chemin, on doit se mettre à étudier la Torah, car la Torah et la téchouvah se complètent et sont indispensables l’une à l’autre. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’après l’épisode de Yithro, vient la section traitant de la réception de la Torah.

On peut dire aussi que les enfants d’Israël, qui avaient veillé à se purifier des quarante-neuf degrés d’impureté et de la souillure du serpent (Zohar ‘Hadach II, 94a) consommèrent la manne qui a contribué à purifier leur corps, et firent téchouvah avant de recevoir la Torah. Cette nourriture céleste leur indiquait leur niveau spirituel, et ils étaient seuls à interpréter parfaitement la Torah (Mékhilta, Béchala’h 17; Tan’houma, id. 2). Nos sages enseignent enfin que la manne les lavait de leurs péchés (Yoma 75a).

Comme nous l’avons vu, les enfants d’Israël portaient également à l’époque le titre de «génération de la connaissance», ou DoR Dé’aH, dont les premières lettres (deux fois daleth) équivalent à huit, chiffre qui est au-dessus des sept jours de la semaine, chiffre qui dépasse la nature, et les dernières lettres har (montagne), qui incarne le mauvais penchant. Ils avaient alors bien besoin de l’assistance divine parce que le yetser hara’ visait à souiller leur connaissance... La manne, qui marquait leur état spirituel, leur fit en fin de compte acquérir les quarante-huit attributs qui font accéder à la Torah.

Car «qui peut s’élever sur la montagne du Seigneur?» (Psaumes 24:3). Il n’est pas du tout facile de vaincre le mauvais penchant (la montagne) sans l’aide de Dieu; «Qui se tiendra dans sa sainte résidence?» (id.), Qui peut accéder à la révélation du Sinaï sans consommer la manne?

«Le peuple à cette vue trembla et se tint à distance.» Ils ne savaient que faire: aller de l’avant ou reculer? Car d’un côté, les enfants d’Israël avaient accédé à des niveaux spirituels sublimes, de l’autre le son du chofar, le tonnerre, et tout le spectacle grandiose auquel ils assistaient, leur fit ressentir leur éloignement de l’Eternel. C’est pourquoi ils se tinrent à distance.

Dieu les avertit donc de ne pas s’approcher de la montagne: s’ils entendaient la voix de Dieu, après les doutes qu’ils avaient éprouvés, ils pouvaient accéder à la vérité. Or, ils ne devaient pas se précipiter vers le Seigneur pour comprendre Son essence.

Nous pouvons à ce stade comprendre la portée de la question posée par mon très vénéré maître, Rabbi Guerchon Libmann, dans son livre Déguel Moussar sur le verset : «Tu parleras ainsi à la maison de Jacob... Vous avez vu ce que j’ai fait à l’Egypte...» (Exode 19:3-4). Pourquoi l’Eternel utilise-t-Il cette expression?

Parce que l’homme peut voir de ses propres yeux les miracles de Dieu, mais le mauvais penchant s’efforce de les lui faire oublier et de le séduire par les futilités de ce monde. Il convient par conséquent de réaliser tous les jours concrètement les miracles que l’Eternel a accomplis en Egypte. Le prophète (Michée 7:15) s’est d’ailleurs ainsi exprimé à cet effet: «Comme au jour où tu sortis d’Egypte, Je te ferai voir des prodiges.» Car si l’Eternel ne nous avait pas montré ces miracles, nous serions encore esclaves en Egypte (Zéva’him 116b; Hagadah de Pessa’h) et aurions oublié jusqu’à Son existence.

Dieu dut donc avertir les enfants d’Israël précisément avant de leur donner la Torah, parce qu’ils avaient déjà accédé à de très hauts niveaux spirituels, et leur mauvais penchant était donc très fort... et vu leur élévation, le moindre doute pouvait se révéler fatal. Mais après avoir renforcé leur foi par les miracles qu’Il accomplit en leur faveur, Il leur dit: «Je suis l’Eternel ton Dieu, qui t’ai fait sortir d’Egypte» (Exode 20:2).

Moïse fit donc «sortir le peuple du camp, à la rencontre de Dieu» (id. 19:17). Nous voyons là le pouvoir du Tsadik dont les paroles enflammées influencent immédiatement ceux qui les entendent. Il n’a pas laissé le mauvais penchant agir sur les enfants d’Israël qui étaient hésitants, comme nous l’avons vu plus haut. Rapportons à cet effet les propos de l’auteur de Beth Israël (Yithro, 720) sur le verset: «Vous avez vu ce que J’ai fait...» Rachi explique qu’il y a une différence entre ce que l’homme voit et ce que les autres lui rapportent... Son cœur a parfois tendance à ne pas croire... Cependant la vue de miracles semble convaincre toutes les générations à venir, à croire... C’est pourquoi le verset (Exode 20:15) stipule: «Tout le peuple voit les voix...» car le peuple voit et voit encore maintenant; «il peut voir ce qu’il entend» (Mékhilta de Rabbi Chimon bar Yo’haï). Les paroles alors entendues sont des paroles de vie, des paroles stables, sincères et agréables à jamais.

Grâce à son immense pouvoir, le Tsadik vise à faire sanctifier le Nom de l’Eternel: Moïse a œuvré à élever spirituellement les enfants d’Israël, et sa voix se faisait entendre d’une extrémité du camp à l’autre: on peut dire qu’il n’a vécu que pour eux...

Pourquoi alors l’Eternel n’a-t-Il pas entendu sa prière de «voir mon pays de l’autre côté du Jourdain»? N’a-t-on pas vu que Dieu se délecte des prières des Tsadikim (Yébamoth 64a)? Pourquoi les portes du ciel lui ont-elles été fermées?

C’est qu’il ne pensait jamais à lui. En bon pasteur fidèle, il ne veillait exclusivement qu’à l’Assemblée d’Israël, qu’il s’efforçait d’épargner du moindre mal. Avait-il hésité à demander à Dieu de l’effacer de Son livre? Si les enfants d’Israël étaient en Terre Sainte, c’est comme s’il y montait lui-même, et s’il priait pour lui-même (ce qu’il n’a jamais fait), cela montrerait qu’il ne cherchait que son intérêt... L’Eternel n’a donc pas exaucé sa prière en dépit du fait qu’Il le considérait comme «le plus fidèle de toute Ma maison» (Nombres 12:7); qu’Il «parlait avec lui face à face» (Exode 33:11); et qu’«Il n’y a point en Israël de prophète semblable à lui» (Deutéronome 34:10).

Cette leçon nous montre combien l’homme  même le Tsadik le plus intègre  doit prendre soin de ne jamais trébucher, et combien d’efforts il faut déployer pour livrer combat au mauvais penchant... Celui qui a toujours sous les yeux les miracles de Dieu, et a foi dans ses Tsadikim, se débarrassera de tous ses doutes, et s’attachera à jamais à l’Eternel.

Que Dieu nous aide à nous débarrasser de tous nos doutes, et nous fasse assister aux miracles, comme Il en a accomplis en Egypte aux yeux de l’Assemblée d’Israël. Que toutes les impuretés de la terre disparaissent, et que toutes les idoles soient anéanties. Puissions-nous de nouveau entendre la voix de Dieu proclamer: «Je suis l’Eternel ton Dieu» et assister à la venue de notre Rédempteur intègre, au plus vite, de nos jours! Amen!

 

 

L’union engendre l’étude de la Torah
TABLE DE MATIERE
Les soixante-dix facettes de la Torah

 

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